Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.99/2007
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5A_99/2007 /frs

Arrêt du 3 mai 2007
IIe Cour de droit civil

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Escher.
Greffière : Mme Rey-Mermet

X.________ SA,
recourante, représentée par Me Soli Pardo, avocat,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me Cyril Aellen, avocat,
Office des faillites du canton de Genève, chemin de la Marbrerie 13, case
postale 1856, 1227 Carouge.

cession des droits de la masse en faillite,

recours en matière civile contre la décision de la Commission de surveillance
des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève du 8 mars
2007.

Faits :

A.
Par jugement du 22 septembre 2003, le Tribunal de première instance du canton
de Genève a prononcé la faillite de A.________ Sàrl. Le 20 avril 2004, il a
ordonné la liquidation sommaire de cette faillite. A l'inventaire dressé par
l'Office des faillites (ci-après: l'Office) figurait une prétention en
responsabilité contre B.________ en sa qualité d'organe de la faillie. Me
Y.________ a été inscrit à l'état de collocation avec une créance de frais et
honoraires d'avocat admise en troisième classe à hauteur de 31'028 fr. 60.

B.
Sur demande de Me Y.________ agissant au nom et pour le compte de B.________,
une prétention «en paiement contre X.________ SA pour travaux non payés et
dommage consécutif à une rupture de contrat», pour un montant de 600'000 fr.,
a été portée à l'inventaire.

Par circulaire du 20 septembre 2004, l'Office, en sa qualité d'administrateur
de la masse en faillite, en a informé les créanciers et a relevé que
X.________ SA contestait sa responsabilité. Arguant des moyens
disproportionnés qui devraient être déployés pour recouvrer le montant
réclamé, il a proposé de renoncer aux démarches visant à l'encaissement de
ces prétentions. Il a invité les créanciers à faire connaître leur avis à ce
sujet jusqu'au 15 octobre 2004, cas échéant à réclamer dans ce délai la
cession des droits de la masse.

Par décision du 22 novembre 2004, l'Office a cédé aux créanciers qui en
avaient fait la demande dans le délai, dont Me Y.________, les prétentions
susmentionnées. Un délai de deux ans leur était imparti  pour faire valoir
leurs droits dès réception de la cession. Le 6 juillet 2005, postérieurement
à la clôture de la faillite, l'Office a communiqué aux cessionnaires une
nouvelle décision annulant et remplaçant celle du 22 novembre 2004 en raison
de la modification de la qualité d'un créancier.

C.
En date du 20 novembre 2006, les créanciers cessionnaires, dont Me
Y.________, ont déposé auprès du Tribunal de première instance une demande
tendant au paiement par X.________ SA des montants de 250'000 fr. et de
350'000 fr.

D.
X.________ SA a déposé, le 22 décembre 2006, une plainte à la Commission de
surveillance des offices des poursuites et des faillites contre la décision
de l'Office du 6 juillet 2005 de céder les droits de la masse à Me
Y.________. Elle a conclu à son annulation en tant qu'elle concerne ce
dernier. Selon elle, la cession viole l'art. 35 de la loi sur la profession
d'avocat (ci-après: LPAv; RSG E 6 10); elle est contraire aux moeurs et donc
nulle en vertu de l'art. 20 al. 1 CO.

Par décision du 8 mars 2007, la Commission de surveillance des offices des
poursuites et des faillites a rejeté la plainte.

E.
X.________ SA forme un recours en matière civile contre la décision du 8 mars
2007 dont elle demande l'annulation. Elle conclut également à l'annulation de
la cession des droits litigieux inventoriés contre la plaignante, en tant
qu'elle concerne Me Y.________.

Des réponses n'ont pas été requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Le 1er janvier 2007, la loi fédérale sur le Tribunal fédéral est entrée
en vigueur (LTF; RS 173.110; RO 2006 1206, 1243). L'arrêt attaqué ayant été
rendu après cette date, la nouvelle loi est applicable en l'espèce ( art. 132
al. 1 LTF).

1.2 Les décisions en matière de poursuites pour dettes et de faillite sont
sujettes au recours en matière civile, qui remplace le recours LP (art. 72
al. 2 let. a LTF en relation avec l'art. 19 LP). Le nouveau recours est
recevable contre des décisions prises par les autorités cantonales de
dernière instance (art. 75 al. 1 LTF). C'est dire qu'en l'espèce, la
conclusion en annulation de la cession des droits litigieux, décision rendue
par l'Office des faillites le 6 juillet 2005, est irrecevable. Les décisions
sur plainte prises par les autorités cantonales de surveillance en vertu de
l'art. 17 LP sont des décisions finales au sens de l'art. 90 LP, dès lors
qu'elles ne peuvent plus être remises en question dans la procédure de
poursuite en cours (arrêt 5A.16/2007 du 11 avril 2007 consid. 1.2). Le
recours contre la décision de l'autorité cantonale de surveillance est
recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF).

1.3 Le recours peut être interjeté notamment pour violation du droit fédéral
et des droits constitutionnels cantonaux (art. 95 LTF). Le Tribunal fédéral
applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Comme sous l'empire de
l'art. 63 al. 1 et 3 OJ, il n'est donc limité ni par les arguments soulevés
dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il
peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et
il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle
de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4; Message du Conseil
fédéral concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale :
in FF 2001 p. 4141).

1.4 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement sur la base des faits
établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie
recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente
doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une
exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées (art. 97 al. 1
LTF), faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait
qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III 136
consid. 1.4 p. 140). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être
présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99
al. 1 LTF).

2.
L'autorité cantonale a retenu que la cession des droits de la masse de l'art.
260 LP était une institution sui generis du droit des poursuites et du droit
procédural offrant une analogie avec la cession des art. 164 ss CO et avec le
mandat des art. 394 ss CO. Elle différait toutefois de la cession des art.
164 ss CO en ce sens qu'elle a pour seul objet le droit d'agir en justice.
Ainsi, après la cession, les prétentions cédées continuent à appartenir à la
masse. La cession confère uniquement aux créanciers le droit de conduire le
procès, de faire valoir les prétentions litigieuses à la place de la masse,
mais en son propre nom et à ses frais et risques. S'y attache un droit de
préférence, celui de se satisfaire avant tous les autres créanciers du
failli, sur le résultat éventuel du procès à concurrence de l'entier de sa
propre créance contre le failli. L'autorité de surveillance a conclu que
l'argumentation de la plaignante selon laquelle Me Y.________ serait devenu
cessionnaire de la créance de la faillie à son encontre tombait à faux et que
l'Office n'avait par conséquent violé ni l'art. 35 LPAv/GE ni l'art. 20 al. 1
CO.

3.
La recourante reproche à l'autorité cantonale de ne pas avoir examiné si la
cession litigieuse respectait le principe de l'indépendance de l'avocat. Tout
en se référant dans son argumentation à l'art. 35 LPAv/GE en vertu duquel
l'avocat ne peut devenir cessionnaire des droits litigieux, elle soutient que
cette règle n'a pas de portée autonome et ne fait que reprendre l'art. 12 de
la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (ci-après : LLCA). Elle
se plaint d'une violation de cette disposition, qui prévoit que l'avocat
exerce sa profession avec soin et diligence (let. a) et en toute
indépendance, en son nom et sous sa propre responsabilité (let. b). Elle
affirme que le raisonnement de l'autorité précédente, qui a distingué la
cession des art. 164 ss CO et celle de l'art. 260 LP, est dénué de
pertinence. De ces considérations, elle déduit que la cession est illicite,
contraire aux moeurs et nulle au sens de l'art. 20 al. 1 CO, ce que
l'autorité cantonale aurait dû constater.

3.1 L'art. 260 LP prévoit que si l'ensemble des créanciers renonce à faire
valoir une prétention, chacun d'eux peut en demander la cession à la masse
(al. 1). La cession a lieu au moyen du formulaire prévu à l'art. 80 de
l'Ordonnance sur l'administration des offices de faillite du 13 juillet 1911
(OAOF; RS 281.32) et aux conditions qui y sont stipulées. L'Office, qui
procède à une cession selon l'art. 260 LP, agit conformément à la loi s'il
s'assure que les conditions de la cession sont remplies, à savoir que
l'ensemble des créanciers a renoncé à faire valoir la prétention à céder et
que les créanciers intéressés ont formulé une requête de cession dans le
délai (cf. ATF 127 III 526 consid. 3). Sur plainte, l'autorité de
surveillance cantonale en matière de poursuites pour dettes et de faillite
examine si l'Office a violé la procédure de cession prévue à l'art. 260 LP et
observé les conditions de l'art. 80 OAOF (cf. ATF 113 III 135).

En l'espèce, il ne ressort pas de la décision attaquée que l'intimé soit
intervenu comme avocat de la faillie. Au vu de la créance d'honoraires qui
figure à l'inventaire de la faillite et dont il est titulaire, il apparaît
toutefois qu'il a fonctionné en cette qualité. En revanche, on ignore, au vu
de la décision entreprise, s'il représentait la faillie en ce qui concerne
les prétentions cédées par l'Office. A ce sujet, l'autorité précédente a
uniquement constaté que l'intimé, agissant au nom de B.________, a chargé
l'Office de porter à l'inventaire les droits litigieux cédés (cf. supra let.
B). Ainsi, l'état de fait de la décision attaquée ne permet pas de vérifier
si l'intimé a manqué à ses devoirs professionnels. La critique de la
recourante est par conséquent irrecevable, dans la mesure où elle se fonde
sur des faits non constatés par l'autorité précédente (cf. supra consid.
1.4). Au demeurant, à supposer que l'intimé ait effectivement représenté la
faillie dans le cadre de la poursuite en recouvrement des prétentions cédées,
il n'appartenait pas à l'Office des faillites d'examiner si l'intimé, en se
faisant céder la prétention litigieuse à l'encontre de la recourante, avait
enfreint les règles sur la profession d'avocat. Cet examen ressortit en
premier lieu aux autorités compétentes en matière de surveillance des avocats
dans le cadre d'une procédure disciplinaire. Cas échéant, il appartiendra au
juge civil saisi de l'action en paiement dirigée contre la recourante de se
prononcer au sujet des conséquences sur la procédure civile de la violation
des règles sur la profession d'avocat. Le recours doit dès lors être rejeté
dès lors qu'aucun reproche ne peut être fait à l'Office des faillites.

4.
La recourante, qui succombe, supportera les frais de justice (art. 66 al. 1
LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens, l'intimé n'ayant pas été invité
à déposer de réponse.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, à
l'Office des faillites du canton de Genève et à la Commission de surveillance
des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève.

Lausanne, le 3 mai 2007

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: