Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 179/2007
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9C_179/2007

Arrêt du 7 novembre 2007
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Piguet.

V. ________,
recourant, représenté par Me Nicolas Saviaux, avocat, avenue d'Ouchy 14, 1006
Lausanne,

contre

Caisse de compensation du canton du Jura,
rue Bel-Air 3, 2350 Saignelégier,
intimée.

Assurance vieillesse et survivants,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du
Jura, Chambre des assurances, du 16 mars 2007.

Faits:

A.
L. ________ est décédé en 2004, laissant pour seul héritier légal son fils
V.________. A la demande de ce dernier, l'inventaire officiel de la
succession a été dressé. Dans le délai de production, la Caisse de
compensation du canton du Jura (ci-après: la caisse de compensation) a
produit une créance de cotisations personnelles AVS/AI/APG de 1'733 fr. 90,
en précisant que les cotisations relatives à la période courant de janvier
2003 à mars 2004 étaient toujours taxées provisoirement et feraient le cas
échéant l'objet d'une production ultérieure. L'inventaire a été clos le 30
juin 2004, sans que la caisse de compensation ne fasse d'autres productions,
et la succession a été acceptée sous bénéfice d'inventaire le 11 novembre
2004.

B.
Le 11 mai 2005, le Service des contributions de la République et canton du
Jura a adressé à la caisse de compensation du canton du Jura deux
communications fiscales relatives à des procédures de rappel d'impôts portant
sur les années 2001 et 2002 ainsi qu'une communication relative à la taxation
- d'office - des revenus réalisés par le défunt en 2003. Se fondant sur ces
documents, la caisse de compensation a rendu le 25 mai 2005 deux décisions
rectificatives des cotisations dues pour les années 2001 et 2002 ainsi qu'une
décision relative à l'année 2003, et réclamé le versement complémentaire de
la somme de 10'642 fr. 75 à titre d'arriéré de cotisations.

V. ________ a formé opposition contre ces décisions, en arguant du fait que
les créances de la caisse de compensation devaient être considérées comme
éteintes, puisqu'elles ne figuraient pas à l'inventaire de la succession. Par
décision du 13 juin 2005, la caisse de compensation a confirmé la teneur de
ses premières décisions.

C.
Par jugement du 16 mars 2007, la Chambre des assurances du Tribunal cantonal
de la République et canton du Jura a rejeté le recours formé par V.________ à
l'encontre de la décision sur opposition du 13 juin 2005.

D.
V.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce
jugement. En substance, il en demande l'annulation, ainsi que celle de la
décision sur opposition litigieuse.
La Caisse conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 Comme la décision attaquée a été rendue après l'entrée en vigueur, le 1er
janvier 2007 (RO 2006 p. 1242), de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), le recours est régi par le nouveau droit (art. 132
al. 1 LTF).

1.2 Interjeté par une partie directement touchée par la décision entreprise
et qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification
(art. 89 al. 1 LTF), le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90
LTF) rendu dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) par une
autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été
déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et selon la forme (art. 42 LTF)
prévus par la loi et l'on ne se trouve pas dans l'un des cas d'exceptions
mentionnés par l'art. 83 LTF. Le recours est donc recevable au regard des
dispositions citées.

2.
2.1 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par les arguments soulevés
dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il
peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et
il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle
de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140). Toutefois,
eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF -
sanctionnée par l'irrecevabilité des recours dont la motivation est
manifestement insuffisante (art. 108 al. 1 let. b LTF) -, le Tribunal fédéral
n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter,
comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions
juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant
lui. Le principe d'allégation vaut plus particulièrement s'agissant de la
violation des droits fondamentaux ainsi que des dispositions du droit
cantonal ou intercantonal. Le Tribunal fédéral n'examine en effet de tels
griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant, conformément à
l'art. 106 al. 2 LTF, c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et
exposés de façon claire et détaillée dans le mémoire du recours de droit
public (cf. ATF 133 III 393 consid. 6 p. 397, 130 I 26 consid. 2.1 p. 31).

2.2 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou
en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

3.
Le litige porte sur le point de savoir si la caisse de compensation peut
rechercher V.________ pour les créances de cotisations de son défunt père non
portées à l'inventaire de la succession.

3.1 Aux termes de l'art. 43 RAVS, en cas de décès d'une personne tenue au
paiement des cotisations, ses héritiers répondent solidairement des
cotisations dues par elle de son vivant. Les art. 566, 589 et 593 du code
civil sont réservés.

3.2 Lorsque la succession est acceptée sous bénéfice d'inventaire, les
créanciers du défunt qui ne figurent pas à l'inventaire pour avoir négligé de
produire en temps utile ne peuvent rechercher l'héritier ni personnellement
ni sur les biens de la succession (art. 590 al. 1 CC), sauf s'ils ont omis de
produire sans leur faute ou s'ils ont produit mais que leur créance n'a
néanmoins pas été portée à l'inventaire (art. 590 al. 2 CC). Dans ces deux
hypothèses, l'héritier n'est tenu que jusqu'à concurrence de son
enrichissement.

3.3 Les créances de cotisations doivent, en principe, être produites en cours
d'inventaire, en tout cas lorsque la caisse a déjà fixé le montant des
cotisations avant l'échéance du délai de production ou qu'elle possède alors
les éléments lui permettant de prendre sa décision (ATFA 1963 p. 28 consid.
2). N'est excusable, au sens de l'art. 590 al. 2 CC, que l'absence de
production due à l'ignorance non coupable de l'existence d'une créance de
cotisation, situation à laquelle il y a lieu d'assimiler l'incertitude
résultant du fait que l'administration ne dispose pas encore d'éléments
suffisants pour conclure à l'existence d'une dette de cotisation (ATF 97 V
221 consid. 2b p. 224). En revanche, une créance de cotisations qui n'a pas
été produite, de manière fautive, dans la procédure de bénéfice d'inventaire
est éteinte (cf. ATF 111 V 1 consid. 3 p. 2).

4.
4.1 Ainsi qu'il ressort des faits établis par le tribunal cantonal des
assurances et non contestés par le recourant, la caisse de compensation se
trouvait, à l'échéance du délai de production, de même qu'à la clôture de
l'inventaire, dans l'ignorance des procédures de rappel d'impôts ouvertes à
l'encontre des taxations fiscales portant sur les années 2001 et 2002; de
même n'était-elle pas en mesure de déterminer le montant exact des
cotisations dues pour 2003. Ce n'est qu'à partir du moment où le Service des
contributions de la République et canton du Jura a transmis les
communications fiscales y relatives qu'il a été possible pour la caisse de
compensation de réclamer, conformément à l'art. 39 RAVS, l'arriéré de
cotisations des années 2001 et 2002 et de percevoir le montant dû pour
l'année 2003. En tant que la caisse de compensation n'avait pas eu
connaissance avant l'échéance du délai de production des éléments nécessaires
au calcul du solde de cotisations dues, le défaut de production est
excusable. Il s'ensuit que V.________ est tenu, jusqu'à concurrence de son
enrichissement, au paiement du montant de 10'642 fr. 75 réclamé par la caisse
de compensation.

4.2 Contrairement à ce que soutient le recourant, on ne saurait reprocher un
comportement passif à la caisse de compensation, quand bien même elle n'était
pas sans ignorer que le Service des contributions de la République et canton
du Jura devait encore procéder à la taxation définitive des revenus réalisés
par le défunt durant les années 2003 et 2004. Dans le cadre de la fixation
des cotisations des assurés exerçant une activité lucrative indépendante, le
législateur a expressément confié aux autorités fiscales cantonales le soin
de déterminer le revenu provenant d'une activité indépendante et le capital
propre engagé dans l'entreprise (art. 9 al. 3 LAVS et 23 RAVS; voir également
RCC 1992 p. 34 consid. 4b). Il s'ensuit que les caisses de compensation sont
liées, en principe, par les données communiquées par les autorités fiscales
cantonales pour fixer les cotisations dues pour l'année de cotisation (art.
23 al. 4 et 27 al. 2 RAVS). En raison des particularités de cette procédure,
le législateur a d'ailleurs posé une règle particulière en matière de
prescription qui s'écarte des règles générales de l'art. 24 LPGA. Lorsque les
cotisations perçues sur le revenu proviennent d'une activité indépendante, le
délai de prescription n'échoit qu'un an après la fin de l'année civile au
cours de laquelle la taxation fiscale déterminante ou la taxation consécutive
à une procédure pour soustraction d'impôts est entrée en force (art. 16 al.
1, 2ème phrase, LAVS; cf. arrêt H 1/06 du 30 novembre 2006, consid. 4.4.1;
voir également Ueli Kieser, Alters- und Hinterlassenenversicherung, in:
Schweizerisches Bundesverwal-tungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2e éd.,
Bâle 2007, p. 1285, n. 238). N'ayant aucun moyen de contraindre les autorités
fiscales à prendre rapidement une décision, la caisse de compensation n'était
par conséquent pas tenue d'entreprendre quelque démarche que ce soit auprès
de celles-ci.

4.3 C'est en vain que le recourant croit devoir être protégé dans sa bonne
foi, en tant que la caisse de compensation lui aurait déclaré au cours d'un
entretien téléphonique antérieur aux communications de l'autorité fiscale que
la question des cotisations personnelles AVS/AI/APG dues par le défunt avait
été définitivement réglée. L'administration n'est liée par un renseignement
ou une décision émanant d'elle que dans la mesure où la situation de faits
n'a pas subi ultérieurement de modification significative. On ne saurait en
effet exiger de l'administration qu'elle examine d'office toutes les
éventualités qui pourraient surgir à l'avenir. Dès lors qu'un fait nouveau
important est de nature à conduire à une appréciation juridique différente,
comme cela a été précisément le cas avec les commu-nications fiscales du 11
mai 2005, l'administration n'est en principe plus liée par ses précédentes
déclarations (Häfelin/Müller/Uhlmann, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5e éd.,
Zurich 2006, p. 145, n. 692).

5.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires de la présente
procédure (art. 66 al. 1 LTF).

Le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 1'100 fr., sont mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la
République et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 7 novembre 2007

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Meyer Piguet