Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.516/2007
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4A_516/2007

Arrêt du 6 mars 2008
Ire Cour de droit civil

MM. et Mmes les Juges Corboz, Président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Kolly
et Kiss.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.

Epoux X.________,
recourants, représentés par Me David Lachat,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me Jean-Louis Collart.

contrat de bail; sous-location dénuée d'autorisation; résiliation anticipée,

recours contre l'arrêt de la Chambre d'appel en
matière de baux et loyers du canton de Genève du 5 novembre 2007.

Faits:

A.
Par contrat du 27 juin 1988, la SI A.________ a remis à bail aux  époux
X.________ un appartement de huit pièces dans un immeuble, à Genève, pour un
loyer mensuel de 4'185 fr., charges comprises.

Avec l'autorisation de la bailleresse, les époux X.________ ont sous-loué le
logement durant les étés 1989 et 1990.

Un nouveau contrat a été passé entre les parties en date du 5 mars 1992. Le
loyer mensuel a été porté à 4'220 fr., charges comprises. L'article 3 de ce
bail a la teneur suivante:

«Le locataire est autorisé à bien plaire à sous-louer son appartement pendant
les trois mois d'été, ceci sous son entière responsabilité. Toutefois, le
locataire devra préalablement chaque année informer le bailleur sur la durée
exacte et les conditions de sous-location.»

En été 1993, la bailleresse a reçu des plaintes d'occupants de l'immeuble en
raison de perturbations attribuées à une famille nombreuse qui aurait
sous-loué l'appartement des époux X.________. Par courrier du 6 septembre
1993, elle a fait part aux locataires de cette information et leur a demandé
de lui communiquer les conditions de la sous-location. On ignore si les époux
X.________ se sont exécutés.

En février 1998, Y.________ est devenu le nouveau propriétaire de l'immeuble.

Le 26 janvier 2000, la gérance a rédigé deux lettres à l'attention des époux
X.________, l'une émanant de la direction («version longue») et l'autre du
service de location («version courte»). Les deux documents rappelaient aux
locataires que, selon l'article 3 du bail, la sous-location était autorisée à
bien plaire uniquement pendant les mois d'été et que s'ils envisageaient à
terme une sous-location, celle-ci était autorisée par la loi pour autant que
l'accord préalable du bailleur ait été donné et que les conditions de la
sous-location aient été communiquées. Le courrier émanant de la direction
précisait, en plus, que l'autorisation de sous-louer ne serait maintenue qu'à
la condition que le bailleur n'enregistre pas d'autres plaintes. Les
locataires ont reçu en tout cas l'un des deux plis.
Le 25 février 2000, Y.________ a signifié aux époux X.________ un avis
officiel de hausse de loyer concernant exclusivement la provision pour
charges. Les locataires ont contesté cette augmentation, que le bailleur a
renoncé à valider.

Le 10 mai 2001, le bailleur a notifié aux époux X.________ un avis de
résiliation ordinaire du bail pour le 31 août 2001. Selon la lettre annexée,
les locataires avaient omis, depuis plusieurs années, de transmettre au
bailleur l'identité des sous-locataires et les conditions de la
sous-location, contrairement aux exigences posées à l'article 3 du bail.

Les époux X.________ ont contesté cette résiliation par la voie judiciaire.
Par pli du 29 mai 2001, ils ont également informé la régie que l'appartement
serait sous-loué du 1er juin au 31 août 2001 à un dénommé V.________,
directeur d'une banque, pour un loyer mensuel de 12'000 fr.

En janvier et février 2002, les locataires ont sous-loué l'appartement aux
époux U.________ pour un loyer de 12'000 fr. par mois.

Par l'intermédiaire de son conseil, Y.________ a fait savoir aux époux
X.________, dans un courrier du 21 janvier 2002, qu'il avait appris que le
logement était à nouveau sous-loué sans autorisation; il invitait par
conséquent les locataires à lui communiquer le nom des sous-locataires et les
conditions de la sous-location.

Lors de l'audience du 24 janvier 2002 tenue dans le cadre de la procédure en
annulation du congé du 10 mai 2001, les époux X.________, par la voix de leur
précédent conseil, ont nié que l'appartement soit alors sous-loué.

Par courrier du 30 janvier 2002, le conseil du bailleur faisait savoir aux
locataires que leur position rendait vaine toute nouvelle interpellation ou
avertissement au sens de l'art. 257f al. 3 CO et leur annonçait la prochaine
résiliation du bail.

Le 6 février 2002, Y.________, invoquant l'art. 257f al. 3 CO, a notifié aux
époux X.________ un nouveau congé pour le 31 mars 2002.

Par jugement du 20 février 2003, le Tribunal des baux et loyers du canton de
Genève a annulé le congé signifié en mai 2001, car il était intervenu moins
de trois ans après la fin de la procédure de conciliation relative à
l'augmentation des charges (art. 271a al. 1 let. e ch. 3 CO).

B.
Les époux X.________ ont contesté la résiliation du 6 février 2002 fondée sur
l'art. 257f al. 3 CO.

Déclarée non conciliée, la cause a été portée devant le Tribunal des baux et
loyers du canton de Genève le 5 juillet 2002.

Un premier jugement a été annulé par la Chambre d'appel en matière de baux et
loyers, qui a renvoyé la cause au Tribunal des baux et loyers pour complément
d'enquêtes.

Plusieurs témoins ont été entendus, en particulier le directeur et un employé
de la gérance ainsi que des habitants de l'immeuble.

Par jugement du 22 janvier 2007, le tribunal a déclaré valable le congé
notifié par Y.________ aux époux X.________ pour le 31 mars 2002.

Statuant le 5 novembre 2007 sur appel des locataires, la Chambre d'appel en
matière de baux et loyers a confirmé le jugement de première instance. A
l'instar des premiers juges, elle a considéré que les conditions d'une
résiliation anticipée du bail au sens de l'art. 257f al. 3 CO étaient
remplies. Selon l'arrêt cantonal, le bailleur a émis plusieurs protestations
écrites, que ce soit par son ou ses courriers du 26 janvier 2000 réclamant le
respect de l'article 3 du contrat ou par sa lettre de résiliation du 10 mai
2001 se référant à des sous-locations non autorisées (première condition); au
demeurant, tout avertissement était inutile au sens de l'art. 108 ch. 1 CO,
dès lors que les locataires, début 2002, ont nié une sous-location contre
toute évidence et laissé lettre morte les courriers des 21 et 30 janvier. La
cour cantonale a jugé également que les locataires avaient persisté dans la
violation de leurs obligations contractuelles en omettant à réitérées
reprises de communiquer les conditions de sous-location au bailleur et en
sous-louant l'appartement en hiver (deuxième condition). Enfin, elle a
qualifié le maintien du bail d'insupportable pour le bailleur, qui n'a pas à
tolérer des sous-locations dépourvues de son autorisation et à des loyers
surfaits (troisième condition).

C.
Les époux X.________ interjettent un recours en matière civile. Ils demandent
au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal, puis de déclarer inefficace
et, partant, nulle la résiliation anticipée du bail qui leur a été notifiée
pour le 31 mars 2002; à titre subsidiaire, ils concluent au renvoi de la
cause à l'autorité cantonale pour instruction complémentaire.

Par ordonnance du 17 janvier 2008, le Président de la cour de céans a accordé
au recours l'effet suspensif réclamé par les recourants.

Dans sa réponse, Y.________ propose le rejet du recours.

Pour sa part, la cour cantonale se réfère aux considérants de sa décision.

Considérant en droit:

1.
1.1 Formé par les parties qui ont succombé dans leurs conclusions (art. 76
al. 1 LTF), le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF)
rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de
dernière instance (art. 75 al. 1 LTF).

La contestation porte sur la validité d'une résiliation de bail. En pareil
cas, la valeur litigieuse se détermine selon le loyer dû pour la période
durant laquelle le contrat subsiste nécessairement, en supposant que l'on
admette la contestation, et qui s'étend jusqu'au moment pour lequel un
nouveau congé aurait pu être donné ou l'a été effectivement (ATF 119 II 147
consid. 1 p. 149; 111 II 385 consid. 1 p. 386). Lorsque le bail bénéficie de
la protection contre les congés des art. 271ss CO, il convient, sauf
exceptions, de prendre en considération la période de trois ans prévue à
l'art. 271a al. 1 let. e CO (cf. ATF 111 II 385 consid. 1 p. 386; arrêt
4C.264/2002 du 25 août 2003, consid. 1.1, reproduit in SJ 2004 I p. 93; sous
le nouveau droit de procédure fédéral, entre autres, arrêt 4A_277/2007 du 26
septembre 2007, consid. 2). Comme le loyer mensuel payé par les recourants
s'élève à plus de 4'000 fr., la valeur litigieuse de 15'000 fr. exigée par
l'art. 74 al. 1 let. a LTF pour les contestations relatives à un bail à loyer
est manifestement atteinte en l'espèce.
Pour le surplus, déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art.
42 LTF) prévus par la loi, le recours est en principe recevable.

1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc lié ni par les arguments
soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid.
1.4). Toutefois, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al.
1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il
n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter,
comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions
juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant
lui.

1.3 Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral conduit son
raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont
été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens
de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du
vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).

La notion de «manifestement inexacte» correspond à celle d'arbitraire au sens
de l'art. 9 Cst. La partie recourante qui entend s'écarter des constatations
de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les
conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient
réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de
fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III
136 consid. 1.4; cf. également ATF 133 III 350 consid. 1.3). Aucun fait
nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la
décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties
(art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al.
2 LTF).

2.
Les recourants critiquent l'arrêt attaqué sous plusieurs angles.

Premièrement, en admettant que le bailleur avait émis des protestations
écrites au sens de l'art. 257f al. 3 CO, au demeurant inutiles, la cour
cantonale aurait violé les art. 8 CC et 274 al. 3 CO ainsi que les art. 257f
al. 3 et 108 ch. 1 CO. En effet, sur les deux lettres de la régie du 26
janvier 2000, seule la «version longue» aurait éventuellement pu valoir
protestation; tel ne serait pas le cas de la «version courte», qui ne se
référait pas à un ou plusieurs événements concrets. Les recourants en
déduisent que la Chambre d'appel ne pouvait pas laisser ouverte la question
de savoir si les deux lettres avaient été reçues par les locataires ou, le
cas échéant, lequel des deux plis avait atteint ses destinataires. Les
recourants contestent également que le congé du 10 mai 2001, annulé par le
juge avec des effets ex tunc, puisse être assimilé à un avertissement au sens
de l'art. 257f al. 3 CO. Enfin, tout en doutant que l'art. 108 ch. 1 CO soit
applicable en l'espèce, ils font valoir que, de toute manière, le bailleur ne
pouvait pas partir de l'idée, en janvier 2002, qu'à l'évidence, les
locataires n'entendaient pas assumer leur obligation de diligence en rapport
avec la sous-location et que toute sommation serait ainsi inutile.

Deuxièmement, les recourants nient toute récidive, au sens de l'art. 257f al.
3 CO, dans la violation de leurs obligations contractuelles. Ils exposent
tout d'abord que la nouvelle violation du contrat ou du devoir de diligence
doit être en relation avec celle mentionnée dans l'avertissement écrit. En
l'espèce, la protestation du 26 janvier 2000, «version longue», faisait état
de plaintes des voisins en relation avec des sous-locations. Or, le congé
notifié le 6 février 2002 n'est en rien lié à des plaintes des occupants de
l'immeuble.

Troisièmement, les recourants sont d'avis que le maintien du bail n'était pas
insupportable pour le bailleur, de sorte que l'une des conditions d'une
résiliation anticipée sur la base de l'art. 257f al. 3 CO n'est pas réalisée.
A cet égard, ils font valoir que la cour cantonale ne pouvait pas appliquer
en l'occurrence la jurisprudence permettant au bailleur de résilier le
contrat lorsque le locataire sous-loue les locaux sans autorisation et au
mépris des conditions fixées à l'art. 262 al. 2 CO. En effet, à suivre les
recourants, les juges genevois ont violé les art. 18 al. 1 et 262 CO en
considérant que l'article 3 du bail ne faisait que reprendre dans les grandes
lignes le régime légal de la sous-location. Rappelant que l'art. 262 CO est
de droit semi-impératif, les recourants considèrent que l'article 3 du
contrat déroge en leur faveur à la disposition légale, en leur accordant
d'emblée le droit de sous-louer pendant l'été moyennant uniquement
l'incombance d'informer le bailleur de la durée exacte et des conditions de
la sous-location; en particulier, l'article 3 du bail dispenserait les
locataires de recueillir le consentement du bailleur exigé par l'art. 262 al.
1 CO et ne prévoirait pas non plus que le bailleur puisse s'opposer à la
sous-location dans l'une des trois hypothèses prévues à l'art. 262 al. 2 CO.
Ainsi, selon les recourants, la cour cantonale ne pouvait pas leur reprocher
de n'avoir pas requis préalablement du bailleur l'autorisation de sous-louer,
ni d'avoir pratiqué des sous-locations à des loyers surfaits. Au surplus, il
suffisait de supprimer l'article 3 du contrat pour mettre fin aux supposées
violations du devoir de diligence des locataires. Du reste, le bailleur
lui-même avait annoncé cette possibilité dans la lettre du 26 janvier 2000
(«version longue»), ce qui le lierait selon le principe de la confiance.

3.
A titre liminaire, il convient de relever que le bailleur a résilié le bail
de manière anticipée en raison d'une sous-location non autorisée en hiver.
C'est dire que celle-ci n'était pas régie par l'article 3 du bail, qui
concerne exclusivement les sous-locations durant les trois mois d'été. Au
surplus, vu le caractère impératif de l'art. 262 CO (ATF 119 II 353 consid. 4
p. 355 et les références), l'article 3 ne pouvait avoir pour conséquence une
interdiction totale de la sous-location en dehors des mois d'été. En
conclusion, la sous-location débutant en janvier 2002 était soumise au régime
ordinaire de l'art. 262 CO, qui suppose le consentement du bailleur (al. 1),
lequel ne peut le refuser que dans l'un des trois cas envisagés à l'al. 2
(refus de communiquer les conditions de la sous-location [let. a]; conditions
de la sous-location abusives par rapport à celles du bail principal [let. b];
sous-location présentant pour le bailleur des inconvénients majeurs [let.
c]).

3.1 L'art. 257f al. 3 CO permet notamment au bailleur de résilier un bail
d'habitation dans un délai de trente jours pour la fin d'un mois lorsque le
locataire, malgré un avertissement écrit, persiste à enfreindre son devoir de
diligence de manière à rendre le maintien du bail insupportable pour son
cocontractant ou les habitants de l'immeuble.

Une sous-location sans le consentement du bailleur peut justifier une
résiliation anticipée du bail selon l'art. 257f al. 3 CO. Cette situation se
présente lorsque le locataire passe outre un refus du bailleur de consentir à
la sous-location ou qu'il s'abstient de demander l'autorisation de
sous-louer.
Dans le premier cas, s'il était en droit de refuser son consentement pour
l'un des motifs de l'art. 262 al. 2 CO, le bailleur peut résilier le bail
conformément à l'art. 257f al. 3 CO (David Lachat, Commentaire romand [op.
cit. 1], n. 4 ad art. 262 CO; Peter Higi, Zürcher Kommentar, n. 49 ad art.
262 CO; Pierre Engel, Contrats de droit suisse, 2e éd., p. 175). Comme le
refus du consentement n'équivaut pas à la protestation exigée par l'art. 257f
al. 3 CO, le bailleur devra toutefois avoir préalablement sommé en vain le
locataire de mettre un terme à la sous-location (Higi, ibid.).

Dans le second cas, les auteurs divergent. Selon le SVIT-Kommentar Mietrecht,
le seul fait de ne pas demander le consentement du bailleur suffit à
justifier le congé anticipé, sans avertissement préalable (2e éd., n. 32, p.
434). Il est toutefois difficile de voir dans l'omission du locataire une
attitude démontrant d'emblée l'inutilité, au sens de l'art. 108 ch. 1 CO,
d'une sommation invitant le preneur à respecter les exigences posées par
l'art. 262 CO, en particulier si le preneur ignorait l'obligation de requérir
l'autorisation du bailleur. C'est pourquoi une autre partie de la doctrine
est d'avis que le bailleur ne peut pas résilier le contrat aussitôt qu'il
apprend que l'objet remis à bail est sous-loué sans son consentement. Pour
respecter la condition de la protestation prescrite à l'art. 257f al. 3 CO,
le bailleur doit inviter le locataire, par écrit, à se conformer aux
exigences légales, en l'enjoignant à mettre un terme à la sous-location
(Peter Heinrich, Die Untermiete, thèse Zurich 1999, p. 138; Lachat, Le bail à
loyer [op. cit. 2], p. 381 in fine) ou en protestant contre l'absence de
demande d'autorisation et, le cas échéant, en exigeant de prendre
connaissance des conditions de la sous-location (Higi, op. cit., n. 58 ad
art. 262 CO; Lachat, ibid.). Si le bailleur choisit la première injonction,
le preneur a tout de même la possibilité de requérir le consentement de son
cocontractant, qui peut être donné après coup (Higi, op. cit., n. 58 ad art.
262 CO; Lachat, op. cit. 2, note de pied 26, p. 381); le bailleur ne pourra
alors invoquer l'art. 257f al. 3 CO pour justifier un congé anticipé
(Heinrich, op. cit., p. 138/139). Selon Higi, l'absence de réaction du
locataire à l'avertissement écrit du bailleur autorise ipso facto ce dernier
à résilier le bail de manière anticipée (op. cit., n. 58 ad art. 262 CO; dans
le même sens, Heinrich, op. cit., p. 139). En revanche, pour d'autres
auteurs, un congé anticipé ne sera fondé, dans ce cas, que si un examen
rétrospectif des faits permet de conclure que le bailleur disposait d'un
motif valable de s'opposer à la sous-location (Lachat, op. cit. 1, n. 4 ad
art. 262 CO et op. cit. 2, p. 381; Roger Weber, Basler Kommentar, 4e éd., n.
4a ad art. 262 CO; apparemment dans le même sens, arrêts 4A_217/2007 du 4
septembre 2007, consid. 3 et 4C.251/1998 du 22 octobre 1998, consid. 2).
L'application de l'art. 257f al. 3 CO suppose que la violation persistante
par le locataire de son devoir de diligence rende insupportable le maintien
du contrat pour le bailleur. Dans deux arrêts non publiés, le Tribunal
fédéral est parti de l'idée que cette condition s'appliquait même si le
bailleur était en droit de s'opposer à la sous-location, en particulier sur
la base de l'art. 262 al. 2 let. c CO; ainsi, après avoir admis qu'une
sous-location dénuée de l'autorisation préalable présentait des inconvénients
majeurs qui auraient permis au bailleur de refuser son consentement, le juge
devait examiner, en plus, si la sous-location rendait le maintien du bail
insupportable pour le bailleur ou les habitants de l'immeuble (arrêts
précités du 4 septembre 2007, consid. 3 et du 22 octobre 1998, consid. 2).
Une telle manière de voir ne saurait être confirmée. En effet, le fait que le
maintien du bail soit insupportable pour le bailleur suppose une certaine
gravité du manquement reproché au locataire (Lachat, op. cit. 1, n. 10 ad
art. 257f CO; Higi, op. cit., n. 58 ad art. 257f CO; SVIT-Kommentar, n. 34 ad
art. 257f CO, p. 190). Or, le refus de communiquer les conditions de la
sous-location (art. 262 al. 2 let. a CO) ou la sous-location à des conditions
abusives (art. 262 al. 2 let. b CO) atteignent manifestement le degré de
gravité requis. Par ailleurs, on ne voit pas comment une sous-location
présentant des inconvénients majeurs au sens de l'art. 262 al. 2 let. c CO ne
rendrait pas, par là-même, le maintien du bail insupportable pour le
bailleur. Force est ainsi de reconnaître que l'exigence du caractère
insupportable du maintien du contrat pour le bailleur n'a pas de portée
indépendante, lorsque le bail est résilié en raison d'une sous-location
dénuée d'autorisation préalable et que la sous-location aurait pu être
refusée à bon droit par le bailleur pour l'un des motifs prévus à l'art. 262
al. 2 CO (cf. également ATF 132 III 109, qui fait abstraction de la condition
de la situation insupportable en cas de violation persistante des
stipulations contractuelles relatives à l'affectation des locaux).

3.2 En janvier 2002, les recourants ont sous-loué l'appartement aux époux
U.________, sans avoir requis le consentement du bailleur. Lorsqu'il a appris
ce fait, l'intimé s'est insurgé auprès des locataires, par pli du 21 janvier
2002, et leur a demandé de lui communiquer les conditions de la
sous-location, y compris l'identité des sous-locataires. Ce faisant, il a
protesté par écrit, conformément à l'art. 257f al. 3 CO, contre la violation
par les locataires de leur obligation de requérir le consentement du bailleur
pour sous-louer l'appartement; comme la loi l'y autorise, il a demandé au
surplus à connaître les conditions de la sous-location afin de pouvoir, si
besoin était, s'opposer à cette mesure.

Les recourants n'ont pas répondu à ce courrier et n'ont donc pas cherché à se
conformer aux exigences légales en matière de sous-location. Au contraire,
lors d'une audience tenue le 24 janvier 2002 entre les mêmes parties, le
conseil représentant alors les locataires - dont le comportement leur est
imputable - a nié toute sous-location, démontrant ainsi que ses mandants
persistaient à violer leurs obligations contractuelles en matière de
sous-location. Le courrier du bailleur du 30 janvier 2002, annonçant pourtant
une prochaine résiliation anticipée du bail, est resté, lui aussi, sans
réponse.

Dans ces conditions, l'intimé était en droit de résilier le bail de manière
anticipée en date du 6 février 2002. A cet égard, il n'est pas nécessaire
d'examiner si le seul fait de ne pas réagir après une protestation écrite du
bailleur suffit à fonder un congé sur la base de l'art. 257f al. 3 CO. En
effet, dans le cas particulier, le bailleur aurait pu, de toute manière,
s'opposer valablement à la sous-location si son consentement avait été
requis.

Premièrement, en ne donnant pas suite à la demande de renseignements de
l'intimé de janvier 2002, les recourants ont refusé de communiquer les
conditions de la sous-location, ce qui aurait constitué un motif de refus du
consentement au sens de l'art. 262 al. 2 let. a CO.

Deuxièmement, il ne fait aucun doute que les conditions de la sous-location
aux époux U.________ étaient abusives par rapport à celles du bail principal.
Le montant mensuel de 12'000 fr. exigé des sous-locataires représente près de
trois fois le loyer payé par les locataires. Même en tenant compte du fait
que la sous-location portait sur un logement meublé, une telle différence
apparaît manifestement disproportionnée. Certes, lors d'une précédente
sous-location, les recourants avaient déjà convenu d'un loyer identique avec
leur sous-locataire et en avaient informé le bailleur par courrier du 29 mai
2001. La sous-location en question concernait toutefois les mois d'été; par
conséquent, elle était soumise à l'article 3 du bail. Comme les recourants
prétendent eux-mêmes, dans leur mémoire au Tribunal fédéral, que ladite
clause contractuelle ne conférait au bailleur qu'un droit de regard sur les
conditions de sous-location, à l'exclusion de tout droit de veto, ils ne
sauraient, sous peine de commettre un abus de droit, prétendre à présent que
le montant de 12'000 fr. par mois avait été implicitement agréé par le
bailleur. Le motif de refus de l'art. 262 al. 2 let. b CO aurait donc aussi
été réalisé en l'espèce.

Sur le vu de ce qui précède, la résiliation anticipée signifiée par l'intimé
le 6 février 2002 pour le 30 mars 2002 remplit les conditions posées par
l'art. 257f al. 3 CO; contrairement à ce que les recourants prétendent, elle
est dès lors valable.

4.
L'arrêt attaqué se trouve confirmé dans son résultat si ce n'est dans ses
motifs. La solution adoptée par la cour de céans rend inutile l'examen des
griefs soulevés par les recourants en rapport avec la motivation de la cour
cantonale. Il s'ensuit que le recours ne peut être que rejeté.

5.
Les recourants, qui succombent, prendront à leur charge les frais judiciaires
(art. 66 al. 1 LTF) et verseront des dépens à l'intimé (art. 68 al. 1 et 2
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'500 fr., sont mis solidairement à la
charge des recourants.

3.
Les recourants, débiteurs solidaires, verseront à l'intimé une indemnité de
5'500 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre
d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Lausanne, le 6 mars 2008

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:

Corboz Godat Zimmermann