Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.572/2007
Zurück zum Index Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2007
Retour à l'indice Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2007


6B_572/2007
6B_573/2007 /rod

Arrêt du 11 décembre 2007
Cour de droit pénal

MM. les Juges Schneider, Président,
Favre et Zünd.
Greffière: Mme Angéloz.

X. ________,
recourant, représenté par Me Nicolas Bornand, avocat,

Y.________,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Neuchâtel,
case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1,
intimé.

Révision (art. 385 CP),

recours contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du
canton de Neuchâtel du 22 août 2007.

Faits:

A.
Par jugement du 9 novembre 2005, le Tribunal correctionnel du Val-de-Travers
a condamné X.________, pour infraction à l'art. 19 ch. 1 LStup, tentative de
lésions corporelles graves commise en excès de légitime défense et mise en
danger de la vie d'autrui, à 30 mois de réclusion, révoquant un sursis
accordé le 9 décembre 2002. Il a également condamné Y.________, frère jumeau
de X.________, pour infraction à l'art. 19 ch. 1 et 2 LStup, fabrication de
fausse monnaie et entrave à l'action pénale, à la peine, partiellement
complémentaire à une autre prononcée le 24 août 1999, de 14 mois de réclusion
avec sursis pendant 5 ans. Il a par ailleurs condamné quatre coaccusés, à
savoir les frères A.________ et B.________, cousins des susnommés, ainsi que
C.________ et D.________ , notamment pour infraction à la LStup.

B.
Il était en substance reproché à X.________ d'avoir préparé un site de
production de chanvre indoor prévu pour 1200 plants. Il lui était en outre
fait grief d'avoir, le 22 décembre 2003, avec un pistolet de calibre 6.35 mm,
qu'il était allé chercher dans sa voiture après une dispute avec ses cousins,
tiré, en visant le bas-ventre, sur B.________, qu'il a atteint, puis tenté de
tirer, sans résultat du fait que l'arme s'était enrayée, sur A.________,
avant de tirer à nouveau en direction de ce dernier alors qu'il s'enfuyait.

S'agissant de Y.________, il a été retenu qu'il avait exploité deux
importants sites de production de chanvre indoor et récolté plusieurs
dizaines de kilos de chanvre, en agissant en bande, avec C.________, et par
métier. Il a également été retenu qu'il s'était rendu à Lausanne, avec
C.________, afin de récupérer l'arme utilisée par son frère le 22 décembre
2003, pour la remettre à la victime et accréditer ainsi la thèse de
l'accident, comportement pour lequel il a toutefois bénéficié d'une exemption
de peine en application de l'art. 305 al. 2 CP. Enfin, il a été retenu qu'il
avait fabriqué et mis en circulation 1000 coupures de 1000 fr.

C.
X.________ s'est pourvu en cassation contre ce jugement, contestant les
lésions corporelles retenues, qu'il estimait devoir être qualifiées de
simples, et la mise en danger de la vie d'autrui, dont il demandait son
acquittement. Y.________ a, quant à lui, renoncé à recourir.

Par arrêt du 19 juillet 2006, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal neuchâtelois a rejeté le pourvoi de X.________.

D.
Contre cet arrêt, X.________ s'est pourvu en nullité au Tribunal fédéral, se
plaignant uniquement de sa condamnation pour l'infraction réprimée par l'art.
129 CP, au motif que l'usage d'une arme enrayée ne pouvait entraîner une mise
en danger de la vie d'autrui et qu'il n'avait pas mis la vie de A.________ en
danger lorsqu'il avait tiré dans sa direction ou, du moins, n'avait eu
d'autre intention que de l'effrayer.

Par arrêt 6S.395/2006, du 2 novembre 2006, le Tribunal fédéral, en
application de l'art. 36a OJ, a rejeté le pourvoi dans la mesure de sa
recevabilité.

E.
Le 13 mars 2007, Y.________ a déposé un pourvoi en révision auprès de la Cour
de cassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois. Il disait vouloir, par
là, rétablir la vérité, car il ne pouvait supporter que son frère soit
condamné pour un acte qu'il n'avait pas commis, soit pour avoir tiré, en le
blessant, sur B.________ et avoir tenté à deux reprises de tirer sur
A.________. A l'appui, il faisait valoir que c'était lui, et non son frère
X.________, qui tenait le pistolet, de sorte que celui-ci ne pouvait avoir
tiré les coups de feu qui lui étaient reprochés. Il expliquait que lui-même
et son frère n'avaient pas voulu révéler plus tôt la vérité, parce qu'ils
n'avaient jamais imaginé que ce dernier serait condamné à une peine ferme
aussi lourde. Ils avaient convenu que lui-même serait uniquement condamné
pour les faits constitutifs d'infraction à la LStup et son frère seulement
pour les coups de feu tirés; les peines seraient ainsi partagées et,
normalement, assorties du sursis. Il en avait finalement été autrement, parce
que son frère avait pris l'initiative de se charger de faits qui ne lui
étaient en réalité pas imputables.

Le 23 mars 2007, X.________ a déposé à son tour une demande de révision. En
substance, il reprenait, en sa faveur, les arguments de son frère Y.________
faisant valoir qu'il s'agissait d'un élément nouveau et décisif.
Subséquemment, il concluait à son acquittement des infractions de mise en
danger de la vie d'autrui et de tentative de lésions corporelles graves et,
partant, à une réduction de la peine qui lui avait été infligée.

Par arrêt du 22 août 2007, la Cour de cassation neuchâteloise a rejeté les
pourvois en révision. En bref, elle a considéré que la version des faits
présentée par les recourants, bien que nouvelle, ne pouvait être qualifiée de
sérieuse, faute d'être suffisamment vraisemblable pour faire douter du
bien-fondé du jugement de condamnation au point de rendre possible un
jugement sensiblement plus favorable à X.________.

F.
X.________, par l'entremise de son mandataire, et Y.________, agissant
personnellement, forment, séparément, un recours en matière pénale au
Tribunal fédéral, pour violation de l'art. 385 CP. Ils concluent, chacun, à
l'annulation de l'arrêt attaqué, à ce que le Tribunal fédéral ordonne la
révision du jugement du 9 novembre 2005 et renvoie la cause au tribunal
compétent pour nouveau jugement en ce sens, subsidiairement au renvoi de la
cause à la Cour de cassation neuchâteloise pour nouvelle décision. ils
sollicitent tous deux l'effet suspensif.

Des déterminations n'ont pas été requises.

Considérant en droit:

1.
Il se justifie de statuer par un seul arrêt sur les deux recours, qui ont le
même objet et portent sur le même complexe de faits.

2.
A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a participé à la
procédure devant l'autorité précédente, ou a été privé de le faire, et a un
intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée
(art. 81 al. 1 let. a et b LTF).

Le recours de Y.________ tend à la modification du jugement de condamnation
du 9 novembre 2005 en ce sens qu'il soit retenu que c'est lui, et non son
frère, qui tenait l'arme lors des événements du 22 décembre 2003. Il vise
ainsi à obtenir la libération de son frère des infractions de mise en danger
de la vie d'autrui et de tentative de lésions corporelles graves, avec, à
tout le moins, la possible conséquence que les faits litigieux lui soient
d'une manière ou d'une autre imputés, comme il l'admet d'ailleurs
explicitement en relevant qu'il est entièrement conscient que sa peine risque
d'être alourdie. Or, il est manifeste que le recourant n'a pas d'intérêt
propre et juridiquement protégé à ce que le jugement de condamnation soit
révisé en faveur de son frère et, moins encore, à ce qu'il le soit en sa
défaveur. Son recours est par conséquent irrecevable.

3.
Pour les mêmes motifs que son frère, le recourant X.________ demande la
révision du jugement de condamnation en sa faveur. Autrement dit, il ne
serait pas l'auteur des coups de feu et devrait donc être libéré des
infractions de mise en danger de la vie d'autrui et de tentative de lésions
corporelles graves.

3.1 L'art. 385 CP correspond textuellement à l'art. 397 aCP, de sorte que la
jurisprudence relative à cette dernière disposition conserve sa valeur.

Il en résulte qu'un fait ou un moyen de preuve est nouveau au sens de l'art.
385 CP, lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est
prononcé, c'est-à-dire lorsqu'il ne lui a pas été soumis sous quelque forme
que ce soit (ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73; 122 IV 66 consid. 2a p. 67 et les
arrêts cités), sans qu'il importe, sous réserve de l'abus de droit, qui ne
doit être admis qu'avec retenue en cas de révision fondée sur l'art. 385 CP,
qu'il ait été connu ou non du requérant (ATF 130 IV 72 consid. 2.2 p. 74). Le
fait ou le moyen de preuve est sérieux, lorsqu'il est propre à ébranler
l'état de fait sur lequel se fonde la condamnation et que, ainsi modifié,
celui-ci rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné
(ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73; 122 IV 66 consid. 2a p. 67 et les arrêts
cités).

Savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de fait
ou de moyen de preuve nouveau et sérieux et si la modification, le cas
échéant, de l'état de fait sur lequel repose la condamnation est de nature à
entraîner une décision plus favorable au condamné relève du droit (ATF 130 IV
72 consid. 1 p. 73 et les arrêts cités). En revanche, savoir si un fait ou un
moyen de preuve était effectivement inconnu du juge relève du fait et celle
de la force probante du fait ou du moyen de preuve de l'appréciation des
preuves, étant rappelé qu'une vraisemblance suffit au stade du rescindant
(ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73 et les arrêts cités).

3.2 L'arrêt attaqué retient que le fait invoqué, à savoir que c'est le frère
du recourant, et non ce dernier, qui serait l'auteur des coups de feu,
n'avait pas été soumis au tribunal et le considère donc à juste titre comme
nouveau. Seule est ainsi litigieuse la question de savoir si c'est à tort que
l'arrêt attaqué nie que ce fait puisse être qualifié de sérieux au sens de
l'art. 385 CP.

3.3 L'arrêt attaqué estime que le fait invoqué, faute d'être suffisamment
vraisemblable, est impropre à entraîner une modification de l'état de fait du
jugement de condamnation.

A l'appui, il relève que la nouvelle version du recourant et de son frère se
heurte à de nombreux faits résultant du dossier. D'une part, les trois autres
participants aux événements du 22 décembre 2003 avaient fait des
déclarations, qui, dans la procédure principale, avaient été jugées
suffisamment concordantes avec celles du recourant et de son frère pour
retenir les faits litigieux à la charge de celui-là. D'autre part, si l'on
retenait la nouvelle version avancée, d'autres déclarations recueillies lors
de l'instruction deviendraient à tout le moins incohérentes. Ainsi, on ne
s'expliquerait pas que le recourant, aussitôt après les coups de feu, se soit
dirigé vers une autre personne, qu'il pensait être B.________, par lequel il
se croyait poursuivi, s'il n'avait eu l'arme à la main; il était impensable
que le recourant, après l'épisode des coups de feu, soit allé à l'encontre de
son adversaire supposé sans être armé. De même, on ne s'expliquerait pas que,
le soir même du 22 décembre 2003, C.________ se soit rendu avec le frère du
recourant au domicile de ce dernier à Lausanne pour lui reprendre l'arme et
la remettre à B.________, afin d'accréditer la thèse d'un accident; si l'arme
avait été en main du frère du recourant, l'expédition à Lausanne en vue de
récupérer l'arme, qui était un fait incontesté, n'aurait eu aucun sens.

3.4 Le recourant critique cette appréciation, dont il soutient qu'elle a
conduit à constater les faits de manière manifestement inexacte.

Le grief de constatation manifestement inexacte des faits n'est pas distinct
de celui pris de l'arbitraire dans l'établissement des faits et revient donc
à se plaindre d'une violation de l'art. 9 Cst. (cf. ATF 133 II 249 consid.
1.4.3 p. 254/255; arrêt 6B_350/2007, du 5 octobre 2007, consid. 5). Comme
tel, il est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2
LTF, lesquelles correspondent à celles qui résultaient de l'art. 90 al. 1
let. b OJ pour le recours de droit public (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p.
287/288; 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254/255). Sous peine d'irrecevabilité le
recourant doit donc démontrer que la décision attaquée, sur le point
contesté, est arbitraire, c'est-à-dire, non seulement discutable ou même
critiquable, mais manifestement insoutenable, et cela non seulement dans sa
motivation mais aussi dans son résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I
8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178).

La motivation du recourant ne satisfait pas à ces exigences. Elle se réduit à
une rediscussion des faits et de l'appréciation des preuves dont ils ont été
déduits, voire à une simple opposition de son interprétation des faits à
celle de l'autorité cantonale, suivie de l'affirmation d'une constatation
manifestement inexacte des faits. Il ne démontre pas en quoi le raisonnement
de l'arrêt attaqué, sur les points contestés, serait arbitraire, au sens
rappelé ci-dessus. Proposer une nouvelle fois sa version des faits, en
contestant ou critiquant simplement celle retenue par l'autorité cantonale ne
suffit pas à faire admettre l'arbitraire allégué. Il n'est dès lors pas
établi, conformément aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, qu'une
vraisemblance suffisante du fait invoqué aurait été niée arbitrairement, ni,
par conséquent, que c'est en violation de l'art. 385 CP que l'autorité
cantonale aurait admis que ce fait n'est pas sérieux au sens de cette
disposition. Le grief est dès lors irrecevable, faute de motivation
suffisante.

4.
Les recours doivent ainsi être déclarés irrecevables et les recourants, qui
succombent, supporteront les frais (art. 66 al. 1 LTF). Les causes étant
tranchées, les requêtes d'effet suspensif deviennent sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de Y.________ est déclaré irrecevable.

2.
Le recours de X.________ est déclaré irrecevable.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge de
Y.________.

4.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge de
X.________.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de cassation pénale
du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 11 décembre 2007

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:

Schneider Angéloz