Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.214/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1C_214/2008/col

Arrêt du 26 novembre 2008
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Eusebio.
Greffier: M. Rittener.

Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Jacques Borowsky, avocat,

contre

Service des automobiles et de la navigation du canton de Genève, route de
Veyrier 86, 1227 Carouge.

Objet
retrait du permis de conduire,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 1er
avril 2008.

Faits:

A.
Le 4 mars 2007 à 4h30, A.________ a été interpellé par la police alors qu'il se
trouvait sur sa moto à la hauteur de la place du Traînant, à Genève. Selon le
rapport établi à cette occasion, l'intéressé circulait au guidon de sa moto sur
le quai Gustave-Ador en direction du quai de Cologny. Il était en état
d'ébriété et n'était pas titulaire du permis de conduire pour motocycles, son
permis d'élève conducteur pour cette catégorie de véhicule étant échu depuis le
12 septembre 2006. Entendu le jour même par la police, A.________ a déclaré
qu'il n'était pas surpris que le contrôle de son haleine par éthylomètre se
soit révélé positif, qu'il avait bu dans la soirée deux verres de rosé et un
whisky coca avant de prendre sa moto et de circuler jusqu'à la place de
Traînant, dans le but de "montrer le bord du lac à un ami". L'alcoolémie
mesurée sur la base d'une prise de sang s'élevait à 1,15 ?, plus ou moins 0,06
?. Entre 1993 et 2006, A.________ a fait l'objet de trois retraits de permis
pour conduite en état d'ébriété. L'alcoolémie relevée lors de ces infractions
s'élevait à 1,34 ? en 1993, 1,37 ? en 2002 et 1,52 ? en 2006.

B.
Invité à se déterminer par le Service des automobiles et de la navigation du
canton de Genève (ci-après: le SAN), l'intéressé a expliqué qu'il s'était
effectivement rendu au bord du lac avec un ami dans la nuit du 4 mars 2007,
qu'il y avait retrouvé sa moto - qu'il avait prêtée quelques jours auparavant à
un autre ami - et qu'il avait décidé de la déplacer vers un parking distant de
quelques mètres. Il contestait avoir circulé au guidon de cette moto et avoir
eu l'intention de le faire. Il n'avait pas enclenché le moteur, ne s'était pas
engagé sur la voie de circulation et voulait seulement pousser sa moto jusqu'au
parking. Par décision du 29 mai 2007, le SAN a retiré le permis d'A.________ à
titre préventif pour une durée indéterminée. Rappelant les antécédents de
l'intéressé, cette autorité a considéré que l'examen de son dossier suscitait
des doutes quant à son aptitude à la conduite et elle a ordonné une expertise
auprès de l'Institut universitaire de médecine légale afin d'élucider cette
question.

C.
A.________ a contesté cette décision devant le Tribunal administratif du canton
de Genève. Il ne discutait pas le taux d'alcoolémie constaté le 4 mars 2007,
mais il contestait avoir circulé au guidon de sa moto. Il a repris les
explications qu'il avait données au SAN et a déposé à l'appui de celles-ci des
attestations écrites de l'ami qui l'accompagnait le soir en question et de
l'ami à qui il avait prêté sa moto quelques jours auparavant. Le Tribunal
administratif a rejeté ce recours par arrêt du 1er avril 2008, considérant que
les dénégations de l'intéressé quant au fait qu'il circulait au guidon de sa
moto lors de son interpellation par la police devaient être écartées.

D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande
au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il se plaint d'arbitraire dans
l'établissement des faits et l'appréciation des preuves (art. 9 Cst. et 97 LTF)
ainsi que d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.). Le
SAN n'a pas présenté d'observations. Le Tribunal administratif se réfère à
l'arrêt attaqué. L'Office fédéral des routes en fait de même et conclut au
rejet du recours. Ces déterminations ont été communiquées à A.________.

Considérant en droit:

1.
La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss LTF, est
en principe ouverte contre les décisions prises en dernière instance cantonale
au sujet de mesures administratives de retrait du permis de conduire. Le
recourant est particulièrement atteint par la décision attaquée ? qui confirme
le retrait préventif de son permis de conduire pour une durée indéterminée ? et
il a un intérêt digne de protection à son annulation; il a donc la qualité pour
recourir au sens de l'art. 89 al. 1 let. a et b LTF. Pour le surplus, interjeté
en temps utile et dans les formes requises contre une décision finale prise en
dernière instance cantonale non susceptible de recours devant le Tribunal
administratif fédéral, le recours satisfait aux exigences des art. 42, 86 al. 1
let. d, 90 et 100 al. 1 LTF, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière.

2.
Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le
recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2
Cst.), au motif que le Tribunal administratif n'aurait pas pris en
considération les moyens de preuve qu'il avait présentés. L'arrêt attaqué ne
serait fondé que sur le rapport de police et ne tiendrait pas compte des
témoignages écrits des amis du recourant. Ce moyen tombe à faux, dès lors que
le Tribunal administratif a expressément fondé son raisonnement non seulement
sur le rapport de police, mais également sur les déclarations écrites de l'ami
présent le soir des événements et celles que le recourant a lui-même données
lors de son audition par la police. Pour le surplus, le recourant n'explique
pas en quoi d'autres moyens de preuve valablement présentés auraient été
ignorés, mais il se borne à déplorer que sa thèse n'ait pas été suivie. Ce
grief doit donc être rejeté.

3.
Le recourant reproche au Tribunal administratif d'avoir fait preuve
d'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves.

3.1 Les constatations de faits importants pour le jugement de la cause ne
peuvent être critiquées que si elles ont été faites en violation du droit au
sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF),
c'est-à-dire arbitraire (cf. Message concernant la révision totale de
l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4135), ce que
le recourant doit démontrer par une argumentation répondant aux exigences de
l'art. 42 al. 2 LTF, respectivement de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 133 II 249
consid. 1.4.3 p. 254 s.). L'existence de faits constatés de manière inexacte ou
en violation du droit doit en outre être susceptible d'avoir une influence
déterminante sur l'issue de la procédure (art. 97 al. 1 in fine LTF). Selon la
jurisprudence, l'appréciation des preuves ou l'établissement des faits sont
arbitraires (art. 9 Cst.; pour une définition de l'arbitraire cf. ATF 133 I 149
consid. 3.1 p. 153) lorsque l'autorité n'a manifestement pas compris le sens et
la portée d'un moyen de preuve, si elle ne prend pas en compte, sans raison
sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision ou lorsqu'elle
tire des constatations insoutenables des éléments recueillis (ATF 129 I 8
consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41).

3.2 En l'espèce, le recourant soutient que le Tribunal administratif aurait dû
douter des constatations de la police selon lesquelles il roulait au guidon de
sa moto. Il allègue que les phares de sa moto étaient éteints au moment où il a
été interpellé, alors qu'ils "s'enclenchent automatiquement lorsque le moteur
est en marche", mais il ne l'établit aucunement. Si l'on peut concevoir que les
phares ne peuvent pas être allumés lorsque le moteur est éteint, il n'est pas
démontré que l'inverse soit vrai. De plus, même s'il était avéré que les phares
s'allument automatiquement au démarrage de la moto en question, il n'est pas
pour autant exclu qu'ils puissent être ensuite éteints volontairement ou même
qu'ils aient été défectueux. Quoi qu'il en soit, il n'est même pas démontré que
les phares étaient effectivement éteints, le recourant se limitant à expliquer
que les policiers n'ont pas contesté cette allégation. On ne voit cependant pas
pour quelles raisons ils auraient dû le faire, l'agent entendu devant le
Tribunal administratif n'ayant au demeurant pas été clairement interpellé sur
ce point.
Pour le surplus, contrairement à ce qu'affirme le recourant, le Tribunal
administratif ne s'est pas fondé uniquement sur le rapport de police pour
retenir que l'intéressé circulait bien au guidon de sa moto. En effet, il a
également pris en considération le témoignage écrit de l'ami du recourant, qui
expose qu'ils avaient tous deux mis un casque et qu'ils étaient montés sur la
moto. Comme le retient à juste titre l'arrêt attaqué, cet élément corrobore la
version du rapport de police. De plus, l'explication de l'ami en question selon
laquelle ils avaient mis un casque et étaient montés sur la moto "pour rire"
n'apparaît guère convaincante. Enfin, le Tribunal administratif s'est également
fondé sur l'audition du recourant par la police le 4 mars 2007, au cours de
laquelle l'intéressé n'avait pas contesté avoir conduit sa moto; il avait au
contraire expressément déclaré qu'il avait pris sa moto et circulé jusqu'à la
place du Traînant. Ces déclarations ressortent du procès-verbal de cette
audition, sur lequel l'intéressé a apposé sa signature. Dans ces conditions, la
nouvelle version du recourant n'est pas de nature à remettre en doute le
rapport de police, ce d'autant moins que l'intéressé n'apporte aucune preuve
convaincante pour corroborer son récit. Par conséquent, les faits n'ont en tout
cas pas été constatés de manière arbitraire au sens de la jurisprudence
susmentionnée.

4.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, doit
supporter les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Service des automobiles et de
la navigation et au Tribunal administratif du canton de Genève ainsi qu'à
l'Office fédéral des routes, Division circulation routière.

Lausanne, le 26 novembre 2008
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Rittener