Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.51/2007
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5A_51/2007

Arrêt du 24 octobre 2007
IIe Cour de droit civil

MM. les Juges Raselli, Président, Meyer et Marazzi.
Greffier: M. Abbet.

X. ________, (époux),
recourant, représenté par Me Christian Tamisier, avocat,

contre

dame X.________, (épouse),
intimée, représentée par Me Karin Baertschi, avocate,

divorce,

recours en matière civile contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice du canton de Genève du 19 janvier 2007.

Faits :

A.
X. ________, né le 13 mars 1960, et dame X.________, née le 29 octobre 1950,
se sont mariés le 29 octobre 1983 au Pérou. Deux enfants sont issus de cette
union : A.________, née le 6 septembre 1985, et B.________, né le 22 juillet
1990.
Les époux vivent séparés depuis le mois de mars 2001.

B.
Le 6 juillet 2005, X.________ a formé une demande unilatérale en divorce. Par
jugement du 8 mai 2006, le Tribunal de première instance du canton de Genève
a prononcé le divorce des époux, attribué la garde et l'autorité parentale
sur l'enfant B.________ à la mère, fixé la contribution d'entretien de
l'époux en faveur de cet enfant à 1000 fr. par mois jusqu'à sa majorité ou
l'achèvement de sa formation, et celle en faveur de l'épouse à 800 fr. par
mois jusqu'au 31 décembre 2009.

C.
Statuant sur appel de l'épouse et appel incident de l'époux le 19 janvier
2007, la Cour de justice du canton de Genève a porté le montant de la
contribution en faveur de l'épouse à 1'700 fr. par mois jusqu'au 29 octobre
2014, somme réduite de la moitié de tout gain supplémentaire que celle-ci
pourrait obtenir au-delà de sa capacité de gain actuelle arrêtée à 1'900 fr.
Depuis le 1er novembre 2014 et jusqu'à la retraite de l'époux, la
contribution a été fixée à 3'600 fr. par mois sous déduction des rentes des
premier et deuxième piliers perçues par l'épouse.
La Cour de justice a en outre confirmé le partage des avoirs de prévoyance
professionnelle convenu entre les époux et transmis le dossier de la cause au
Tribunal cantonal des assurances sociales pour établissement de ces avoirs et
exécution du partage.

D.
Contre l'arrêt de la Cour de justice, l'époux interjette un recours en
matière civile. Il conclut à sa réforme en ce sens que le montant de la
contribution d'entretien envers son épouse soit ramené à 420 fr. par mois
jusqu'au 31 décembre 2009. Il requiert en outre le bénéfice de l'assistance
judiciaire et l'octroi de l'effet suspensif.
L'épouse conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué.
La Cour de justice s'est référée à ses considérants.
Le Président de la cour de céans a déclaré sans objet la demande d'effet
suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué ayant été rendu après l'entrée en vigueur, le 1er janvier
2007 (RO 2006 1242), de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), la procédure est régie par le nouveau droit (art.
132 al. 1 LTF).

2.
En l'espèce, seule la contribution d'entretien en faveur de la femme divorcée
est litigieuse. Il s'agit d'une contestation civile de nature pécuniaire (cf.
ATF 116 II 493 consid. 2b p. 495; 95 II 68 consid. 2d p. 75), dont la valeur
litigieuse atteint 30'000 fr. Le recours satisfait donc aux exigences des
art. 72 al. 1 et 74 al. 1 let. b LTF. Interjeté en temps utile contre une
décision finale prise par une autorité cantonale de dernière instance, le
recours est également recevable au regard des art. 75 al. 1, 90 et 100 al. 1
LTF.

3.
Le recourant reproche à la Cour de justice de n'avoir pas pris en compte
certaines de ses charges - frais de déplacement, prêt contracté auprès du
fonds d'entraide de l'Administration cantonale et dette d'arriérés d'impôts -
dans le calcul de sa capacité contributive.

3.1 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte, à
savoir arbitraire (ATF 133 III 393 consid. 7.1 p. 398) ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend
contester les constatations de l'autorité précédente doit expliquer de
manière circonstanciée en quoi les conditions de l'exception prévue par
l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de
tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision
attaquée (cf. ATF 133 III 462 consid. 2.4 p. 466/467, 439 consid. 3.2 p.
445).

3.2 S'agissant des frais de déplacement, la cour cantonale a notamment
constaté que le recourant n'avait pas démontré la nécessité d'utiliser sa
moto plutôt que les transports publics pour se rendre à son lieu de travail;
elle a donc retenu un montant de 70 fr. au lieu des 80 fr. allégués. A cet
égard, le recourant se borne à reproduire les allégations qu'il avait déjà
fait valoir en appel - à savoir qu'il a des horaires irréguliers de jour
comme de nuit et qu'il peut être appelé en urgence -, sans indiquer en quoi
la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en refusant d'admettre
leur force probante. Faute de s'en prendre à la motivation de la Cour de
justice, la critique est irrecevable.

3.3 En ce qui concerne le prêt contracté auprès du fonds d'entraide de
l'administration cantonale, la Cour de justice a considéré que les documents
justificatifs produits - reconnaissance de dette et autorisation de
prélèvement direct sur son salaire -, qui n'étaient ni datés ni signés,
n'établissaient ni que le prêt avait été contracté avant la fin du ménage
commun aux fins de l'entretien des deux époux, ni même la réalité de ce prêt.
A cet égard, le recourant affirme lui-même que le prêt a été contracté afin
de rembourser les arriérés de contribution d'entretien qu'il devait à son
épouse. Cet élément suffit à établir que le prêt, pour autant qu'il existe, a
été conclu après la fin de la vie commune, partant que les dettes qui en
résulteraient ne pourraient être prises en compte dans le calcul du minimum
vital de l'époux débirentier (cf. ATF 127 III 289 consid. 2a/bb p. 292;
Schwenzer, FamKommentar Scheidung, Berne 2005, n. 77 ad art. 125 CC; Perrin,
La méthode du minimum vital, SJ 1993 p. 437).

3.4 S'agissant enfin des arriérés d'impôts, la cour cantonale n'en a pas tenu
compte dès lors que l'époux n'en avait pas établi le remboursement effectif.
Ce dernier, qui se borne à décrire les démarches qu'il a entreprises auprès
de l'administration fiscale depuis décembre 2005, ne démontre pas en quoi la
constatation de l'absence de remboursement effectif relèverait de
l'arbitraire.

4.
Le recourant s'en prend également au calcul de la capacité contributive de
l'épouse, à qui un revenu supérieur à ses ressources effectives aurait dû
être imputé; elle pourrait en effet, d'une part, mettre en location la maison
qu'elle possède au Pérou et, d'autre part, solliciter une rente de
l'assurance-invalidité.

4.1 Lors de la fixation de la contribution d'entretien, en application de
l'art. 125 CC, il faut se fonder d'abord sur les revenus effectifs des époux.
Un conjoint - y compris le créancier de l'entretien (ATF 127 III 136 consid.
2c) - peut toutefois se voir imputer un revenu hypothétique supérieur pour
autant, non seulement qu'il puisse gagner plus que son revenu effectif en
faisant preuve de bonne volonté et en accomplissant l'effort que l'on peut
raisonnablement exiger de lui, mais aussi que l'obtention d'un tel revenu
soit effectivement possible (ATF 128 III 4 consid. 4a p. 5; 127 III 136
consid. 2a p. 139; 119 II 314 consid. 4a p. 316/317). Les critères permettant
de déterminer le montant du revenu hypothétique sont en particulier la
qualification professionnelle, l'âge, l'état de santé et la situation du
marché du travail (cf. ATF 128 III 4 consid. 4c/cc p. 8; arrêt 5C.94/2003 du
17 juillet 2003 consid. 3.1, résumé in FamPra.ch 2004 p. 129).
Savoir si l'on peut raisonnablement exiger du débiteur qu'il réalise un
revenu est une question de droit; en revanche, savoir quel revenu une
personne a la possibilité effective de réaliser est une question de fait (ATF
126 III 10 consid. 2b p. 12/13; également 128 III 4 consid. 4c/bb p. 7).

4.2 La cour cantonale a constaté que l'intimée possède une maison au Pérou,
dans laquelle vivent des membres de sa famille; elle n'en a cependant pas
tenu compte comme source de revenu hypothétique. Le revenu hypothétique de la
fortune doit pourtant être pris en compte, à tout le moins lorsque, comme en
l'espèce, l'élément de fortune n'a pas été aliéné de façon irréversible par
l'époux propriétaire (cf. ATF 117 II 16 consid. 1; Bastons Bulletti,
L'entretien après divorce, méthodes de calcul, montant, durée et limites, in
SJ 2007 II p. 82). Le simple fait que des membres de la famille occupent
actuellement l'immeuble ne permet pas de faire abstraction du revenu locatif
que l'épouse pourrait retirer de ce bien. Celle-ci admet d'ailleurs la
possibilité d'une mise en location mais prétend que, au vu du niveau de vie
au Pérou, elle ne pourrait en retirer un loyer supérieur à 100 fr. par mois;
quant au recourant, il n'a allégué aucun chiffre, ni supérieur ni inférieur.
C'est donc un montant de 100 fr. que la Cour de céans retiendra comme revenu
hypothétique en lien avec l'immeuble situé au Pérou.
Si l'on insère ce montant dans les calculs effectués par l'autorité
cantonale, le disponible mensuel de l'intimée, après paiement de la
contribution d'entretien querellée, s'élève à 140 fr. (charges de 1'560 fr.
et contribution de 1'700 fr.) alors que celui du recourant se monte à 310
fr., si bien que, selon de la méthode dite du minimum vital avec répartition
de l'excédent appliquée par la Cour de justice, la contribution d'entretien
n'excède pas les limites posées par le droit fédéral (cf. ATF 126 III 8
consid. 3c p. 9; Gloor/Spycher, op. cit. n. 36 ad art. 125 CC; Bastons
Bulletti, op. cit., p. 104/105). Le grief est donc mal fondé.

4.3 La cour cantonale a également retenu que l'intimée n'était pas en mesure
de travailler à plus de 50% en raison, non seulement de son âge - 51 ans lors
de la séparation; 55 ans lors de la demande en divorce - mais également de
ses problèmes de santé; elle a toutefois fixé la contribution indépendamment
du point de savoir si cet état de santé justifiait l'octroi d'une rente de
l'assurance-invalidité.

4.3.1 S'agissant des problèmes de santé, la cour cantonale s'est fondée sur
un certificat médical, qui fait état d'une incapacité de travail sans en
indiquer ni la cause ni la durée; ce document émane d'un spécialiste en
rhumatologie et en médecine interne, lors même que l'intimée, outre des
"problèmes physiques à la main droite" dont la nature n'est pas précisée,
invoque essentiellement des troubles d'ordre psychique. Le recourant ne se
plaignant toutefois pas d'un établissement arbitraire des faits, la cour de
céans s'en tiendra aux constatations de l'autorité cantonale s'agissant de
l'incapacité de travail (art. 105 al. 1 LTF et 106 al. 2 LTF).

4.3.2 Le recourant reproche toutefois à la cour cantonale de n'avoir pas tenu
compte d'une rente d'assurance-invalidité comme source de revenu hypothétique
tout en admettant une incapacité de travail pour raison de santé. Il est vrai
que le débiteur d'entretien ne saurait renoncer à des prestations sociales,
telles que les rentes d'assurance-invalidité, auxquelles il a droit;
celles-ci doivent en effet être prises en compte dans son revenu (cf.
Gloor/Spycher, op. cit., n. 7 ad art. 125 CC; arrêt 5C.278/2002 du 28 janvier
2003 consid. 3.1, résumé in FamPra.ch 2003 p. 433). Cela étant, toute
incapacité de travail, même médicalement attestée, ne donne pas encore droit
à une rente d'assurance-invalidité; le Tribunal fédéral a ainsi jugé qu'il
n'était pas arbitraire d'admettre, sur la base de certificats médicaux,
l'incapacité d'un conjoint de trouver un emploi pour des raisons de santé,
même si les conditions d'obtention d'une rente d'invalidité faisaient défaut
(arrêt 5P.423/2005 du 27 février 2006, consid. 2.2). Pour que l'on puisse
tenir compte d'une telle rente sous l'angle d'un revenu hypothétique, il faut
que le droit à l'obtenir soit établi, ou, à tout le moins, hautement
vraisemblable. Dès lors qu'une telle possibilité ne ressort pas des
constatations de fait de l'autorité cantonale - contre lesquelles le
recourant ne soulève aucun grief - force est d'admettre que l'omission de
prendre en compte une rente d'invalidité comme revenu hypothétique n'est pas
contraire au droit fédéral.

5.
Le recourant, qui succombe, supportera l'émolument de justice; il versera à
l'intimée une indemnité à titre de dépens. Dans cette mesure, la demande
d'assistance judiciaire de l'intimée est sans objet.
Celle du recourant doit être rejetée au vu de sa situation financière
actuelle. En effet, le disponible mensuel de 14 fr. allégué a été obtenu en
augmentant forfaitairement de 20% l'ensemble des charges; il n'est en réalité
pas inférieur à 1'100 fr. (6'755 fr. de charges, pour autant que l'on prenne
en compte tous les postes, et 7'855 fr. de revenu) si on le calcule en
conformité avec la jurisprudence de la cour de céans - à savoir en limitant
cette augmentation forfaitaire au seul montant de base du droit des
poursuites (arrêt 5P.295/2005 du 4 octobre 2005, consid. 2.3.2; cf. également
ATF 129 III 385 consid. 5.2.2 p. 390/391; arrêt 5C.107/2005 du 13 avril 2006
consid. 4.2.1 et les références).
Le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire du recourant est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge du recourant.

4.
Le recourant versera à l'intimée un montant de 1'500 fr. à titre de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 24 octobre 2007

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président:   Le Greffier: