Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.188/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1C_188/2008/col

Arrêt du 10 juillet 2008
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Aemisegger, Juge présidant, Fonjallaz et Eusebio.
Greffier: M. Rittener.

Parties
A.________,
recourante, représentée par Me Mauro Poggia, avocat,

contre

Caisse cantonale de chômage, rue Caroline 9, 1014 Lausanne,
Etat de Vaud, Service juridique et législatif,
place du Château 1, 1014 Lausanne.

Objet
licenciement,

recours contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton
de Vaud du 14 novembre 2007.

Faits:

A.
A.________ a été employée de l'Etat de Vaud à partir du 1er juin 1999, au
service d'oto-rhino-laryngologie du Centre hospitalier universitaire vaudois
(CHUV). Selon son premier cahier des charges, signé le 1er février 2000, elle
occupait le poste de "secrétaire de desk de policlinique", activité consistant
à gérer les dossiers et les rendez-vous. Ce cahier des charges a été modifié
les 3 octobre et 19 décembre 2002. Depuis le 23 juin 2003, son emploi a été
régi par un contrat de durée indéterminée selon lequel elle exerçait la
fonction d'employée d'administration à 100%, pour un revenu annuel de 70'728
francs.
Le 20 décembre 2004, à la suite d'un rapport interne établi le 29 novembre 2004
par B.________, supérieur hiérarchique direct de A.________, le directeur des
ressources humaines a ouvert contre elle une procédure d'avertissement pour
manque évident de rendement dans le travail, pour une qualité de service ne
correspondant pas aux attentes et pour des erreurs trop nombreuses. Le 8 mars
2005, l'Etat de Vaud lui a adressé un "ultime avertissement", la menaçant d'une
résiliation de son contrat, le cas échéant avec effet immédiat. A.________ a
contesté cet avertissement devant le Tribunal de prud'hommes de
l'administration cantonale. Par jugement du 22 décembre 2005 - dont les
considérants ont été notifiés le 9 novembre 2006 - ce tribunal a partiellement
admis l'action et a modifié l'avertissement en ce sens que la menace de renvoi
avec effet immédiat a été supprimée. Il a considéré que l'insubordination dont
avait fait preuve l'intéressée justifiait un avertissement, mais que plusieurs
griefs formulés à son encontre n'avaient pas été établis ou relevaient
d'erreurs courantes qui ne constituaient pas des indices de faute
professionnelle caractérisée ou récurrente.

B.
Alors que la procédure susmentionnée était en cours, un autre contentieux est
survenu au sujet d'un nouveau cahier des charges que A.________ refusait de
signer. Par courrier du 29 août 2005, ses supérieurs hiérarchiques l'ont
informée du fait que ce cahier des charges entrerait en vigueur le 1er
septembre 2005, l'invitant à adresser rapidement d'éventuelles remarques à son
supérieur direct, faute de quoi ce document serait validé. Ils l'avisaient
également du fait qu'une violation du cahier des charges pourrait entraîner des
sanctions administratives. Par courrier du 16 septembre 2005, le directeur des
ressources humaines a reproché à l'intéressée d'avoir, le 9 septembre 2005,
"refusé, sans justification valable, de préparer les documents pour
l'endoscopie" alors que son nouveau cahier des charges prévoyait cette tâche.
Il lui a rappelé qu'elle était sous le coup d'un avertissement et l'a menacée
de licenciement, le cas échéant avec effet immédiat, si un tel fait devait se
reproduire. Le 28 septembre 2005, l'avocate de A.________ répondait que
l'avertissement faisait l'objet d'une procédure judiciaire et qu'elle
reprendrait la discussion relative au cahier des charges "une fois en
possession de tous les documents déterminants".
Le 5 octobre 2005, A.________ a refusé une seconde fois de préparer des
dossiers d'endoscopie. Par lettre du 6 octobre 2005, l'Etat de Vaud a résilié
le contrat de travail avec effet immédiat. Il invoquait les avertissements du 8
mars et du 16 septembre 2005 et relevait que le 30 septembre 2005 l'intéressée
avait confirmé, en présence de ses supérieurs, qu'elle refuserait de préparer
des dossiers d'endoscopie, ce qu'elle a effectivement fait le 5 octobre 2005.
Ce refus inadmissible d'exécuter son travail justifiait une résiliation du
contrat de travail avec effet immédiat pour justes motifs, conformément aux
art. 59 al. 3 let. a et 61 de la loi sur le personnel de l'Etat de Vaud (LPers/
VD; RS/VD 172.31).

C.
Le 11 novembre 2005, A.________ a contesté cette décision devant le Tribunal de
prud'hommes de l'administration cantonale. Dans son jugement du 19 décembre
2006, cette autorité a constaté que le nouveau cahier des charges n'était pas
inéquitable ni chicanier et que l'employée avait contrevenu aux art. 50 al. 1
et 2 LPers/VD et 124 du règlement d'application de cette loi (RLPers/VD; RS/VD
172.31.1) en refusant d'exécuter le travail qui pouvait raisonnablement être
exigé d'elle. Le tribunal a toutefois considéré que les justes motifs de renvoi
immédiat n'étaient pas réalisés et il lui a alloué le salaire auquel elle
aurait eu droit si les rapports de travail avaient pris fin à l'échéance du
délai de congé, ainsi qu'une indemnité au sens de l'art. 337c al. 3 CO
correspondant à deux mois de salaire.
A.________ a recouru contre ce jugement devant la Chambre des recours du
Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Elle
alléguait que les justes motifs d'une résiliation immédiate n'étaient pas
réalisés, qu'il s'agissait d'une résiliation abusive ou non fondée au sens de
l'art. 60 LPers/VD, ce qui lui donnait droit à un poste équivalent au sein de
l'administration. A titre subsidiaire, elle demandait le paiement de son
salaire jusqu'à l'échéance du délai de congé et une indemnité équivalant à six
mois de salaire.
Le Tribunal cantonal a rejeté le recours par arrêt du 14 novembre 2007, notifié
le 11 mars 2008. Il a considéré en substance que la recourante avait été
licenciée avec effet immédiat en application de l'art. 61 LPers/VD et qu'elle
ne pouvait dès lors pas prétendre à sa réintégration ou à un poste équivalent.
En effet, en cas de résiliation immédiate jugée illégitime, l'art. 61 LPers/VD
renvoie aux règles des art. 337b et 337c CO, qui ne prévoient pas de telles
possibilités. De plus, c'était en vain que la recourante contestait les faits
en ce qui concerne la faute commise, à savoir le refus d'exécuter des tâches
prévues par son cahier des charges. Enfin, l'octroi d'une indemnité équivalant
à deux mois de salaire ne prêtait pas le flanc à la critique.

D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande
au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt, de déclarer abusive et non fondée la
résiliation des rapports de travail et d'ordonner sa réintégration dans un
poste équivalent. Elle conclut subsidiairement à ce que l'Etat de Vaud soit
condamné à lui verser une indemnité correspondant à six mois de salaire et,
plus subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour
complément d'instruction. Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de
son arrêt. L'Etat de Vaud a présenté des observations; il conclut au rejet du
recours.

Considérant en droit:

1.
La décision attaquée a été rendue en matière de rapports de travail de droit
public au sens de l'art. 83 let. g LTF. La recourante conclut principalement à
sa réintégration au service de l'Etat de Vaud et subsidiairement au versement
d'une indemnité. Dès lors que son action a, en tout cas partiellement, un but
économique et dans la mesure où son objet peut être apprécié en argent, il y a
lieu de considérer qu'il s'agit d'une contestation de nature pécuniaire (cf.
Fabienne Hohl, Procédure civile, Tome II, Berne 2002, p. 77; Jean-François
Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II,
Berne 1990, p. 196 ss). Il s'ensuit que le motif d'exclusion de l'art. 83 let.
g LTF n'entre pas en considération. La contestation porte sur la réintégration
au service de l'Etat pour une durée indéterminée et, subsidiairement, sur
l'octroi d'une indemnité équivalant à six mois de salaire au lieu de deux. La
valeur litigieuse atteint donc le seuil de 15'000 fr. ouvrant la voie du
recours en matière de droit public dans ce domaine (art. 51 al. 2 et 85 al. 1
let. b LTF). Dès lors que l'arrêt attaqué rejette le recours formé contre la
décision de résiliation de son contrat de travail, la recourante est
particulièrement atteinte par ce prononcé et elle a un intérêt digne de
protection à son annulation; elle a donc la qualité pour recourir (art. 89 al.
1 let. b et c LTF). Pour le surplus, interjeté en temps utile et dans les
formes requises contre une décision finale prise en dernière instance cantonale
non susceptible de recours devant le Tribunal administratif fédéral, le recours
est recevable au regard des art. 42, 86 al. 1 let. d, 90 et 100 al. 1 LTF.

2.
Dans un premier grief, la recourante se plaint d'une "violation du droit public
cantonal". Elle cite le texte des art. 59, 60 et 61 LPers/VD et expose en
substance que le Tribunal cantonal a mal appliqué ces dispositions et qu'elle
"ne saurait accepter cette interprétation du droit cantonal public vaudois".
Le recours au Tribunal fédéral peut être formé pour violation du droit fédéral
(art. 95 let. a LTF), y compris les droits constitutionnels (cf. Message
concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28
février 2001, FF 2001 p. 4132). En revanche, la violation du droit cantonal ne
constitue pas un motif de recours, sous réserve de celle des droits
constitutionnels cantonaux et des dispositions cantonales sur le droit de vote
des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires (art. 95 let.
c et d LTF), ce qui n'entre pas en considération dans le cas d'espèce. Sont
également réservés les cas où le recourant soutient que la violation de
dispositions légales cantonales est constitutive d'une violation du droit
fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF, telle que l'interdiction de
l'arbitraire ancrée à l'art. 9 Cst.
La recourante se borne en l'occurrence à critiquer l'application du droit
cantonal sans aucunement démontrer, ni même alléguer, que cette application
serait arbitraire ou qu'elle porterait atteinte à ses droits constitutionnels
Or, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, les griefs de violation du droit
constitutionnel ne peuvent être examinés que s'ils sont invoqués et motivés;
ils répondent en outre à des exigences de motivation accrues, correspondant à
celles de l'ancien art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 133 III 589 consid. 2 p. 591 et
les références). Le Tribunal fédéral ne peut dès lors pas entrer en matière sur
ce premier moyen, qui doit être déclaré irrecevable.

3.
Dans un deuxième grief, la recourante se plaint d'arbitraire dans
l'appréciation des preuves et l'établissement des faits. Elle reproche en
substance au Tribunal cantonal d'avoir retenu de manière choquante qu'elle
avait failli à son devoir de fournir des prestations de qualité au sens de
l'art. 50 LPers/VD.

3.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte
pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même
qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution
retenue en dernière instance cantonale que si elle est manifestement
insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté ou si elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou
de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit
insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 133
I 149 consid. 3.1 p. 153; 132 I 13 consid. 5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p.
219; 129 I 173 consid. 3.1 p. 178). En matière d'appréciation des preuves et
d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité n'a
manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, si elle ne
prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à
modifier la décision ou lorsqu'elle tire des constatations insoutenables des
éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41).

3.2 En l'occurrence, la recourante allègue qu'il serait manifestement choquant
de retenir qu'elle avait refusé d'exécuter un travail qui pouvait
raisonnablement être exigé d'elle, contrevenant ainsi à son obligation de
fournir des prestations de qualité. Elle se prévaut du fait qu'elle aurait
donné entière satisfaction à son employeur depuis son engagement, le 1er juin
1999, jusqu'à la fin du mois de novembre 2004. A partir de ce moment, les
relations avec son supérieur direct se seraient dégradées "avec la complaisance
du directeur des ressources humaines". Le nouveau cahier des charges, que la
recourante qualifie de vexatoire, aurait servi de prétexte pour résilier le
contrat de travail.
Le Tribunal cantonal ne remet pas en cause le fait que la recourante ait donné
satisfaction de juin 1999 à novembre 2004, de sorte que c'est en vain qu'elle
se prévaut de cet élément. L'arrêt querellé constate en revanche que
l'intéressée n'a pas respecté le nouveau cahier des charges, qui n'apparaissait
pas chicanier ou inéquitable. La modification du cahier des charges consistait
en effet à remplacer certaines tâches administratives par d'autres tâches de
qualité équivalente, qui ne s'éloignaient guère des attributions antérieures de
l'intéressée. Or, la recourante ne démontre pas l'inexactitude de ces
constatations. Elle n'explique notamment pas pour quelles raisons les nouvelles
tâches qui lui ont été confiées seraient "vexatoires". De plus, le fait qu'une
procédure était en cours en ce qui concerne le premier avertissement ne la
dispensait pas d'effectuer les tâches prévues par son cahier des charges. En
omettant de le faire, elle a effectivement violé son obligation de fournir des
prestations de qualité. Quant à la prétendue complaisance du directeur des
ressources humaines à l'égard de son supérieur direct et l'utilisation du
cahier des charges comme prétexte pour mettre fin au contrat, il s'agit de
simples allégations qui n'apparaissent pas étayées par des éléments figurant au
dossier. En tous les cas, la recourante ne mentionne pas les moyens de preuve
que l'autorité intimée aurait omis de prendre en compte à cet égard. En
définitive, elle ne démontre pas en quoi les faits auraient été constatés ou
appréciés de manière arbitraire au sens de la jurisprudence susmentionnée.

4.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.
La recourante, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure
(art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 10 juillet 2008
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant: Le Greffier:

Aemisegger Rittener