Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.251/2007
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6B_251/2007 /rod

Arrêt du 7 septembre 2007
Cour de droit pénal

MM. les Juges Wiprächtiger, Juge présidant,
Favre et Mathys.
Greffière: Mme Bendani.

Ministère public de la Confédération, 3003 Berne,
recourant,

contre

X.________,
intimé, représenté par Me Jean-Michel Zufferey, avocat,

Mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), entrave à la circulation
publique (art. 237 CP), menaces (art. 180 CP), quotité de la peine, frais,

recours en matière pénale contre l'arrêt de la Tribunal pénal fédéral, Cour
des affaires pénales, du 24 avril 2007.

Faits :

A.
Par arrêt du 24 avril 2007, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal
fédéral a condamné X.________, pour voies de fait, injures et tentative de
contrainte, à une peine pécuniaire de 120 jours-amende d'un montant de 50 fr.
par jour, avec sursis, et à une amende de 1'000 fr., la peine de substitution
étant arrêtée à 20 jours de privation de liberté. Elle l'a acquitté des chefs
de prévention de mise en danger de la vie d'autrui, d'entrave à la
circulation publique et de menace. Elle l'a condamné à participer aux frais
de la cause à hauteur de 4'000 fr., sur un total s'élevant à 14'440 fr. 40.

Cette décision repose sur les faits suivants.

A.a X.________, né en 1967, a obtenu le brevet d'instructeur de parapente en
1998 et pratique ce sport en compétition. En 2001, il s'est associé à
Y.________, qui exploitait une école dans ce domaine. Leurs relations s'étant
dégradées, ils se sont séparés en 2002. Depuis lors, ils ont tous deux
développé leur propre école. Ils ont convenu que chacun d'eux travaillerait
sur son site, soit à Nendaz/Veysonnaz pour X.________ et à Vercorin/Val
d'Anniviers pour Y.________, chacun s'interdisant de démarcher des clients
sur le site de l'autre.

A.b Dans le courant de l'été 2003, pendant un vol à proximité du site de
Veysonnaz, X.________ a gêné, pendant près d'un quart d'heure, Z.________,
parapentiste chevronné, ami et collaborateur occasionnel de Y.________. Il
l'a frôlé plusieurs fois, créant des turbulences et exécutant des "wings
over", le forçant de la sorte à changer de trajectoire et l'obligeant à
adapter ses manoeuvres contre son gré, à une altitude d'environ 150 mètres
au-dessus du sol, dans des conditions de vol dynamique.

A.c Le 28 juillet 2004, Z.________ s'est rendu sur la place d'atterrissage et
de décollage à Veysonnaz. Alors qu'il gonflait son aile, celle-ci est
retombée sur X.________, qui l'a piétinée. Z.________ a ensuite jeté le
casque de X.________. Ce dernier lui a finalement asséné deux coups de poing
sur la tête.

A.d Immédiatement après cette altercation, X.________ a pris l'air à bord
d'un parapente solo. Alors qu'il se trouvait en vol, il a aperçu Y.________,
qui effectuait un vol biplace avec une passagère. Une fois ceux-ci posés et
alors qu'ils discutaient avec deux autres parapentistes, X.________ les a
survolés en faisant trois ou quatre allers-retours, a craché dans leur
direction sans les atteindre et a proféré des insultes à son ancien associé.

A.e Après cet épisode, alors que Y.________ et sa passagère avaient repris
les airs, X.________ les a gênés dans leur vol jusqu'à la place
d'atterrissage, soit pendant environ 15 minutes. Il est resté à proximité
immédiate du biplace, jusqu'à 2 mètres de distance, tournant autour de lui en
changeant fréquemment de position, se plaçant au-dessus, au-dessous, à côté
et devant alors que les deux voiles volaient à quelque 700 mètres d'altitude
et à 40 km/h. Il l'a poursuivi, a fait des oreilles et provoqué des
turbulences, tout en injuriant Y.________.

Pendant le vol, X.________ a crié à Y.________ qu'il allait lui faire la peau
à l'atterrissage. Ce dernier a eu peur. Il a envisagé d'aller se poser
ailleurs, mais a finalement décidé d'atterrir à Veysonnaz dans la mesure où
il connaissait plusieurs personnes sur place.

Durant la phase d'atterrissage, soit dès 300-400 mètres d'altitude,
X.________ a continué à gêner le biplace. Il a provoqué des turbulences. Il a
effectué un virage de 360 degrés juste devant l'engin de Y.________ alors que
celui-ci se trouvait en approche finale à environ 40 mètres du sol. Il a
fermé les oreilles de sa voile et donné de grands coups de frein. Les deux
parapentistes ont atterri presque simultanément. Les deux voiles se sont
touchées alors que Y.________ effectuait l'arrondi final et qu'elles étaient
encore en l'air.

B.
Le Ministère public de la Confédération dépose un recours en matière pénale
contre l'arrêt du 24 avril 2007. Il conclut, principalement, à ce que
X.________ soit également reconnu coupable de mise en danger répétée de la
vie d'autrui, d'entrave répétée à la circulation publique et de menace,
condamné à une peine pécuniaire de 250 jours-amende avec sursis et à une
participation aux frais à hauteur de 8'000 fr. Subsidiairement, il demande le
renvoi de la cause pour nouveau jugement à la Cour des affaires pénales.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 La décision attaquée a été rendue par le Tribunal pénal fédéral (art. 80
al. 1 LTF), dans une cause de droit pénal (art. 78 al. 1 LTF). Elle peut donc
faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78 ss LTF), que le
recourant, qui remplit manifestement les conditions de l'art. 81 al. 1 LTF,
est habilité à former.

1.2 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que le recourant ne démontre que ces
faits ont été établis de façon manifestement inexacte, à savoir arbitraire au
sens de l'art. 9 Cst. (FF 2001 p. 4135), ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 LTF). Il ne sanctionne une violation de droits
fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106
al. 2 LTF). Dans ce cas, les exigences de motivation de l'acte de recours
correspondent à celles de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (FF 2001 p. 4142). Le
recourant qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente
doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une
exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées (art. 97 al. 1
LTF), faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait
qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III 136
consid. 1.4 p. 140).

2.
Le recourant soutient que les éléments subjectifs et objectifs des
infractions visées par les art. 129 et 237 CP sont réalisés.

2.1
2.1.1 Aux termes de l'art. 129 CP, celui qui, sans scrupules, aura mis autrui
en danger de mort imminent sera puni d'une peine privative de liberté de cinq
ans au plus ou d'une peine pécuniaire. Du point de vue subjectif, il faut que
l'auteur ait agi intentionnellement et que l'acte ait été commis sans
scrupules. L'auteur doit avoir conscience du danger de mort imminent pour
autrui et adopter volontairement un comportement qui le crée (ATF 121 IV 67
consid. 2d p. 75 in fine). En revanche, il ne veut pas, même à titre
éventuel, la réalisation du risque (ATF 107 IV 163 consid. 3 p. 165). Le dol
éventuel ne suffit pas (arrêt 6S.3/2006 du 16 mars 2006; arrêt 6S.426/2003 du
1er mars 2004).

Selon l'art. 237 ch. 1 CP, celui qui, intentionnellement, aura empêché,
troublé ou mis en danger la circulation publique, notamment la circulation
sur la voie publique, par eau ou dans les airs, et aura par là sciemment mis
en danger la vie ou l'intégrité corporelle des personnes sera puni d'une
peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Sur le plan subjectif, l'auteur doit, consciemment et volontairement,
empêcher, troubler ou mettre en danger la circulation publique et savoir,
qu'en agissant de la sorte, il met en danger la vie ou l'intégrité corporelle
d'autrui. Le dol éventuel ne suffit pas à cet égard.

2.1.2 Déterminer ce qu'une personne a su, envisagé, voulu ou accepté, de même
que la détermination de son dessein ou de ses mobiles, relève des
constatations de faits, qui lient la Cour de droit pénal, à moins que ceux-ci
n'aient été établis de façon manifestement inexacte (cf. supra consid. 1.2).
C'est en revanche une question de droit que de savoir si l'autorité cantonale
s'est fondée sur une juste conception de la notion d'intention et si, sur la
base des faits qu'elle a retenus, elle a correctement appliqué cette notion
(cf. ATF 119 IV 1 consid. 5a p. 2s.).
2.2 La Cour des affaires pénales a jugé que l'intention de l'intimé de mettre
en danger la vie ou l'intégrité corporelle des parapentistes dans les cas
décrits sous let. A.b et A.e n'était pas établie, ni même vraisemblable, et
que l'aspect subjectif des infractions prévues par les art. 129 et 237 ch. 1
CP n'était par conséquent pas réalisé. Elle a constaté que, par son
comportement, l'intimé n'avait pas souhaité provoquer un accident et causer
des lésions ou la mort de ses victimes. En réalité, il avait voulu intimider
ses concurrents, de manière à ce que ceux-ci renonçassent à utiliser le site
de Veysonnaz. De plus, au moment d'agir, il savait qu'il s'en prenait à des
parapentistes expérimentés, capables d'éviter que la gêne qu'il provoquait
par ses manoeuvres eût des conséquences fâcheuses.

En l'espèce, il est vrai, comme l'avance le recourant, que pour les
infractions visées, il n'est pas nécessaire que l'intimé ait voulu, même à
titre éventuel, provoquer un accident et causer des lésions ou le décès des
autres parapentistes. Il reste que, selon les faits précités, l'accusé
savait, au moment d'agir, qu'il gênait des parapentistes chevronnés capables
de maîtriser leur engin. On déduit à l'évidence de cette constatation qu'il
n'avait donc pas conscience du danger crée par son comportement. Cette
appréciation n'est pas manifestement insoutenable au regard de l'expérience
des victimes et de l'intimé dans la pratique du parapente. Par ailleurs, en
affirmant simplement l'inverse, à savoir que l'intimé, de par ses
connaissances et expérience, avait parfaitement conscience du danger de mort
imminent, le recourant se contente de nier le fait contesté en opposant sa
propre appréciation des preuves à celle de l'autorité, ce qui ne suffit
manifestement pas à faire admettre l'arbitraire. Dans ces conditions,
l'élément intentionnel des infractions visées par les art. 129 et 237 ch. 1
CP n'est pas réalisé et la critique du recourant est infondée.

3.
Le recourant soutient que la menace au sens de l'art. 180 CP doit être
retenue en concours idéal avec la tentative de contrainte.

3.1 L'art. 181 CP prévoit que celui qui, en usant de violence envers une
personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque
manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à
laisser faire un acte sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans
au plus ou d'une peine pécuniaire. Selon l'art. 180 ch. 1 CP, celui qui, par
une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni
d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine
pécuniaire.

Lorsque des menaces au sens de l'art. 180 CP sont utilisées comme moyen de
pression pour obliger autrui à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un
acte, on se trouve en présence d'un concours imparfait, l'art. 181 CP étant
seul applicable (ATF 99 IV 212 consid. 1b p. 216).

3.2 La Cour des affaires pénales a considéré que l'incident de l'été 2003
(cf. supra consid. A.b) et le comportement de l'accusé lors du vol accompli
le 28 juillet 2004, incluant les menaces de s'en prendre physiquement à
Y.________ (cf. supra consid. A.e), devaient être considérés dans leur
ensemble, car ils traduisaient chez l'accusé une volonté unique consistant à
faire en sorte que Y.________ et Z.________ ne vinssent plus voler sur le
site de Veysonnaz. Elle a ainsi jugé, conformément à la jurisprudence
précitée, que les menaces proférées à l'encontre de Y.________ étaient
absorbées par la contrainte visée par l'art. 181 CP, celles-ci ayant été
utilisées comme moyen de pression pour convaincre la victime de ne plus
revenir sur le site de l'intéressé (cf. consid. 2.2.1, 2.2.2 et 2.3 de
l'arrêt attaqué).

Le recourant prétend que la menace de s'en prendre physiquement à Y.________
ne visait pas à contraindre ce dernier de ne pas revenir à Veysonnaz, mais à
l'avertir qu'il le frapperait lorsqu'il atterrirait. Ce faisant, le recourant
se contente en réalité de nier les constatations de l'autorité de première
instance et d'y opposer sa propre appréciation des faits. Or, une telle
argumentation ne suffit pas pour faire admettre l'arbitraire, lequel n'est
d'ailleurs même pas allégué. Pour le reste, au regard du but unique visé par
l'intimé à travers son comportement, la Cour des affaires pénales n'a pas
violé le droit fédéral en admettant le concours imparfait entre les art. 180
et 181 CP. Le grief est dès lors rejeté dans la mesure où il est recevable.

4.
Le recourant se plaint de la quotité de la peine et de la répartition des
frais compte tenu des infractions supplémentaires (art. 129, 180 et 237 CP)
qui devraient être retenues à la charge de l'intimé.

Ces critiques sont irrecevables, le recours sur les infractions contestées
étant infondé (cf. supra consid. 2 et 3) et les motifs de l'arrêt attaqué sur
la peine et la répartition des frais n'étant, pour le reste, pas discutés.

5.
En conclusion, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Il
n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

6.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et au Tribunal pénal
fédéral, Cour des affaires pénales.

Lausanne, le 7 septembre 2007

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant:   La greffière: