Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.170/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1C_170/2008 ajp

Arrêt du 22 août 2008
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger et Reeb.
Greffier: M. Parmelin.

Parties
X.________,
Y.________,
A. Z.________,
recourants, représentés par Me Raymond Didisheim, avocat, place St-François 7,
1003 Lausanne,

contre

Municipalité de Peyres-Possens,
1063 Peyres-Possens, représentée par
Me Robert Liron, avocat, rue des Remparts 9, 1400 Yverdon-les-Bains,
Département de l'économie du canton de Vaud, Service du développement
territorial, place de la Riponne 10, 1014 Lausanne,
représenté par Me Edmond de Braun, avocat, rue Bellefontaine 2, 1003 Lausanne.

Objet
Construction en zone agricole, remise en état,

recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal
cantonal du canton de Vaud du 12 mars 2008.

Faits:

A.
X.________, A. Z.________ et Y.________ sont copropriétaires de la parcelle n°
276 du registre foncier de la commune de Peyres-Possens, au lieu-dit "Les
Morréments". Cette parcelle non bâtie, de 2'935 mètres carrés, est située en
zone agricole selon le plan général d'affectation communal approuvé le 4 août
1982 par le Conseil d'Etat du canton de Vaud. A. Z.________ et son époux
B.Z.________ sont également propriétaires, en zone du village A, de la parcelle
adjacente à l'est n° 26, de 765 mètres carrés, qui supporte leur maison
d'habitation. B.Z.________ est en outre propriétaire de la parcelle n° 28,
d'une surface de 1'018 mètres carrés, qui jouxte la parcelle n° 26, en zone du
village A.
Du 20 juin au 10 juillet 2000, A. et B. Z.________ ont mis à l'enquête publique
la construction de deux garages et d'une écurie pour quatre chevaux sur les
parcelles nos 26 et 28. En même temps, X.________, A. Z.________ et Y.________
ont mis à l'enquête publique la construction d'un paddock d'environ 40 sur 18
mètres sur la parcelle n° 276. Le dossier relatif à la construction des garages
et de l'écurie a été transmis par les autorités communales à la Centrale des
autorisations du Département des infrastructures du canton de Vaud. Tel n'est
pas le cas en revanche du dossier relatif au paddock qui a fait l'objet d'une
enquête communale sans publication dans la Feuille des avis officiels du canton
de Vaud. Le 13 juillet 2000, la Municipalité de Peyres-Possens a délivré deux
permis de construire, le premier portant sur la construction du paddock, le
second autorisant la construction des deux garages et de l'écurie.
Le 12 décembre 2001, des voisins se sont plaints que l'implantation du paddock
ne correspondait pas au permis de construire délivré et que des écoulements
ainsi qu'un chemin d'accès au paddock depuis les écuries avaient été réalisés
sans autorisation sur la parcelle n° 276. Le 21 janvier 2002, la Municipalité
de Peyres-Possens a écrit aux époux Z.________ pour leur demander de
régulariser la situation en mettant les ouvrages en conformité avec le permis
de construire ou en soumettant à l'enquête publique complémentaire de nouveaux
plans.
X.________, A. Z.________ et Y.________ ont opté pour la seconde solution. Une
enquête publique complémentaire communale a eu lieu du 2 au 23 septembre 2002,
basée sur un nouveau plan de situation du 8 août 2002 mentionnant
l'implantation exacte du paddock et le chemin d'accès. Par courrier du 8
octobre 2002, la Municipalité de Peyres-Possens a informé les époux Z.________
que l'enquête publique complémentaire n'avait pas suscité de remarques, que le
plan de situation du 8 août 2002 annulait et remplaçait celui du 8 juin 2000 et
que la mise en conformité du plan de situation avec l'état existant était ainsi
réalisée sans qu'il y ait lieu de modifier le permis de construire. A cette
occasion, aucune autorisation cantonale n'a été requise et, partant, délivrée.
Par décision du 13 juin 2007, le Service de l'aménagement du territoire du
canton de Vaud, devenu par la suite le Service du développement territorial, a
constaté que le paddock n'avait pas fait l'objet de l'autorisation cantonale
spéciale prescrite par la loi pour les ouvrages situés en zone agricole et a
ordonné, dans un délai au 31 août 2007, la suppression du chemin et du carré de
sable réalisés en zone agricole, l'évacuation du tout-venant et des autres
matériaux mis en place pour renforcer le terrain et la revégétalisation en
prairie de l'entier de la surface du carré de sable et du chemin jusqu'en
limite de la zone de village A.
Statuant par arrêt du 12 mars 2008, la Cour de droit administratif et public du
Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté
le recours formé contre cette décision par X.________, A. Z.________ et
Y.________. Elle a estimé que le paddock n'était pas conforme à l'affectation
de la zone agricole et qu'une autorisation fondée sur les art. 16a et 22 de la
loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700) était dès lors
exclue. Elle a par ailleurs considéré que l'installation ne pouvait pas
davantage être admise à titre dérogatoire en application de l'art. 24 LAT et a
confirmé l'ordre de démolition, un nouveau délai au 31 juillet 2008 étant
imparti aux recourants pour procéder aux travaux de remise en état des lieux.

B.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, X.________, A.
Z.________ et Y.________ demandent au Tribunal fédéral de réformer cet arrêt en
ce sens que le recours formé devant le Tribunal cantonal est admis, que l'arrêt
cantonal attaqué est annulé et que des dépens de première instance leur sont
alloués.
Le Tribunal cantonal conclut au rejet du recours. La Municipalité de
Peyres-Possens s'en remet à justice. Le Service cantonal du développement
territorial et l'Office fédéral du développement territorial ont renoncé à
déposer des observations.

C.
Par ordonnance du 8 mai 2008, le juge instructeur a admis la requête d'effet
suspensif présentée par les recourants.

Considérant en droit:

1.
Dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale dans le domaine
du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions, le recours
est recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82
ss de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110) et 34 al. 1 LAT dans sa
teneur actuelle selon le ch. 64 l'annexe à la loi sur le Tribunal administratif
fédéral (ATF 133 II 353 consid. 2 p. 356, 249 consid. 1.2 p. 251). Aucune des
exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'est réalisée. Les recourants ont pris part
à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal et sont particulièrement
touchés par l'arrêt attaqué qui confirme la suppression du chemin et du paddock
réalisés sur la parcelle n° 276. Ils ont donc la qualité pour agir au sens de
l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité du recours en
matière de droit public étant remplies, il convient de statuer sur le fond.

2.
Le dossier cantonal renferme un lot de photographies qui permettent de se
rendre compte de l'impact des ouvrages litigieux dans le site et de statuer en
connaissance de cause sur la proportionnalité de l'ordre de remise en état
litigieux, de sorte qu'il n'y a pas lieu de donner suite à la requête
d'inspection locale présentée par les recourants.

3.
Ces derniers ne contestent pas que le paddock et le chemin d'accès réalisés sur
la parcelle n° 276 soient des installations au sens de l'art. 22 LAT. Ils
admettent également que ces ouvrages étaient soumis à une autorisation spéciale
du Service cantonal du développement territorial dans la mesure où ils prennent
place hors de la zone à bâtir. Il est par ailleurs tout aussi constant que les
conditions posées à l'octroi d'une telle autorisation n'étaient pas réunies.
Les recourants soutiennent en revanche que l'ordre de supprimer ces
aménagements violerait tant le principe de la proportionnalité que celui de la
bonne foi.

3.1 La garantie de la propriété peut être restreinte aux conditions de l'art.
36 Cst. A teneur de l'alinéa 3 de cette disposition, toute restriction d'un
droit fondamental doit être proportionnée au but visé. Selon la jurisprudence,
l'ordre de démolir une construction édifiée sans permis et pour laquelle une
autorisation ne pouvait être accordée n'est en soi pas contraire au principe de
la proportionnalité. L'autorité renonce à une telle mesure si les dérogations à
la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à
justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si
celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y
a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au
droit (ATF 123 II 248 consid. 3a/bb p. 252; 111 Ib 213 consid. 6b p. 224; 102
Ib 64 consid. 4 p. 69). Même un constructeur qui n'est pas de bonne foi peut
invoquer le principe de la proportionnalité. Toutefois, celui qui place
l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce qu'elle se préoccupe
plus de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients
qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a p. 255; 111 Ib 213 consid.
6b p. 224 et la jurisprudence citée).

3.2 Les recourants ne peuvent être suivis lorsqu'ils se prévalent de leur bonne
foi. En vertu des art. 81 al. 1 et 120 al. 1 let. a de la loi cantonale sur
l'aménagement du territoire et les constructions, tout projet de construction
en dehors des zones à bâtir doit être soumis à une autorisation spéciale
préalable du département en charge des constructions. L'autorité municipale
n'était donc pas compétente pour autoriser le paddock et le chemin d'accès en
zone agricole et le permis de construire qu'elle a délivré aux recourants est
radicalement nul (ATF 132 II 21 consid. 3 p. 26). Ces derniers ne sauraient
s'en prévaloir pour s'opposer à l'ordre de remise en état des lieux. Ils ne
peuvent pas davantage faire valoir une quelconque assurance émanant de
l'autorité cantonale compétente pour tous les projets de construction situés
hors de la zone à bâtir en vertu de l'art. 25 al. 2 LAT dès lors que le Service
cantonal de l'aménagement du territoire n'a pas été consulté que ce soit dans
le traitement de la demande de permis de construire principale ou dans la
procédure d'enquête complémentaire. Cette omission est imputable à faute aux
recourants. L'architecte qui a rempli le formulaire de demande de permis de
construire a certes indiqué que le paddock prendrait place en zone agricole; en
revanche, il a omis de cocher la case consacrée aux constructions hors zone à
bâtir et n'a pas davantage rempli le questionnaire ad hoc destiné à l'obtention
de l'autorisation spéciale requise. Cette omission a eu pour conséquence que la
demande de permis de construire relative au paddock n'a pas été soumise à
l'autorité cantonale compétente pour les constructions hors de la zone à bâtir.
Une telle erreur n'est pas admissible. Même si les recourants pouvaient de
bonne foi ignorer les règles de répartition des compétences dans ce domaine,
tel n'est pas le cas de leur architecte (cf. ATF 111 Ib 213 consid. 6a p. 222;
arrêt 1A.301/2000 du 28 mai 2001 consid. 6a publié in ZBl 103/2002 p. 363). Les
recourants doivent se laisser opposer les erreurs de leur mandataire dans la
rédaction de la demande de construire et ne sauraient renvoyer aux propres
manquements de la Municipalité de Peyres-Possens dans le traitement de leur
demande de permis de construire (cf. arrêt du 1P.829/2005 du 1er mai 2006
consid. 3.3 publié in SJ 2006 I p. 449; arrêt 1P.485/1999 du 18 octobre 1999
consid. 4 publié in SJ 2000 I p. 122 et les références citées). Au demeurant,
même si la bonne foi des recourants devait être reconnue, elle ne saurait les
protéger contre l'intervention de l'autorité de surveillance destinée à
rétablir une situation conforme au droit lorsque cette intervention est
conforme au principe de la proportionnalité (arrêt 1A.1/2005 du 11 novembre
2005 consid. 8.3).
Les installations litigieuses violent fondamentalement le droit fédéral de
l'aménagement du territoire. La séparation entre zone à bâtir et zones
constructibles est en effet un principe essentiel d'aménagement qui, en dehors
des exceptions prévues par la loi, doit demeurer d'application stricte (ATF 132
II 21 consid. 6.4 p. 40; 111 Ib 213 consid. 6b p. 225; arrêt 1A.301/2000 du 28
mai 2001 consid. 6c publié in ZBl 103/2002 p. 364). Le paddock s'étend sur 720
mètres carrés auxquels vient s'ajouter le chemin d'accès. La surface soustraite
à une exploitation agricole est donc importante et l'atteinte portée au droit
fédéral non négligeable (cf. arrêt 1A.276/2006 du 25 avril 2007, qui concernait
une surface de 750 mètres carrés affectée à un jardin potager). Il importe à
cet égard peu que ces ouvrages ne soient pas aussi visibles qu'une construction
en trois dimensions ou que l'Office fédéral du développement territorial ait
suggéré un assouplissement de la législation en faveur de telles installations
dans la procédure de consultation relative à une modification partielle de la
loi fédérale sur l'aménagement du territoire dès lors que cette proposition n'a
pas trouver de concrétisation dans la loi (cf. Message du Conseil fédéral du 2
décembre 2005 relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur
l'aménagement du territoire, FF 2005 p. 6646; arrêt 1A.256/2005 du 10 mars 2006
consid. 3). Le Tribunal administratif a estimé le coût de la remise en état des
lieux à quelques dizaines de milliers de francs. Les recourants ne contestent
pas cette estimation. Ils considèrent qu'il y aurait lieu de tenir compte dans
l'appréciation du préjudice que leur cause la décision attaquée du montant de
300'000 fr. investi dans la construction de l'écurie qu'ils auraient renoncé à
consentir s'ils avaient su que le paddock ne pouvait pas être autorisé. Ils ne
démontrent toutefois pas que l'aménagement d'une aire de sortie en sable serait
absolument nécessaire et que les chevaux ne peuvent s'ébattre sur la surface
attenante à l'écurie et sur la parcelle n° 276, comme le retient la cour
cantonale (cf. arrêt 1A.26/2003 du 22 avril 2003 consid. 6), de sorte que
l'inutilité de l'écurie n'est pas établie. A supposer que tel soit le cas, ils
ne prétendent de toute manière pas que le coût de la remise en état des lieux
et de la construction d'une écurie les mettraient en difficulté financièrement.
L'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit apparaît
ainsi prépondérant par rapport à l'intérêt privé des recourants au maintien des
ouvrages litigieux. Dans ces conditions, l'ordre de remise en état des lieux ne
viole pas le principe de la proportionnalité.

4.
Le recours doit par conséquent être rejeté aux frais des recourants qui
succombent (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Le délai d'exécution fixé au 31 juillet
2008 par l'arrêt attaqué étant échu, un nouveau délai au 1er décembre 2008 sera
imparti aux propriétaires de la parcelle n° 276 pour procéder aux travaux de
remise en état des lieux. La Municipalité de Peyres-Possens, qui s'en est
remise à justice et qui a pris fait et cause pour les recourants, ne saurait
prétendre à des dépens. Il en va de même du Service cantonal du développement
territorial, qui n'a pas déposé d'observations au fond.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un délai échéant au 1er décembre 2008 est imparti aux recourants pour procéder
à la remise en état des lieux conformément à la décision du Service de
l'aménagement du territoire du canton de Vaud du 13 juin 2007.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des
recourants.

4.
Il n'est pas alloué de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, de la
Municipalité de Peyres-Possens et du Département de l'Economie du canton de
Vaud, ainsi qu'à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal
du canton de Vaud et à l'Office fédéral du développement territorial.
Lausanne, le 22 août 2008
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Parmelin