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Sozialrechtliche Abteilungen I 85/2007
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 7}
I 85/07

Arrêt du 14 avril 2008
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Gehring.

Parties
A.________,
recourante, représentée par Me Irène Wettstein Martin, avocate, rue du Simplon
18, 1800 Vevey,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan
8, 1800 Vevey,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances du
canton de Vaud du 30 août 2006.

Faits:

A.
A.________, née en 1957, mariée et mère de deux enfants nés en 1983 et 1991, a
exercé, outre ses tâches ménagères, une activité lucrative principale à temps
partiel comme femme de ménage, puis aide-concierge (40 %) à partir du 1er
septembre 1999. Parallèlement, elle a assuré une conciergerie d'immeuble depuis
1988.

A la suite de dorsalgies associées à des cervicalgies et à des céphalées, elle
a présenté une incapacité totale de travail dès le 28 février 2001. Le 3
octobre suivant, elle a déposé une demande de prestations de
l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une rente. Procédant à
l'instruction du dossier, l'office AI a recueilli divers avis médicaux
établissant que A.________ disposait d'une capacité résiduelle de travail de 50
% dans son ancien métier et de 70 % dans une activité lucrative adaptée à son
état de santé. Dans un questionnaire complémentaire du 18 octobre 2001, elle a
indiqué que sans atteinte à la santé elle exercerait une activité lucrative
principale à plein temps en sus de la tenue de son ménage.

Par décision du 23 novembre 2004 confirmée sur opposition le 24 août 2005,
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (l'office AI) a
rejeté la demande de rente, considérant que A.________ présentait un degré
d'invalidité (18 %) insuffisant pour lui ouvrir droit à la prestation.

B.
Par jugement du 30 août 2006 notifié le 14 décembre suivant, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a partiellement admis le recours formé par
l'assurée et lui a alloué un quart de rente à compter du 1er février 2002.

C.
A.________ a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement
dont elle a requis l'annulation en concluant, sous suite de frais et dépens, à
l'octroi d'un trois-quart de rente, subsidiairement d'une demi-rente, dès le
1er février 2002, voire le 1er janvier 2004.

L'office AI a conclu au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en
vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été
rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF;
ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
Le jugement entrepris porte sur des prestations de l'assurance-invalidité, de
sorte que le Tribunal fédéral examine uniquement si l'autorité cantonale de
recours a violé le droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir
d'appréciation, si les faits pertinents ont été constatés de manière
manifestement inexacte ou incomplète ou s'ils ont été établis au mépris de
règles essentielles de procédure (art. 132 al. 2 OJ [dans sa teneur selon le
ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI,
en vigueur depuis le 1er juillet 2006], en relation avec les art. 104 let. a et
b, ainsi que 105 al. 2 OJ).

3.
3.1 Se fondant sur les déclarations de la recourante (cf. questionnaire
complémentaire du 18 octobre 2001), les premiers juges ont admis que, sans
atteinte à la santé, elle aurait travaillé à 100 % comme aide-concierge et
aurait réalisé en 2002 un revenu sans invalidité de 56'740 fr. 15. Considérant
qu'elle n'aurait pas conservé son activité lucrative accessoire comme concierge
d'immeuble, ils ont dénié la prise en compte du gain corrélatif. A titre de
revenu d'invalide, ils se sont référés aux salaires statistiques ressortant de
l'ESS 2002 et ils ont retenu un montant de 30'106 fr. 50 correspondant au
salaire réalisé en 2002 par une femme exerçant à 70 % une activité lucrative
simple et répétitive, sous déduction d'un abattement de 10 % (47'788 fr. 20 x
70 % = 33'451 fr. 70 - 10 %). Procédant à la comparaison des revenus précités,
ils ont obtenu un degré d'invalidité de 47 %.
La recourante conteste le calcul du degré d'invalidité, en particulier la
comparaison des revenus à laquelle les premiers juges ont ainsi procédé. D'une
part, elle met en cause le gain sans invalidité retenu dans la mesure où il ne
comprend pas le revenu d'appoint perçu comme concierge d'immeuble. A cet égard,
elle fait valoir que sans atteinte à la santé, elle aurait poursuivi l'exercice
de cette activité lucrative accessoire en sus de la principale; qu'elle a du
reste déjà assumé par le passé une telle double charge; que ses enfants ont par
ailleurs atteint l'âge de participer aux tâches ménagères, la soulageant ainsi
d'un certain nombre d'entre elles; qu'enfin, la conciergerie d'immeuble en
question n'est pas particulièrement astreignante - le cahier des charges
corrélatif lui permettant notamment de s'organiser de manière autonome - de
sorte qu'elle s'avère parfaitement compatible avec l'exercice à 100 % d'une
activité lucrative principale. Partant, elle se prévaut d'un revenu sans
invalidité de 65'768 fr. par année (soit 56'740 fr. [comme aide-concierge à 100
%] + 9'028 fr. [comme concierge d'immeuble]) lui ouvrant droit à une
demi-rente. D'autre part, elle réclame un abattement du revenu d'invalide par
25 % au regard de son atteinte à la santé et de circonstances personnelles et
conclut à l'octroi d'un trois-quart de rente.

3.2 Selon la jurisprudence, le choix de l'une des trois méthodes d'évaluation
du degré d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus, méthode
mixte, méthode spécifique) dépend du statut du bénéficiaire potentiel de la
rente : assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, assuré exerçant
une activité lucrative à temps partiel, assuré non actif. On décidera que
l'assuré appartient à l'une ou l'autre de ces catégories en fonction de ce
qu'il aurait fait - les circonstances étant par ailleurs restées les mêmes - si
l'atteinte à la santé n'était pas survenue. En pratique, on tiendra compte de
l'évolution de la situation jusqu'au prononcé de la décision administrative
litigieuse, en admettant la reprise hypothétique d'une activité lucrative
partielle ou complète, si cette éventualité présente un degré de vraisemblance
prépondérante (ATF 125 V 146 consid. 2c p. 150, 117 V 194 consid. 3b et les
références).

3.3 En l'espèce, l'office AI, suivi en cela par les premiers juges, a déterminé
le degré d'invalidité de la recourante en application de la méthode générale de
comparaison des revenus, considérant que sans atteinte à la santé, elle aurait
travaillé à 100 % comme aide-concierge.
Cependant, cette dernière n'a jamais exercé d'activité lucrative à plein temps,
et cela même avant la naissance de son premier enfant, à l'aune des gains
annuels - activités lucratives principale et accessoire confondues - déclarés à
l'AVS, à savoir 5'203 fr. en 1981, 5'413 fr. en 1982, 3'000 fr. en 1986, 6'000
fr. en 1987, 13'349 fr. en 1988, 12'803 fr. en 1989, 13'299 fr. en 1990, 10'736
fr. en 1991, 7'728 fr. en 1992, 13'901 fr. en 1993, 15'753 fr. en 1994, 18'504
fr. en 1995, 15'332 fr. en 1996, 16'173 fr. en 1997, 15'791 fr. en 1998, 16'428
fr. en 1999 et 32'244 fr. en 2000 (cf. extrait du compte individuel).
Certes, les revenus annuels réalisés en 2000 (par 32'244 fr.) et de janvier à
août 2001 (par 24'822 fr. 90) s'avèrent-ils sensiblement plus élevés que les
précédents. Ils n'en rémunèrent toutefois pas moins une activité accessoire
particulièrement marginale (par 9'028 fr. comme concierge d'immeuble) et une
autre exercée à titre principal comme aide-concierge à temps partiel (40 %)
augmenté de 153,75 heures supplémentaires. Concentrées sur les mois d'août,
septembre, novembre et décembre 2000 ainsi que janvier à mars 2001, ces
dernières reflètent une surcharge provisoire de travail plutôt que la volonté
des parties au contrat de travail d'augmenter à long terme le taux d'occupation
de l'intéressée, cela d'autant qu'aucun élément au dossier ne laisse inférer
une telle éventualité et que dès le mois d'avril 2001 la recourante a repris
son taux d'occupation ordinaire de 40 %.

Cela étant, ni l'office AI, ni les premiers juges ne pouvaient déduire des
seules déclarations de la recourante (cf. questionnaire complémentaire du 18
octobre 2001) que sans atteinte à la santé elle aurait exercé une activité
lucrative principale à 100 %. Au regard de son parcours professionnel depuis
1981 tel qu'il ressort de l'extrait de son compte individuel et de son statut
personnel, en particulier familial, tel qu'il a évolué jusqu'au prononcé de la
décision administrative litigieuse, il y a lieu de considérer comme établi au
degré de vraisemblance prépondérante que si l'atteinte à la santé n'était pas
survenue, elle aurait poursuivi l'exercice d'une activité lucrative principale
comme aide-concierge à 40 % et accessoire comme concierge d'immeuble,
consacrant le reste de son temps à la tenue de son ménage. Dès lors, en
retenant que la recourante aurait exercé une activité lucrative à 100 % sans
atteinte à la santé, les premiers juges ont constaté les faits de manière
manifestement inexacte et violé le droit fédéral. En tant qu'assurée exerçant
une activité lucrative à temps partiel, il convient ainsi d'évaluer le degré
d'invalidité qu'elle présente selon la méthode mixte et non par comparaison des
revenus.

4.
4.1 En vertu de l'art. 28 al. 2ter LAI, lorsque l'assuré exerce une activité
lucrative à temps partiel, l'invalidité pour cette activité est évaluée selon
l'art. 16 LPGA. S'il accomplit ses travaux habituels, l'invalidité est fixée
selon l'al. 2bis pour cette activité-là. Dans ce cas, les parts respectives de
l'activité lucrative et de l'accomplissement des travaux habituels sont
déterminées; le taux d'invalidité est calculé d'après le handicap dont la
personne est affectée dans les deux domaines d'activité (méthode mixte
d'évaluation de l'invalidité). Ainsi, il faut évaluer d'une part l'invalidité
dans les travaux habituels par comparaison des activités (art. 27 RAI) et
d'autre part l'invalidité dans une activité lucrative par comparaison des
revenus (art. 28 al. 2 LAI); on pourra alors déterminer l'invalidité globale
d'après le temps consacré à ces deux champs d'activité. La part de l'activité
professionnelle dans l'ensemble des travaux de l'assuré est déterminée en
comparant l'horaire de travail usuel dans la profession en question et
l'horaire accompli par l'assuré valide; on calcule donc le rapport en pour-cent
entre ces deux valeurs. La part des travaux habituels constitue le reste du
pourcentage (ATF 130 V 395 consid. 3.3 et les références).

4.2 S'agissant de déterminer la perte de gain, il convient d'admettre que sans
invalidité la recourante aurait réalisé en 2002 un gain de 31'724 fr., soit
22'696 fr. à titre principal comme aide-concierge à 40 % (56'740 fr. x 40 %)
augmentés de 9'028 fr. à titre accessoire comme concierge d'immeuble. Quant au
revenu d'invalide, il a été fixé à 30'106 fr. par les premiers juges en
considération notamment d'un abattement de 10 % compte tenu du handicap et des
circonstances personnelles de l'assurée. Le grief de cette dernière selon
lequel cet abattement serait inapproprié et qu'il conviendrait de lui
substituer le taux maximal de 25 % ne saurait être retenu, les premiers juges
n'ayant pas outrepassé leur pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3
p. 399). Cela étant, il n'est pas possible en l'état du dossier d'arrêter le
revenu d'invalide à prendre en considération lors de la comparaison des gains
déterminants, dès lors que le temps consacré par la recourante à l'exercice
d'une activité lucrative par rapport à celui qu'elle vouerait à
l'accomplissement des travaux habituels n'a pas été établi. Il convient par
conséquent de renvoyer le dossier à l'office AI afin que celui-ci fixe la part
respective des champs d'activité précités, avant d'y adapter le revenu
d'invalide et de procéder à la comparaison des gains.

4.3 Par ailleurs, dès lors qu'aucune pièce au dossier n'établit les
empêchements subis par la recourante dans l'accomplissement des travaux
habituels, il est impossible d'évaluer le degré d'invalidité ménagère que
celle-ci présente. Sur ce point également, l'office AI devra procéder à un
complément d'instruction.

4.4 Sur le vu de ce qui précède, le jugement entrepris n'est pas conforme au
droit fédéral et le recours se révèle par conséquent bien fondé. La Cour de
céans précise qu'au regard de l'art. 107 LTF, le présent renvoi ne saurait
mettre en péril le quart de rente accordé à la recourante.

5.
La procédure, qui a trait à des prestations de l'assurance-invalidité est
onéreuse (art. 134 2ème phrase OJ), de sorte que l'intimé qui succombe doit en
supporter les frais (art. 156 al. 1 en relation avec l'art. 135 OJ).
Représentée par une avocate, la recourante a droit à une indemnité à titre de
dépens à la charge de l'intimé (art. 159 al. 1 en relation avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit administratif est admis en ce sens que le jugement du
Tribunal des assurances du canton de Vaud du 30 août 2006 et la décision sur
opposition de l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud du 24
août 2005 sont annulés, la cause étant renvoyée audit office pour instruction
complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
L'avance de frais effectuée par la recourante, d'un montant de 500 fr., lui est
restituée.

4.
L'intimé versera à la recourante la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe à la
valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

5.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera sur les dépens pour la
procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière
instance.

6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 14 avril 2008
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Meyer Gehring