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Sozialrechtliche Abteilungen U 21/2007
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U 21/07

Arrêt du 20 novembre 2007
Ire Cour de droit social

MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Widmer et Frésard.
Greffière: Mme Berset.

Caisse maladie et accidents de la société suisse des hôteliers, HOTELA, rue
de la Gare 18, 1820 Montreux, recourante,

contre

C.________,
intimée, représentée par Me Martin Ahlström, avocat, quai Gustave-Ador 38,
1207 Genève.

Assurance-accidents,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève du 30 novembre 2006.

Faits:

A.
Ressortissante française née en 1953, C.________ a été engagée à partir du 7
juillet 2003 par l'établissement médico-social (EMS) X.________ à Y.________,
en qualité d'aide-soignante. A ce titre, elle était assurée contre le risque
d'accidents professionnels et non professionnels auprès de la caisse HOTELA
(ci-après Hotela).

Le 29 août 2004, C.________ a été victime d'un accident sur son lieu de
travail. Elle a décrit par la suite cet événement comme suit: Lors d'un
colloque, alors qu'elle s'asseyait sur un tabouret, celui-ci s'est dérobé et
elle a fait une chute en arrière en percutant le bord d'un lavabo avec le
bras et le haut du dos. Dans les minutes suivantes, elle a ressenti une vive
douleur à la main et au coude gauches, puis après un quart d'heure des
douleurs cervicales à gauche et au niveau de l'épaule gauche. Les douleurs se
sont amplifiées dans l'heure qui a suivi à tel point qu'elle peinait à
s'allonger et ne parvenait plus à lever son bras gauche. Le jour même, elle a
consulté un ostéopathe à Y.________. Son incapacité de travail était totale.

Le 30 août 2004, C.________ a consulté le docteur P.________. Ce médecin a
constaté la présence de cervicalgies et de scapulalgies gauches et
diagnostiqué une entorse cervicale avec névralgies cervico-brachiales
gauches. Il a prescrit un traitement antalgique, le port d'une minerve et des
séances de physiothérapie (rapport médical initial LAA du 13 recte: 31 août
2004).

Le 2 septembre 2004, l'employeur a rempli une déclaration d'accident en
indiquant ce qui suit « C.________ s'est assise à côté du tabouret et a chuté
en arrière contre un lavabo ». L'employeur a précisé que l'assurée s'était
blessée le dos à cette occasion et que la nature de la lésion consistait en
un pincement du nerf cervical et en une contusion. Hotela a pris le cas en
charge.

Le 18 octobre 2004, une imagerie par résonance magnétique (IRM) de la colonne
cervicale a mis en évidence l'absence d'anomalie osseuse ainsi que la
présence d'une petite hernie discale paramédiane gauche en C4-C5 et d'une
petite hernie non significative au niveau C5-C6.

Dans un rapport du 16 novembre 2004, le docteur F.________, neurochirurgien,
a indiqué avoir reçu en consultation C.________. Celle-ci lui avait déclaré
qu'elle avait fait une chute assez sévère « a priori » et présenté
immédiatement une douleur cervico-brachiale gauche, irradiant dans les deux
derniers doigts, de type C8. La patiente avait un bilan radiologique initial
normal, une exploration fonctionnelle de l'épaule normale et des douleurs
insomniantes ne cédant pas aux différents traitements. Le docteur F.________
a précisé que l'RM n'était absolument pas inquiétante, dans la mesure où l'on
retrouvait une petite discopathie C5-C6 qu'il qualifiait de bénigne, sans
contrainte radiculaire ou neuro-méningée significative. Il n'y avait aucune
indication chirurgicale. Le docteur F.________ a proposé de soumettre la
patiente à un électromyograme pour objectiver l'origine neurologique ou non
de la douleur. Si cet examen devait se révélait normal, il conviendrait tout
simplement de s'abstenir de tout traitement, car l'évolution se faisait
souvent vers une amélioration. En revanche, si l'examen montrait une
souffrance radiculaire séquellaire, la patiente devrait être mise sous
médication (Neurotin) à doses progressivement croissantes pendant quelques
semaines. Ce médecin a encore indiqué qu'il trouvait une épaule bloquée sur
le plan clinique, avec une petite péri-arthrite scapulo-humérale sans
atteinte radiologique.

Le 27 novembre 2004, l'employeur a signifié son congé à C.________ pour le 31
janvier 2005.

Le 9 décembre 2004, le docteur A.________, spécialiste en chirurgie
orthopédique et médecin-conseil de Hotela, a estimé que l'action  vulnérante
décrite était inappropriée pour « faire » ou déclencher une hernie discale,
que la causalité était possible et que le statu quo sine était atteint au
plus tard à la date de l'IRM (18 octobre 2004).

Le 15 février 2005, C.________ a été engagée à un taux d'occupation de 30 %
comme aide-soignante à domicile par une entité genevoise.

Par décision du 18 mars 2005, Hotela a mis un terme à ses prestations avec
effet au 18 octobre 2004. L'assurée a fait opposition à cette décision.

Le 13 avril 2005, C.________ a été examinée à la demande d'Hotela par la
doctoresse F.________, spécialiste en rhumatologie. Dans un rapport du 16
avril 2005, cette praticienne a constaté des douleurs à la palpation
paravertébrale C2-C6 à gauche, à la palpation de l'insertion de l'angulaire
de l'omoplate gauche, avec tension du trapèze et sterno-cléiodo-mastoïdien
marquée ainsi qu'une importante limitation de la mobilité cervicale. En
outre, elle a mentionné des douleurs à la palpation épicondylienne et
épitrochléene gauche, comme le long du sillon épitrochléo-olécrânien. La
doctoresse F.________ a posé le diagnostic de syndrome cervico-brachial sans
signes neurologiques déficitaires et de status après traumatisme
d'accélération crânio-cervical vraisemblablement dans l'axe antéro-
postérieur.

Une IRM cervicale du 19 octobre 2005 a mis en évidence des discopathies
dégénératives modérément protrusives C4-C5, sans conflit disco-radiculaire
associé, inchangées par rapport au dernier contrôle. Une écographie de
l'épaule gauche du 15 décembre 2005 a révélé la présence d'une capsulose
évolutive (capsulite) gléno-humérale gauche, sans atteinte concomitante à la
coiffe des rotateurs.
Par décision sur opposition du 1er novembre 2005, Hotela a confirmé sa
décision du 18 mars 2005. Elle a retenu que l'assurée souffrait
principalement d'une hernie discale et que celle-ci n'avait été ni provoquée
ni déclenchée par l'accident, mais tout au plus favorisée par cet événement
puisqu'elle s'inscrivait dans un contexte de lésions dégénératives
préexistantes. Hotela a ainsi considéré que l'accident du 29 août 2004 avait
entraîné une décompensation douloureuse passagère de troubles antérieurs dont
les effets ne s'étaient plus exercés au-delà de la date de l'IRM du 18
octobre 2004.

B.
Par acte du 2 février 2006, C.________ a interjeté un recours contre cette
décision devant le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République
et canton de Genève. Elle a conclu à ce qu' Hotela soit condamnée à lui
verser des prestations au-delà du 18 octobre 2004. A l'appui de son recours,
elle a produit deux avis de la doctoresse H.________, médecin traitant et
spécialiste en médecine physique et en rééducation (rapports des 8 décembre
2005 et 17 janvier 2006). Selon le premier rapport (sous forme de réponses à
un questionnaire), l'assurée a présenté une incapacité de travail de 100% du
28 (recte: 29) août 2004 au 28 février 2005 et de 50 % dès le 1er mars 2005.
Au titre de diagnostic(s), la doctoresse H.________ a mentionné des
cervicobrachialgies gauches chronicisées, une absence de souffrance
radiculaire C5-D1 ou tronculaire en dehors d'un syndrome du tunnel carpien
gauche. Dans le deuxième rapport (du 17 janvier 2006), la doctoresse
H.________ a décrit l'événement du 29 août 2004 comme suit: l'assurée a fait
une chute en arrière en s'asseyant sur un tabouret défectueux; elle s'est
retenue à la table devant elle puis est partie en arrière avec contusion
dorsale et probablement mécanisme de whiplash à l'origine de cervicalgies
gauches immédiates, accompagnées rapidement, entre autres, de brachialgies
gauches. Par ailleurs, la doctoresse H.________ a retenu comme diagnostic des
séquelles douloureuses chronicisées après entorse cervicale traumatique avec
développement d'une capsulite rétractile dans un contexte de conflit
d'assurance qui pourrait contribuer à entretenir un comportement algique. Ce
médecin a conclu son appréciation en ces termes: « Je ne pense pas que la
minime hernie discale vue à la première IRM soit à considérer comme élément
causal des cervicalgies et brachialgies, mais des évolutions chroniques
jusqu'à deux ans peuvent se voir dans les suites d'un traumatisme cervical
avec mécanisme de whiplash, mécanisme que l'on peut retenir comme à l'origine
des cervicalgies dans le cas présent ».

Par jugement du 30 novembre 2006, le Tribunal cantonal des assurances
sociales a partiellement admis le recours, dit que C.________ avait droit à
des prestations jusqu'au 28 août 2006 et renvoyé la cause à Hotela pour
calcul desdites prestations. S'appuyant sur l'avis de la doctoresse
H.________, il a considéré que l'assurée avait été victime d'un traumatisme
de type coup de lapin et admis l'existence d'un lien de causalité naturelle
entre les douleurs cervicales alléguées et l'accident pour une période de
deux ans.

C.
Hotela interjette un recours de droit administratif contre ce jugement dont
elle demande l'annulation en concluant à la confirmation de sa décision sur
opposition du 1er novembre 2005.

C. ________ conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé
publique a renoncé a se déterminer.

D.
Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
Le litige porte sur le droit de l'assurée à des prestations de
l'assurance-accidents au-delà du 18 octobre 2004, singulièrement sur le
caractère naturel (et adéquat) du lien de causalité entre les atteintes que
celle-ci a présentées au-delà de cette date et l'événement accidentel survenu
le 29 août 2004.

3.
Le jugement entrepris expose de manière exacte et complète les dispositions
légales et les principes jurisprudentiels relatifs à la nécessité d'une
atteinte à la santé et d'un rapport de causalité naturelle et adéquate entre
celle-ci et un accident pour que l'assureur-accidents soit tenu à fournir des
prestations (cf. ATF 129 V 177 consid. 3.1 p. 181, 402 consid. 4.3.1 p. 406,
119 V 335 consid. 1 p. 337, 118 V 286 consid. 1b et les références p. 289).
Il suffit donc d'y renvoyer.

4.
Hotela conteste le jugement de la cour cantonale, en tant qu'il retient que
l'assurée a subi lors de l'accident du 29 août 2004 un traumatisme de type
« coup de lapin ». Elle fait grief aux premiers juges de n'avoir pas discuté
ce point, quand bien même la recourante avait déclaré sans ambiguïté qu'elle
n'admettait pas « cet état de fait ». D'après la reourante, l'intimée a fait
une chute banale de sa propre hauteur et les circonstances de cet événement
ne sont en rien comparables aux situations dans lesquelles l'existence d'un
traumatisme de type « coup de lapin » a été admis (collision lors d'un
accident de la circulation routière avec choc arrière, pratique de certains
sports de combat comme la boxe ou la lutte). Par ailleurs, hormis les
cervicalgies, l'assurée n'avait présenté aucune des autres plaintes
consécutives au tableau clinique correspondant à un tel traumatisme.

5.
5.1 Il s'agit de savoir si, comme l'ont retenu les premiers juges, on est en
présence d'une lésion au rachis cervical par accident de type coup du lapin,
caractérisée par l'absence de preuve d'un déficit organique.

5.2 Selon la définition donnée dans le cadre d'une étude comparative
européenne et rapportée par Guy Chappuis (La sinistralité des lésions
bénignes du rachis cervical: une spécificité suisse? Un essai comparatif
CEA/AREDOC_CEREDOC in: REAS 2005, p. 211, not. p. 212), on entend par
traumatisme cervical bénin ou mineur une lésion du rachis cervical, causée
par des mécanismes d'accélération-décélération (dus par exemple à une forte
extension et/ou à une flexion plus ou moins accompagnée d'une torsion), sans
implication neurologique et sans atteinte des structures osseuses, nerveuses
ou discoligamentaires, pouvant entraîner une symptomatologie douloureuse au
repos ou lors des mouvements et s'accompagner d'une mobilité réduite de la
colonne cervicale.

5.3 D'après la jurisprudence, en matière de lésion du rachis cervical par
accident de type «coup du lapin», de traumatisme analogue ou de traumatisme
cranio-cérébral, sans preuve d'un déficit fonctionnel organique, l'existence
d'un lien de causalité naturelle entre l'accident et l'incapacité de travail
ou de gain doit en principe être reconnue en présence d'un tableau clinique
typique présentant de multiples plaintes (maux de tête diffus, vertiges,
troubles de la concentration, de la mémoire et de la vue, nausées,
fatigabilité, irritabilité, dépression, modification du caractère, etc.).
Encore faut-il que l'existence d'un tel traumatisme et de ses suites soit
dûment attestée par des renseignements médicaux fiables (ATF 119 V 335
consid. 1 p. 337, 117 V 359 consid. 4b p. 360).

5.4 En l'espèce, il est douteux vu le déroulement de l'accident que l'on soit
en présence d'un phénomène de ce type. Les doctoresses F.________ et
H.________ l'affirment, mais sans le démontrer. De toute façon, l'ensemble
des symptômes précités qui sont généralement attribuables à une lésion du
rachis cervical (tableau clinique) font défaut. On ne saurait donc présumer -
en référence à la jurisprudence en matière de traumatisme de type « coup du
lapin » -  qu'il existe un lien de causalité naturelle entre les plaintes non
objectivables de l'assurée et l'accident. Cette jurisprudence n'est pas
applicable en l'espèce.

6.
Il reste à se demander s'il existe des troubles objectivables qui soient en
relation de causalité naturelle avec l'accident. Il faut répondre par la
négative. La minime hernie discale n'est pas un élément causal des
cervicalgies et des brachialgies (cf. rapport de la doctoresse H.________ du
17 janvier 2006, p. 2). L'EMG préconisée par le docteur F.________ a été
pratiquée et n'a pas permis d'objectiver d'un point de vue neurologique les
douleurs (essentiellement des cervicalgies) dont de plaint l'assurée (même
référence). Quant au développement d'une capsulite rétractile signalée par la
doctoresse H.________, rien n'indique qu'elle soit en relation avec
l'accident. L'intimée ne le prétend du reste pas. La doctoresse H.________
attribue en effet les cervicalgies et les brachialgies à un traumatisme
cervical avec mécanisme de whiplash. Or, comme on l'a vu, l'existence d'un
traumatisme de ce type doit être écartée en l'espèce. On notera encore à ce
dernier propos que le docteur F.________, qui est neurochirirgien, a procédé
en novembre 2004 à une exploration fonctionnelle de l'épaule qui était alors
normale.

7.
En conclusion, il n'y pas d'atteinte objectivable qui puisse être en relation
de causalité naturelle avec l'accident. Il n'y avait pas de motif, pour les
premiers juges, de prolonger la durée du droit aux prestations au delà du 18
octobre 2004.

Le recours est donc bien fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du 30 novembre 2006 du Tribunal cantonal
des assurances sociales de la République et canton de Genève est annulé.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office
fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 20 novembre 2007

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:

Ursprung Berset