Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.389/2007
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5A_389/2007 /frs

Arrêt du 19 septembre 2007
IIe Cour de droit civil

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Zappelli, Juge suppléant.
Greffière : Mme Rey-Mermet.

X. ________,
recourante, représentée par Me Pierre Scherb, avocat,

contre

Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108,
1211 Genève 3

interdiction,

recours en matière civile contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice du canton de Genève du 8 juin 2007.

Faits :

A.
Par courrier du 19 décembre 2005, A.________ et B.________ ont signalé au
Tribunal tutélaire du canton de Genève l'état psychique et la situation de
leur soeur X.________, née le 29 mai 1973.

Le Tribunal tutélaire a ordonné que l'intéressée soit soumise à une expertise
psychiatrique. L'expert a conclu qu'en raison de la schizophrénie
indifférenciée dont elle souffrait, X.________ était incapable de gérer ses
affaires et ne pouvait se passer de soins et de secours permanents; il a
relevé notamment que les actuelles conditions de vie et de prise en charge
thérapeutique de l'intéressée n'étaient pas de nature à permettre une
amélioration de son état.

B.
Par ordonnance du 25 octobre 2006, le Tribunal a prononcé l'interdiction de
X.________ et a nommé G.________ en qualité de tuteur pour une période de
deux ans.

Statuant le 8 juin 2007 sur appel de X.________, la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève a confirmé le jugement attaqué.

C.
X.________ forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle
conclut principalement à l'annulation de l'arrêt cantonal, à ce qu'il soit
procédé à l'audition des médecins F.________ et J.________, à la mise en
oeuvre d'une nouvelle expertise médicale et à ce qu'il soit renoncé à son
interdiction. A titre subsidiaire, elle demande à être placée sous l'autorité
parentale de ses parents et, à titre encore plus subsidiaire, elle requiert
le renvoi à la Cour de justice pour "toute mesure d'instruction" et nouvelle
décision.

D.
Par ordonnance du 24 août 2007, le Président de la Cour de céans a accordé
l'effet suspensif au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué ayant été rendu après l'entrée en vigueur, le 1er janvier
2007 (RO 2006, 1242) de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF; RS
173.110), le recours est régi par le nouveau droit (art. 132 al. 1 LTF).

2.
2.1 Le jugement entrepris est une décision finale (art. 90 LTF) sujette au
recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF) prise par
l'autorité cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF). Pour le
surplus, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et en la
forme prévus par la loi (art. 42 LTF).

2.2 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que le recourant ne démontre que ces
faits ont été établis de façon manifestement inexacte, à savoir arbitraire au
sens de l'art. 9 Cst. (Message du Conseil fédéral concernant la révision
totale de l'organisation judiciaire fédérale in : FF 2001 p. 4135), ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF si la correction du vice est
susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Il ne
sanctionne une violation de droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué
et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF). Dans ce cas, les exigences
de motivation de l'acte de recours correspondent à celles de l'art. 90 al. 1
let. b OJ (FF 2001 p. 4142). Le recourant qui entend s'écarter des
constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière
circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105
al. 2 LTF seraient réalisées (art. 97 al. 1 LTF), faute de quoi il n'est pas
possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans
la décision attaquée (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4).
2.3 Selon l'art. 99 al. 2 LTF, les conclusions nouvelles sont irrecevables.
Il s'ensuit que les conclusions de la recourante tendant à l'audition de deux
médecins et à la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise médicale sont
inadmissibles.

3.
La recourante se plaint d'arbitraire dans la constatation des faits.

3.1 La cour cantonale aurait admis à tort que la recourante accumulait des
détritus chez elle, ce qui aurait joué un rôle prépondérant dans
l'appréciation de son incapacité à gérer ses affaires.

Cette critique est vaine dès lors que la constatation incriminée n'aurait pas
d'influence sur l'issue de la cause. Contrairement à ce que semble soutenir
la recourante, la cour cantonale, en se ralliant à l'expertise, a fondé la
mesure de tutelle non pas sur la constatation litigieuse mais sur l'existence
d'une maladie mentale, soit d'une schizophrénie indifférenciée rendant
l'intéressée incapable de gérer ses affaires et ne lui permettant pas de se
passer de soins et de secours permanents. L'expert avait lui-même motivé ce
diagnostic sur une série de constatations et d'observations faites lors des
hospitalisations de la recourante (soit, outre l'accumulation de déchets, la
situation d'échec scolaire, un retrait psychosocial et repli sur soi-même,
l'interruption d'un apprentissage, puis d'un emploi, l'incapacité à vivre de
manière autonome, des troubles du comportement alimentaire, un ralentissement
psychomoteur majeur avec perplexité et épisodes d'irritabilité, une
désorganisation de la pensée, la pauvreté du discours, des idées de
concernement et de vol de la pensée, des éléments délirants non structurés à
thème d'empoisonnement, des rituels de lavage compulsif, aboulie, apragmacie
et perte pondérale). Faute d'avoir rendu vraisemblable que la décision finale
aurait été différente si les faits avaient été établis de manière conforme au
droit (Message, p. 4136), le grief doit être rejeté.

3.2 La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir ignoré le fait qu'elle
consultait le Dr F.________ une fois par semaine.

A nouveau, la critique tombe à faux, l'autorité cantonale ayant constaté que
le certificat médical produit par la recourante attestait, sans autres
précisions, que celle-ci était suivie par le Dr F.________. S'agissant de
l'absence de constatation relative aux consultations hebdomadaires, le grief
est irrecevable. En effet, la recourante n'expose pas, conformément aux
exigences de motivation (cf. consid. 2.2 supra), en quoi l'autorité n'aurait
pas pris en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à
modifier la décision, se serait trompée manifestement sur le sens et la
portée d'un tel élément ou encore aurait procédé à des déductions
insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 et les références citées).

4.
La recourante fait grief à l'autorité cantonale d'avoir violé le principe de
proportionnalité en prononçant son interdiction sur la base de l'art. 369 CC.
Selon elle, l'institution d'une curatelle aurait suffi car la pathologie dont
elle souffre est susceptible de varier en forme et en intensité, ce d'autant
plus qu'elle affirme suivre régulièrement un traitement médicamenteux qui a
permis d'améliorer et de stabiliser son état. A défaut de curatelle, elle
estime qu'elle aurait dû être placée sous autorité parentale. A cet égard,
elle est d'avis que ses parents sont aptes à assumer sa prise en charge; elle
conteste que ceux-ci minimisent ses troubles psychiques et prétend que les
reproches qui leur sont adressés résulteraient de la constatation erronée
qu'elle accumulait des détritus dans l'appartement familial.

4.1 Aux termes de l'art. 369 al. 1 CC, sera pourvu d'un tuteur tout majeur
qui, pour cause de maladie mentale ou de faiblesse d'esprit, est incapable de
gérer ses affaires, ne peut se passer de soins et de secours permanents ou
menace la sécurité d'autrui. Il suffit que le malade mental ou le faible
d'esprit remplisse une de ces trois conditions pour être interdit.

Selon le principe de la proportionnalité, la mesure tutélaire doit avoir
l'efficacité recherchée tout en sauvegardant au maximum la sphère de liberté
de l'intéressé (Deschenaux/Steinauer, Personnes physiques et tutelles, 4ème
éd., 2001, n° 862; Schnyder/Murer, Commentaire bernois, 1984, n. 162 ad art.
369 CC; Ernst Langener, Commentaire bâlois, 2ème éd., 2002, n. 29 ss ad art.
360 CC). Le but d'une mesure tutélaire est de protéger le faible contre
lui-même et l'exploitation par des tiers. Une mesure est disproportionnée si
elle est trop radicale ou si elle est trop faible pour atteindre ce but
(arrêt 5C.74/2003 du 3 juillet 2003 in : FamPra.ch 2003, consid. 4.2;
Affolter, Commentaire bâlois, 2ème éd., 2002, n. 60 ad art. 406 CC; Stettler,
Représentation et protection de l'adulte, 4ème éd., 1997, nos 80 et 81).

4.2 En l'espèce, selon les constatations de la cour cantonale qui lient le
Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), la recourante souffre d'une
schizophrénie indifférenciée qui l'empêche de vivre de manière autonome et
qui risque d'évoluer en état déficitaire chronique majeur en l'absence de
prise en charge médicale et psychosociale. La cour cantonale a correctement
fait usage de son pouvoir d'appréciation en la matière, en estimant qu'en
raison de cette maladie, elle a besoin de façon durable de soins et de
surveillance personnelle, ce qui n'est pas contesté par l'intéressée. Quoi
qu'elle en dise, les mesures qu'elle propose (curatelle de soins ou placement
sous autorité parentale) n'apparaissent toutefois pas suffisantes pour
assurer la prise en charge nécessaire. Ces mesures, qui ont déjà été
appliquées à la recourante, ont jusqu'à présent été mises en échec. A
l'instar de l'autorité cantonale, il faut relever l'insuffisance notoire de
la prise en charge actuelle par ses parents; cette insuffisance ne découle
pas uniquement de leur passivité relativement à l'accumulation de déchets,
mais plus généralement du fait qu'ils minimisent les troubles psychiatriques
de leur fille, n'ont qu'une vue à court terme de son avenir et, par leur
attitude, l'incitent à vivre sous leur dépendance, comportement qui fait
courir un risque d'aggravation pour la recourante. Malgré ses allégations
relatives à des consultations médicales hebdomadaires, l'arrêt attaqué
constate, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF),
l'absence de suivi médical régulier. De même, lorsqu'elle conteste que ses
parents minimisent ses troubles, elle fonde son argumentation sur des faits
qui ne ressortent pas de l'arrêt cantonal, sans pour autant prétendre ni
démontrer qu'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. consid. 2.2 supra), ce qui
rend la critique irrecevable. Il apparaît que les séjours au domicile
familial ont abouti à des hospitalisations, la recourante ne se soumettant
pas au traitement ambulatoire mis en place. Dans ces conditions, les parents
n'apparaissent manifestement pas aptes à assurer la prise en charge de leur
fille, étant rappelé que le père est âgé de 80 ans. Ces circonstances
excluent par conséquent le placement sous autorité parentale prévu par l'art.
385 al. 3 CC (cf. Deschenaux/Steinauer, op. cit., n° 912). Par ailleurs, une
curatelle de soins, à l'instar de celle qui avait été instaurée en 2001, ne
suffit pas à assurer l'assistance personnelle nécessaire. A l'époque, cette
mesure s'était rapidement révélée inadéquate. A sa sortie de la clinique où
elle avait été hospitalisée contre son gré, l'intéressée s'était en effet
rapidement trouvée en rupture de tout suivi médical, ce qui avait entraîné
une dégradation de son état de santé. En définitive, vu la pathologie de la
recourante qui nécessite une surveillance et une aide personnelles durables,
seule une mesure d'interdiction apparaît adéquate pour lui fournir un niveau
de protection suffisant (cf. ATF 97 II 302). C'est dire que la cour cantonale
n'a pas violé le principe de proportionnalité en prononçant l'interdiction de
la recourante en application de l'art. 369 al. 1 CC.

5.
Vu le sort du recours qui est rejeté dans la mesure où il est recevable, les
frais de justice seront supportés par son auteur (art. 66 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante et à la Chambre
civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 19 septembre 2007

Le président:  La greffière: