Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.654/2007
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5A_654/2007

Arrêt du 4 mars 2008
IIe Cour de droit civil

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Hohl et Marazzi.
Greffier: M. Fellay.

X. ________,
recourant, représenté par Me Mauro Poggia, avocat,

contre

A.________ SA,
B.________,
C.________ SA,
intimés,

Office des poursuites de Genève,

saisie,

recours contre la décision de la Commission de surveillance des offices des
poursuites et des faillites du canton de Genève du 25 octobre 2007.

Faits:

A.
Dans le cadre de diverses poursuites formant la série n° xxxx et dirigées
contre X.________, historien indépendant né en 1944, l'Office des poursuites
de Genève a, le 16 novembre 2006, fixé la quotité saisissable des revenus du
prénommé à 2'300 fr. par mois, compte tenu de ses charges mensuelles de 4'288
fr. et de ses revenus mensuels de 6'616 fr., composés d'une rente AI de 1'616
fr. et de deux rentes pour incapacité de gain de 2'500 fr. chacune.

Saisie d'une plainte du poursuivi, qui reprochait à l'office de n'avoir pas
tenu compte dans le calcul de son minimum vital de ses frais professionnels
et des primes de son assurance-maladie complémentaire, la Commission
cantonale de surveillance l'a rejetée par décision du 1er février 2007 en
excipant de l'autorité de chose jugée de décisions rendues dans le cadre
d'une série antérieure. Par arrêt du 17 août 2007, le Tribunal fédéral a, sur
recours du poursuivi, annulé cette décision, qui consacrait un déni de
justice formel, et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle
statue à nouveau.

Par décision du 25 octobre 2007, la Commission cantonale de surveillance a
derechef rejeté la plainte.

B.
Contre cette nouvelle décision qu'il a reçue le 29 octobre 2007, le poursuivi
a, par acte du 8 novembre 2007, interjeté un recours en matière civile au
Tribunal fédéral, concluant en substance à ce qu'il soit fait droit aux
revendications formulées dans sa plainte. Il invoque la violation des art. 92
et 93 LP à propos du refus de prendre en compte ses frais professionnels,
ainsi que celle de l'art. 10 al. 2 Cst. (droit à la liberté personnelle) et
de l'art. 36 al. 3 Cst. (principe de la proportionnalité) en ce qui concerne
les primes de l'assurance-maladie complémentaire.

Des réponses n'ont pas été requises.

Par ordonnance d'effet suspensif du 7 février 2008, l'office des poursuites a
été invité à surseoir à la distribution des deniers dans le cadre des
poursuites formant la série en cause.

Considérant en droit:

1.
Interjeté dans le délai (art. 100 al. 2 let. a LTF) et la forme (art. 42 LTF)
prévus par la loi par une partie qui a succombé dans ses conclusions prises
devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre une
décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes et
de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité cantonale de
surveillance de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF), le recours est
recevable, et ce indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c
LTF).

2.
L'art. 93 al. 1 LP prévoit que les biens relativement saisissables, tels que
les pensions et prestations de toutes sortes destinées notamment à couvrir
une perte de gain, ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le
préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital).
Cette disposition garantit à ces derniers la possibilité de mener une
existence décente, sans toutefois les protéger contre la perte des commodités
de la vie; elle vise à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à
leurs intérêts fondamentaux, les menace dans leur vie ou leur santé ou leur
interdise tout contact avec le monde extérieur. Les besoins du poursuivi et
de sa famille reconnus par la jurisprudence sont ceux d'un poursuivi moyen et
des membres d'une famille moyenne, c'est-à-dire du type le plus courant. Ils
doivent toutefois tenir compte des circonstances objectives, et non
subjectives, particulières au poursuivi (arrêt non publié 7B.77/2002 du 21
juin 2002 consid. 2.1; ATF 108 III 60 consid. 3 p.65).

La détermination du minimum indispensable est une question d'appréciation
(P.-R. Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes
et la faillite, n. 165 ad art. 93 LP et la jurisprudence citée). Dans ce
domaine, le Tribunal fédéral n'intervient donc qu'en cas d'abus ou d'excès,
par exemple lorsque l'autorité cantonale a retenu des critères inappropriés
ou n'a pas tenu compte de circonstances pertinentes (ATF 132 III 281 consid.
2.1; 130 III 90 consid. 1 et les références). Il revoit en revanche librement
les décisions cantonales en tant qu'elles sont contraires à la loi ou se
fondent sur une interprétation erronée des notions ou concepts juridiques sur
lesquels repose la loi, tels que ceux de revenu relativement saisissable, de
saisissabilité, de minimum insaisissable (arrêt non publié 7B.77/2002 du 21
juin 2002 consid. 2.3; Gilliéron, op. cit., n. 166. ad art. 93 LP et la
jurisprudence citée).

3.
En ce qui concerne la prise en compte de la prime de l'assurance-maladie
complémentaire, le recourant fait valoir que le non-paiement de cette prime
impliquera la résiliation de ladite assurance et l'impossibilité définitive,
compte tenu de son état de santé, d'en souscrire une nouvelle pour l'avenir,
alors qu'il ne saurait faire l'économie d'une telle assurance s'il veut
pouvoir bénéficier du libre choix de son médecin en cas d'hospitalisation
future.

Sur ce point, la Commission cantonale de surveillance s'en est tenue à la
jurisprudence constante, qui considère que seules les primes pour des
assurances obligatoires peuvent être retenues et qu'ainsi, en matière
d'assurance-maladie, seules les primes de l'assurance-maladie obligatoire,
soit pour une couverture de base, peuvent être prises en compte dans le
calcul du minimum vital (ATF 129 III 242 consid. 4.1 p. 244; arrêt non publié
7B.225/2003 du 23 octobre 2003 consid. 3.1; SJ 2000 II 217). A son avis, les
primes pour une assurance-maladie complémentaire régie par la LCA, laquelle
est facultative pour tous et non seulement pour une catégorie de personnes,
constituent des contributions purement volontaires allant au-delà de ce qui
est nécessaire à l'entretien du débiteur et de sa famille, dans la mesure où
il s'agit de dépenses effectuées pour assurer un confort supplémentaire non
indispensable.

Le Tribunal fédéral partage ce point de vue et considère, avec l'autorité
cantonale, qu'il n'y a pas lieu de faire une exception au principe de la
prise en compte des seules dépenses nécessaires et indispensables dans le
calcul du minimum vital au motif que le recourant, s'il devait renoncer à
cette assurance facultative, ne pourrait plus contracter une telle assurance
à l'avenir du fait de son état de santé. Sa situation ne diffère point de
celle d'autres assurés qui, pour des raisons financières, doivent mettre un
terme à une assurance complémentaire contractée lorsque leur situation le
leur permettait. L'on ne peut suivre le recourant lorsqu'il affirme que,
faute de pouvoir s'acquitter des primes pour une assurance complémentaire, il
n'aurait désormais plus le choix de son médecin en cas d'hospitalisation. La
loi fédérale sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10) pose en effet, à son
article 41, le principe du libre choix de l'assuré entre les fournisseurs de
prestations admis et aptes à traiter sa maladie au sens des art. 36 à 40
LAMal (médecins, hôpitaux, institutions de soins semi-hospitaliers, etc.).
L'exclusion des primes de l'assurance-maladie complémentaire du calcul du
minimum vital a pour fondement légal l'art. 93 LP, qui prévoit la prise en
compte des seuls besoins de base du débiteur. Elle répond en outre à
l'intérêt des créanciers, qui n'ont pas à contribuer au financement de
prestations d'assurance allant au-delà de la couverture des besoins de base
du débiteur, et elle ne prive pas ce dernier, comme on vient de le relever,
de son libre choix du médecin en cas d'hospitalisation. Cela étant, le
recourant ne saurait se prévaloir ni d'une atteinte à sa liberté personnelle
(art. 10 al. 2 Cst.), ni du non-respect du principe de la proportionnalité
(art. 36 al. 3 Cst.), au sens donné par la jurisprudence à ces notions (cf.
ATF 133 I 27 consid. 3.1; 132 I 229 consid. 11.3 p. 246).

4.
Pour fixer le montant saisissable, l'office doit d'abord tenir compte de
toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu
global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant
aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit
du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa
famille (minimum vital). Dans le cas du débiteur exerçant une activité
indépendante, l'office doit donc porter en déduction les frais professionnels
effectivement engagés (ATF 112 III 19 consid. 2b/c). Cela suppose avant tout
que le débiteur réalise un revenu en tant qu'indépendant.

Du propre aveu du recourant, l'activité d'historien indépendant qu'il déploie
n'est aujourd'hui pas rémunératrice, mais constitue le préalable
incontournable pour une possible future réinsertion, ses charges
professionnelles restant obligatoirement à perte puisque la caractéristique
majeure de ses handicaps persistants l'empêche d'assumer quelque engagement
contractuel et rémunérateur impliquant des échéances fixes. A teneur
d'attestations médicales qu'il a produites, ses efforts pour maintenir une
activité professionnelle sont nécessaires à son équilibre et lui permettent
de mieux assumer ses handicaps.

Selon la Commission cantonale de surveillance, les efforts déployés par le
recourant pour maintenir son outil de travail dans l'espoir de retrouver une
capacité professionnelle sont louables et participent sans doute à son
équilibre, mais le coût de cette activité, qui ne lui procure aucun revenu,
ne saurait être supporté par ses créanciers.
Cette conclusion est conforme au droit déterminant sus-évoqué et ne consacre
aucun abus ou excès du pouvoir d'appréciation, pas davantage que, comme
allégué dans le recours, une violation du principe de la proportionnalité
(art. 36 al. 3 Cst.), étant rappelé à ce propos que le recourant, âgé
actuellement de 64 ans, est au bénéfice d'une rente AI et de prestations pour
incapacité de gain versées par des assurances privées.

5.
Le recours doit par conséquent être rejeté, aux frais de son auteur (art. 66
al. 1 LTF).

Les parties intimées n'ont pas été invitées à se déterminer sur le fond.
L'intimée A.________ SA s'est prononcée sur la requête d'effet suspensif,
mais elle l'a fait sans le concours d'un avocat et les conditions d'octroi, à
titre exceptionnel, d'une indemnité pour débours et activité (ATF 113 Ib 353
consid. 6b) ne sont pas remplies. Cela étant, il n'y a pas lieu d'allouer de
dépens (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'Office des poursuites de
Genève et à la Commission de surveillance des offices des poursuites et des
faillites du canton de Genève.

Lausanne, le 4 mars 2008

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Raselli Fellay