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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 350/2007
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_350/2007

Arrêt du 30 avril 2008
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Wagner.

Parties
Office cantonal AI Genève, rue de Lyon 97, 1203 Genève,
recourant,

contre

I.________,
intimé, représenté par Me Zoltan Szalai, avocat, rue de Rive 6, 1211 Genève 3.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et Canton de Genève du 2 mai 2007.

Faits:

A.
I.________, né en 1947, originaire de Serbie, a travaillé en Suisse en qualité
de maçon, en dernier lieu dès le 18 avril 1994 au service de l'entreprise
X.________, à S.________. A l'arrêt de travail à partir du 10 décembre 2002, il
a présenté le 4 novembre 2003 une demande de prestations de
l'assurance-invalidité.
Le docteur J.________, médecin de la Permanence médicale Y.________ et médecin
traitant de l'assuré depuis le 12 février 2003, a produit un rapport médical du
27 novembre 2003, dans lequel il attestait une incapacité de travail de 100 %
dans l'activité de maçon depuis le 10 décembre 2002, d'une durée indéterminée.
Dans un rapport médical du 16 avril 2004, le docteur V.________, médecin
traitant de l'assuré depuis le 28 avril 2003, a retenu les diagnostics ayant
des répercussions sur la capacité de travail d'épisode dépressif moyen avec
syndrome somatique et d'affaiblissement intellectuel débutant, tout en évoquant
aussi des problèmes somatiques.
Sur requête de son Service médical régional, l'Office cantonal de
l'assurance-invalidité de Genève a confié une expertise au COMAI de Genève. Le
23 août 2005, les médecins ont procédé à un examen clinique. Le 6 septembre
2005, le docteur D.________, spécialiste FMH en médecine physique et
réadaptation-rhumatologie, a effectué un examen rhumatologique. Le 20 septembre
2005, la doctoresse E.________, spécialiste FMH en psychiatrie, a effectué un
examen psychiatrique. Dans un rapport d'expertise interdisciplinaire du 21
décembre 2005, les médecins du Centre d'expertise médicale ont posé les
diagnostics avec répercussion sur la capacité de travail de syndrome douloureux
somatoforme persistant ([CIM-10] F45.4) et de trouble panique (anxiété
épisodique paroxystique [F41.0]). Ils indiquaient que pour autant que l'assuré
n'ait à soulever ni à transporter de charge lourde, la capacité de travail
était réduite à l'heure actuelle à 50 % pour des raisons psychiatriques.
Dans un avis médical du 13 février 2006, les médecins du SMR ont conclu que
I.________ ne souffrait d'aucune atteinte à la santé au sens de la LAI et que
sa capacité de travail était entière dans la profession antérieure. Ils ont
constaté que les diagnostics posés dans le rapport d'expertise du 21 décembre
2005 ne pouvaient être retenus, dès lors que les critères nécessaires et requis
à leur établissement, codifiés dans la CIM-10, n'étaient pas présents.
Par décision du 22 mars 2006, l'office AI, rejetant la demande, a refusé toutes
prestations. Il avisait I.________ que le diagnostic de syndrome douloureux
somatoforme persistant ne saurait être retenu, étant donné que les critères
nécessaires pour poser ce diagnostic n'étaient pas présents dans le rapport
d'expertise. Par ailleurs, l'assuré ne présentait pas d'atteinte psychique
depuis son dernier jour de travail. En conséquence, sa capacité de travail
était entière dans l'activité habituelle de maçon.
Les 3 avril et 8 mai 2006, I.________ a formé opposition contre cette décision.
Dans un avis médical du 12 juin 2006, les médecins du SMR ont constaté
qu'aucune des pièces versées au dossier depuis leur avis médical du 13 février
2006 n'était susceptible de modifier leur appréciation du cas.
Par décision du 8 août 2006, l'office AI a rejeté l'opposition.

B.
Statuant sur le recours formé par I.________ contre cette décision, le Tribunal
cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève, par
jugement du 2 mai 2007, l'a partiellement admis en ce sens que, se ralliant aux
conclusions des experts du COMAI dans leur rapport du 21 décembre 2005, il a
retenu que l'assuré présentait un trouble psychique limitant sa capacité de
travail à 50 % dans une activité légère. Annulant les décisions des 22 mars et
8 août 2006, il a renvoyé la cause à l'office AI pour instruction
complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision, afin qu'il
procède à l'évaluation de l'invalidité de l'assuré et fixe le montant de la
rente.

C.
L'Office cantonal de l'assurance-invalidité de Genève interjette un recours en
matière de droit public contre ce jugement, en concluant à l'annulation de
celui-ci. Il demande que la décision sur opposition du 8 août 2006 et la
décision de refus de prestations du 22 mars 2006 soient confirmées.
I.________ conclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours. Dans
son préavis, l'Office fédéral des assurances sociales propose l'admission du
recours.

Considérant en droit:

1.
1.1 Constitue une décision incidente pouvant faire séparément l'objet d'un
recours aux conditions prévues à l'art. 93 al. 1 LTF, la décision cantonale
qui, d'une part, tranche une question de fond et, d'autre part, renvoie la
cause à l'administration pour complément d'instruction sur un autre point (ATF
133 V 477 consid. 4.2 p. 481 s.). En l'occurrence, le jugement de renvoi pour
évaluation de l'invalidité de l'assuré et calcul du montant de la rente ne
laisse à l'office AI aucune latitude de jugement d'un point de vue matériel, en
ce qui concerne l'atteinte à la santé et la capacité de travail de l'intimé, et
peut ainsi causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
LTF (arrêt I 126/07 du 6 août 2007, consid. 1.2 non publié aux ATF 133 V 504).
Le recours est dès lors recevable.

1.2 Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour
violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que le Tribunal fédéral
applique d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments du
recourant, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral
n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de
motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des
conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les
faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf
s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit
au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend
s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi
les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait
divergent ne peut être pris en considération.

2.
2.1 Le litige porte sur l'atteinte à la santé et la capacité de travail de
l'intimé.

2.2 Les principes relatifs au pouvoir d'examen développés dans l'ATF 132 V 393
consid. 3 p. 397 s. (en relation avec l'art. 132 OJ dans sa version en vigueur
du 1er juillet au 31 décembre 2006) continuent à s'appliquer pour distinguer
les constatations de fait de l'autorité précédente (qui lient en principe le
Tribunal fédéral) de l'application qu'elle fait du droit (question qui peut
être examinée librement en instance fédérale). Conformément à ces principes,
les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé,
la capacité de travail de l'assuré et l'exigibilité relèvent d'une question de
fait et ne peuvent être contrôlées que sous un angle restreint (ATF 132 V 393
consid. 3.2 p. 398).

3.
Les premiers juges ont retenu le diagnostic de syndrome douloureux somatoforme
persistant posé par les experts du COMAI. Constatant que la doctoresse
E.________, dans son évaluation du 20 septembre 2005, avait posé les
diagnostics de trouble panique (anxiété épisodique paroxystique [F41.0]) et de
probable trouble mental, ils ont considéré que le trouble panique constituait
une comorbidité psychiatrique. Se ralliant aux conclusions des experts du COMAI
dans leur rapport du 21 décembre 2005, ils ont admis que l'atteinte psychique
et le manque de ressources propres de l'assuré limitaient sa capacité de
travail, qui était de 50 % dans une activité légère.

3.1 Se fondant sur l'avis médical SMR du 13 février 2006, le recourant nie que
les éléments soient réunis pour retenir le diagnostic de syndrome douloureux
somatoforme persistant.
S'agissant là d'une question de fait, il n'appartient pas au Tribunal fédéral,
dont le pouvoir d'examen est limité (supra, consid. 2.2), de procéder une
nouvelle fois à l'appréciation des preuves administrées. Le recourant ne
démontre pas en quoi celle opérée par la juridiction cantonale serait
manifestement inexacte.
Même si l'on confrontait les faits constatés par les premiers juges avec le
contenu de l'avis médical SMR du 13 février 2006, on ne voit pas que le
diagnostic de syndrome douloureux somatoforme persistant soit manifestement
inexact. Ce diagnostic émane d'experts du COMAI, dont la doctoresse E.________,
spécialiste en psychiatrie, et s'appuie lege artis sur les critères d'un
système de classification reconnu ([CIM-10] F45.4; ATF 130 V 397). Selon les
constatations de la juridiction cantonale, il a été retenu par les experts du
COMAI en l'absence d'atteinte ostéoarticulaire significative objective. Dans
leur rapport du 21 décembre 2005, ceux-ci ont indiqué qu'ils pouvaient évoquer
un diagnostic de trouble somatoforme douloureux en raison de la présentation
clinique qui ne correspondait à aucune entité pathologique connue et qui était
en discordance avec les plaintes de l'assuré, ainsi que de la présence d'un
trouble anxieux. Sur ce point, la juridiction cantonale a relevé que les
experts du COMAI, prenant en compte les résultats de l'imagerie par résonance
magnétique du cerveau du 11 juillet 2005, étaient de l'avis que les changements
intervenant sur le caractère pouvaient être expliqués par la décompensation du
trouble anxieux. Cela n'est pas discuté par le recourant ni par les médecins du
SMR.

3.2 Les premiers juges ont qualifié de comorbidité psychiatrique le trouble
panique diagnostiqué par les experts du COMAI.
Avec raison, le recourant fait valoir que l'on n'est pas en présence d'une
comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée
(ATF 131 V 49 consid. 1.2 p. 50, 130 V 352 consid. 2.2.3 p. 354).
Dans leurs constatations relatives au trouble panique, les premiers juges ont
retenu qu'il s'agissait d'une comorbidité psychiatrique, qui se manifestait
dans le cas de l'intimé sous forme de malaises, d'angoisse importante avec
attaques de panique lors de réveils nocturnes (transpirations profuses,
tachychardies, difficultés respiratoires avec oppressions thoraciques, peur de
mourir).
Toutefois, ces faits n'établissent pas la présence d'une comorbidité
psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée.
Dans le rapport du 21 décembre 2005, sur lequel se fonde la juridiction
cantonale, les experts du COMAI ont expressément déclaré que l'atteinte
psychique, en soi, n'était pas grave. A aucun moment, ils n'ont évoqué la
présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité
et sa durée. Les arguments de l'intimé, qui fait état d'un important mal-être
et d'une limitation importante de sa capacité de travail, n'y changent rien.
Le recours est bien fondé de ce chef.

3.3 Parmi les autres critères consacrés par la jurisprudence, dont l'existence
permet d'admettre le caractère non exigible de la reprise du travail (ATF 131 V
49 consid. 1.2 p. 50 s., 130 V 352 consid. 2.2.3 p. 354 s.), le manque de
ressources propres (facultés de mentalisation carrément absentes, ressources
scolaires et professionnelles rudimentaires) dont les experts du COMAI ont fait
état dans leur rapport du 21 décembre 2005 ne constitue pas un de ces critères.
Les premiers juges, à l'instar des experts du COMAI, se sont fondés sur le
manque de ressources propres. Ces faits ne sont pas pertinents. Il convient dès
lors de compléter le jugement entrepris, dans la mesure où les critères
consacrés par la jurisprudence n'ont pas été pris en considération.
Ainsi, l'existence d'un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans
rémission durable (symptomatologie inchangée ou progressive) n'est évoquée ni
par le docteur J.________ dans son rapport médical du 27 novembre 2003, ni par
le docteur V.________ dans son rapport médical du 16 avril 2004, ni par les
experts du COMAI dans leur rapport du 21 décembre 200. Le critère de la perte
d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie n'est pas non
plus réalisé. Certes, l'intimé, se référant à l'anamnèse de la doctoresse
E.________ dont il ressort qu'il n'ose plus faire de déplacements éloignés et
qu'il n'a pas de copains ni d'amis, parle d'attitude de repli sur lui-même. Il
n'en demeure pas moins que ce médecin, sous la rubrique de son évaluation du 20
septembre 2005 relative au status psychiatrique, indique qu'il n'y a pas
d'isolement social (notamment pas de différence par rapport à ses habitudes
sociales). L'existence d'un état psychique cristallisé n'est attestée par aucun
médecin. Il n'y a pas eu d'échec de traitements médicaux qui soit attesté par
un médecin.

3.4 Il résulte de ce qui précède (supra, consid. 3.2 et 3.3) que le syndrome
douloureux somatoforme persistant ne se manifeste pas avec une sévérité telle
que, d'un point de vue objectif, seule une mise en valeur limitée de la
capacité de travail de l'intimé puisse être raisonnablement exigée de lui.
Il s'ensuit que le jugement attaqué, qui admet une capacité de travail réduite
de 50 % au plan psychique en l'absence des critères de morbidité retenus par la
jurisprudence, viole le droit fédéral (art. 95 let. a LTF).

4.
Etant donné que l'intimé ne présente aucune atteinte à la santé invalidante,
les conditions du droit à une rente d'invalidité ne sont donc pas remplies. Dès
lors, un renvoi de la cause à l'office AI pour qu'il procède à l'évaluation de
l'invalidité de l'assuré et qu'il fixe le montant de la rente ne se justifie
pas, ce qui conduit à l'annulation du ch. 4 du dispositif du jugement
entrepris.

5.
Compte tenu de l'issue du litige, les frais judiciaires doivent être supportés
par l'intimé qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il ne saurait prétendre une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 68 al. 1 LTF). Il n'a pas
droit non plus au remboursement de ses frais et dépens de l'instance inférieure
(art. 61 let. g LPGA), de sorte que le ch. 5 du dispositif du jugement attaqué
doit être annulé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal cantonal des assurances
sociales de la République et canton de Genève, du 2 mai 2007, est annulé.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et Canton de Genève et à l'Office fédéral
des assurances sociales.
Lucerne, le 30 avril 2008
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
p. Le Président: Le Greffier:

Borella Wagner