Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 109/2007
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2007
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2007


I 109/07

Arrêt du 25 juin 2007
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

M.________,
recourant, représenté par Me Jacques Emery, avocat, boulevard Helvétique 19,
1207 Genève,

contre

Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève,
intimé.

Assurance-invalidité,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève du 20 décembre 2006.

Faits:

A.
A.a Né en 1963, M.________ a travaillé en qualité de maçon au service de la
société X.________ SA jusqu'au 20 janvier 1994, date à laquelle il a été mis
en arrêt de travail en raison de cervico-dorsalgies. Au cours de
l'instruction ouverte par l'Office cantonal genevois de
l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) après le dépôt d'une demande
de prestations de l'assurance-invalidité, le prénommé a effectué un stage au
Centre d'observation professionnelle de l'assurance-invalidité (COPAI) en
automne 1997. Présentant un conflit sous-acromial à l'épaule, il a par
ailleurs subi une intervention chirurgicale en juin 2000. Après avoir demandé
notamment l'avis de son médecin-conseil (note du docteur C.________ du 26
juin 2000), l'office AI a, par prononcé du 27 juillet 2000, fixé à 100 % le
degré d'invalidité de M.________ dès le 20 janvier 1995. Le 20 octobre
suivant, il l'a mis au bénéfice d'une rente entière d'invalidité à partir du
1er novembre 2000, avant de lui allouer, le 1er décembre 2000, une rente
entière pour la période du 1er janvier 1995 au 31 octobre 2000.

A.b Dans une procédure de révision du droit à la rente initiée en mai 2004,
l'office AI a recueilli divers avis médicaux et chargé le Centre
d'observation médicale (COMAI) d'une expertise, qui a été rendue le 17
janvier 2004. Se fondant sur les conclusions de celle-ci, qu'il a soumises à
l'appréciation de son Service médical régional (SMR; avis des docteurs
L.________ et H.________ du 8 février 2005), l'office AI a supprimé le droit
de l'assuré à une rente d'invalidité à partir du 1er décembre 2005, en
retenant que des mesures d'ordre professionnel ne se justifiaient pas
(décision du 31 octobre 2005). M.________ s'étant opposé à cette décision,
l'administration l'a confirmée par décision sur opposition du 7 juin 2006.

B.
Saisi d'un recours formé par l'assuré, le Tribunal cantonal des assurances
sociales de la République et canton de Genève l'a partiellement admis, par
jugement du 20 décembre 2006. Confirmant la décision sur opposition du 7 juin
2006 en tant qu'elle supprimait la rente d'invalidité (chiffre 4 du
dispositif), il l'a annulée en ce qu'elle refusait des mesures d'ordre
professionnel.

C.
M.________ a interjeté un recours de droit administratif, en concluant en
substance au maintien du droit à une rente d'invalidité. Il a par ailleurs
requis le bénéfice de l'assistance judiciaire.

L'office AI a conclu au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
Le jugement entrepris porte sur des prestations de l'assurance-invalidité, de
sorte que le Tribunal fédéral examine uniquement si l'autorité cantonale de
recours a violé le droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir
d'appréciation, si les faits pertinents ont été constatés de manière
manifestement inexacte ou incomplète ou qu'ils ont été établis au mépris de
règles essentielles de procédure (art. 132 al. 2 OJ [dans sa teneur selon le
ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la
LAI, en vigueur depuis le 1er juillet 2006], en relation avec les art. 104
let. a et b, ainsi que 105 al. 2 OJ).

3.
Le jugement entrepris expose de manière exacte et complète la réglementation
légale sur la révision (art. 17 al. 1 LPGA) et la reconsidération (art. 53
al. 2 LPGA), ainsi que la jurisprudence concernant les conditions auxquelles
le juge peut confirmer une décision de révision de l'administration au motif
substitué que la décision de rente initiale était sans nul doute erronée (ATF
125 V 368 consid. 2 p. 369). Il suffit d'y renvoyer.

4.
La juridiction cantonale a admis le droit du recourant à des mesures de
reclassement d'ordre professionnel, tandis qu'elle a nié que les conditions
d'une révision au sens de l'art. 17 LPGA étaient remplies. Elle a en revanche
retenu que les conditions d'une reconsidération de la décision du 20 octobre
2000 étaient réalisées et confirmé, pour ce motif substitué, la suppression
de la rente à partir du 1er décembre 2005. Seul ce dernier point est contesté
par le recourant, si bien qu'il convient d'examiner si la décision du 20
octobre 2000 était manifestement erronée, l'importance notable de sa
rectification au sens de l'art. 53 al. 2 LPGA ne faisant aucun doute pour les
parties.

4.1 Les premiers juges ont considéré que la décision initiale de l'intimé
reposait sur une appréciation des pièces médicales manifestement erronée, dès
lors que l'administration avait reconnu au recourant une incapacité de
travail entière dans toute activité, sans évaluer sa situation après
l'intervention chirurgicale de juin 2000. Celle-ci devait, de l'avis des
docteurs V.________, médecin traitant, et C.________, apporter une
amélioration qui eût permis la mise en oeuvre d'une capacité de travail
résiduelle de 70 %. Par ailleurs, l'office AI avait ignoré l'évaluation du
COPAI, selon laquelle l'assuré avait conservé une capacité de travail avec un
rendement de 70 % dans une activité adaptée, de même qu'il n'avait pas
procédé à une comparaison des revenus qui s'imposait pourtant au regard de
l'art. 28 al. 2 aLAI (cf. pour la situation après le 31 décembre 2003, l'art.
16 LPGA auquel renvoie l'art. 28 al. 2 LAI). Aussi, la juridiction cantonale
a-t-elle examiné les répercussions de la capacité de travail résiduelle du
recourant (avec un rendement de 70 %) sur sa situation économique. Elle a
déduit de la comparaison des revenus avant et après invalidité, compte tenu
d'un abattement de 15 % sur le revenu d'invalide, qu'il présentait un taux
d'invalidité de 31,4 %. De ce fait, la décision du 20 octobre 2000 par
laquelle le recourant avait été mis au bénéfice d'une rente d'invalidité
était manifestement erronée.

4.2 Le recourant conteste que la décision initiale fût entachée d'une erreur
manifeste. Ses arguments ne sont toutefois pas suffisants pour remettre en
cause les conclusions auxquelles est arrivée la juridiction cantonale.
Quoiqu'il en dise, l'avis du docteur C.________ fondé sur les renseignements
que celui-ci a pris auprès de la doctoresse V.________ (cf. note du 26 juin
2000) suffisait à admettre la probabilité qu'après une période de
convalescence de quelques mois suivant l'intervention chirurgicale du début
du mois de juin 2000, le recourant serait en mesure de de mettre à profit une
capacité résiduelle de travail avec un rendement réduit à 70 %. Ayant revu
son patient après l'intervention du 8 juin 2000, la doctoresse V.________ a
expliqué au médecin du SMR qu'après trois mois de convalescence, elle
l'estimait capable de travailler dans les postes décrits lors du stage du
COPAI. Au regard de ces constatations médicales, une nouvelle évaluation de
l'état de santé du recourant après une période de convalescence s'imposait,
mesure que l'intimé a précisément omis de mettre en oeuvre avant de rendre sa
décision. Quant à l'argument selon lequel le docteur L.________ du SMR aurait
conclu que le taux d'invalidité du recourant n'avait pas changé suffisamment
pour modifier son droit à la rente en septembre 2000, pour se contredire par
la suite en estimant que la décision d'allocation d'une rente en 2000 n'était
pas étayée, il repose sur une lecture incomplète du dossier. On ne saurait
qualifier de contradictoire l'appréciation du docteur L.________, dès lors
qu'il a toujours été d'avis que l'allocation d'une rente entière d'invalidité
ne tenait pas compte de la capacité résiduelle effective du recourant.

Enfin, c'est en vain que M.________ fait valoir que le dossier à disposition
de l'office AI et de la juridiction cantonale serait incomplet. Compte tenu
des nombreux rapports médicaux au dossier, en particulier celui des experts
du COMAI et des médecins du SMR qui se prononcent de manière circonstanciée
sur sa situation, une nouvelle évaluation de la capacité de travail du
recourant auprès du COPAI n'est pas nécessaire.

4.3 Cela étant, les griefs soulevés par le recourant en ce qui concerne les
montants retenus pas l'autorité cantonale de recours au titre de salaire sans
et avec invalidité en application de la méthode de la comparaison des revenus
sont bien fondés.

4.3.1 Tout d'abord, pour déterminer le revenu sans invalidité, la juridiction
cantonale s'est référée, en l'absence de données établies par l'ancien
employeur du recourant tombé en faillite, aux statistiques de l'Enquête sur
la structure des salaires de l'Office fédéral de la statistique (ESS). Plus
précisément, elle s'est fondée sur le salaire obtenu par les hommes exerçant
une activité simple et répétitive dans le domaine de la construction - ce que
le recourant ne remet pas en cause - et retenu le montant de 4'608 fr. par
mois, soit un revenu annuel de 55'296 fr. Comme le fait valoir à bon droit le
recourant, elle n'a cependant pas tenu compte du fait que les salaires
mensuels standardisés de l'ESS (tableaux de type A) sont fondés sur un
horaire hebdomadaire de 40 heures, tandis que l'horaire hebdomadaire usuel de
travail dans les entreprises dans le domaine de la construction en 2000
comportait 42 heures (Die Volkswirtschaft, 1-2/2007, p. 94, B 9.2). Il s'agit
là d'un facteur dont la jurisprudence impose de tenir compte lors de
l'application des tableaux ESS de type A (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb p. 77),
de sorte que la juridiction cantonale aurait dû adapter le montant de
55'296 fr. à cet horaire usuel de travail - ce qui aurait donné
58'060 fr. 80.

4.3.2 S'agissant ensuite du revenu d'invalide, l'autorité cantonale de
recours a pris comme référence le salaire de 4'437 fr., correspondant à celui
versé à des hommes pour des activités simples et répétitives dans les
secteurs de la production et des services en 2000 (TA1, ESS 2000), qu'elle a
adapté à l'horaire usuel de travail de 41,9 heures (tous domaines confondus),
pour obtenir un montant de 4'647 fr. 75 par mois, soit un salaire annuel de
55'773 fr. Retenant ensuite que le rendement du recourant était diminué à 70
%, les premiers juges ont constaté que «compte tenu de cette diminution de
rendement, il résulte un salaire de 44'619 fr.». Cette constatation est
toutefois manifestement inexacte puisque 70 % de 55'773 donne 39'041.

4.3.3 Compte tenu des vices qui entachent la comparaison des revenus
effectuée en instance cantonale, il convient de s'écarter des constatations
des premiers juges et d'effectuer le calcul du taux d'invalidité en comparant
un revenu sans invalidité de 58'060 fr. au salaire d'invalide de 39'041 fr.
en prenant en considération l'abattement de 15 % appliqué en instance
cantonale à ce revenu (33'184 fr.). Sur ce dernier point, le grief du
recourant selon lequel cet abattement «ne paraît pas adéquat» au regard de sa
situation personnelle et un taux de 25 % aurait dû être appliqué n'est pas
pertinent. L'étendue de l'abattement dans le cadre de la fixation du revenu
d'invalide en raison de circonstances particulières relève du pouvoir
d'appréciation de la juridiction cantonale (ATF 132 V 393 consid. 3.3 p.
399). Or, l'argumentation du recourant ne laisse pas apparaître que celle-ci
aurait abusé de ce pouvoir. Dans la mesure au demeurant où le recourant
invoquerait l'inopportunité de la décision des premiers juges sur cette
question, son grief n'est pas admissible dans le cadre du recours de droit
administratif (supra consid. 2).

La comparaison des revenus ainsi déterminés ([58'060 fr. -
33'184 fr.] x 100/58'060 fr.) donne un taux d'invalidité arrondi au pour-
cent supérieur (voir ATF 130 V 121) de 43 %.

4.4 En conséquence de ce qui précède, il apparaît que ce n'est pas le
principe même du versement d'une rente d'invalidité qui était manifestement
erroné dans la décision initiale, comme l'ont considéré les premiers juges,
mais l'allocation d'une rente entière d'invalidité. La rectification de cette
décision conduit à supprimer, par substitution de motifs, la rente entière
d'invalidité allouée au recourant et la remplacer par le droit à un quart de
rente (compte tenu de l'échelonnement du droit à la rente prévu à l'art. 28
al. 1 LAI), à partir du 1er janvier 2006 (art. 88bis al. 2 let. a RAI).

Partant, le recours s'avère bien fondé.

5.
La présente procédure, qui a trait à des prestations de
l'assurance-invalidité, est onéreuse (art. 134 2ème phrase OJ). L'office AI
qui succombe doit en supporter les frais (art. 156 al. 1 en corrélation avec
l'art. 135 OJ). Par ailleurs, obtenant gain de cause et représenté par un
avocat, le recourant a droit à des dépens à la charge de l'intimé (art. 156
al. 1 OJ). Sa requête d'assistance judiciaire est dès lors sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le chiffre 4 du dispositif du jugement du Tribunal
des assurances sociales de la République et canton de Genève, ainsi que la
décision de l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité du 7 juin
2005 sont annulés. Le recourant a droit à un quart de rente d'invalidité qui
remplace le droit à une rente entière à partir du 1er janvier 2006.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge de
l'intimé.

3.
L'intimé versera au recourant la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe à la
valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 25 juin 2007

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière: