Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 85/2007
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9C_85/2007

Arrêt du 1er février 2008
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Berthoud.

E. ________,
recourante, représentée par Me Karin Baertschi, avocate, rue du 31 Décembre
41, 1207 Genève,

contre

Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève,
intimé.

Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et Canton de Genève du 6 février 2007.

Faits:

A.
E. ________, née en 1961, a travaillé en qualité d'aide soignante jusqu'au
31 octobre 2002. Souffrant notamment de fibromyalgie, de hernies discales et
d'une affection des nerfs des tunnels carpiens, elle s'est annoncée à
l'assurance-invalidité le 20 décembre 2002.

L'Office cantonal de l'assurance-invalidité du canton de Genève (l'office AI)
a confié un mandat d'expertise pluridisciplinaire au Centre d'observation
médicale de l'AI. Dans leur rapport du 27 février 2004, les doctoresses
S.________, rhumatologue, et L.________, psychiatre, ont posé les diagnostics
de lombo-sciatalgie S1 droite chronique depuis mai 2001, de hernie discale
paramédiane droite L5-S1, de tunnel carpien à droite depuis décembre 2001, et
de status post cure de tunnel carpien à gauche en janvier 2003, ces
affections ayant une répercussion sur la capacité de travail. Elles ont aussi
fait état d'un syndrome douloureux somatoforme persistant (incluant la
fibromyalgie) depuis 1995 environ, ainsi que d'une personnalité à traits
obsessionnels, sans répercussion sur la capacité de travail. Les expertes ont
précisé que l'activité habituelle d'aide-soignante n'était plus exigible en
raison des atteintes somatiques, mais qu'en revanche l'assurée conservait une
capacité de travail entière sans diminution de rendement dans une activité
légère, plutôt assise, avec possibilité de changer occasionnellement de
position et sans mouvements trop répétés des poignets et des mains. Quant aux
atteintes psychiques, elles n'avaient pas d'incidence sur la capacité de
travail.

L'office AI a ordonné une évaluation des capacités professionnelles de
l'assurée. Un stage a eu lieu du 2 août au 16 octobre 2005 et n'a pu être
mené à terme. Les capacités physiques de l'assurée se sont révélées
compatibles avec une activité légère, permettant l'alternance des positions
et évitant les gestes répétitifs (rapport du Centre d'intégration
professionnelle O.________, du 21 octobre 2005).

Comme une aggravation de l'état de santé de l'assurée avait été invoquée,
l'office AI a confié un second mandat d'expertise pluridisciplinaire au
COMAI. Dans leur rapport d'expertise du 23 juin 2006, les docteurs
U.________, rhumatologue, et R.________, psychiatre, ont attesté que la
situation clinique n'avait pas changé du point de vue somatique depuis
l'évaluation que leurs collègues  avaient réalisée en février 2004. En
revanche, la symptomatologie s'était aggravée sur le plan psychique et
l'assurée présentait désormais les critères d'un épisode dépressif avec
syndrome somatique d'intensité au moins moyenne, sans que la dénomination de
sévère ne puisse être donnée. Un trouble dépressif récurrent ne pouvait pas
être retenu. Selon les experts, la capacité de travail et le rendement
étaient réduits. Ils ont ajouté que la capacité motivationnelle était
diminuée en raison du trouble dépressif, et si en 2004 le tableau paraissait
typique d'un trouble somatoforme douloureux sans comorbidité psychiatrique,
le tableau dépressif prédominait en 2006. Pour eux, il était difficile
d'imaginer une capacité de travail significative dans le circuit économique
normal, qu'ils considéraient dès lors comme nulle.

Dans un avis du 28 juillet 2006, le docteur B.________, psychiatre au SMR, a
estimé que l'assurée présentait un syndrome somatoforme douloureux
persistant, sans aucune comorbidité psychiatrique ni aucun critère de
gravité. Comme l'assurée se trouvait en mesure de surmonter ses douleurs, sa
capacité de travail restait entière dans une activité adaptée.

Par décision du 20 septembre 2006, l'office AI a fixé le taux d'invalidité à
18 % et rejeté la demande de prestations (mesures d'ordre professionnel et
rente).

B.
E.________ a formé une opposition contre cette décision, en concluant au
versement d'une rente entière d'invalidité.

L'office AI a transmis l'écriture de l'assurée au Tribunal des assurances
sociales du canton de Genève comme objet de sa compétence. Par jugement du
6 février 2007, le Tribunal a rejeté le recours.

C.
E.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce
jugement dont elle demande l'annulation, avec suite de dépens, en concluant
au renvoi de la cause à l'office intimé afin qu'il lui alloue une rente
entière d'invalidité.

L'intimé et l'Office fédéral des assurances sociales n'ont pas été invités à
se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral statue sur la
base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) et peut
rectifier ou compléter d'office les constatations de celle-ci si les faits
ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au
sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

Au regard de la réglementation sur le pouvoir d'examen prévue par la LTF, il
convient d'examiner sur la base des griefs soulevés dans le recours formé
devant le Tribunal fédéral si le jugement entrepris viole (notamment) le
droit fédéral dans l'application des règles pertinentes du droit matériel et
de preuve (art. 95 let. a LTF), y compris une éventuelle constatation des
faits contraire au droit (art. 97 al. 1, art. 105 al. 2 LTF). En revanche,
sous l'empire de la LTF, il n'y a pas lieu de procéder à un libre examen du
jugement attaqué sous l'angle des faits (sauf si le recours est dirigé contre
une décision concernant l'octroi ou le refus de prestations en espèces de
l'assurance-accidents et de l'assurance militaire; art. 97 al. 2 LTF). De
même, n'y a-t-il pas à vérifier l'exercice par la juridiction cantonale de
son pouvoir d'appréciation sous l'angle de l'opportunité (selon les principes
développés dans l'ATF 126 V 75 consid. 6 p. 81 en relation avec la version en
vigueur du 1er juillet au 31 décembre 2006 de l'art. 132 de la loi fédérale
d'organisation judiciaire [OJ], abrogée depuis).

En ce qui concerne l'évaluation de l'invalidité, les principes relatifs au
pouvoir d'examen développés dans l'ATF 132 V 393 consid. 3 p. 397 ss (en
relation avec l'art. 132 OJ dans sa version en vigueur du 1er juillet au 31
décembre 2006) continuent à s'appliquer pour distinguer les constatations de
fait de l'autorité précédente (qui lient en principe le Tribunal fédéral) de
l'application du droit par celle-ci (question qui peut être examinée
librement en instance fédérale). Conformément à ces principes, les
constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé,
la capacité de travail de l'assuré et l'exigibilité relèvent d'une question
de fait et ne peuvent être contrôlées que sous un angle restreint (ATF 132 V
393 consid. 3.2 p. 398).

2.
Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité.

3.
Le jugement entrepris expose correctement les règles légales et les principes
jurisprudentiels relatifs à la notion d'invalidité et à son évaluation, ainsi
que la jurisprudence rendue en matière de troubles somatoformes et sur la
valeur probante des pièces médicales. Il suffit donc d'y renvoyer.

Pour rejeter le recours, les juges cantonaux ont constaté, à la lecture des
conclusions de l'expertise du COMAI de 2006, que la recourante souffrait d'un
épisode dépressif moyen - et non pas sévère - que le COMAI a du reste
qualifié de non récurrent. Ils en ont déduit que cela suffisait pour exclure
la présence manifeste d'une comorbidité psychiatrique importante, tant sous
l'angle de l'acuité que de la durée, au sens de la jurisprudence. Cette
solution se justifiait d'autant plus, à leur avis, que les états dépressifs
(pris en tant que comorbidité psychiatrique) constituent généralement des
manifestations (réactives) d'accompagnement des troubles somatoformes
douloureux, de sorte qu'ils ne sauraient faire l'objet d'un diagnostic
séparé, sauf à présenter les caractères de sévérité susceptibles de les
distinguer sans conteste d'un tel trouble. Quant aux autres critères
jurisprudentiels fondant un pronostic défavorable à propos de l'exigibilité
d'une reprise d'une activité professionnelle, les juges cantonaux ont
constaté qu'ils n'étaient pas remplis.

Dans ces conditions, le Tribunal cantonal a décidé de s'écarter des
conclusions des médecins du COMAI (expertise du 23 juin 2006) et a retenu que
la recourante ne présentait pas d'incapacité de travail issue d'un trouble
somatoforme douloureux. Elle était ainsi en mesure de reprendre une activité
professionnelle à temps complet dans une activité adaptée, tenant compte des
contre-indications formulées par les experts au point de vue rhumatologique.

4.
La recourante fait grief au Tribunal des assurances sociales d'avoir dénié
toute valeur probante au rapport d'expertise du 23 juin 2006, et de s'être
substitué sans droit aux experts de ce centre en considérant qu'elle ne
présenterait pas de comorbidité psychiatrique suffisamment grave. A son avis,
ce rapport satisfait pleinement aux réquisits jurisprudentiels relatifs à la
valeur probante de tels documents, de même qu'il établit clairement et de
façon indiscutable qu'elle présente une incapacité totale de travail dans
n'importe qu'elle activité, cela essentiellement en raison de ses atteintes
psychiques.

Bien que la recourante ne se prévale pas formellement de l'un des motifs de
recours consacrés aux art. 95 ss LTF et qu'elle n'énonce pas les dispositions
topiques applicables, on peut déduire de son mémoire de recours qu'elle
invoque une violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), résultant de
l'application erronée des règles jurisprudentielles relatives à la force
probante des rapports médicaux (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352).

5.
Contrairement à l'opinion de la recourante, le Tribunal des assurances n'a
pas dénié toute valeur probante au rapport d'expertise du 23 juin 2006
lorsqu'il a déclaré qu'il s'écartait de l'appréciation de la capacité de
travail des médecins du COMAI. Le Tribunal s'est bien plutôt appuyé sur leurs
avis pour statuer, comme cela ressort du consid. 7 de son jugement, où il a
qualifié les deux expertises de complètes et convaincantes.

En réalité, les premiers juges ont rejeté le recours pour un motif juridique,
que la recourante n'a du reste pas abordé. De manière à lier le Tribunal
fédéral, ils ont constaté d'une part que la recourante présentait un trouble
somatoforme douloureux persistant ainsi qu'un épisode dépressif moyen. Les
juges cantonaux en ont déduit à juste titre que cela excluait la présence
d'une comorbidité psychiatrique importante, tant sous l'angle de l'acuité que
de la durée (consid. 9c), avant de constater que les autres critères
consacrés par la jurisprudence qui fondent un pronostic défavorable en ce qui
concerne l'exigibilité d'une reprise d'activité professionnelle n'étaient pas
non plus réalisés (consid. 9d et 9e). Dans ces conditions, c'est à bon droit
que le Tribunal des assurances a admis que l'appréciation de la capacité de
travail des médecins du COMAI n'était juridiquement pas déterminante, car en
application des règles jurisprudentielles relatives au caractère invalidant
des troubles somatoformes (voir les consid. 8a, 8b, et singulièrement 9c) les
affections psychiques de la recourante ne pouvaient pas être qualifiées
d'invalidantes au sens de la LAI (consid. 9f).

Quant au degré d'invalidité pris en tant que tel, la recourante ne conteste
pas qu'il n'atteint pas le seuil de 40 % ouvrant droit à la rente qu'elle
souhaite obtenir de l'intimé. Le recours est infondé.

6.
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et Canton de Genève, à l'Office fédéral
des assurances sociales et à la Caisse cantonale genevoise de compensation.

Lucerne, le 1er février 2008

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Meyer Berthoud