Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.199/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_199/2008/col

Arrêt du 8 août 2008
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Aeschlimann et Reeb.
Greffier: M. Jomini.

Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Jean-Claude Mathey, avocat,

contre

B.________.,
Banque C.________,
intimées, toutes les deux représentées par Me Yves Burnand, avocat,
Masse en faillite D.________,
intimée, représentée par Me Christian Favre, avocat,
Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1014 Lausanne.

Objet
procédure pénale, for,

recours contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton
de Vaud du 5 mai 2008.

Considérant en fait et en droit:

1.
Le Juge d'instruction du canton de Vaud (ci-après: le Juge d'instruction
cantonal) a ouvert, dans les années 1990, une enquête à l'encontre de
E.________ et divers consorts, à qui il était reproché des infractions contre
le patrimoine ainsi que des faux dans les titres. Après une disjonction, une
enquête séparée a été instruite par le Juge d'instruction cantonal contre
A.________ (enquête PE02.004348). Par une ordonnance du 27 juin 2007, ce
dernier a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
Lausanne (ci-après: le Tribunal correctionnel) comme accusé de faux dans les
titres commis dans l'exercice de fonctions publiques; il lui est reproché en
substance d'avoir, en tant que notaire, établi en 1995 l'acte constitutif de la
société D.________ (fondée notamment par E.________) en omettant de mentionner
certains éléments.

2.
Le 21 février 2008, A.________ a adressé au Tribunal correctionnel une requête
incidente en fixation de for, concluant au prononcé du déclinatoire et à la
transmission de l'affaire aux autorités judiciaires valaisannes. Par un
prononcé du 20 mars 2008, le Président du Tribunal correctionnel a rejeté cette
requête, dans la mesure où elle était recevable. Il a retenu l'existence d'un
accord, entre les juges d'instruction des cantons de Vaud et du Valais, au
sujet de la compétence des autorités vaudoises dans la présente affaire.
A.________ a recouru contre ce prononcé auprès du Tribunal d'accusation du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Le Tribunal d'accusation a rejeté ce recours, dans la mesure où il était
recevable, par un arrêt rendu le 5 mai 2008 (arrêt envoyé le 18 juin 2008 aux
parties, notamment aux parties civiles qui s'étaient déterminées sur le
recours, à savoir la masse en faillite de D.________, la banque C.________ et
B.________). Dans cet arrêt, l'existence d'une voie de recours au Tribunal
d'accusation contre une décision concernant un conflit de for intercantonal a
été mise en doute, mais cette question de recevabilité a été laissée indécise.
Statuant sur le fond, le Tribunal d'accusation a rappelé la teneur de l'art. 21
al. 1 du Code de procédure pénale (CPP/VD), aux termes duquel "en cas de
conflit de for intercantonal, le juge d'instruction cantonal prend toutes
mesures pour que l'autorité compétente soit saisie". En l'occurrence, le Juge
d'instruction cantonal et son homologue valaisan ont procédé à un échange de
vues et sont convenus que les autorités vaudoises seraient compétentes pour
poursuivre les infractions reprochées au recourant; cet accord a été notifié le
23 mai 2003 au recourant, qui n'a pas contesté à ce moment-là la compétence des
autorités vaudoises. Pour le Tribunal d'accusation, un tel accord doit être
considéré comme définitif, sous réserve de motifs impérieux justifiant une
modification; en l'espèce, l'existence de tels motifs n'est pas établie, étant
rappelé que la compétence des autorités du canton de Vaud se fonde sur l'art.
343 CP ("for en cas de participation") puisqu'une instruction pénale avait déjà
été ouverte dans ce canton contre E.________, accusé d'avoir participé aux
mêmes faits.

3.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au
Tribunal fédéral de réformer l'arrêt du Tribunal d'accusation, en ce sens que
sa requête en déclinatoire est admise, le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de Lausanne devant se déclarer incompétent pour juger de la
cause à défaut de rattachement avec le canton de Vaud.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. Le Tribunal d'accusation a
produit son dossier.

4.
Vu le sort à réserver aux griefs du recourant sur le fond, il n'y a pas lieu de
se prononcer au sujet de la recevabilité du présent recours.

5.
L'existence d'un accord, entre les autorités compétentes des deux cantons
concernés, pour l'instruction et le jugement de l'affaire dans le canton de
Vaud, n'est pas contestée. Un tel accord aurait pu être attaqué devant la
Chambre d'accusation du Tribunal fédéral (jusqu'à l'entrée en vigueur, le 1er
avril 2004, de la loi sur le Tribunal pénal fédéral [LTPF; RS 173.71]) ou
devant le Tribunal pénal fédéral (depuis la date précitée - art. 345 CP, art.
28 al. 1 let. g LTPF); le recourant, en tant que personne poursuivie ou
inculpée, aurait pu lui-même saisir l'autorité fédérale pour contester le choix
de la compétence des autorités vaudoises (cf. ATF 132 IV 89 consid. 2 p. 94;
128 IV 225 consid. 2.3 p. 229; Erhard Schweri/Felix Bänziger, Interkantonale
Gerichtsstandsbestimmung in Strafsachen, 2e éd. Berne 2004, p. 197).
Après l'accord sur la compétence des autorités vaudoises - que le Juge
d'instruction cantonal a obtenu dans le cadre de ses attributions selon l'art.
21 al. 1 CPP/VD -, le transfert du for dans un autre canton ne peut, d'après la
jurisprudence, intervenir que si des motifs impérieux ou déterminants le
justifient; il faut en effet tenir compte de l'intérêt à conduire la procédure
pénale de manière efficace et rapide, ce qui pourrait être compromis par
l'attribution d'une affaire déjà instruite aux autorités d'un autre canton (cf.
ATF 132 IV 89 consid. 2 p. 94; 120 IV 282 consid. 3a p. 286 et les arrêts
cités).
En l'espèce, l'enquête a été ouverte il y a plusieurs années; elle est
maintenant close et le recourant est renvoyé devant le Tribunal correctionnel,
les débats devant avoir lieu prochainement. Il faudrait des motifs
particulièrement importants pour qu'à ce stade, l'accord de 2003 soit remis en
cause et l'affaire transférée aux autorités valaisannes, ce qui ne manquerait
pas d'en retarder sensiblement l'issue. Or le recourant se borne à invoquer des
arguments généraux, concernant le lieu de commission de l'infraction (en se
référant à l'endroit où a été instrumenté l'acte de fondation de la société
litigieuse, ainsi qu'au siège et au centre des activités de ladite société),
qui auraient déjà pu être soulevés au début de l'enquête, voire au moment où il
a eu connaissance de l'accord reconnaissant la compétence des autorités
vaudoises. Ces arguments généraux ont dû nécessairement être pris en
considération d'office, lors de la détermination du for. Le recourant ne se
prévaut ainsi, manifestement, pas de motifs impérieux pour un transfert de for,
au sens de la jurisprudence précitée. Il en découle que le Président du
Tribunal correctionnel puis le Tribunal d'accusation étaient fondés à prendre
acte de l'accord de 2003, considéré comme définitif, et à ne pas se prononcer à
nouveau sur la question du for intercantonal. C'est également à bon droit que
le Tribunal d'accusation n'a pas envisagé de soumettre la requête en
déclinatoire au Tribunal pénal fédéral, car cette requête n'était manifestement
pas une contestation valable, plusieurs années après l'accord entre les juges
d'instruction des deux cantons, de l'attribution de la compétence aux autorités
vaudoises.
Il s'ensuit que le recours au Tribunal fédéral, manifestement infondé, doit
être rejeté, dans la mesure où il est recevable, selon la procédure simplifiée
de l'art. 109 al. 2 LTF.

6.
Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 65 al. 1
et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux parties intimées,
qui n'ont pas été invitées à se déterminer.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Procureur
général et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 8 août 2008
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Jomini