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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.539/2007
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6B_539/2007 /rod

Arrêt du 15 novembre 2007
Cour de droit pénal

MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Favre.
Greffière: Mme Bendani.

X. ________,
recourant, représenté par Me Hubert Theurillat, avocat,

contre

Y.________,
intimée, représentée par Me Martine Lang, avocate,
Procureur général du canton du Jura,
case postale 196, 2900 Porrentruy 2.

Lésions corporelles graves par négligence,

recours en matière pénale contre l'arrêt de la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton du Jura du 11 juillet 2007.

Faits :

A.
Par jugement du 28 mars 2007, le Tribunal de première instance du canton du
Jura a condamné X.________, pour lésions corporelles graves par négligence, à
une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 150 fr./j., avec sursis pendant 2
ans.

B.
Par arrêt du 11 juillet 2007, la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien a
confirmé le jugement de première instance.

Cette condamnation repose, en bref, sur les éléments suivants.

B.a Le 25 février 2004, peu avant 11 h., A.________, conducteur d'un camion
de l'entreprise B.________ SA, a approché l'avant de son véhicule du centre
de collecte de verre (Eco-point), situé sur le parc St-Germain, à Porrentruy.
Il a saisi, au moyen du bras articulé se trouvant sur le pont du camion, le
container de verre et l'a vidé dans la benne de son engin. Alors qu'il
s'apprêtait à remettre en place le container, il a aperçu Y.________ qui
s'était glissée entre l'avant du camion et le muret délimitant le lieu de la
collecte et a tenté de l'avertir. Elle n'a pas compris les mises en garde et,
après avoir fait un écart à droite, est tombée dans la fosse profonde de 2
mètres 50. Elle s'est fracturée une vertèbre lombaire.

B.b Le centre de collecte Eco-point de Porrentruy est situé au fond d'un
parking, soit dans un lieu particulièrement fréquenté. Il est clairement
délimité sur trois côtés (arrière et latéraux) par un muret constitué de
planches en bois. Il comprend quatre containers pour le tri des déchets, dont
celui pour le verre qui est cause. Il s'agit d'un container enterré. Il est
composé d'une cuve en béton fixée dans le sol et d'un container métallique
d'une contenance de 3m3 et d'un poids à vide de 700 kilos s'introduisant dans
la cuve bétonnée. Il est surmonté d'une bouche solidaire d'un mètre de haut
environ permettant de déposer les bouteilles usagées par les ouvertures
adéquates. Pour extraire le container et le sortir de terre, il faut avoir
recours à une grue. Pendant que celui-ci est sorti du sol, aucune protection
n'est mise sur la fosse ou aux alentours et aucun panneau d'avertissement
n'est placé aux abords.

B.cX.________ est le chef du Service des travaux de la Municipalité de
Porrentruy. Il a signé le contrat de vidange des Eco-points avec la société
B.________ SA.

C.
X.________ dépose un recours en matière pénale. Invoquant une violation des
art. 9 Cst., 11 ss et 122 ss CP, il conclut principalement à son acquittement
et subsidiairement à l'annulation de l'arrêt cantonal.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours ordinaire au Tribunal fédéral peut notamment être formé pour
violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris les droits
constitutionnels. Il doit être motivé (art. 42 al. 1 LTF) et sa motivation
doit exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al.
2 LTF). Les griefs mentionnés à l'art. 106 al. 2 LTF sont toutefois soumis à
des exigences de motivation accrues, correspondant à celles qui résultaient
de l'art. 90 al. 1 let. b OJ pour le recours de droit public, auxquelles ils
doivent satisfaire sous peine d'irrecevabilité (cf. FF 2001 p. 4142).

2.
Le 1er janvier 2007 sont entrées en vigueur les nouvelles dispositions de la
partie générale du code pénal. Celles-ci ne sont en principe applicables
qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (art. 2 al. 1 CP). La loi
réserve toutefois la possibilité d'appliquer le nouveau droit à des crimes et
délits commis avant cette date si l'auteur n'est mis en jugement qu'après et
que le nouveau droit lui est plus favorable que la loi en vigueur au moment
où a été commise l'infraction (art. 2 al. 2 CP).

2.1 Lorsqu'une autorité cantonale de recours est appelée à rendre un arrêt
qui se substitue à la décision de première instance, l'accusé est aussi mis
en jugement devant elle, au sens de l'art. 2 al. 2 CP. Elle est dès lors
tenue d'appliquer le nouveau droit si celui-ci est plus favorable à l'accusé,
même dans les cas où les nouvelles dispositions légales sont entrées en
vigueur après le jugement de première instance (cf. ATF 117 IV 369 consid. 15
p. 386).

En l'occurrence, la Cour pénale a statué en appel. Elle devait par conséquent
appliquer le nouveau droit s'il était plus favorable au recourant.

2.2 Pour déterminer quel est le droit le plus favorable, il y a lieu
d'examiner l'ancien et le nouveau droit dans leur ensemble et de comparer les
résultats auxquels ils conduisent dans le cas concret (ATF 114 IV 81 consid.
3b p. 82). Le nouveau droit ne doit être appliqué que s'il conduit
effectivement à un résultat plus favorable au condamné. Par ailleurs,
l'ancien et le nouveau droit ne peuvent être combinés. Ainsi, on ne saurait,
à raison d'un seul et même état de fait, appliquer l'ancien droit pour
déterminer quelle infraction a été commise et le nouveau droit pour décider
si et comment l'auteur doit être puni. Si l'un et l'autre droit conduisent au
même résultat, c'est l'ancien droit qui est applicable (cf. arrêt 6B_14/2007
du 17 avril 2007 consid. 4.2).

En l'espèce, il n'est pas contesté que seule entre en ligne de compte, en cas
de condamnation du recourant en application du nouveau droit, une peine
pécuniaire de quinze jours-amende, avec sursis. Or, cette sanction est plus
favorable à l'intéressé que l'emprisonnement, avec ou sans sursis, et que
l'amende, nécessairement ferme de l'ancien droit (cf. art. 125 CP dans sa
teneur jusqu'au 31 décembre 2006; arrêt attaqué p. 32; arrêt 6B_175/2007 du
24 août 2007 consid. 3). C'est donc à juste titre que la Cour cantonale a
appliqué les nouvelles dispositions pénales.

3.
Le recourant a été condamné pour lésions corporelles graves par négligence au
sens de l'art. 125 CP. Cette disposition prévoit que celui qui, par
négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité
corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de
liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (al. 1). Si la lésion
est grave le délinquant sera poursuivi d'office (al. 2).

3.1 Le recourant nie la gravité des lésions corporelles subies par la
victime. Il relève que l'état de santé préexistant de cette dernière a pu
influer sur la survenance et les conséquences de l'accident et reproche aux
autorités cantonales de ne pas avoir ordonné d'expertise à ce sujet.

3.1.1 Sont graves au sens de l'art. 125 al. 2 CP, les lésions corporelles qui
satisfont aux exigences de l'art. 122 CP (ATF 93 IV 12). Cette disposition
réprime celui qui, intentionnellement, aura blessé une personne de façon à
mettre sa vie en danger (al. 1), aura mutilé le corps d'une personne, un de
ses membres ou un de ses organes importants ou causé à une personne une
incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, aura
défiguré une personne de façon grave et permanente (al. 2), aura fait subir à
une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la
santé physique ou mentale (al. 3).

L'art. 122 CP énumère ainsi diverses hypothèses dans lesquelles les lésions
corporelles graves doivent être retenues (al. 1 et 2), avant d'énoncer une
clause générale (al. 3). Celle-ci a pour but d'englober les cas de lésions du
corps humain ou de maladies, qui ne sont pas cités par l'art. 122 CP, mais
qui entraînent néanmoins des conséquences graves sous la forme de plusieurs
mois d'hospitalisation, de longues et graves souffrances ou de nombreux mois
d'incapacité de travail (ATF 124 IV 53 consid. 2 p. 56 s.). Il faut procéder
à une appréciation globale et plusieurs atteintes, dont chacune d'elles est
insuffisante en soi, peuvent contribuer à former un tout représentant une
lésion grave (A. Roth, in Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, ad art. 122
n° 19 p. 129 s.; B. Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, ad art.
122 n° 12 p. 131).

Comme la notion de lésions corporelles graves est une notion juridique
indéterminée, la jurisprudence reconnaît, dans les cas limites, une certaine
marge d'appréciation au juge du fait. Dans ces circonstances, le Tribunal
fédéral s'impose une certaine réserve dans la critique de l'interprétation
faite par l'autorité cantonale, dont il ne s'écarte que si cela s'avère
nécessaire (cf. ATF 115 IV 17 consid. 2b p. 20).

3.1.2 En affirmant que l'invalidité préexistante de la victime a pu jouer un
rôle dans la survenance ou les conséquences de l'accident, le recourant se
contente de nier les constatations cantonales, établies sur la base des
certificats médicaux du Dr B.________, sans démontrer en quoi celles-ci
auraient été établies de manière arbitraire, conformément aux exigences
posées par l'art. 106 al. 2 LTF (cf. supra consid. 1). Sa critique est dès
lors irrecevable.

Pour le reste, il ne ressort pas de la décision entreprise que le recourant
aurait requis, devant les autorités cantonales, une expertise quant aux
conséquences de l'invalidité de la victime sur l'accident. Invoqué pour la
première fois devant le Tribunal fédéral dans le cadre d'un recours de droit
pénal soumis à l'exigence de l'épuisement préalable des instances cantonales
(art. 80 al. 1 LTF), ce moyen est nouveau et, partant, irrecevable (cf. arrêt
6B_317/2007 non publié du Tribunal fédéral du 16 octobre 2007; ATF 119 Ia 88
consid. 1a p. 90 s.).
3.1.3 Selon les constatations cantonales qui lient l'autorité de céans (cf.
supra consid. 1), la victime a été hospitalisée durant seize jours. Certes,
sa vie n'a pas été concrètement mise en danger. Elle a cependant subi des
contusions diverses et une fracture de la vertèbre L1 instable qui a
nécessité une intervention neuro-orthopédique avec mise en place d'une
arthrodèse lombaire par un implant et une greffe postéro-latérale bilatérale.
Elle a dû ensuite observer, pendant trois mois, une immobilisation stricte
sous corset avant l'ablation progressive de celui-ci. Elle a été soumise à un
traitement médicamenteux et a dû entreprendre une rééducation du dos qui a
mis en évidence la persistance d'un syndrome rachidien lombaire susceptible
d'être atténué, à défaut d'être totalement résorbé, par des mesures de
rééducation. Dans son rapport du 5 avril 2005, le Dr B.________, spécialiste
en maladies rhumatismales, a constaté la persistance d'un état douloureux et
une perte de mobilité rachidienne due à la mise en place de l'implant
vertébral. A son avis, la victime subissait un dommage permanent et devait
être réopérée, dans un délai d'une année, pour l'ablation du matériel
d'ostéosynthèse. Précisant que sa patiente était invalide pour des motifs
étrangers à l'accident, il a estimé que l'incapacité de travail motivée par
l'accident était de 100 % du 25 février 2004 au 11 février 2005. Dans son
rapport du 6 juillet 2007, ce médecin a confirmé ses précédentes
constatations. Il a précisé qu'une nouvelle intervention n'était plus
d'actualité mais pouvait s'avérer nécessaire à tout moment selon l'évolution
de la patiente. Il a attesté d'une incapacité totale de travailler d'une
année, précisant que la situation de rentière AI à 100 % de la victime était
totalement étrangère aux conséquences de l'accident du 25 février 2004. Cette
dernière a confirmé qu'en raison des blessures subies, elle était encore
limitée dans sa mobilité dans la vie de tous les jours, qu'elle avait dû
poursuivre des séances de physiothérapie et prendre quotidiennement des
médicaments, car elle ressentait toujours des douleurs.

Au regard de l'ensemble de ces éléments et plus particulièrement de
l'hospitalisation suivie d'une immobilisation stricte de trois mois, de
l'incapacité totale de travail d'une année, des douleurs persistantes, des
traitements physiothérapeutiques et médicamenteux poursuivis encore plus de
trois ans après l'accident, la Cour pénale n'a pas violé le droit fédéral en
qualifiant de graves les lésions subies par la victime.

3.2 Le recourant conteste sa position de garant et une violation fautive de
ses obligations. En bref, il soutient que, pour la phase de vidange des
Eco-points, la responsabilité incombait exclusivement à B.________ SA en tant
qu'entreprise spécialisée, dont il n'avait pas à surveiller le travail et qui
ne lui avait jamais fait part d'un quelconque problème.

3.2.1 L'art. 12 al. 3 CP définit la négligence comme une imprévoyance
coupable dont fait preuve celui qui, ne se rendant pas compte des
conséquences de son acte ou n'en tenant pas compte, agit sans user des
précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle.
Pour qu'il y ait négligence, il faut donc, en premier lieu, que l'auteur ait
violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas
excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas
prêté l'attention ou fait les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour
se conformer à son devoir (ATF 122 IV 17 consid. 2b p. 19 s.).
3.2.1.1 Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l'auteur, au
moment des faits, aurait pu, compte tenu de ses connaissances et de ses
capacités, se rendre compte de la mise en danger d'autrui et qu'il a
simultanément dépassé les limites du risque admissible. Pour déterminer plus
précisément quels étaient les devoirs imposés par la prudence, on peut se
référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité
et éviter des accidents. A défaut de dispositions légales ou réglementaires,
on peut se référer à des règles analogues émanant d'associations privées ou
semi-publiques lorsqu'elles sont généralement reconnues. La violation des
devoirs de la prudence peut aussi être déduite des principes généraux, si
aucune règle spéciale de sécurité n'a été violée (ATF 129 IV 119 consid. 2.1
p. 121; 127 IV 62 consid. 2d p. 65; 126 IV 13 consid. 7a/bb p. 17; 122 IV 17
consid. 2b/aa p. 20).

La violation d'un devoir de prudence est fautive, lorsque l'on peut reprocher
à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, de n'avoir pas
déployé l'attention et les efforts qu'on pouvait attendre de lui pour se
conformer à son devoir de prudence, autrement dit d'avoir fait preuve d'un
manque d'effort blâmable (ATF 129 IV 119 consid. 2.1 p. 121; 122 IV 17
consid. 2b p. 19; 121 IV 207 consid. 2a p. 211).

3.2.1.2 Les lésions corporelles par négligence constituent une infraction de
résultat, qui suppose en général une action, mais qui, conformément à l'art.
11 al. 1 CP, peut aussi être réalisée par le fait d'un comportement passif
contraire à une obligation d'agir. Selon l'art. 11 al. 2 CP, reste passif en
violation d'une obligation d'agir celui qui n'empêche pas la mise en danger
ou la lésion d'un bien juridique protégé par la loi pénale bien qu'il y soit
tenu à raison de sa situation juridique, notamment en vertu: de la loi (let.
a), d'un contrat (let. b), d'une communauté de risques librement consentie
(let. c), de la création d'un risque (let. d). L'art. 11 al. 3 CP précise que
celui qui reste passif en violation d'une obligation d'agir n'est punissable
à raison de l'infraction considérée que si, compte tenu des circonstances, il
encourt le même reproche que s'il avait commis cette infraction par un
comportement actif.

L'al. 1 de cette disposition codifie la jurisprudence selon laquelle les
infractions par négligence peuvent aussi être réalisées par omission, dans la
mesure où l'auteur avait un devoir juridique d'agir découlant d'une position
de garant. L'al. 2 énonce une liste non exhaustive des différentes sources de
la position de garant. L'al. 3 pose la condition de l'équivalence. Ainsi,
selon cette norme, une infraction de commission par omission est réalisée
lorsque la survenance du résultat que l'auteur s'est abstenu d'empêcher
constitue une infraction, que ce dernier aurait effectivement pu éviter le
résultat par son action et qu'en raison de sa situation juridique
particulière, il y était à ce point obligé que son omission apparaît
comparable au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (cf.
ATF 117 IV 131 consid. 2a p. 132 s.; 113 IV 68 consid. 5a p. 72).

Pour déterminer si un délit d'omission improprement dit est réalisé, il y a
tout d'abord lieu d'examiner si la personne à laquelle l'infraction est
imputée se trouvait dans une situation de garant (cf. infra consid. 3.2.3).
Ce n'est que si tel est le cas que l'on peut établir l'étendue du devoir de
diligence qui découle de cette position de garant et quels actes concrets
l'intéressé était tenu d'accomplir en raison de ce devoir de diligence (cf.
infra consid. 3.2.4). Lorsque l'auteur a omis de faire un acte qu'il était
juridiquement tenu d'accomplir, il faut encore se demander si cette omission
peut lui être imputée à faute (cf. infra consid. 3.2.5).
3.2.2 L'arrêt attaqué fait grief au recourant de ne pas avoir veillé à ce que
les mesures de sécurité nécessaires pour prévenir les risques prévisibles
liés à un usage normal du domaine public soient prises par le délégataire, ni
surveillé ponctuellement le respect de ces mesures de sécurité. Ce sont ainsi
clairement des omissions qui lui sont reprochées.

3.2.3 Il résulte de la décision entreprise que le recourant est chef du
Service des travaux publics de la Municipalité de Porrentruy. Selon son
cahier des charges, il assume la direction et la surveillance du Service des
travaux publics ainsi que tous les travaux courants; ses tâches comprennent
notamment la surveillance générale de la voirie ainsi que l'établissement des
programmes de travail du personnel de la voirie, la direction du service
immobilier de la commune, la collaboration avec les autres services pour tous
les travaux exécutés sur le territoire de la commune, la surveillance du
dépôt des ordures et autres matériaux, ainsi que la surveillance de manière
générale des travaux confiés à des entreprises privées.

D'après le règlement d'organisation et d'administration de la commune
municipale de Porrentruy (ROAC), le Service des travaux publics assume
notamment la gestion des dossiers relevant des travaux publics, de la voirie,
de l'environnement, des ouvrages publics et des bâtiments communaux ainsi que
la direction et la surveillance générale de la voirie et des chantiers (art.
54).

Au regard du cahier des charges de l'intéressé et du règlement précité, le
recourant assumait une position de garant.

3.2.4 Une fosse en béton d'une profondeur de 2 mètres 50, qui est laissée
ouverte sur le domaine public durant la journée et n'est pas d'emblée visible
par toute personne usant normalement des lieux requiert, conformément aux
règles élémentaires de prudence, la mise en place d'un dispositif de sécurité
adéquat. Celui-ci peut consister en une protection solide entourant de tous
côtés l'ouverture de la fosse ou en une signalisation par des panneaux
apparents. En effet, à propos des obstacles momentanés n'entravant le flux du
trafic que temporairement et irrégulièrement, la publication intitulée
"sécurité au travail" de la SUVA, valable pour toutes les entreprises
assujetties à la LAA, mentionne qu'on peut prévenir le danger de ces
obstacles, entre autres, par une signalisation particulièrement apparente. La
publication SUVA "ouverture dans les planchers, parois et places de
chargement et déchargement", mentionne, au titre de règles fondamentales, que
les points de chute doivent être protégés par des entourages fixes de un
mètre de hauteur au moins ou par des dispositifs équivalents. Elle prévoit
également que les places de chargement et de déchargement doivent être
aménagées de manière que les marchandises puissent être chargées et
déchargées en toute sécurité et qu'elles ne représentent aucun danger de
chute pour le personnel et pour la charge.

Selon les faits établis, l'intéressé s'est rendu une fois sur place pour
examiner comment B.________ SA effectuait son travail. Toutefois, il n'a rien
retiré de particulier de cette visite. Ce n'est qu'après l'accident du
25 février 2004 qu'il a constaté que l'entreprise ne prenait pas les mesures
de sécurité nécessaires. Or, conformément à son cahier des charges, le
recourant assume la surveillance de la voirie et d'une manière générale des
travaux confiés à des entreprises privées. Dans cette mesure, il devait
surveiller, de manière ponctuelle, le travail effectué par l'entreprise
B.________ SA, détecter les risques existants et prendre les mesures
nécessaires à la sécurité de l'aire de recyclage ou exiger de l'entrepreneur
qu'il les prenne. Il n'a cependant procédé qu'à un seul contrôle, n'a décelé
aucun problème dans le travail de l'entreprise mandatée, ni exigé les mesures
de protection nécessaire. Il a ainsi omis l'accomplissement d'actes qu'il
était juridiquement tenu d'accomplir. Il a donc violé, par omission, les
devoirs de prudence qui lui incombaient.

3.2.5 L'arrêt attaqué constate que le recourant est au bénéfice d'une
formation d'ingénieur civil et exerce la fonction de chef du Service des
travaux publics auprès de la Municipalité de Porrentruy depuis 1994. De plus,
il connaissait parfaitement son cahier des charges et l'existence de norme de
sécurité. Partant, il disposait des connaissances personnelles nécessaires
pour se conformer au devoir de prudence raisonnablement exigible de sa part.
Son omission lui est par conséquent imputable à faute.

3.3 Le recourant se prévaut de l'interruption du lien de causalité en raison
du comportement de la victime.

3.3.1 En cas d'omission, la question de la causalité ne se présente pas de la
même manière qu'en cas de commission (ATF 117 IV 130 consid. 2a p. 133 et les
arrêts cités); l'omission d'un acte est en relation de causalité naturelle
avec le résultat de l'infraction présumée si l'accomplissement de l'acte eût
empêché la survenance de ce résultat avec une vraisemblance confinant à la
certitude ou, du moins, avec une haute vraisemblance (ATF 116 IV 306 consid.
2a p. 310; cf. également ATF 121 IV 286 consid. 4c p. 292, 118 IV 130
consid. 6a p. 141); elle est en relation de causalité adéquate avec le
résultat si l'accomplissement de l'acte omis aurait, selon le cours ordinaire
des choses et l'expérience de la vie, évité la survenance de ce résultat (ATF
117 IV 130 consid. 2a p. 133).

La causalité adéquate peut être exclue, l'enchaînement des faits perdant sa
portée juridique, si une autre cause concomitante, par exemple une force
naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une
circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire, que
l'on ne pouvait pas s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne
suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut
encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la
plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à
l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et
notamment le comportement de l'auteur (ATF 121 IV 10 consid. 3, 207 consid.
2a p. 213; 120 IV 300 consid. 3e p. 312).

3.3.2 Compte tenu de l'absence totale de toute signalisation de la fosse dès
la phase initiale de la mise en exploitation du centre de déchets, il est
hautement vraisemblable que le recourant, s'il avait surveillé, de manière
ponctuelle, le travail de l'entreprise B.________ SA, aurait remarqué
l'absence de toutes mesures de protection et aurait exigé une sécurité
adéquate, de sorte que l'accident ne se serait pas produit. Par ailleurs,
selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait que le
maître de l'ouvrage exige des mesures pour sécuriser un trou ouvert au
domaine public durant la journée est propre à éviter qu'un accident ne
survienne. Il existe donc un rapport de causalité naturelle et adéquate entre
l'omission relevée et le résultat qui s'est produit.

Le fait que la victime ait vu le camion et se soit glissée dans un passage de
60 à 65 cm, pour passer entre l'avant du véhicule et la barrière entourant la
déchetterie, ne constitue pas un comportement si imprévisible ou
extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. En effet, en amenant ses
déchets au centre de tri, l'intimée accomplissait un acte ordinaire qui
n'exige pas une attention particulière. De plus, la configuration des lieux,
en raison de la présence des piliers en béton du pont suspendu et d'un muret
en bois bordant les containers, empêche les usagers empruntant le même
cheminement que la victime de voir d'emblée la fosse en question. Enfin, la
présence et le bruit de la grue et du camion détournent l'attention des
usagers et constituent davantage, contrairement à ce que pense le recourant,
un facteur de risque de chute. Ce danger est d'autant plus élevé qu'il ne
tombe pas sous le sens de tout usager que la vidange de ces containers impose
de les sortir de leur cuve et de laisser ouverte une fosse de 2 mètres 50 de
profondeur, sans protection aucune.

3.4 Sur le vu de ce qui précède, les conditions de l'art. 125 CP sont
réalisées. La condamnation du recourant pour lésions corporelles graves par
négligence ne viole donc pas le droit fédéral.

Le recourant invoque également l'arbitraire et la violation du principe in
dubio pro reo. Il n'étaye cependant pas ces griefs par une motivation
distincte de celle qu'il présente à l'appui de la violation des art. 11 et
125 CP. Dans la mesure où il entendrait néanmoins en faire des griefs
séparés, ceux-ci seraient dès lors irrecevables, faute d'être motivés
conformément aux exigences légales (cf. supra consid. 1).

4.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure de sa recevabilité et le
recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au
Procureur général du canton du Jura et à la Cour pénale du Tribunal cantonal
du canton du Jura.

Lausanne, le 15 novembre 2007

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le président:    La greffière: