Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.321/2007
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6B_321/2007 /rod

Arrêt du 15 août 2007
Cour de droit pénal

MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Favre.
Greffière: Mme Angéloz.

X. ________,
recourant, représenté par Me François Roux, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
case postale, 1014 Lausanne.

Assassinat; infraction grave et contravention à la loi fédérale sur les
stupéfiants; internement,

recours en matière pénale contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de
Vaud, Cour de cassation pénale, du 28 mars 2007.

Faits :

A.
Par jugement du 14 décembre 2006, le Tribunal criminel de l'arrondissement de
l'Est vaudois a condamné X.________, né en 1966, pour assassinat, infraction
grave et contravention à la LStup, à 15 ans de réclusion. Il a suspendu
l'exécution de la peine et ordonné l'internement de l'accusé en milieu
carcéral, en application de l'art. 43 aCP. Il a par ailleurs statué sur des
conclusions civiles.

Saisie d'un recours de X.________, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois l'a rejeté par arrêt du 28 mars 2007, confirmant le jugement
attaqué, dont elle a toutefois rectifié d'office le dispositif en ce sens que
l'accusé était condamné à une peine privative de liberté de 15 ans et
l'internement ordonné en application de l'art. 64 al. 1 CP.

B.
Cet arrêt retient, en résumé, ce qui suit.

B.a Dans les années 1980, X.________ avait noué une relation avec Y.________,
personne fragile et toxicomane. Après des retrouvailles de hasard, ils sont
restés en contact.

Le 18 septembre 2004, X.________ s'est réveillé à la mi-journée. Il a absorbé
la méthadone et le médicament qui lui étaient prescrits contre sa toxicomanie
et son alcoolisme, puis a entamé une consommation d'alcool qui s'est
poursuivie jusque dans la soirée. Il a alors appelé Y.________, qui a accepté
de le recevoir chez elle, puis s'est mis en route, muni d'un solide couteau à
lame repliable.

Arrivé chez Y.________, il s'est installé avec elle sur le canapé. La
conversation, relative aux problèmes de toxicomanie de Y.________, s'est
envenimée et celle-ci a quitté la pièce. Pendant son absence, X.________ a
ouvert son couteau. Au retour de Y.________, il l'a empoignée à la gorge et
l'a frappée plusieurs fois au torse avec son couteau, lui assénant en outre
de nombreux coups de poing. Après avoir tenté de se défendre, la victime a
glissé à terre et n'a plus bougé ni crié. X.________ s'est alors rendu à la
cuisine pour laver ses mains et son arme, dont il a replié la lame. De retour
au salon, il a remarqué que la victime râlait et lui a donné un coup de botte
dans la gorge, qui a été fatal.
S'agissant des motifs de son acte, X.________ a expliqué qu'il avait voulu
faire taire la victime, qui avait décliné sa proposition d'intervenir dans
ses relations avec ses fournisseurs de cocaïne, lui avait fait comprendre
qu'il n'avait pas à se mêler de sa vie privée et avait persisté à parler de
drogue, sujet qui le contrariait.

B.b Du printemps à l'automne 2000, X.________ a acquis quelque 180 g
d'héroïne, dont il a cédé quelque 130 g, correspondant à 24 g d'héroïne pure.
En 2000 et de janvier à mai 2004, il a consommé régulièrement de l'héroïne, y
compris après l'introduction de son traitement de substitution à la
méthadone, et occasionnellement de la marijuana et de la cocaïne. Il a été
retenu que la consommation antérieure au 14 novembre 2003 était prescrite.

B.c X.________ a été soumis à une expertise psychiatrique, supervisée par la
Dresse Z.________. Du rapport établi le 18 août 2005, il ressort que
l'expertisé souffre d'un trouble de la personnalité de type dyssocial et de
troubles mentaux et comportementaux liés à l'utilisation d'alcool, d'opiacées
et de benzodiazépines. Ces troubles n'affectent pas sa conscience, mais
altèrent sa volonté dans une mesure moyenne. Les experts ont relevé le
caractère grave et durable de la psychopathologie que présentait l'expertisé.
Ils ont en outre fait état d'un risque élevé de commission d'un nouveau geste
hétéro-agressif grave. Ils ont préconisé l'internement de l'expertisé.

B.d La cour cantonale a rejeté le grief que le recourant faisait aux premiers
juges d'avoir écarté sa conclusion incidente tendant à ce qu'une nouvelle
expertise soit ordonnée. Elle a en outre jugé infondés les griefs pris d'une
violation des art. 11, 13 et 66 aCP, de l'art. 112 aCP ainsi que des art. 43
aCP et 63 aCP.

C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, pour
violation de son droit d'être entendu, arbitraire et violation des art. 11 et
13 aCP. Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause
en instance cantonale pour nouvelle instruction, y compris nouvelle
expertise. Subsidiairement, il demande la réforme de l'arrêt entrepris en ce
sens que la peine ne soit pas suspendue aux fins d'internement. Il sollicite
l'assistance judiciaire.

Une réponse n'a pas été requise.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours au Tribunal fédéral peut notamment être formé pour violation du
droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris les droits constitutionnels. Le
Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est
donc limité ni par les arguments du recourant ni par la motivation de
l'autorité précédente. Toutefois, compte tenu de l'exigence de motivation
prévue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs
invoqués et n'est dès lors pas tenu de traiter des questions qui ne sont plus
discutées devant lui. Il ne peut aller au-delà des conclusions des parties
(art. 107 al. 1 LTF).

2.
Le recours doit être motivé (art. 42 al. 1 LTF) et sa motivation doit exposer
succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Pour
les griefs de violation du droit fédéral et du droit international (art. 95
let. a et b LTF), l'exigence de motivation résultant de l'art. 42 al. 2 LTF
correspond à celle qui valait pour le recours en réforme, le pourvoi en
nullité et le recours de droit administratif. En revanche, pour les griefs de
violation des droits constitutionnels, du droit cantonal et du droit
intercantonal, qui ne peuvent être examinés que s'ils sont invoqués et
motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), l'exigence de motivation
correspond à celle qui résultait de l'art. 90 al. 1 let. b OJ pour le recours
de droit public. Il en découle notamment que ces griefs sont irrecevables,
s'ils ne satisfont pas aux exigences accrues de motivation résultant de
l'art. 106 al. 2 LTF. Cela vaut notamment pour le grief d'arbitraire dans
l'établissement des faits, respectivement l'appréciation des preuves, dès
lors qu'il revient à invoquer une violation de l'art. 9 Cst. (arrêt
6B_178/2007, du 23 juillet 2007, consid. 1.4, destiné à la publication, et
les références citées).

3.
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu garanti
par l'art. 29 al. 2 Cst., respectivement d'arbitraire prohibé par l'art. 9
Cst. En bref, il reproche aux juges cantonaux de n'avoir pas ordonné une
nouvelle expertise, portant sur sa polytoxicomanie, les alternatives à un
internement et l'incidence de son épilepsie sur ses actes.

3.1 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comporte
notamment le droit à l'administration de preuves, valablement offertes, quant
aux faits de nature à influer sur le sort de la décision à rendre (ATF 129 II
497 consid. 2.2 p. 504/505 et les arrêts cités). Il n'y a toutefois pas
violation de ce droit lorsque la mesure probatoire refusée est inapte à
établir le fait à prouver, lorsque ce fait est sans pertinence ou lorsque,
sur la base d'une appréciation non arbitraire des preuves dont elle dispose
déjà, l'autorité parvient à la conclusion que les faits pertinents sont
établis et que le résultat, même favorable au requérant, de la mesure
probatoire sollicitée ne pourrait pas modifier sa conviction (ATF 131 I 153
consid. 3 p. 157 et les arrêts cités).

De jurisprudence constante, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une
décision apparaît discutable ou même critiquable. Il faut qu'elle soit
manifestement insoutenable, et cela non seulement dans sa motivation mais
dans son résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9,
173 consid. 3.1 p. 178).

3.2 Le recourant fait valoir que sa dépendance à la drogue et à l'alcool a
influencé son comportement et qu'un traitement de cette dépendance
permettrait donc de réduire le risque de récidive. Les experts auraient dès
lors dû examiner si un tel traitement, plutôt qu'un internement, ne serait
pas suffisant. Ils ne l'auraient toutefois pas fait, de sorte qu'il se
justifierait d'ordonner une nouvelle expertise.

L'arrêt attaqué ne nie pas que la polytoxicomanie du recourant a joué un
rôle. Il relève toutefois que, selon les experts, la cause première de sa
dangerosité est le grave trouble de la personnalité qu'il présente, la
polytoxicomanie, par l'effet désinhibant qu'elle exerce, n'ayant fait que
l'aggraver. Or, toujours selon les experts, un internement constitue la seule
mesure appropriée pour prévenir le risque de récidive résultant de ce
trouble, un traitement ambulatoire ou une hospitalisation étant à cet égard
insuffisants. Il était dès lors logique que les experts ne s'attardent pas à
examiner si un traitement de la polytoxicomanie du recourant ne serait pas
suffisant, ce pourquoi d'ailleurs ils avaient renoncé à répondre aux
questions relatives à ce traitement dans le questionnaire qui leur était
soumis. Au demeurant, un traitement approprié de la polytoxicomanie du
recourant pouvait être mis en place dans le cadre de l'exécution de
l'internement.

Sur la base de ces considérations, il n'était pas manifestement insoutenable
de conclure qu'une nouvelle expertise, aux fins d'examiner si un traitement
de la polytoxicomanie du recourant ne suffirait pas à contenir le risque de
récidive qu'il présente, ne s'imposait pas. Le recourant n'établit au
demeurant pas, conformément aux exigences de motivation résultant de l'art.
106 al. 2 LTF, que cette appréciation serait arbitraire. Son argumentation se
réduit largement à interpréter des extraits du raisonnement de l'arrêt
attaqué dans le sens de sa thèse et à rediscuter simplement l'appréciation
des juges cantonaux, pour conclure à l'arbitraire qu'il allègue.
Subséquemment, le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.

3.3 Le recourant soutient que la possibilité de mesures alternatives à un
internement, plus précisément de mesures moins incisives, devait être
examinée par les experts, qui auraient toutefois omis de le faire, d'où la
nécessité d'une nouvelle expertise.

Ce grief n'est pas réellement distinct du précédent, dans la mesure où il
revient à se plaindre de ce que les experts n'aient pas examiné si une autre
mesure que l'internement pourrait suffire. Il est toutefois vain, puisque les
experts, comme on l'a vu, ont estimé que seul un internement permettrait de
prévenir le risque de récidive que présente le recourant. Ayant ainsi exclu
qu'une mesure moins incisive puisse suffire, les experts n'avaient pas à
examiner lesquelles pourraient entrer en considération et, le cas échéant, si
elles étaient ou non vouées à l'échec. Cela résulte déjà de leur conclusion,
selon laquelle un internement constitue la seule mesure appropriée pour
éviter une récidive. Le grief est dès lors infondé.

3.4 Le recourant se plaint de ce que les experts n'aient pas été amenés à se
prononcer sur l'incidence que le trouble épileptique dont il souffre a exercé
sur ses actes. Les juges cantonaux auraient résolu eux-mêmes cette question,
alors qu'il incombait à un expert d'y répondre.

3.4.1 Les premiers juges avaient constaté que le recourant n'avait pas subi
d'épisode convulsif majeur et avaient estimé qu'il était impossible qu'un
épisode mineur ait pu lui échapper, dès lors que sa mémoire de la chronologie
des faits était sans lacune, ajoutant que l'épilepsie ne conduit pas à
l'hétéro agressivité.

La cour cantonale a admis que ces considérations se situaient à l'extrême
limite des connaissances qu'un non-praticien du domaine médical peut avoir au
sujet des effets de l'épilepsie. Elle a néanmoins jugé qu'une nouvelle
expertise ne se justifiait pas.

A l'appui, elle a relevé qu'il ressortait du chapitre "anamnèse personnelle"
de l'expertise que le recourant avait souffert de crises convulsives dès
l'âge de 3 ans et qu'un diagnostic d'épilepsie avait été posé très tôt;
quelques crises s'étaient encore produites jusqu'à l'âge de 18 ans et le
recourant avait pris des anti-épileptiques jusqu'à cet âge; ultérieurement,
il avait eu une crise de type "petit mal" en octobre 2004, sans toutefois
qu'une médication soit réintroduite. Dans le chapitre consacré à la
discussion, les experts avaient fait référence à une expertise antérieure,
mentionnant "un trouble caractériel sur épilepsie, en régression". Ils
n'avaient toutefois pas repris ce diagnostic. Or, compte tenu de l'attention
qu'ils avaient apportée aux diverses pathologies dont souffrait ou avait
souffert le recourant, rien ne permettait de supposer qu'ils auraient méconnu
les troubles épileptiques de celui-ci. Il apparaissait au contraire que les
experts, se fondant sur les déclarations du recourant lui-même, avaient
considéré que l'affection en cause avait pu être soignée et qu'il n'y avait
pas lieu d'en tenir compte dans l'analyse des facteurs ayant conduit à la
commission de l'infraction ainsi qu'à l'évaluation de la responsabilité du
recourant et du risque de récidive qu'il présentait.

3.4.2 Le recourant fait valoir que la cour cantonale s'est à son tour
substituée aux experts, que l'expertise ne suffit pas à lever les doutes qui
subsistent quant à l'influence de ses troubles épileptiques sur la commission
de l'homicide et qu'un expert devait être chargé d'examiner cette question.

De l'expertise réalisée, il ressort effectivement que les experts ont procédé
à une analyse très détaillée du parcours et de la personnalité du recourant
ainsi que des pathologies dont il souffre ou a souffert. En particulier, ils
ont clairement fait état, dans le chapitre "anamnèse personnelle", des
troubles épileptiques qu'il avait présenté dans sa jeunesse, tels qu'ils sont
évoqués dans l'arrêt attaqué, et, dans le chapitre "discussion", ils ont
expressément mentionné qu'une expertise antérieure avait notamment conclu à
"un trouble caractériel sur épilepsie, en régression". Il est dès lors
manifeste qu'il n'a pas échappé aux experts que le recourant avait présenté
par le passé des troubles épileptiques. Ils n'ont toutefois pas repris cet
élément dans leur diagnostic, notamment dans leur analyse des troubles du
recourant au moment des faits et de leur lien avec les actes qui lui sont
reprochés, ce qu'ils n'auraient pas manqué de faire s'ils avaient estimé
qu'un tel lien existait. Il n'était dès lors pas arbitraire, au sens défini
plus haut (cf. supra, consid. 3.1), de considérer qu'une nouvelle expertise,
aux fins d'examiner une éventuelle influence des troubles épileptiques dont a
souffert le recourant sur les actes qui lui sont reprochés, ne s'imposait
pas. Le recourant ne démontre d'ailleurs pas que la cour cantonale aurait
fait une appréciation manifestement insoutenable de l'expertise réalisée,
mais se borne à affirmer qu'elle n'a fait qu'émettre des suppositions et que,
sur le point litigieux, il subsiste des doutes justifiant d'ordonner une
nouvelle expertise, ce qui ne suffit certes pas à faire admettre l'arbitraire
allégué. Le grief doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est
recevable.

4.
Dans son grief de violation des art. 11 et 13 aCP, le recourant ne formule
pas de critiques distinctes de celles qui ont déjà été examinées. Il ne fait
que réaffirmer l'arbitraire prétendu, pour en déduire que les art. 11 et 13
aCP ont été violés. Le grief est dès lors irrecevable, faute de motivation
spécifique qui satisfasse aux exigences minimales de motivation de l'art. 42
al. 2 LTF.

5.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme
ses conclusions étaient vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut
être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant devra donc supporter les
frais (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant
compte de sa situation financière.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 fr. est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud,
Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 15 août 2007

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: