Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 260/2007
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9C_260/2007

Arrêt du 1er février 2008
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

A. ________,
recourant, représenté par Me Alain Ribordy, avocat, avenue du Midi 37, 1700
Fribourg,

contre

Office AI du canton de Fribourg,
impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez,
intimé.

Assurance-invalidité,

recours contre le jugement de la Cour des assurances sociales du Tribunal
administratif du canton de Fribourg du 8 mars 2007.

Faits:

A.
A. ________, serrurier de formation né en 1961 et domicilié à U.________, a
présenté le 28 juin 1995 une demande de prestations de l'assurance-invalidité
en invoquant souffrir de troubles auditifs handicapants. L'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après: office AI) lui a
accordé une mesure de reclassement en qualité de dessinateur en constructions
métalliques, à laquelle il a mis fin le 30 septembre 2002 à la suite de
l'échec définitif de l'assuré aux examens de fin d'apprentissage.

Après avoir annoncé en été 2002 une aggravation de son état de santé
(péjoration des troubles auditifs et apparition de lombalgies) qui a conduit
à la prise en charge d'un appareil acoustique par l'assurance-invalidité,
l'intéressé s'est inscrit au chômage et a perçu des indemnités de
l'assurance-chômage du mois d'octobre 2002 au mois de décembre 2003. De
janvier à mars 2004, il a travaillé à mi-temps comme dessinateur-serrurier
jusqu'à la faillite de l'entreprise. A la même époque, il s'est renseigné
auprès de l'office AI sur la suite donnée à son cas. Celui-ci a alors
recueilli divers avis médicaux et soumis l'assuré à une expertise auprès de
la Clinique X.________. Rendant leur rapport le 16 novembre 2004, les
docteurs L.________, B.________ et D.________ de X.________ ont considéré que
A.________ disposait d'une capacité de travail entière dans un emploi adapté
tel que celui d'aide dessinateur-serrurier, mais assortie d'une diminution de
rendement de 30 % en raison des acouphènes.

Estimant que l'assuré était en mesure de travailler à plein temps comme
dessinateur-serrurier semi-qualifié, l'office AI a comparé le salaire qu'il
pouvait obtenir dans une telle activité (53'649 fr.) au revenu qu'il aurait
pu réaliser à la fin de sa formation professionnelle en 2002 (58'233 fr.) et
fixé à 8 % le taux d'invalidité. En conséquence, il a rendu une décision le
23 mai 2005, par laquelle il a dénié à l'intéressé le droit à une rente
d'invalidité. Saisie d'une opposition formée par A.________, l'administration
a confirmé le refus de rente, en considérant que même en prenant en compte
une diminution de rendement de 30 % sur le revenu après invalidité, le taux
d'invalidité (de 34,60 %) était insuffisant pour ouvrir le droit à une rente
(décision sur opposition du 16 mai 2006).

B.
L'assuré a déféré la décision sur opposition au Tribunal administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, en produisant un rapport du
Service de neuropsychologie de la Clinique Y.________ du 23 janvier 2006.
Statuant le 8 mars 2007, le Tribunal administratif l'a débouté.

C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce
jugement, dont il demande l'annulation. Il conclut au renvoi de la cause à la
juridiction cantonale pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.

L'office AI et l'Office des assurances sociales ont renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé
pour violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral statue
sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF)
et peut rectifier ou compléter d'office les constatations de celle-ci si les
faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Aucun fait nouveau ni
preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de
l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

A l'appui de son recours en matière de droit public, le recourant produit un
rapport médical du Service de neurologie de Y.________ du 13 février 2007. Il
s'agit d'une preuve nouvelle au sens de l'art. 99 al. 1 LTF qui n'est pas
recevable: établie postérieurement au jugement entrepris, elle ne peut par
définition "résulter" du jugement entrepris (Meyer, in: M. A. Niggli/P.
Uebersax/H. Wiprächtiger [édit.], Bundesgerichtsgesetz, Bâle 2008, ad art. 99
LTF, n. 43 p. 979).

1.2 Au regard de la réglementation sur le pouvoir d'examen prévue par la LTF,
il convient d'examiner sur la base des griefs soulevés dans le recours formé
devant le Tribunal fédéral si le jugement entrepris viole (notamment) le
droit fédéral dans l'application des règles pertinentes du droit matériel et
de preuve (art. 95 let. a LTF), y compris une éventuelle constatation des
faits contraire au droit (art. 97 al. 1, art. 105 al. 2 LTF). En revanche,
sous l'empire de la LTF, il n'y a pas lieu de procéder à un libre examen du
jugement attaqué sous l'angle des faits (sauf si le recours est dirigé contre
une décision concernant l'octroi ou le refus de prestations en espèces de
l'assurance-accidents et de l'assurance militaire; art. 97 al. 2 LTF). De
même, n'y a-t-il pas à vérifier l'exercice par la juridiction cantonale de
son pouvoir d'appréciation sous l'angle de l'opportunité (selon les principes
développés dans l'ATF 126 V 75 consid. 6 p. 81 en relation avec la version en
vigueur du 1er juillet au 31 décembre 2006 de l'art. 132 de la loi fédérale
d'organisation judiciaire [OJ], abrogée depuis).

1.3 En ce qui concerne l'évaluation de l'invalidité, les principes relatifs
au pouvoir d'examen développés dans l'ATF 132 V 393 consid. 3 p. 397 ss (en
relation avec l'art. 132 OJ dans sa version en vigueur du 1er juillet au 31
décembre 2006) continuent à s'appliquer pour distinguer les constatations de
fait de l'autorité précédente (qui lient en principe le Tribunal fédéral) de
l'application qu'elle fait du droit (question qui peut être examinée
librement en instance fédérale). Conformément à ces principes, les
constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé,
la capacité de travail de l'assuré et l'exigibilité relèvent d'une question
de fait et ne peuvent être contrôlées que sous un angle restreint (ATF 132 V
393 consid. 3.2 p. 398).

2.
Le litige porte sur le droit du recourant à une rente de
l'assurance-invalidité, singulièrement sur l'étendue de la capacité de
travail encore exigible de sa part en dépit de ses atteintes à la santé. Le
jugement entrepris expose correctement les règles légales et les principes
jurisprudentiels applicables au présent cas. Il suffit d'y renvoyer.

3.
3.1 Le recourant critique les constatations de fait de la juridiction
cantonale sous l'angle de l'art. 97 LTF. Il soutient qu'elle a retenu de
façon manifestement inexacte qu'il était capable de travailler à 100 % dans
une activité adaptée, alors qu'elle n'a pas pris en considération les
troubles mnésiques et attentionnels qui l'affectent, ni la diminution de la
capacité de travail que ceux-ci entraîneraient immanquablement. Ces troubles
avaient été mis en évidence par le Service de neuropsychologie de Y.________
dans un rapport élaboré le 23 janvier 2006, qu'il avait produit en instance
cantonale en invoquant une péjoration du tableau clinique présenté au moment
d'une première évaluation neuropsychologique le 25 janvier 2005.

3.2 Se fondant sur «les différents dossiers médicaux figurant au dossier», la
juridiction cantonale a constaté que le recourant était atteint de lombalgies
chroniques, d'une probable maladie de Ménière avec surdité neurosensorielle
bilatérale et Glue Ear à droite et d'acouphènes à l'oreille droite; il
souffrait par ailleurs d'un syndrome d'apnée du sommeil débutant, d'une
possible bronchite chronique, d'un trouble anxio-dépressif et d'un syndrome
de dépendance à des substances psychoactives, actuellement abstinent. En
examinant l'influence de ces diagnostics sur la capacité de travail du
recourant, les premiers juges ont rejeté les conclusions du docteur
S.________, médecin traitant, selon lesquelles la capacité de travail du
recourant avait progressivement été limitée à partir de septembre 2002 pour
arriver à 0 % au printemps 2005, surtout en raison de l'état psychique dont
les symptômes pouvaient être causés par une maladie neurologique. Pour cela,
ils se sont référés au rapport des docteurs V.________ et R.________ du
Service de neurologie de Y.________ (du 14 février 2005), qui, après avoir
effectué différents tests dont les résultats étaient négatifs, ont conclu à
l'existence de discrets troubles attentionnels et mnésiques à pondérer
toutefois par un état anxieux important, une neuro-borréliose apparaissant
par ailleurs très peu probable. La juridiction cantonale s'est également
appuyée sur les constatations des médecins de X.________ du 16 novembre 2004,
selon lesquelles en tenant compte des répercussions fonctionnelles
douloureuses et de l'absence de diagnostic psychiatrique concomitant, la
capacité de travail dans un emploi adapté était entière, avec une diminution
de rendement (de 30 %) en raison des acouphènes.

Fort de ces conclusions médicales, la juridiction cantonale a considéré que
la capacité de travail du recourant était entièrement préservée (dans une
activité adaptée) et renoncé, en revenant sur le parcours du recourant au
regard duquel il souffrirait avant tout des conséquences d'un important
déconditionnement et d'une longue période d'inactivité professionnelle, à
ordonner une expertise médicale pluridisciplinaire.

3.3 Il ressort des constatations de l'autorité cantonale de recours qu'elle
n'a pas examiné, ni partant discuté des éléments découlant du rapport établi
par la Division autonome de neuropsychologie de  Y.________ le 23 janvier
2006, soit à une date faisant partie de la période déterminante qu'elle avait
à prendre en considération sous l'angle des faits pertinents (s'étendant
jusqu'à la décision sur opposition du 16 mai 2006; ATF 129 V 1 consid. 1.2 p.
4, 127 V 466 consid. 1 p. 467).

Selon les conclusions du Professeur K.________, médecin-chef de la division
autonome de neuropsychologie de Y.________, l'évaluation neuropsychologique
du 16 janvier 2006 a mis en évidence des troubles mnésiques et des troubles
attentionnels sévères auxquels s'ajoutent des troubles exécutifs, un
important ralentissement et une baisse des capacités de raisonnement, en
parallèle à une probable symptomatologie anxio-dépressive. Le médecin observe
une péjoration des performance cognitives (mémoire antérograde verbale,
raisonnement, fonctions exécutives) par rapport à l'examen mené le 25 janvier
2005. Par ailleurs, dans un rapport subséquent du 29 septembre 2006, que le
recourant aurait apparemment fait verser au dossier cantonal
(contre-observations du 15 novembre 2006, p. 3), les docteurs V.________ et
C.________, tout en diagnostiquant des troubles mnésiques et attentionnels
modérés (ainsi que des troubles anxio-dépressifs), ont fait état d'une
«aggravation fonctionnelle du patient», le tableau clinique étant marqué par
un important ralentissement psychomoteur et une atteinte des performances
cognitives. Bien que rendu postérieurement à la décision litigieuse du 16 mai
2006, cet avis permet d'apprécier les circonstances au moment où cette
décision a été rendue, de sorte qu'il devait être pris en compte (cf. ATF 99
V 102 et les arrêts cités).

Au regard de l'aggravation des troubles de la mémoire et de l'attention mise
en évidence par le Service de neuropsychologie de Y.________ au début de
l'année 2006, et même si les médecins du Service de neurologie et de
neuropsychologie consultés par le recourant ne s'étaient pas prononcés sur
les effets des troubles de la mémoire et de l'attention sur la capacité de
travail de celui-ci dans une activité adaptée, la juridiction cantonale
n'était pas en droit d'ignorer ces deux éléments de preuve propres à
modifier, le cas échéant, la décision attaquée. A cet égard, elle ne pouvait
pas sans autre examen conclure à l'absence de toute problématique
neurologique - et la constatation manifestement inexacte des faits pertinents
entraîne une violation de la maxime d'office (art. 61 let. c LPGA) - et
renoncer à compléter l'instruction (ou ordonner à l'intimé de ce faire), afin
d'établir dans quelle mesure l'aggravation invoquée par le recourant
influençait la capacité de travail exigible. En fonction du résultat d'une
évaluation médicale portant sur ce point, la capacité de travail du recourant
dans une activité adaptée pourrait être appréciée de manière plus limitative
et conduire à modifier le taux d'incapacité de gain retenu par l'intimé (35
%) et les premiers juges (0 % voire 37 %) et, partant, influer sur le sort de
la cause (art. 97 al. 1 LTF).

3.4 En conséquence de ce qui précède, il convient d'annuler le jugement
entrepris et la décision sur opposition du 16 mai 2006, et de renvoyer la
cause à l'intimé pour instruction complémentaire. Aussi, n'est-il pas
nécessaire d'entrer en matière sur le second grief soulevé par le recourant
lié au moment auquel il aurait déclaré à l'intimé ses troubles auditifs. Il
suffit de préciser dans ce contexte que les considérations des premiers juges
sur la longue période d'inactivité professionnelle du recourant, qui
expliquerait que celui-ci aurait fait valoir une aggravation de son état de
santé à chaque fois qu'une couverture d'assurance prenait fin, sont sans
pertinence sur l'issue du litige. On ne peut en effet rien en déduire sur la
capacité de travail qui serait encore exigible du recourant.

4.
Les frais de la procédure, qui n'est pas gratuite (art. 65 al. 4 LTF), seront
supportés par l'intimé qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Par ailleurs,
représenté par un avocat, le recourant qui obtient gain de cause a droit à
des dépens à la charge de l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF). Sa requête
d'assistance judiciaire est dès lors sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis, en ce sens que le jugement de la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg du 8 mars 2007 et la
décision de l'Office AI du canton de Fribourg du 16 mai 2006 sont annulés, la
cause étant renvoyée à cet office pour instruction complémentaire au sens des
considérants et nouvelle décision.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500  fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
L'intimé versera au recourant la somme de 2500 fr. à titre de dépens pour la
dernière instance.

4.
La Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de
Fribourg statuera sur les dépens pour la procédure de première instance, au
regard de l'issue du procès de dernière instance.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg, à l'Office fédéral
des assurances sociales et à la Caisse de compensation du canton de Fribourg.

Lucerne, le 1er février 2008

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:

Meyer Moser-Szeless