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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 759/2007
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9C_759/2007

Arrêt du 28 janvier 2008
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

S. ________,
recourant, représenté par la Fédération Suisse des Sourds, Service juridique,
Me Daniel Hadorn, avocat, Axenstrasse 3, 6440 Brunnen,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey,
intimé.

Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du
27 juin 2007.

Faits:

A.
Né en 1981 et domicilié dans le canton de Vaud, S.________ est atteint de
surdité bilatérale congénitale. Ayant obtenu un certificat fédéral de
capacité de cuisinier, puis un diplôme de l'Ecole professionnelle de
Y.________ en été 2000, il a travaillé à 80 % comme cuisinier au service de
l'Ecole X.________, dès le mois de décembre 2000. Trois ans plus tard, il a
été engagé comme animateur au Centre de rencontres et d'activités culturelles
Z.________.

Le 24 janvier 2005, il s'est adressé à l'Office de l'assurance-invalidité
pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI), afin d'obtenir la prise en
charge des services d'un interprète en langue des signes auquel il fait appel
dans le cadre de son activité professionnelle (réunions de travail avec des
personnes entendantes), son appareil acoustique n'étant pas suffisant pour
comprendre ses interlocuteurs. Par décision du 26 avril 2006, confirmée le 9
août suivant sur opposition de l'intéressé, l'office AI a refusé la
prestation sollicitée, au motif que les frais y relatifs n'auraient pas été
nécessaires dans la profession initialement apprise mais jamais exercée par
l'assuré.

B.
Statuant le 27 juin 2007 sur le recours formé par l'assuré contre la décision
sur opposition, le Tribunal des assurances du canton de Vaud l'a rejeté.

C.
S.________ interjette un recours en matière de droit public contre le
jugement cantonal. Sous suite de frais et dépens, il conclut à l'annulation
du jugement attaqué et de la décision sur opposition du 9 août 2006 et à la
reconnaissance du droit aux contributions requises.

L'office AI et l'Office fédéral des assurances sociales ont renoncé à se
déterminer sur le recours.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral applique le
droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les
arguments soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par
l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que
ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une
argumentation différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III
136 consid. 1.4 p. 140).

Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF) et peut rectifier ou compléter d'office les
constatations de celle-ci si les faits ont été établis de façon manifestement
inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2
LTF).

2.
2.1 Le litige porte sur la prise en charge, par l'assurance-invalidité, des
frais occasionnés par les services d'un interprète en langue des signes
auquel fait appel le recourant dans le cadre de son activité professionnelle.
La requête du recourant, datée du 24 janvier 2005, a été refusée par décision
sur opposition du 9 août 2006, de sorte que le litige doit être examiné au
regard de l'état de fait existant au moment du prononcé de cette décision et
des règles légales en vigueur à cette date (ATF 130 V 447 consid. 1.2.1,
127 V 467 consid. 1, ATF 121 V 366 consid. 1b; cf. aussi ATF 131 V 243
consid. 2.1). Sont dès lors applicables les modifications de la LAI
introduites par la loi fédérale du 21 mars 2003 (4ème révision AI) et entrées
en vigueur au 1er janvier 2004.

2.2 Le jugement entrepris expose correctement les bases légales et
réglementaires (art. 8, 21 al. 1 1ère phrase, 21bis al. 2 LAI, 14 RAI et 9
OMAI), ainsi que les principes jurisprudentiels (ATF 112 V 11 consid. 1b p.
15, RCC 1986 670 consid. 3b) relatifs aux conditions du droit à un moyen
auxiliaire, ainsi qu'aux prestations de remplacement, de sorte qu'il suffit
d'y renvoyer sur ces points.

3.
La juridiction cantonale a constaté que le recourant était susceptible, de
par sa formation de cuisinier, d'exercer un métier propre à lui assurer un
revenu comparable à celui d'une personne valide et pour lequel il n'a pas
besoin d'un interprète. Retenant que la condition de l'invalidité ou la
menace d'invalidité au sens des art. 4 et 8 LAI n'était en conséquence pas
remplie, elle a nié le droit du recourant au remboursement des frais en
cause. Les premiers juges ont en outre considéré, en se fondant sur un arrêt
du Tribunal fédéral des assurances I 10/03 du 30 août 2004, que la prestation
litigieuse devait également être refusée en vertu du principe de la priorité
de l'obligation de réduire le dommage, même si ce refus pouvait indirectement
rendre plus difficile l'exercice du libre choix de la profession. Examinant
par ailleurs le droit aux contributions requises sous l'angle de l'art. 16
al. 2 let. c LAI dans sa teneur en vigueur à partir du 1er janvier 2004, ils
ont retenu que cette disposition ne s'appliquait pas en l'espèce, parce que
les frais dont le remboursement était demandé n'étaient pas liés à un
perfectionnement professionnel.

4.
4.1 Invoquant tout d'abord une constatation incomplète des faits, le recourant
reproche aux premiers juges d'avoir admis qu'il n'aurait pas besoin de l'aide
d'un interprète en langue des signes s'il exerçait la profession de
cuisinier.

4.2 Dans un rapport intermédiaire du 14 février 2001, l'office AI a indiqué
que le travail dans un restaurant gastronomique à R.________ était
incompatible avec le handicap du recourant, parce qu'une quinzaine de
personnes y étaient employées et les commandes se faisaient verbalement;
l'assuré pouvait travailler de manière plus autonome pour le restaurant d'une
école où il n'y avait que deux collaborateurs et les consignes n'étaient pas
données oralement. Par ailleurs, des aménagements spéciaux avaient dû être
prévus au cours de l'apprentissage, parce que les locaux en cause ne
permettaient pas une communication visuelle entre le service et l'équipe de
la cuisine (rapport intermédiaire de l'office AI du 9 octobre 1998). On doit
déduire de ces circonstances qu'en fonction des caractéristiques du poste de
cuisinier occupé (tels la fonction de l'établissement [hôtel, restaurant,
école], la taille de la cuisine, le nombre des employés dans la cuisine et
dans le service, l'organisation des commandes), le recourant a été confronté
à des situations dans lesquelles le recours aux services d'un interprète en
langue des signes aurait été nécessaire pour lui en faciliter l'exercice. Il
convient dès lors de rectifier la constatation des premiers juges sur ce
point, laquelle doit être considérée comme manifestement inexacte au sens de
l'art. 105 al. 2 LTF.

4.3 Compte tenu de la nécessité pour le recourant de faire appel aux services
de tiers dans la profession de cuisinier, la condition de l'invalidité au
sens de l'art. 8 LAI ne peut être niée en l'espèce. En effet, que ce soit
dans la profession initiale ou dans l'activité exercée ce jour, la mesure de
réadaptation en cause lui permettrait de maintenir sa capacité de gain et
surmonter, jusqu'à un certain point, un empêchement dû à son atteinte à la
santé.

4.4 Pour le surplus, le dossier ne contient pas les éléments nécessaires pour
examiner si les autres conditions posées par les art. 21bis al. 2 LAI et 9
al. 1 let. b OMAI sont remplies. En particulier, le recourant a été mis au
bénéfice de moyens auxiliaires sous la forme d'appareils acoustiques,
auxquels il s'est bien adapté selon le rapport du docteur U.________,
spécialiste ORL, du 29 juin 2006. En l'absence d'une évaluation médicale sur
ce point, il n'est toutefois pas possible d'apprécier sur la base des seules
déclarations du recourant (cf. demande du 24 janvier 2005) si et dans quelle
mesure ces appareils ne lui permettent pas une compréhension de son entourage
suffisante pour exercer son activité sans recourir à l'aide de tiers. Aussi,
convient-il de renvoyer la cause à l'intimé pour qu'il statue à nouveau sur
la prestation sollicitée et vérifie si les autres conditions y donnant droit
- non examinées ici - sont réalisées, ce notamment sous l'angle de l'art.
21bis al. 2 LAI, selon lequel les contributions sont allouées à l'assuré qui
a recours, en lieu et place d'un moyen auxiliaire, aux services d'un tiers,
vu que le recourant a déjà bénéficié d'un appareil acoustique à la charge de
l'assurance-invalidité.

5.
Vu l'issue du litige, les frais de justice doivent être supportés par
l'intimé qui succombe (art. 66 al. 1 première phrase LTF en relation avec
l'art. 65 al. 4 let. a LTF). Représenté par la Fédération suisse des sourds,
le recourant qui obtient gain de cause a droit à des dépens (art. 68 al. 1
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis. Le jugement du Tribunal des assurances du canton de
Vaud du 27 juin 2007 et la décision de l'Office de l'assurance-invalidité
pour le canton de Vaud du 9 août 2006 sont annulés; la cause est renvoyée à
cet office pour nouvelle décision au sens des motifs.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
L'intimé versera au recourant la somme de 2'500 fr. à titre de dépens pour la
dernière instance.

4.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera sur les frais et dépens
pour la procédure de dernière instance, au regard du procès de dernière
instance.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 28 janvier 2008

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:

Meyer Moser-Szeless