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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.480/2007
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6B_480/2007 /rod

Arrêt du 31 janvier 2008
Cour de droit pénal

MM. les Juges Schneider, Président,
Favre et Zünd.
Greffier: M. Oulevey.

X. ________,
Y.________,
recourants,
tous deux représentés par Me Marc Cheseaux,
avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Ordonnance de non-lieu,

recours contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du canton de Vaud du
11 mai 2007.

Faits:

A.
Par acte du 9 mai 2004, X.________ a déposé plainte contre des membres
inconnus du personnel soignant du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
(CHUV). Il leur reprochait d'avoir voulu abandonner le traitement de son fils
Y.________, né en 1983. Celui-ci a également porté plainte le 2 février 2007.

Par ordonnance du 21 mars 2007, le juge d'instruction en charge du dossier a
prononcé un non-lieu.

B.
Sur recours de X.________ et de Y.________, le Tribunal d'accusation du
canton de Vaud a confirmé cette ordonnance, par arrêt du 11 mai 2007.

C.
X.________ et Y.________ recourent au Tribunal fédéral contre cet arrêt, dont
ils demandent l'annulation pour violation de leur droit d'être entendus et
appréciation arbitraire des preuves.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Seules ont qualité pour former un recours en matière pénale ou un recours
constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral les personnes qui justifient
d'un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision
attaquée (cf. art. 81 al. 1 let. b et 115 let. b LTF, a contrario). Un
intérêt de fait ne suffit pas.

1.1 La loi pénale de fond ne confère pas au lésé un droit à l'application des
peines et mesures qu'elle prévoit. L'action pénale appartient exclusivement
au ministère public, qui est dès lors en principe le seul à pouvoir remettre
en cause une décision favorable au prévenu. Certes, la loi fédérale du 4
octobre 1991 sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5) apporte
quelques exceptions à ce principe, en donnant à la personne dont l'intégrité
corporelle, psychique ou sexuelle a été atteinte directement par l'infraction
(victime; art. 2 al. 1 LAVI), ainsi qu'à certains de ses proches dans la
mesure où ceux-ci peuvent faire valoir des prétentions civiles contre
l'auteur de l'infraction (proches assimilés à la victime; art. 2 al. 2 let. b
LAVI), le droit de faire contrôler par une autorité judiciaire supérieure le
refus du ministère public d'exercer l'action pénale ou l'ordonnance de
non-lieu rendue par le juge d'instruction (art. 8 al. 1 let. b LAVI), ainsi
que le droit de recourir contre un jugement au fond, si ces personnes ont
participé à la procédure et si le jugement peut avoir un effet sur le
jugement de leurs prétentions civiles (art. 8 al. 1 let. c LAVI). Mais ces
exceptions sont exhaustives. Même s'il a qualité de victime au sens de la
LAVI, le lésé ne peut recourir au Tribunal fédéral contre la décision
judiciaire contrôlant le refus de suivre ou le non-lieu que si celui-ci peut
avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (cf. art. 81 al.
1 let. b ch. 5 LTF). Sinon, il ne peut recourir, comme tous les autres lésés,
que pour se plaindre de la violation d'un droit formel que la loi de
procédure applicable lui attribue en sa qualité de partie au procès ou parce
qu'on lui aurait dénié à tort le droit de porter plainte (cf. art. 81 al. 1
let. b ch. 5 et 6 LTF; ATF 133 IV 228 et les références).

1.2 Conformément à la jurisprudence rendue à propos de l'art. 270 PPF, qui
reste valable pour l'interprétation de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF (ATF
133 IV 228 consid. 2.3.3 p. 234), la victime n'a pas de prétention civile, au
sens de ces dispositions, si, pour les actes reprochés au prévenu, une
collectivité publique assume une responsabilité de droit public exclusive de
toute action directe contre l'auteur (ATF 128 IV 188 consid. 2.2 p. 191 et
les références; Gilbert Kolly, Le pourvoi en nullité au Tribunal fédéral,
Berne 2004, p. 31/32). Dans le canton de Vaud, le CHUV constitue l'un des
services du département chargé de la santé (art. 2 al. 1 de la loi vaudoise
du 16 novembre 1993 sur les hospices cantonaux; RS/VD 810.11). Il s'ensuit
que la responsabilité de son personnel, notamment à l'égard des patients, est
régie par la loi vaudoise du 16 mai 1961 sur la responsabilité de l'État, des
communes et de leurs agents (RS/VD 170.11), dont l'art. 5 exclut toute
responsabilité personnelle de l'agent envers le lésé. Qu'ils bénéficient ou
non de la protection de la LAVI - ce qui est le cas du fils, mais non
nécessairement du père - X.________ et Y.________ ne peuvent donc recourir au
Tribunal fédéral que pour la violation des droits formels que leur conférait
leur qualité de partie au procès.

1.3 Comme l'a déjà précisé la jurisprudence rendue sous l'empire de la loi
fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 - jurisprudence qui
reste applicable aux recours prévus par la LTF, dès lors que la nouvelle loi
s'inscrit en la matière dans la continuité de l'ancienne (ATF 133 IV 228
consid. 2.3.3 p. 234) - les droits formels dont le lésé peut invoquer la
violation devant le Tribunal fédéral doivent être entièrement séparés du
fond. Ainsi, le lésé peut faire valoir que l'autorité cantonale a refusé à
tort d'entrer en matière sur le recours dont il l'avait saisie, qu'elle ne
lui a pas donné l'occasion de s'exprimer, qu'elle ne lui a pas donné
l'occasion de formuler des réquisitions tendant à l'administration de preuves
ou, encore, qu'elle ne lui a pas donné accès au dossier. Mais, faute d'avoir
qualité pour recourir sur le fond, le lésé ne peut contester ni
l'appréciation des preuves, ni le rejet d'une réquisition motivé par une
appréciation anticipée de la preuve requise ou par le défaut de pertinence du
fait à établir (ATF 120 Ia 157 consid. 2a/bb p. 160 et les références).

En l'espèce, le moyen que les recourants prennent d'une appréciation
arbitraire des preuves (ch. 2 de leur mémoire) est dès lors irrecevable.

2.
Les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir violé le droit d'être
entendu que leur confèrent les art. 29 al. 2 Cst. et 189 al. 1 du code de
procédure pénale vaudois (CPP/VD; RS/VD 312.01), en confirmant le non-lieu
sans nouvelle opération, alors que le juge d'instruction avait rendu son
ordonnance sans leur avoir permis de s'expliquer de vive voix.

2.1 La portée du droit d'être entendu et les modalités de sa mise en oeuvre
sont déterminées d'abord par la législation cantonale, puis par le droit
constitutionnel fédéral. Le Tribunal fédéral revoit l'application et
l'interprétation du premier sous l'angle restreint de l'arbitraire. Il
examine en revanche librement si les garanties minimales consacrées par le
droit constitutionnel fédéral ont été respectées (ATF 128 II 311 consid. 2.1
p. 315 et les arrêts cités).

2.2 L'art. 189 al. 1 CPP/VD, invoqué par les recourants, prévoit que le juge
entend (auditionne) les personnes qu'il présume pouvoir donner des
informations utiles et, dans tous les cas, le prévenu et le plaignant. Cette
disposition appartient toutefois à la Section II du Chapitre III du Titre II
du CPP/VD, qui définit les mesures d'instruction à prendre dans les enquêtes
ouvertes en procédure ordinaire. Elle ne s'applique dès lors pas à la
présente cause, où l'enquête, ouverte en la forme sommaire, était régie par
les art. 254 ss CPP/VD - notamment par l'art. 259 CPP/VD, aux termes duquel
le juge n'entend le plaignant que dans la mesure où il l'estime utile,
notamment pour tenter la conciliation prévue à l'art. 146 CPP/VD. Certes, les
recourants soutiennent que les conditions légales de la forme sommaire
n'étaient pas remplies en l'espèce et que le juge d'instruction aurait dû
opter pour la procédure ordinaire. Mais ils se bornent, pour ce faire, à
opposer leur point de vue à celui de la cour cantonale, sans tenter de
démontrer concrètement en quoi l'instruction aurait présenté des difficultés
particulières. Leurs critiques sur ce point sont donc purement appellatoires
et, comme telles, irrecevables (art. 106 al. 2 LTF; cf. ATF 125 I 492
consid. 1b p. 494 et les références). Aussi la cour de céans est-elle liée
par l'appréciation de la cour cantonale, selon laquelle les conditions d'une
ouverture en la forme sommaire étaient remplies, de sorte que l'art. 189 al.
1 CPP/VD n'était pas applicable en l'espèce. Dans la mesure où elle est
recevable, la partie du moyen prise d'une violation arbitraire du droit
cantonal est dès lors mal fondée.

2.3 Au niveau fédéral, l'art. 29 al. 2 Cst. ne confère aucun droit à
l'oralité de la procédure (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 428 et les arrêts
cités). Il ne donne notamment pas aux parties le droit de s'exprimer
verbalement devant l'autorité appelée à prendre une décision (ATF 125 I 209
consid. 9b p. 219). Au regard de cette disposition, il suffit que chaque
intéressé puisse fournir ses explications ou présenter son point de vue
verbalement ou par écrit, en personne ou par l'intermédiaire d'un
représentant (ATF 125 I 113 consid. 2a p. 115). Comme les recourants n'ont
pas été empêchés de faire connaître par écrit leur point de vue aux autorités
cantonales, la partie de leur moyen prise d'une violation du droit
constitutionnel fédéral est également mal fondée.

2.4 Au demeurant, avant de clore son enquête, le juge d'instruction a,
conformément à l'art. 188 CPP/VD, imparti un délai aux recourants pour
"formuler toute réquisition". Au terme de ce délai, le conseil de X.________
et Y.________ a fait savoir au juge qu'il "ne voyait pas quelles opérations"
pourraient encore être utiles avant la clôture . Dès lors, même si les
dispositions qu'ils invoquent leur avaient donné droit à une audition
personnelle, force aurait alors été de constater que les recourants ont
renoncé à l'exercice de ce droit, qui n'aurait dès lors été violé ni par le
juge d'instruction, ni par la cour cantonale.

En définitive, dans la mesure où il est recevable, le moyen que les
recourants prennent d'une violation de leur droit d'être entendus est   mal
fondé. Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la faible mesure où
il est recevable.

3.
Les recourants, qui succombent, supporteront les frais de justice (art. 66
al. 1 LTF), fixés à 1'000 francs.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, fixés à 1'000 fr., sont mis à la charge des
recourants.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal d'accusation du
canton de Vaud.

Lausanne, le 31 janvier 2008

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Schneider Oulevey