Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.426/2007
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5A_426/2007 /frs

Arrêt du 9 janvier 2008
IIe Cour de droit civil

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Escher et Hohl.
Greffière: Mme Rey-Mermet.

X. ________,
recourant, représenté par Me Nicolas Saviaux, avocat,

contre

l'Etat de Vaud,
représenté par Me Yves Hofstetter, avocat,

liquidation par la voie de la faillite d'une succession répudiée; réalisation
du cautionnement,

recours en matière civile contre l'arrêt de la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal vaudois du 29 juin 2007.

Faits :

A.
Le 15 juin 1992, A.________ a ouvert une action en responsabilité contre le
notaire B.________, lui réclamant le paiement de 2'500'000 fr. en raison de
divers manquements. A la suite du décès de B.________, ce procès a été
suspendu.

La succession du notaire ayant été répudiée, elle a été liquidée par la voie
de la faillite. A.________ a produit sa créance qui a été admise
définitivement à l'état de collocation à hauteur de 1'000'000 fr. le 5
décembre 1997. Le procès suspendu ayant perdu son objet, la cause a été rayée
du rôle le 14 septembre 1998.

B.
B.aConformément à l'ancienne loi sur le notariat du 10 décembre 1956 du
canton de Vaud, B.________ avait conclu un contrat d'assurance responsabilité
civile avec C.________ Assurances pour un montant de 2'000'000 fr. afin de
couvrir le dommage résultant de ses activités ministérielles et
professionnelles. Dans le même but, il avait également remis à l'Etat de Vaud
un certificat de cautionnement solidaire de 300'000 fr. fourni par cette
assurance le 21 novembre 1980.

En 1994, A.________, faisant valoir qu'il avait été lésé par les activités du
notaire, a entrepris des démarches afin d'obtenir la réalisation du
cautionnement solidaire. Le Service de justice de l'Etat de Vaud l'a invité à
s'adresser à l'administration de la faillite.

Le 11 juin 2001, l'administrateur spécial de la faillite a indiqué à
A.________ qu'il n'allait procéder à aucune démarche pour réaliser la caution
et n'allait pas ouvrir action contre C.________ Assurances. Se référant au
contrat d'assurance en responsabilité civile, il a cédé à A.________ les
droits de l'assuré contre l'assurance.

B.b Le 21 août 2001, se fondant sur l'assurance responsabilité civile et sur
le cautionnement, A.________ a ouvert action en paiement contre C.________
Assurances et contre l'Etat de Vaud devant la Cour civile du Tribunal
cantonal vaudois.
Par arrêt du 3 mars 2004, la Cour civile a rejeté la demande. Elle a
notamment considéré que A.________ était légitimé à agir contre C.________
Assurances sur la base du contrat d'assurance responsabilité civile en raison
de la cession du 11 juin 2001. Examinant les conditions de la responsabilité
du notaire, elle a conclu que B.________ n'avait déployé aucune activité
ministérielle ou professionnelle pour A.________, qui n'avait pas été son
client. Partant, le notaire n'avait pu engager sa responsabilité. Au
demeurant, il n'était pas établi qu'il ait commis un acte ou une omission
illicite. Par ailleurs, les juges ont estimé que A.________ n'était légitimé
à agir ni contre C.________ Assurances ni contre l'Etat de Vaud sur la base
du cautionnement, mais devait saisir le Président du Tribunal
d'arrondissement d'une plainte contre le refus de procéder à la réalisation
de cette garantie. Cet arrêt est devenu définitif et exécutoire (cf. arrêts
du Tribunal fédéral 1P.590/2004 du 28 janvier 2005 et 4C.352/2004 du 3 mai
2005).

C.
L'Etat de Vaud ayant refusé de procéder à la réalisation du cautionnement par
décisions des 19 et 25 mai 2005, A.________ a saisi le Président du Tribunal
de l'arrondissement de Lausanne d'une plainte pour déni de justice. A titre
principal, il concluait notamment à ce que l'Etat de Vaud soit invité à
instruire sa demande tendant à la réalisation du cautionnement et à rendre
une décision motivée avec indication des voies de droit; subsidiairement, il
demandait qu'ordre soit donné à l'Etat de Vaud de procéder à la réalisation
du cautionnement et de lui en remettre le produit.

Par prononcé du 8 novembre 2006, le Président du tribunal d'arrondissement de
Lausanne a rejeté la plainte.

Par arrêt du 29 juin 2007, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal vaudois a confirmé ce prononcé et rejeté le recours formé par
A.________.

D.
Contre cet arrêt, A.________ interjette un recours en matière civile au
Tribunal fédéral. Il sollicite en substance de constater que le refus de
réaliser le cautionnement constitue un déni de justice, qu'il est créancier
de la masse en faillite pour 1'000'000 fr. et qu'il est seul titulaire des
droits à la réalisation du cautionnement. Il demande d'inviter l'Etat de Vaud
à rendre une décision motivée avec indication des voies de droit.
Subsidiairement, il demande d'ordonner à l'Etat de Vaud de procéder à la
réalisation de la caution et de mettre en demeure C.________ Assurances de
lui verser le montant de 300'000 fr., plus subsidiairement encore de donner
cet ordre à l'administrateur spécial, le tout sous menace des peines de
l'art. 292 CP.

Le recourant sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire.

Une réponse n'a pas été requise.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué confirme le refus par l'Etat de Vaud de réaliser la garantie
fournie par le notaire pour couvrir le dommage causé dans l'exercice de ses
activités ministérielle et professionnelle. Fondée sur les art. 112 de la loi
vaudoise sur le notariat du 29 juin 2004 (RS/VD 178.11: ci-après : LNo) et 44
du règlement d'application de la loi du 29 juin 2004 (RS/VD 178.11.1;
ci-après : RLNo), cette décision a été prise en application d'une norme de
droit public dans une matière connexe au droit civil au sens de l'art. 72 al.
2 let. b LTF. Déposé dans le délai de 30 jours (art. 100 al. 1 LTF) contre
une décision finale (art. 90 LTF) prise par l'autorité cantonale de dernière
instance (art. 75 al. 1 LTF), le présent recours en matière civile est en
principe recevable.

2.
Le recourant demande que les faits soient complétés sur divers points en
application de l'art. 105 al. 2 LTF.

2.1 Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral statue sur la
base des constatations de l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins
que des faits pertinents pour l'issue du litige n'aient été établis de façon
manifestement inexacte, à savoir arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 134
IV 36 consid. 1.4.1; Message du Conseil fédéral concernant la révision totale
de l'organisation judiciaire fédérale, in : FF 2001 p. 4135) ou en violation
du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 LTF) et pour autant que la
correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art.
97 al. 1 in fine LTF); le recourant doit rendre vraisemblable que la décision
aurait été différente si les faits avaient été établis de manière conforme au
droit (Message, p. 4136). De même, le Tribunal fédéral ne sanctionne une
constatation des faits contraire à l'art. 9 Cst. que si ce moyen est invoqué
et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF); les exigences de motivation
de l'acte de recours correspondent à celles de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF
133 III 638 consid. 2). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle
ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité
précédente (art. 99 al. 1 LTF).

2.2 Le recourant demande que l'état de fait soit complété sur des points
qu'il affirme être pertinents sans pour autant reprocher à l'instance
précédente une constatation arbitraire des faits ou une violation du droit au
sens de l'art. 95 LTF. A fortiori, il ne démontre pas avec quel grief chaque
constatation serait en relation, en quoi elle serait pertinente et dans
quelle mesure la correction du vice aurait une influence sur le sort de la
cause. Faute de satisfaire au principe d'allégation, ces critiques sont
irrecevables.

3.
Le recours en matière civile au Tribunal fédéral peut être exercé pour
violation du droit suisse tel qu'il est délimité à l'art. 95 LTF, soit le
droit fédéral, y compris le droit constitutionnel (let. a), le droit
international (let. b) et le droit intercantonal (let. e). En revanche, sous
réserve des hypothèses visées à l'art. 95 let. c et d LTF, la violation du
droit cantonal n'est pas un motif de recours. Toutefois, il est toujours
possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal
constitue une violation du droit fédéral, parce qu'elle est arbitraire au
sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF
133 III 462 consid. 2.3).
Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst.
lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou
un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le
sentiment de la justice et de l'équité (ATF 132 III 209 consid. 2.1; 131 I 57
consid. 2). En ce qui concerne la façon dont le droit cantonal a été
appliqué, il ne faut pas confondre arbitraire et violation de la loi; une
violation doit être manifeste et reconnue d'emblée pour être considérée comme
arbitraire. Le Tribunal fédéral n'a pas à examiner quelle est
l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des
dispositions applicables; il doit uniquement dire si l'interprétation qui a
été faite est défendable (ATF 132 I 13 consid. 5.1; 131 I 217 consid. 2.1).
Il appartient au recourant d'établir la réalisation de ces conditions, par
une argumentation précise répondant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF
(principe d'allégation). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les
critiques de nature appellatoire (cf. ATF 130 I 258 consid. 1.3; 125 I 492
consid. 1b).

4.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 112 LNo/VD et
les art. 44 à 49 RLNo/VD.

4.1 En droit vaudois, le notaire ne peut être autorisé à pratiquer si, en sus
d'une assurance responsabilité civile couvrant sa responsabilité
ministérielle et professionnelle, il n'a pas déposé une garantie en faveur de
l'Etat (art. 109 LNo/VD), qui peut être fournie sous forme de cautionnement
(art. 111 al. 1 LNo/VD).

Aux termes de l'art. 112 al. 1 LNo/VD, en cas de sinistre, les droits du
notaire sur les valeurs ou objets de la garantie passent à l'Etat. Celui-ci
réalise, pour le compte des lésés et à leur requête, ses droits notamment à
l'égard de la caution. Les droits du notaire passent à l'Etat si la
responsabilité du notaire pour un dommage qu'il a causé illicitement dans
l'exercice de ses activités ministérielles et professionnelles, que ce soit
par dol ou négligence, est établie par un jugement entré en force ou par une
reconnaissance du notaire (art. 44 al. 1 RLNo/VD en relation avec l'art. 107
al. 1 LNo/VD).

4.2 Appliquant ces dispositions, la cour cantonale a relevé que le procès en
responsabilité pendant à l'ouverture de la faillite est devenu, après la
suspension en vertu de l'art. 207 LP, un procès en collocation. Elle a ajouté
que, même s'il avait été continué contre la masse ou un cessionnaire de
celle-ci, il n'aurait pas abouti à un jugement établissant ou écartant la
responsabilité du notaire au sens de l'art. 44 RLNo/VD, mais uniquement à un
jugement tranchant la question de la collocation qui aurait lié uniquement
les créanciers. Par ailleurs, la cour cantonale a encore observé qu'un
jugement définitif et exécutoire avait écarté la responsabilité civile du
notaire : en effet, par jugement du 3 mars 2004 rendu dans la cause opposant
le recourant à C.________ Assurances et à l'Etat de Vaud, la cour civile
avait estimé que le notaire n'avait déployé aucune activité ministérielle ou
professionnelle pour le recourant et n'avait pas commis d'acte illicite, de
sorte qu'il n'avait pu engager sa responsabilité. L'instance précédente a
déduit de l'absence de responsabilité du notaire constatée dans cette
procédure que les droits de celui-ci sur le cautionnement solidaire n'avaient
pas passé à l'Etat.

Sur la base de cette double motivation, la cour cantonale a conclu  que
l'Etat de Vaud a refusé à juste titre de réaliser le cautionnement solidaire.

4.3 Comme l'exige l'art. 42 al. 2 LTF (ATF 133 IV 119 consid. 6.3), le
recourant s'en prend à ces deux motivations, de sorte qu'il convient d'entrer
en matière.

Il soutient que la responsabilité du notaire n'est pas douteuse. Selon lui,
la reconnaissance de sa créance par la masse en faillite équivaut à « une
reconnaissance du notaire » au sens de l'art. 44 al. 1 RLNo/VD. Il estime que
la créance colloquée est le titre juridique lui donnant droit à participer au
produit de la réalisation. Il en déduit que la créance est  établie et
qu'ainsi, les droits du notaire ont passé à l'Etat qui a l'obligation de
réaliser le cautionnement. A ses yeux, l'autorité précédente ne pouvait pas
se fonder sur le jugement rendu par la Cour civile le 3 mars 2004, car
celui-ci ne l'a pas opposé au notaire ou à sa masse en faillite. En outre, ce
jugement ne traite que la question de sa légitimation active à agir sur la
base du cautionnement.

4.4 En l'espèce, il convient d'observer que la collocation définitive d'une
créance ne préjuge pas de l'existence de la prétention, les effets de l'état
de collocation étant limités à la procédure de faillite en cours (ATF 119 III
124 consid. 2b et 3). C'est dire que même si le recourant a produit dans la
faillite une créance découlant de la responsabilité civile du notaire et que
celle-ci a été colloquée définitivement à concurrence de 1'000'000 fr., elle
n'est pas opposable de ce fait aux tiers - en l'occurrence l'assurance
responsabilité civile ou la caution - qui seraient recherchés sur la base
d'un contrat. Dans la procédure opposant C.________ Assurances en tant
qu'assureur de la responsabilité civile et le recourant en qualité de
cessionnaire des droits de l'assuré, soit le notaire, l'assurance a
précisément opposé avec succès l'absence de responsabilité civile du notaire.
Quoi qu'en dise le recourant, la caution peut en faire de même. La cour
cantonale n'a donc pas interprété ou appliqué arbitrairement les art. 112
LNo/VD et 44 RLNo/VD en considérant que, dans le cadre de la réalisation du
cautionnement, la seule collocation de la créance du recourant n'emportait
pas « reconnaissance [de responsabilité] du notaire »  au sens de l'art. 44
al. 1 RLNo/VD et que, par conséquent, les droits du notaire n'étaient pas
passés à l'Etat. En d'autres termes, elle n'est pas tombée dans l'arbitraire
en admettant que le dommage, dont le notaire est responsable et qu'il doit
avoir reconnu, doit être compris dans son sens matériel et ne découle pas du
seul fait que la masse a renoncé à poursuivre le procès. Le recourant se
borne à affirmer le contraire, mais ne démontre nullement en quoi
l'interprétation de la cour cantonale serait arbitraire.

Le recourant souhaite la réalisation de la caution pour obtenir le paiement
de la créance qu'il prétend avoir contre le notaire - actuellement la masse
en faillite - en raison des prétendus manquements de celui-ci. Or, le
jugement du 3 mars 2004 a tranché la question de la responsabilité civile du
notaire en concluant à l'absence de celle-ci. L'existence de la créance
principale, que le cautionnement est censé garantir, a ainsi été niée. Dans
la mesure où le cautionnement se caractérise par son caractère accessoire en
ce sens que l'obligation de la caution dépend de l'existence et du contenu de
la dette principale (ATF 120 II 35 consid. 3a), en l'occurrence de la dette
du notaire à l'encontre du recourant, on ne peut reprocher à la cour
cantonale d'avoir commis l'arbitraire en concluant que l'absence de
responsabilité civile du notaire opposable à l'assureur en responsabilité
civile valait également à l'égard de la caution. C'est d'autant plus le cas
que la réalisation de la caution n'a lieu, en vertu de l'art. 112 al. 2
LNo/VD, que pour les montants non couverts par l'assurance de la
responsabilité civile. En l'absence de responsabilité civile du notaire, soit
de sinistre au sens de l'art. 112 al. 1 LNo/VD, il n'était pas arbitraire de
retenir que les droits du notaire n'avaient pas passé à l'Etat. En se bornant
à objecter que le procès ne l'a pas opposé au notaire ou à sa masse en
faillite et que le jugement du 3 mars 2004 n'a pas traité du cautionnement au
fond, le recourant ne démontre pas en quoi le raisonnement de la cour
cantonale serait arbitraire.

Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable.

5.
Vu le sort prévisible du recours, la requête d'assistance judiciaire doit
être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires, dont le montant sera
fixé en tenant compte notamment de la situation financière du recourant (art.
65 al. 2 LTF), doivent être mis à sa charge. L'intimé n'ayant pas été invité
à répondre, il n'y a pas lieu de lui accorder des dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au Conseil d'Etat du
canton de Vaud et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal
vaudois.

Lausanne, le 9 janvier 2008

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: