Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 818/2007
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_818/2007

Arrêt du 11 novembre 2008
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Piguet.

Parties
Office cantonal AI du Valais,
avenue de la Gare 15, 1951 Sion,
recourant,

contre

O.________,
intimée, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat, Service juridique,
Fédération suisse pour l'intégration des handicapés, place du Grand-Saint-Jean
1, 1003 Lausanne.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances du canton du
Valais du 9 octobre 2007.

Faits:

A.
O.________ a successivement travaillé en qualité d'ouvrière d'usine, d'aide de
cuisine, d'ouvrière agricole, de lingère et de nettoyeuse. Alléguant souffrir
de douleurs aux deux genoux, aux épaules, au bras gauche et au dos, elle a
déposé le 20 octobre 2003 une demande de prestations de l'assurance-invalidité.
Dans le cadre de l'instruction du dossier, l'Office cantonal AI du Valais
(ci-après: l'office AI) a recueilli les avis des médecins traitants de
l'assurée, les docteurs P.________ et H.________ (rapports des 26 décembre 2003
et 19 avril 2004), lesquels ont signalé la présence d'une chondropathie
rotulienne bilatérale et d'un trouble somatoforme douloureux (fibromyalgie).
Compte tenu des diagnostics indiqués, l'office AI a confié la réalisation d'une
expertise pluridisciplinaire au Centre d'Expertises Médicales de l'Hôpital
X.________. Dans leur rapport du 17 janvier 2005, les experts ont retenu les
diagnostics de gonarthrose bilatérale avec syndrome fémoro-patellaire depuis
1998, de trouble dissociatif (de conversion) mixte, de confusion psychogène et
d'épisode dépressif sévère sans symptôme psychotique, ainsi que celui sans
répercussion sur la capacité de travail de fibromyalgie; s'il n'existait pas de
limitation somatique à l'exercice d'une profession adaptée, la gravité de
l'état psychique de l'assurée était suffisante pour conclure à une incapacité
de travail de 70 % dans toute activité.
Le Service médical régional de l'AI (SMR) a également examiné l'assurée. Dans
son rapport du 23 décembre 2005, le SMR a retenu les diagnostics de gonarthrose
bicompartimentale (arthrose interne et fémoro-patellaire) à gauche, de
gonarthrose bicompartimentale (arthrose externe et fémoro-patellaire) à droite
et de lombalgies communes, ainsi que celui - sans répercussion sur la capacité
de travail - de syndrome douloureux somatoforme persistant; la capacité de
travail était complète dans toute activité adaptée, aucun élément ne permettant
de retenir l'existence d'une affection psychique à caractère invalidant.
Se fondant sur les conclusions de cette seconde évaluation, l'office AI a, par
décisions des 4 et 5 janvier 2006, confirmées sur opposition le 1er juin
suivant, nié à l'assurée le droit à une rente d'invalidité et à un
reclassement, faute pour celle-ci de présenter une incapacité de gain
suffisante pour donner droit à des prestations.

B.
O.________ a déféré la décision sur opposition au Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais, en concluant à l'octroi d'une rente
d'invalidité et de mesures de réadaptation. En cours d'instruction, la
juridiction cantonale a confié la réalisation d'une expertise psychiatrique au
docteur S.________. Dans son rapport du 10 avril 2007, ce médecin a
diagnostiqué un épisode dépressif moyen faisant suite à un trouble de
l'adaptation durant plus de six mois, des troubles de la personnalité (troubles
alexithymiques et stratégies de faire face [coping] inefficientes comme
somatisation/conversion, regression et déni) et un syndrome douloureux
somatoforme persistant; la capacité résiduelle de travail s'élevait à 33 % et
pourrait atteindre 50 % moyennant une prise en charge thérapeutique adaptée. Au
regard des conclusions concordantes des expertises réalisées par X.________ et
par le docteur S.________, le Tribunal cantonal des assurances a, par jugement
du 9 octobre 2007, admis le recours, annulé la décision sur opposition du 1er
juin 2006 et renvoyé le dossier à l'office AI pour examen sur la base d'une
capacité de travail exigible de 30 % des autres conditions du droit aux
prestations.

C.
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
dont il demande l'annulation. Il conclut principalement au renvoi de la cause
au Tribunal cantonal des assurances du canton du Valais pour nouvelle décision,
subsidiairement au renvoi de la cause à ce dernier pour instruction
complémentaire et nouvelle décision et, plus subsidiairement encore, à la
confirmation de sa décision sur opposition du 1er juin 2006.
O.________ conclut à l'irrecevabilité du recours, tandis que l'Office fédéral
des assurances sociales en propose l'admission.
Considérant en droit:

1.
1.1 En tant qu'il renvoie le dossier à l'administration pour qu'elle rende une
nouvelle décision, le jugement entrepris doit être qualifié de décision
incidente qui ne peut être attaquée qu'aux conditions de l'art. 93 LTF (ATF 133
V 477 consid. 4.2 p. 482). Dans le cas particulier, le Tribunal cantonal des
assurances a fixé à 70 % le taux d'incapacité de travail de l'assurée et
considéré qu'il appartenait à l'office recourant de calculer le degré
d'invalidité et d'examiner le droit aux prestations d'invalidité. Cela étant,
le jugement attaqué contient une constatation de fait impérative destinée à
l'autorité inférieure qui ne lui laisse plus aucune latitude de jugement pour
la suite de la procédure, de sorte qu'elle est tenue de rendre une décision
qui, selon elle, est contraire au droit fédéral. En cela, elle subit un
préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, si bien qu'il y a
lieu d'entrer en matière sur son recours (cf. ATF 133 V 477 consid. 5.2 p.
483).

1.2 Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du
droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral
applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les
arguments de la partie recourante ou par la motivation de l'autorité
précédente. Toutefois, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42
al. 1 et 2 LTF - sanctionnée par l'irrecevabilité des recours dont la
motivation est manifestement insuffisante (art. 108 al. 1 let. b LTF) -, le
Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués. Il fonde son
raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance
(art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte
ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La
partie recourante qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de
manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont
réalisées sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération.

2.
2.1 Dans une première série de griefs de nature formelle, tirés de la violation
des garanties générales de procédure de l'art. 29 al. 1 et 2 Cst., l'office
recourant se plaint d'un déni de justice ainsi que d'un défaut de motivation du
jugement cantonal.

2.2 Au regard de la décision sur opposition et des conclusions du recours
cantonal, le litige portait en instance cantonale aussi bien sur le droit de
l'assurée à des mesures d'ordre professionnel que sur le droit à une rente
d'invalidité. En se prononçant sur l'existence et l'étendue d'une incapacité de
travail, l'autorité cantonale de recours a statué sur l'un des aspects de
l'objet du litige, à savoir l'une des conditions préalables à la reconnaissance
d'une invalidité. Si on peut s'étonner qu'elle n'ait ensuite pas examiné les
répercussions économiques de l'incapacité de travail ainsi reconnue, on ne
saurait cependant lui reprocher d'avoir commis un déni de justice formel en
renvoyant le dossier à l'administration (sur cette notion, voir ATF 117 Ia 116
consid. 3a p. 117). En raison du principe dit de la priorité de la réadaptation
sur la rente, l'allocation d'une rente d'invalidité n'entre en considération
que si l'intéressé n'est pas, ou pas encore, susceptible d'être réadapté
professionnellement en raison de son état de santé (ATF 121 V 190 consid. 4 p.
192). Dans le cas particulier, l'office recourant avait dénié à l'assurée le
droit à une mesure de reclassement, au motif qu'elle ne présentait pas un taux
d'invalidité suffisant pour donner droit à cette prestation, sans se déterminer
sur les autres conditions de ce droit. Or, vu le taux d'incapacité de travail
retenu (70 %), les premiers juges pouvaient partir de l'idée que l'assurée
atteignait le seuil minimum fixé par la jurisprudence pour l'ouverture du droit
à des mesures de réadaptation d'ordre professionnel (diminution de la capacité
de gain de 20 % environ; ATF 124 V 108 consid. 2b p. 110). A ce stade de la
procédure, ils n'avaient en revanche pas à vérifier si le refus de la mesure de
reclassement pouvait être confirmé par substitution de motifs, puisque de tels
motifs - par exemple, le défaut d'aptitude objective et subjective de
l'intéressée - n'avaient pas été formellement examinés par l'administration
dans sa décision, ni partant discutés par les parties.

2.3 La violation du droit d'entendu pour défaut de motivation de la décision
attaquée (sur cette notion, voir ATF 133 III 439 consid. 3.3 p. 445 et les
références) est un grief qui n'est également pas fondé en l'espèce, dans la
mesure où la juridiction cantonale a indiqué les motifs qui l'ont conduite à
retenir que l'assurée présentait une incapacité de travail de 70 %. L'office
recourant ne soutient d'ailleurs pas qu'il n'aurait pas été en mesure de
discerner la portée de la décision attaquée et de l'attaquer en connaissance de
cause. En contestant la valeur probante du rapport d'expertise établi par le
docteur S.________ et en invoquant une mauvaise application de la jurisprudence
en matière de troubles somatoformes, le recourant reproche en réalité à la
juridiction cantonale, sous couvert d'une violation du droit d'être entendu,
d'avoir fait preuve d'arbitraire dans la constatation des faits et
l'appréciation des preuves et d'avoir violé le droit fédéral. Il s'agit-là de
griefs qu'il convient d'examiner avec le fond du litige.

3.
3.1 Sur le fond, l'office recourant reproche au Tribunal cantonal des
assurances d'avoir procédé à une constatation manifestement inexacte et
incomplète des faits en se fondant sur le rapport établi le 10 avril 2007 par
le docteur S.________. La juridiction cantonale n'aurait en effet pas tenu
compte du fait que l'état de santé psychique de l'assurée s'était péjoré à
compter de l'automne 2006, soit postérieurement à la décision litigieuse, et
que les conclusions de l'expert étaient vraisemblablement influencées par cet
état de fait. Il estime également que la juridiction cantonale aurait violé le
droit fédéral en n'examinant pas la situation à la lumière des critères posés
par la jurisprudence en matière de troubles somatoformes douloureux. Un tel
examen aurait en effet permis de constater que l'assurée était encore capable
de fournir l'effort de volonté suffisant pour surmonter ses douleurs et
reprendre une activité légère et adaptée.

3.2 Se fondant sur les conclusions concordantes et probantes résultant des
expertises réalisées par X.________ et le docteur S.________, les premiers
juges ont retenu que la capacité de travail de l'assurée était à l'heure
actuelle de 30 %. Bien que les diagnostics retenus par le docteur S.________
divergeassent de ceux de X.________, les experts avaient relevé que l'assurée
était fortement limitée par une comorbidité psychiatrique. Même si le premier
nommé était d'avis que cette comorbidité n'était pas d'une acuité importante,
elle n'en nécessitait pas moins d'après lui un traitement adéquat avant que la
reprise d'une activité à plus de 33 % puisse être envisagée. Il apparaissait
par ailleurs peu vraisemblable que l'état de santé de l'assurée se fût amélioré
pendant la période séparant la première et la seconde expertise. Le docteur
S.________ avait en effet relevé que l'incapacité de travail avait été de 20 %
au moins depuis 1998 et, l'assurée n'ayant depuis lors jamais bénéficié d'un
traitement idoine, n'avait fait que s'accroître depuis lors.

3.3 Les critiques de l'office recourant ne font pas apparaître le résultat de
l'appréciation des preuves à laquelle a procédé la juridiction cantonale comme
insoutenable. En tant qu'il affirme que l'état de santé de l'assurée se serait
aggravé à l'automne 2006 et que, partant, sa capacité de travail était
certainement supérieure avant la survenance de cette aggravation, il ne saurait
être suivi. Son point de vue ne repose en effet sur aucun élément précis qui
plaiderait incontestablement dans le sens d'une évolution de l'état de santé
durant la période séparant les deux expertises. Tout au plus ressort-il de
l'anamnèse dressée par le docteur S.________ que le médecin traitant de
l'assurée l'avait trouvée à cette époque déprimée et anxieuse et lui avait
prescrit à ce titre un traitement médicamenteux. Faute de données médicales
plus probantes, ces quelques lignes ne sauraient suffire à justifier
l'existence d'une péjoration de l'état de santé et de la capacité de travail de
l'assurée. De même ne saurait-on rien déduire du fait que le docteur S.________
a déclaré que l'état de santé de l'assurée s'était péjoré progressivement
depuis 1998 et fixé la capacité résiduelle de travail à un taux légèrement
supérieur à celui retenu par X.________.

3.4 Pour le reste, il n'y a pas lieu de considérer que la juridiction cantonale
aurait violé le droit fédéral en n'examinant pas la situation sous l'angle des
précisions apportées par la jurisprudence concernant l'appréciation du
caractère invalidant de troubles somatoformes douloureux (voir ATF 132 V 65,
131 V 49, 130 V 354 et 396). Le raisonnement de l'office AI repose en effet sur
la prémisse que l'assurée souffre principalement d'un trouble somatoforme
douloureux persistant. Or, comme l'a mis en évidence la juridiction cantonale,
les rapports d'expertise laissent clairement ressortir que la capacité de
travail de l'assurée est en l'occurrence limitée de manière prépondérante par
une symptomatologie dépressive et que le syndrome douloureux ne joue qu'un rôle
secondaire dans le tableau clinique. Le fait que le trouble dépressif puisse
être réactionnel au trouble somatoforme n'a d'ailleurs été nullement évoqué.
Certes, le docteur S.________ a expliqué que cette affection psychiatrique ne
revêtait pas une acuité importante. Cette remarque doit toutefois être mise en
relation avec les espoirs que celui-ci a placé dans une prise en charge
thérapeutique adaptée devant permettre à l'assurée de recouvrer à relativement
court terme une capacité de travail de 50 % au moins.

4.
Mal fondé, le recours doit être rejeté. L'office recourant, qui succombe,
supportera les frais judiciaires afférents à la présente procédure (art. 66 al.
1, 1ère phrase, LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée la somme de 1'500 fr. à titre de dépens pour
la dernière instance.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 11 novembre 2008

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: p. le Greffier:

Meyer Cretton