Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 84/2007
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U 84/07

Arrêt du 31 janvier 2008
Ire Cour de droit social

MM. les Juges Ursprung, Président,
Lustenberger et Frésard.
Greffier: M. Beauverd.

B. ________,
recourant, représenté par Hüsnü Yilmaz, Fédération suisse pour l'intégration
des handicapés, place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

La Bâloise Compagnie d'Assurances, Aeschengraben 21, 4051 Bâle,
intimée, représentée par Me Christian Grosjean, avocat, Budin & Associés, rue
Jean Sénebier 20, 1205 Genève.

Assurance-accidents,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances
du canton de Vaud du 27 décembre 2006.

Faits:

A.
B. ________, né en 1944, a travaillé en qualité de chauffeur-livreur au
service de la société X.________ SA. A ce titre, il était assuré
obligatoirement contre le risque d'accident auprès de la Bâloise Assurances
(ci-après: la Bâloise).

Le 2 mars 2002, il a été victime d'un accident qui a touché l'épaule droite.
La Bâloise a pris en charge les suites de cet événement.

L'assuré a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité le 6
juin 2003. Par des décisions des 3 décembre 2004 et 11 avril 2005, l'Office
AI du canton de Vaud lui a alloué une demi-rente d'invalidité pour la période
du 1er mars au 31 décembre 2003 et trois quarts de rente à partir du 1er
janvier 2004. Ces prestations étaient fondées sur un taux d'invalidité de 64
%. Pour fixer le revenu d'invalide (19'799 fr.), l'office AI s'est référé au
revenu moyen réalisable selon cinq descriptions de poste de travail (DPT),
compte  tenu d'une capacité résiduelle de travail de 50 % dans ces activités.
L'assuré n'a pas contesté ces décisions.

De son côté, la Bâloise a confié une expertise au docteur O.________,
spécialiste en chirurgie orthopédique. Dans un rapport du 8 février 2005, ce
médecin a indiqué que l'intéressé était au bénéfice d'une rente de
l'assurance-invalidité en raison non seulement de ses troubles à l'épaule
droite, mais encore de troubles digestifs et d'une arthrose à la colonne
vertébrale. Il est d'avis que l'affection à l'épaule droite empêche l'assuré
d'exercer son activité de chauffeur-livreur. En revanche, cette atteinte
n'entraîne pas d'incapacité de travail dans des activités adaptées.

Par décision du 22 mars 2005, confirmée sur opposition le 29 juin suivant, la
Bâloise a supprimé le droit de l'assuré à la prise en charge des frais
médicaux et à l'indemnité journalière à partir du 1er mars 2005, alloué une
indemnité pour atteinte à l'intégrité fondée sur un taux de 10 % et refusé
l'octroi d'une rente au motif que le taux d'invalidité (5 %) était
insuffisant pour ouvrir droit à une telle prestation. Pour fixer le revenu
d'invalide (52'025 fr. 50), la Bâloise s'est référée au salaire obtenu par
des hommes exerçant une activité simple et répétitive, tel qu'il ressort de
l'Enquête suisse sur la structure des salaires 2002 (ESS) de l'Office fédéral
de la statistique (tableau TA 1, niveau de qualification 4), compte tenu
d'une capacité de travail entière et d'une déduction de 10 % en raison de
l'âge et des limitations liées au handicap.

B.
B.________ a recouru contre la décision sur opposition devant le Tribunal des
assurances du canton de Vaud, en concluant à l'octroi, dès le 1er mars 2005,
d'une rente fondée sur une incapacité de gain de 27,5 %.

Statuant le 27 décembre 2006, la juridiction cantonale a admis le recours et
réformé la décision entreprise en ce sens que l'intéressé a droit, dès le 1er
mars 2005, à une rente d'invalidité fondée sur un taux de 10 %.

C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
il demande la réforme, en reprenant ses conclusions formulées en première
instance, sous suite de dépens.
L'intimée conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral de la
santé publique a renoncé à présenter des déterminations.

Considérant en droit:

1.
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée
en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été
rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1
LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
2.1 Le litige porte sur le taux d'invalidité ouvrant droit à la rente allouée
à partir du 1er mars 2005, singulièrement sur le montant du revenu d'invalide
déterminant pour la comparaison des revenus prévue à l'art. 16 LPGA.

Selon cette disposition légale, à laquelle renvoie l'art. 18 al. 2 LAA, ce
revenu est celui que l'assuré pourrait obtenir en exerçant l'activité qui
peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures
de réadaptation, sur un marché du travail équilibré.

2.2 Pour fixer le revenu d'invalide, l'intimée s'est référée au salaire
obtenu par des hommes exerçant une activité simple et répétitive, tel qu'il
ressort de l'ESS 2002 (tableau TA 1, niveau de qualification 4), soit 54'684
fr. annuellement (4'557 fr. x 12). Après avoir adapté ce montant à
l'évolution des salaires en 2005 (+ 1,4 %) et à un horaire hebdomadaire de
travail de 41,7 heures, l'assureur-accidents a opéré une déduction de 10 %
pour tenir compte de l'âge et des limitations liées au handicap. Le revenu
d'invalide ainsi obtenu était de 52'025 fr., ce qui donne, après comparaison
avec un revenu sans invalidité de 54'600 fr., un taux d'invalidité de 5 %
(arrondi).

De son côté, la juridiction cantonale a fixé le revenu d'invalide sur les
mêmes bases statistiques mais a considéré qu'une déduction de 15 % tenait
mieux compte de la limitation découlant de l'atteinte à l'épaule droite
entraînant, dans une activité adaptée, une rétribution inférieure à celle
qu'obtiendrait une personne disposant de la pleine force de ses deux bras. Le
revenu d'invalide ainsi obtenu était de 49'135 fr., ce qui donne, après
comparaison avec le revenu sans invalidité de 54'600 fr., un taux
d'invalidité de 10 %.

Le recourant reproche à l'intimée et à la juridiction cantonale de s'être
fondées sur les salaires statistiques tirés de l'ESS 2002. Invoquant le
principe jurisprudentiel de l'uniformité de la notion d'invalidité dans
l'assurance-invalidité et l'assurance-accidents, il soutient que le revenu
d'invalide devait être fixé sur la base du revenu moyen dans les cinq DPT
retenues par l'office AI, à savoir des activités de caissier de
station-service, d'aide-magasinier, d'ouvrier ou d'employé à la presse,
d'ouvrier de fabrique et d'employé dans le secteur emballage et expédition,
le tout compte tenu d'une capacité de travail résiduelle de 50 %. Il fait
valoir que les conditions auxquelles la jurisprudence autorise une évaluation
divergente de l'invalidité ne sont pas réalisées en l'occurrence.

2.3
2.3.1 En raison de l'uniformité de la notion d'invalidité, il convient
d'éviter que pour une même atteinte à la santé, assurance-accidents,
assurance militaire et assurance-invalidité n'aboutissent à des appréciations
divergentes quant au taux d'invalidité. C'est pourquoi, même si un assureur
ne peut se contenter de reprendre simplement et sans plus ample examen le
taux d'invalidité fixé par l'autre assureur, une évaluation entérinée par une
décision entrée en force ne peut pas rester simplement ignorée. Aussi,
l'assureur doit-il se laisser opposer la présomption de l'exactitude de
l'évaluation de l'invalidité effectuée, une appréciation divergente de
celle-ci ne pouvant intervenir qu'à titre exceptionnel et seulement si
certaines conditions sont réalisées. En particulier, peuvent constituer des
motifs suffisants de s'écarter d'une telle évaluation le fait que celle-ci
repose sur une erreur de droit ou sur une appréciation insoutenable ou
qu'elle résulte d'une simple transaction conclue avec l'assuré ou encore
qu'elle est fondée sur des mesures d'instruction extrêmement limitées et
superficielles ou, enfin, qu'elle n'est pas du tout convaincante ou entachée
d'inobjectivité (ATF 126 V 288 consid. 2d p. 293; VSI 2004 p. 185 consid. 3
[I 564/02]; RAMA 2001 no U 410 p. 73 s. consid. 3 [U 381/99]).

2.3.2 La présomption de l'exactitude de l'évaluation de l'invalidité suppose
donc que les assureurs concernés répondent d'une même atteinte à la santé.
Or, tel n'est pas le cas en l'espèce. D'ailleurs, le recourant admet que
l'intimée ne répond pas de la même atteinte que l'assurance-invalidité,
puisqu'il ne soutient pas que la rente de l'assurance-accidents devrait
reposer sur le même taux d'invalidité que la rente de l'assurance-invalidité,
à savoir 64 %.

Dès lors, il convient d'examiner si l'atteinte à la santé dont répond
l'assurance-accidents permettait encore à l'assuré de réaliser un revenu de
49'135 fr., calculé sur la base de l'ESS 2002 et compte tenu d'une déduction
de 15 %, ou d'obtenir seulement un gain de 39'598 fr., calculé en fonction du
revenu moyen des cinq DPT retenues par l'office AI.

Dans son rapport d'expertise du 8 février 2005, le docteur O.________ a fait
état d'une polyarthrite scapulo-humérale (PSH) à droite, consistant en une
déchirure post-traumatique du sus-épineux et partielle du sous-scapulaire
après distorsion, d'une spondylose cervicale et dorso-lombaire, antérieure à
l'accident, et d'une coxarthrose droite débutante. Selon l'expert, seules les
lésions de l'épaule droite sont d'origine accidentelle. En raison de ces
séquelles, l'assuré n'est plus capable d'exercer son activité de chauffeur de
poids lourds, parce qu'il ne peut plus porter de charges au-dessus de
l'horizontale, ni supporter le poids d'un objet dépassant 5 kilos pendant
plus de dix minutes, bras le long du corps. Sous ces réserves, ajoute
l'expert, l'intéressé pourrait pleinement exercer des activités de chauffeur
de taxi, de surveillant de station-service ou d'ouvrier en atelier, pour
autant qu'il n'ait pas à faire des efforts avec le bras droit. Etant donné la
présence des autres affections étrangères à l'accident, le docteur O.________
est néanmoins d'avis que la capacité de travail est limitée à 50 %.

Sur le vu des conclusions de l'expert, il n'y a pas de raison de s'écarter du
point de vue de l'intimée et de la juridiction cantonale, selon lequel le
recourant, compte tenu exclusivement de l'atteinte à la santé découlant de
l'accident, est en mesure d'exercer une activité simple et répétitive au sens
de l'ESS 2002, tableau TA 1 et niveau de qualification 4. Par ailleurs, en
opérant une déduction de 15 % sur le salaire statistique, la juridiction
cantonale a tenu pleinement compte des limitations découlant des séquelles à
l'épaule droite.

Au demeurant, il est incontestable qu'en retenant les cinq DPT en question,
l'office AI a pris en considération l'ensemble des atteintes à la santé du
recourant. Dans un rapport (du 21 juillet 2003) rédigé à la demande de
l'assurance-invalidité, le docteur R.________, spécialiste en médecine
interne, a attesté que la capacité de travail de l'assuré était affectée non
seulement par les séquelles accidentelles mais encore par des lombalgies
chroniques avec tassements vertébraux D6, D7 et D8, par une artériopathie des
membres inférieurs stade IIA selon Fontaine, par une coxarthrose droite,
ainsi que par un syndrome de dépendance à l'alcool. Selon ce médecin, les
lésions à l'épaule restreignent les mouvements d'élévation et d'abduction,
tandis que les dorso-lombalgies chroniques le gênent dans les positions
debout ou assise prolongées, ainsi qu'en flexion et/ou rotation du tronc et
dans le port de charges. Or, il ressort d'un rapport final de l'office AI du
3 août  2004 que les DPT en question ont été choisies compte tenu notamment
du fait que les activités en cause ne requéraient pas une position penchée ni
de longs déplacements et permettaient l'alternance régulière des positions
debout et assise. Ainsi, le choix de ces DPT prenait en considération une
atteinte à la santé plus étendue que celle qui découle de l'accident, de
sorte que les activités en question ne peuvent pas servir de référence pour
établir la perte de gain qui doit être couverte par l'assurance-accidents.

Vu ce qui précède, le jugement attaqué n'est pas critiquable et le recours se
révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit administratif est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 31 janvier 2008

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Ursprung Beauverd