Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.357/2007
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6B_357/2007 /rod

Arrêt du 11 octobre 2007
Cour de droit pénal

MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Mathys.
Greffier: M. Vallat.

X. ________,
recourant, représenté par Me Guillaume Perrot, avocat,

contre

Y.________,
Ministère public du canton de Vaud, case postale, 1014 Lausanne.

Indemnité à titre de dépens,

recours en matière pénale contre le jugement du Tribunal d'accusation du
Tribunal cantonal du canton de Vaud du 29 mars 2007.

Faits :

A.
Par ordonnance du 3 novembre 2006, le Juge d'instruction de l'arrondissement
de La Côte a condamné Y.________, pour voies de fait, à cinq jours d'arrêts
avec sursis durant un an, peine complémentaire à celle prononcée le 28 août
2006 par le Procureur général de la République et canton de Genève. Il a, en
outre, rejeté la requête de X.________ tendant à l'allocation d'une
réparation morale et de dépens pénaux.

Saisi d'une opposition de la partie civile sur la seule question des dépens,
le Tribunal d'accusation du canton de Vaud l'a rejetée par arrêt du 29 mars
2007, notifié le 8 juin suivant.

B.
X.________ interjette un recours en matière pénale contre cet arrêt. Il
conclut, sous suite de dépens, principalement à sa réforme en ce sens que la
somme de 500 francs lui soit allouée à titre de dépens et, à titre
subsidiaire, à l'annulation de la décision entreprise et au renvoi de la
cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.

Il n'a pas été requis de déterminations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision entreprise est postérieure au 1er janvier 2007. La procédure est
régie par le nouveau droit (art. 132 al. 1 LTF).

2.
Le recourant a pris part à la procédure devant l'autorité précédente. Il a un
intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de l'arrêt entrepris en
tant que ce dernier lui refuse l'allocation de dépens pour la procédure qui a
abouti à l'ordonnance de condamnation du 3 novembre 2006 (art. 81 let. a et b
LTF). Le recourant a dès lors qualité pour former un recours en matière
pénale (Niklaus Schmid, Die Strafrechtbeschwerde nach dem Bundesgesetz über
das Bundesgericht - eine erste Auslegeordnung, RPS 2006 p. 160 ss, spéc. p.
187).

3.
Le recours peut être formé pour violation du droit tel qu'il est circonscrit
aux art. 95 et 96 LTF. L'art. 95 LTF mentionne quelques domaines particuliers
du droit cantonal dont la violation constitue un motif de recours, tels les
droits constitutionnels cantonaux (let. c), les dispositions cantonales sur
le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations
populaires (let. d) et le droit intercantonal (let. e). Hors de ces domaines
spécifiques, l'entrée en vigueur de la LTF n'a pas modifié l'étendue du
pouvoir d'examen exercé par le Tribunal fédéral sur l'application du droit
cantonal et communal. L'application de ces normes ne peut être invoquée à
l'appui d'un recours au Tribunal fédéral que s'il en résulte une violation du
droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF, soit notamment de la garantie
constitutionnelle fédérale contre l'arbitraire (art. 9 Cst.) (ATF 133 II 249
consid. 1.2.1 p. 251).

Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un
principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière
choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne
s'écarte de la solution retenue par la cour cantonale de dernière instance
que si elle apparaît insoutenable - et non seulement critiquable ou
discutable -, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée
sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas
que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il
que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 132 III 209 consid.
2.1; 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p.
178).

4.
4.1 L'allocation d'une indemnité à titre de dépens dans les procédures pénales
régies par le droit cantonal n'est imposée par aucun principe général ni
aucune règle de niveau international ou encore constitutionnel ou légal du
droit fédéral (ATF 105 Ia 127 consid. 2b et 3 p. 128 s. et 130 s.).
4.2 Dans le canton de Vaud, l'allocation des dépens est réglée par l'art. 163
du Code de procédure pénale du 12 septembre 1967 (RS/VD 312.01). Les dépens
comprennent les honoraires d'avocat, la perte de gain et les débours divers
qu'une partie a assumés pour participer au procès pénal ou à l'action civile
jointe au procès pénal, et dont elle peut réclamer le remboursement à une
autre partie, sauf au Ministère public (al. 1 ). Sous réserve de l'art. 97,
let. d, le sort des dépens est réglé en même temps que celui des frais. Les
règles concernant les frais sont applicables par analogie (al. 2). La réserve
de l'art. 97 let. d concerne le cas où la partie civile conclut qu'il lui
soit donné acte de ses réserves tant pour les dommages intérêts que pour les
dépens.

La doctrine souligne que le juge pénal vaudois doit user de son pouvoir
d'appréciation et n'est limité que par l'arbitraire. Il doit tout d'abord
évaluer l'utilité de la présence de la partie au procès et lorsque l'utilité
est reconnue, apprécier l'ampleur des frais engagés en vue de la procédure et
dans le cadre de celle-ci (Jean-Daniel Martin, Le juge instructeur vaudois et
sa compétence spéciale, thèse, Lausanne 1985, p. 107). Selon la pratique des
autorités vaudoises, sur laquelle s'est fondée la cour cantonale, la partie
civile qui a consulté un avocat n'a droit à l'allocation de dépens que si son
intervention est justifiée par un intérêt civil suffisant, qui peut être nié
en raison notamment du caractère peu grave de l'infraction (Benoît Bovay,
Michel Dupuis, Laurent Moreillon, Christophe Piguet, Procédure pénale
vaudoise, code annoté, Lausanne 2004, art. 163 n. 4.4 et la jurisprudence
cantonale citée).

4.3 Le recourant invoque tout d'abord les art. 157 al. 1 et 159 CPP/VD.
Conformément à la première de ces dispositions, en règle générale, si le
prévenu est condamné à une peine, les frais sont mis à sa charge. Le
recourant relève que cette règle est applicable par analogie à la question
des dépens (art. 163 al. 2 CPP/VD). Il en déduit qu'en cas de condamnation,
le juge pénal ne devrait refuser des dépens au plaignant que dans des cas
tout à fait exceptionnels, notamment lorsqu'il a agi par dol, témérité ou
légèreté ou s'il a compliqué l'instruction (art. 159 CPP/VD).

L'art. 157 CPP/VD est introduit par la locution "en général" et l'énumération
de l'art. 159 CPP/VD, précédée de l'adverbe "notamment" n'est pas exhaustive
(Bovay et al., op. cit., art. 159, n. 1.1). Le juge dispose sur la question
des frais également d'un large pouvoir d'appréciation (Bovay et al. , op.
cit., art. 157, n. 1), si bien que les normes invoquées par le recourant
n'imposent pas si impérativement la lecture restrictive qu'il en donne à
propos des dépens que toute autre interprétation apparaîtrait d'emblée
insoutenable. Il ne va d'ailleurs pas de soi que le refus d'allouer des
dépens à une partie soit soumis exactement aux mêmes règles que celles
permettant de lui imposer des frais - ces derniers pouvant, contrairement aux
dépens (Bovay et al., op. cit., art. 163 n. 5.5), demeurer à charge de l'Etat
(art. 162 CPP/VD) - ou de supporter les dépens d'une autre partie. L'art. 163
al. 2 CPP/VD n'y renvoie du reste que par analogie.
Il s'agit donc plutôt d'examiner si l'absence d'intérêt civil suffisant
constitue un critère pertinent pour justifier le refus des dépens à la partie
civile ou plaignante et si la gravité de l'infraction pénale permet
d'appréhender cet intérêt civil.

4.4
4.4.1 La première question doit, à l'évidence, être résolue par l'affirmative.
En tant que l'intérêt civil au litige - soit, selon la pratique cantonale,
l'existence rendue vraisemblable par celui qui se constitue partie civile
d'un rapport de causalité direct ou indirect entre un dommage dont il réclame
réparation et les actes dont le prévenu doit répondre (Bovay et al., op.
cit., art. 93 n. 1.3) - constitue la condition même à laquelle la qualité de
partie civile est reconnue (art. 93 CPP/VD), ce critère n'apparaît pas
critiquable lorsqu'il s'agit, en fin de procédure, de déterminer si la partie
civile peut ou non prétendre des dépens à charge du prévenu. En définitive, à
ce stade de la procédure, savoir si la partie civile avait un intérêt civil
suffisant à la procédure pénale revient, pour l'essentiel, à se demander si
elle a obtenu gain de cause, que ses prétentions civiles lui aient été
allouées ou qu'elles aient tout au moins été réservées à l'examen de la
juridiction civile.

Le recourant s'étant constitué partie civile et ayant pris des conclusions en
réparation du dommage, il n'est pas nécessaire d'examiner si ce même critère
est pertinent en ce qui concerne le plaignant qui n'a pas pris de conclusions
civiles, à qui la loi reconnaît de plein droit la qualité de partie civile
même en l'absence de toute prétention à la réparation d'un dommage (art. 94
CPP/VD). Faute de toute motivation sur ce point (art. 106 al. 2 LTF), il
n'est pas nécessaire non plus d'examiner si l'unique critère de l'intérêt
civil rend suffisamment compte de l'utilité de la présence dans la procédure
pénale du plaignant qui élève en outre des prétentions civiles.

4.4.2 Plus délicat est de savoir si la gravité de l'infraction permet de
déterminer l'existence d'un intérêt civil suffisant. Ce critère a été jugé
contestable en doctrine (Martin, op. cit., p. 107). Cet auteur relève à juste
titre que la gravité de l'infraction est sans rapport avec les questions
civiles qui en découlent et souligne que seul est déterminant l'intérêt civil
au litige. Pour fondée qu'elle puisse paraître, cette critique ne permet
cependant pas encore de dire à elle seule qu'il serait absolument
insoutenable de prendre en considération la gravité de l'infraction pénale
pour allouer ou refuser des dépens à la partie civile.
Quoi qu'il en soit, selon la jurisprudence cantonale, la décision de rejet
des conclusions civiles, qui a force de chose jugée, ne doit être prise que
si les conclusions civiles apparaissent d'emblée dénuées de tout fondement
(Bovay et al., op. cit., art. 372, n. 3.1). Dans cette hypothèse, réalisée en
l'espèce, l'inexistence d'un intérêt civil au litige pénal est patente et
peut partant déjà justifier le refus d'allouer des dépens selon la pratique
rappelée ci-dessus. La partie civile n'obtient au demeurant pas gain de
cause. Il est donc d'autant moins arbitraire d'en refuser l'allocation si
l'infraction reprochée est, au surplus, de peu de gravité.

4.5 Le recourant soutient ensuite que la pratique de la cour cantonale serait
contradictoire. Il se réfère à une décision rendue par la cour cantonale le
23 mars 2007 dans un dossier PE05.041689-NKO. Cette décision repose cependant
sur un état de fait sensiblement différent du cas d'espèce, tant en ce qui
concerne le montant des prétentions civiles (plusieurs milliers de francs) et
l'issue du litige sur ce point (acte ayant été donné à la partie de ses
réserves civiles), que le nombre et la gravité des infractions retenues
(lésions corporelles simples, voies de fait, injure, menaces, violence ou
menace contre les autorités et les fonctionnaires, opposition aux actes de
l'autorité, infraction à la loi sur les transports publics et contravention à
la loi fédérale sur les stupéfiants), ainsi que la peine prononcée (trente
jours de peine privative de liberté). Le recourant ne peut dès lors rien
déduire en sa faveur de cette décision de la cour cantonale sous l'angle de
l'égalité de traitement ou de l'arbitraire.

4.6 Le recourant invoque encore une inégalité de traitement avec les victimes
au bénéfice des garanties de la Loi fédérale sur l'aide aux victimes
d'infractions. Cette loi a cependant précisément pour but de renforcer les
droits des victimes (art. 1 al. 1 LAVI) au sens de l'art. 2 LAVI. Le
recourant, qui n'en a du reste pas demandé le bénéfice, ne tente pas de
démontrer qu'il remplirait les conditions d'accès aux prestations prévues par
cette loi, ce qui ne va pas de soi lorsque sont en cause de simples voies de
fait (ATF 125 II 265 consid. 2a/aa p. 268, consid. 2e p. 271; ATF 120 Ia 157
consid. 2d/aa-bb p. 162). Cette argumentation ne lui est d'aucun secours.

5.
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la cause (art. 66 al. 1 LTF)
et ne peut prétendre des dépens (art. 68 al. 2 LTF). Il n'y a pas lieu d'en
allouer non plus aux parties intimées, qui n'ont pas été invitées à se
déterminer.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2000 francs est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et à
l'intimé, ainsi qu'au Ministère public et au Tribunal d'accusation du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 11 octobre 2007

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: