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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.669/2007
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_669/2007 /rod

Arrêt du 16 janvier 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Favre et Brahier Franchetti, Juge suppléante.
Greffière: Mme Paquier-Boinay.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Martine Rüdlinger, avocate,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Actes d'ordre sexuel avec un enfant, viol, pornographie; expertise
psychiatrique,

recours contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois du 24 août 2007.

Faits:

A.
Au printemps 2004, X.________ a rencontré fortuitement Y.________, enfant
sourde et muette née le 19 janvier 1989, dans le hall de son immeuble. Dans
l'ascenseur, X.________ a ignoré l'intention de la jeune fille qui désignait le
bouton de son étage et l'a conduite à celui où se situait son studio. Il l'a
poussée hors de la cabine, a ouvert la porte de son logement, a empoigné la
jeune fille pour qu'elle franchisse la porte qu'il a ensuite verrouillée. Il a
alors amené la victime à regarder un film pornographique avant de la
déshabiller et de la prendre par force sur son lit. Y.________ a résisté
physiquement dans l'ascenseur, le couloir et le studio. Son handicap l'a
empêchée d'appeler au secours.
En été 2004 s'est déroulé un second épisode identique au premier.

B.
Par jugement du 16 mai 2007, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
l'Est vaudois a notamment libéré X.________ des griefs de contrainte, actes
d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement et de
résistance, séquestration et enlèvement et l'a condamné pour actes d'ordre
sexuel avec un enfant, viol et pornographie à une peine privative de liberté de
cinq ans. Le tribunal a estimé que le récit de l'enfant était crédible
contrairement à la thèse du complot développée par X.________.

C.
Par arrêt du 24 août 2007, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté le recours de X.________ et confirmé le jugement de première
instance.

D.
X.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt. Invoquant une
violation du principe in dubio pro reo et de l'art. 20 CP, il conclut,
principalement, à la réforme de l'arrêt attaqué et à son acquittement de tous
les chefs d'accusation retenus à son encontre ainsi qu'au rejet de toutes les
conclusions civiles. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt
attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale. Il sollicite en outre
l'assistance judiciaire et l'effet suspensif.

Considérant en droit:

1.
1.1 Rendu en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de
dernière instance (art. 80 al. 1 LTF), l'arrêt attaqué, qui met fin à la
procédure (art. 90 LTF), peut faire l'objet d'un recours en matière pénale
(art. 78 ss LTF). L'accusé, qui a succombé dans ses conclusions (art. 81 al. 1
let b LTF) a qualité pour recourir.

1.2 Le recours peut notamment être formé pour violation du droit fédéral (art.
95 let. a LTF), qui englobe les droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral
statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1
LTF), à moins que le recourant ne démontre que ces faits ont été établis de
façon manifestement inexacte, à savoir arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (FF
2001 p. 4135), ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1
LTF). Le Tribunal fédéral ne sanctionne une violation de droits fondamentaux
que si ce moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF).
Les exigences de motivation de l'acte de recours correspondent à celles de
l'art. 90 al. 1 let. b OJ (FF 2001 p. 4142).
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est
donc limité ni par les arguments du recourant ni par la motivation de
l'autorité précédente. Toutefois, compte tenu de l'exigence de motivation
prévue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, dont la sanction est l'irrecevabilité (art.
108 al. 1 let. b LTF), il n'examine en principe que les griefs invoqués et
n'est dès lors pas tenu de traiter des questions qui ne sont plus discutées
devant lui. Il ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al.
1 LTF).

2.
2.1 La présomption d'innocence est garantie par les art. 32 al. 1 Cst. et 6
par. 2 CEDH, qui ont la même portée. Elle a pour corollaire le principe "in
dubio pro reo", qui concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation
des preuves. En tant que règles sur le fardeau de la preuve, ces principes
signifient que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute
doit profiter à l'accusé. Comme règles de l'appréciation des preuves, ils sont
violés lorsque le juge qui s'est déclaré convaincu aurait dû, au vu des
éléments de preuve qui lui étaient soumis, éprouver des doutes quant à la
culpabilité de l'accusé. Le Tribunal fédéral examine librement si ces principes
ont été violés en tant que règle sur le fardeau de la preuve, mais il n'examine
que sous l'angle de l'arbitraire la question de savoir si le juge aurait dû
éprouver un doute, c'est-à-dire celle de l'appréciation des preuves (ATF 127 I
38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4 p. 211; 120 Ia 31 consid. 2d p. 37
s.).
Lorsque, comme en l'espèce, le recours est dirigé contre une décision d'une
autorité cantonale de dernière instance dont la cognition était limitée à
l'arbitraire, l'examen du Tribunal fédéral porte concrètement sur l'arbitraire
du jugement de l'autorité inférieure, à la lumière des griefs soulevés dans
l'acte de recours. Cependant, pour se conformer aux exigences de motivation
rappelées au considérant 1.2 ci-dessus, le recourant ne peut pas simplement
reprendre les critiques qu'il a formulées en instance cantonale, mais il doit
exposer pourquoi cette dernière aurait refusé à tort de qualifier d'arbitraire
l'appréciation des preuves faite par l'autorité de première instance. Le
Tribunal fédéral se prononce librement sur cette question (ATF 125 I 492
consid. 1a/cc et 1b p. 495 et les arrêts cités).

2.2 Dans le cas particulier, le recourant conteste avoir emmené la jeune fille
dans son studio et l'avoir violée. En l'absence de toute trace matérielle des
événements, le tribunal a motivé sa conviction selon laquelle la version de la
victime correspondait à la réalité par le fait qu'elle avait pu décrire
succinctement mais complètement l'appartement du recourant et qu'on ne
comprenait pas comment elle pourrait mentir avec une telle précision et une
telle émotion. Le tribunal a relevé que la psychologue n'avait jamais constaté
de tendance à l'affabulation chez la victime. Il a insisté sur l'émotion
dégagée par l'enregistrement des déclarations faites par celle-ci à la police,
qu'il a opposée à la défense désinvolte ainsi qu'à l'indignation factice de
l'accusé et a considéré que les déclarations de la victime avaient une
résonance psychologique juste. Il a encore précisé que ces déclarations étaient
intervenues dans un contexte d'angoisse et de somatisation et que la victime
avait clairement distingué les deux situations auxquelles elle avait été
confrontée, ayant également été victime d'attouchements de la part de son
beau-père, faits reconnus par ce dernier.
Pour l'essentiel, le moyen du recourant tiré d'une appréciation arbitraire des
preuves a été déclaré purement appellatoire par la cour cantonale et a été
rejeté.
Devant la cour de céans, le recourant se limite à prétendre que l'autorité de
recours s'est contentée de retenir la version de la victime et qu'elle a
confirmé sa condamnation uniquement parce qu'elle n'était pas convaincue de son
innocence, ne donnant au demeurant aucune explication convaincante sur le refus
de prendre en considération sa version plutôt que celle de la victime. Or, il
ressort clairement du dossier que le recourant n'a pas été condamné parce qu'il
n'a pas pu prouver son innocence, mais au contraire que sa culpabilité a été
retenue sur la base d'une appréciation des preuves qui a conduit à admettre que
la version de la victime correspondait à la réalité. En tant qu'il conteste
cette appréciation des preuves sans en démontrer le caractère arbitraire et
sans expliquer en quoi l'arrêt cantonal aurait rejeté à tort son grief, le
recourant ne satisfait pas aux exigences de motivation rappelées ci-dessus et
il n'y a pas lieu d'examiner ce grief, qui doit être déclaré irrecevable.

3.
Le recourant invoque en outre une violation de l'art. 20 CP et prétend que des
doutes auraient dû être nourris sur sa responsabilité pénale et qu'une
expertise psychiatrique aurait donc dû être ordonnée.

3.1 L'art. 20 CP, qui prescrit au juge d'ordonner une expertise s'il existe une
raison sérieuse de douter de la responsabilité de l'auteur, correspond à l'art.
13 al. 1 aCP (cf. Message concernant la modification des dispositions générales
du code pénal et du code pénal militaire; FF 1999, 1787 ss, 1813). La
jurisprudence relative à cette dernière disposition conserve donc sa valeur.
Selon celle-là, le juge doit ordonner une expertise non seulement lorsqu'il
éprouve effectivement des doutes quant à la responsabilité de l'auteur, mais
aussi lorsque, d'après les circonstances du cas particulier, il aurait dû en
éprouver, c'est-à-dire lorsqu'il se trouve en présence d'indices sérieux
propres à faire douter de la responsabilité pleine et entière de l'auteur (ATF
133 IV 145 consid. 3.3; 132 IV 29 consid. 5.1 et les arrêts cités).
A titre d'exemple de tels indices, la jurisprudence mentionne une contradiction
manifeste entre l'acte et la personnalité de l'auteur, le comportement aberrant
du prévenu, un séjour antérieur dans un hôpital psychiatrique, une interdiction
prononcée en vertu du code civil, l'alcoolisme chronique, la dépendance aux
stupéfiants, la possibilité que la culpabilité ait été influencée par un état
affectif particulier ou encore l'existence de signes d'une faiblesse d'esprit
ou d'un retard mental (cf. ATF 116 IV 273 consid. 4a p. 274; 102 IV 74 consid.
1b p. 75 s.).

La jurisprudence a cependant souligné qu'une capacité délictuelle diminuée ne
doit pas être admise en présence de toute insuffisance du développement mental,
mais seulement lorsque l'accusé se situe nettement en dehors des normes et que
sa constitution mentale se distingue de façon essentielle non seulement de
celle des personnes normales mais aussi de celle des délinquants comparables
(ATF 133 IV 145 consid. 3.3; 116 IV 273 consid. 4b p. 276).

3.2 Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir nié l'existence
d'indices suffisants pour ordonner une expertise. Il prétend souffrir de
psychopathie grave, du fait qu'il a violé une jeune fille sourde et muette à
deux reprises dans des conditions abominables pour ensuite manifester un
détachement et une désinvolture considérés comme inquiétants par les premiers
juges.
Le recourant, délinquant primaire, a commis deux viols sur une jeune fille
handicapée. Du fait de son comportement en procédure et notamment de ses
dénégations, on ne dispose d'aucune information sur ses mobiles. Son
comportement est certes troublant et on peut s'interroger sur la personnalité
et l'état psychique d'un auteur d'actes aussi vils, comme c'est le cas pour
tous les délinquants sexuels. Cependant, il ne ressort pas du dossier que ses
facultés mentales étaient altérées au moment où il a agi et le recourant
n'invoque aucun élément permettant de soupçonner que tel aurait été le cas. Le
seul fait qu'il ait commis à deux reprises une infraction sexuelle ne suffit
pas à faire douter de sa responsabilité pénale, sauf à considérer que tout
individu à la vie apparemment ordinaire qui commettrait de telles infractions
serait suspect d'une capacité délictuelle diminuée.
Au surplus, l'expérience enseigne que maintes maladies et comportements
dépendent du psychisme. Estimer qu'il y a matière à doute quant à la
responsabilité chaque fois qu'il est possible, voire vraisemblable, que les
actes ont aussi une origine psychique serait excessif (voir arrêt non publié du
9 septembre 2005 dans la cause 6S.284/2005, consid. 2.3; arrêt du 7 septembre
1983 dans la cause Str.84/1983, publié in SJ 1984 p. 160, consid. 3; ATF 102 IV
225 consid. 7b p. 226).
Le comportement du recourant en cours de procédure, soit le fait qu'il ait
toujours nié et nie encore avoir commis de telles infractions ou son attitude
désinvolte et son détachement, qui étaient pour le moins malvenus en l'espèce,
ne le distinguent pas non plus de la plupart des auteurs d'infractions
sexuelles et ne suffisent pas à faire sérieusement douter de sa pleine
responsabilité pénale.
Dans ces circonstances, l'autorité cantonale n'a donc pas violé le droit
fédéral en refusant d'ordonner une expertise et le grief doit être rejeté.

4.
Partant, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme
ses conclusions apparaissaient d'emblée vouées à l'échec, l'assistance
judiciaire ne peut être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui
succombe, supportera les frais de la cause (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant
sera fixé en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 LTF). Il
ne sera pas alloué de dépens à la victime qui n'est pas intervenue dans la
procédure devant le Tribunal fédéral.

Enfin, la cause étant ainsi tranchée, la requête d'effet suspensif est devenue
sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 1000 francs est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de cassation pénale du
Tribunal cantonal vaudois.
Lausanne, le 16 janvier 2008
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Schneider Paquier-Boinay