Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.435/2007
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_435/2007

Arrêt du 26 mars 2008
Ire Cour de droit civil

Composition
M. et Mmes les Juges Corboz, Président, Klett et Romy, Juge suppléante.
Greffière: Mme Crittin.

Parties
X.________ SA,
recourante, représentée par Me François Roullet,

contre

Y.________ Ltd,
intimée, représentée par Me Mauro Poggia.

Objet
contrat de distribution exclusive,

recours en matière civile contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice du canton de Genève du 14 septembre 2007.

Faits:

A.
A.a A.________ est un ressortissant suisse, domicilié à .... Il s'est fait
connaître dans le monde de l'horlogerie en tant que "designer" et a notamment
réalisé des montres pour ..., ..., ..., ... ou .... A.________ est
personnellement titulaire de la marque "A.________" déposée à ... pour le monde
entier, marque sous laquelle sont produits des instruments d'écriture et des
montres.

Dès 1990, A.________ a réalisé, au travers de la raison individuelle
A.B.________, des dessins de montres sur commandes de tiers, ainsi que des
objets plus personnalisés. Pour en assurer la production, il a fondé V.________
SA (ci-après: V.________) en 1989. Cette société a changé sa raison sociale en
A.A.________ en 2000, puis en X.________ SA (ci-après: X.________) en 2004.

Le siège de cette société est à ..., dans le canton de Vaud. Elle a pour but
social la production, fabrication, commercialisation, développement et
distribution de tous produits d'horlogerie, bijouterie, joaillerie et branche
annexe.

Y.________ LTD (ci-après: Y.________) est une société active dans les domaines
de la représentation cosmétique et horlogère, ayant son siège à .... Elle fait
partie du Groupe W.________, basé aux Emirats Arabes Unis.
A.b En date du 1er janvier 1999, V.________ et Y.________ ont conclu un contrat
de distribution exclusive des produits "A.________", d'une durée de cinq ans,
couvrant les territoires d'Arabie Saoudite, des Emirats Arabes Unis et du
Qatar.

A teneur de ce contrat, V.________ s'engageait expressément à ne pas accorder
la représentation et la distribution de ces produits à une tierce personne sur
le territoire des pays énumérés dans le contrat. Pour sa part, Y.________
s'engageait à déployer tous ses efforts pour promouvoir et diffuser les
produits de V.________.
En outre, Y.________ s'engageait à acquérir de la marchandise jusqu'au terme
initial pour des sommes annuelles minimales fixées à l'annexe B du contrat
(art. 2.02).
L'art. 6.01 traitait plus précisément de la résiliation, notamment en ces
termes (traduction libre):
"Le fabricant peut résilier le contrat en tout temps, moyennant un préavis
écrit au distributeur de cinq jours, en cas de survenance de l'un des
événements suivants:
(i) (...)
(ii) Le distributeur n'a pas exécuté un paiement dans le délai et selon le mode
prévu dans le contrat et ce défaut n'est pas réparé malgré une mise en demeure
du fabricant avec fixation d'un délai de 30 jours;
(iii) (...)
(iv) Le distributeur viole toute autre obligation résultant du présent contrat
et ne remédie pas à cette situation dans un délai de 30 jours qui suit la
notification de la violation par le fabricant;
(...)."
Ce contrat incluait une clause d'arbitrage en faveur d'un Tribunal arbitral
ayant son siège à Genève. Tout litige devait être tranché par un arbitre
unique, appliquant le Concordat suisse sur l'arbitrage, à l'exclusion des
dispositions de la LDIP prévues au chapitre 12.
A.c En date du 1er juin 1999, Y.________ et A.________ ont conclu un contrat de
licence autorisant la première à utiliser ladite marque dans les trois pays
visés par le contrat de distribution exclusive. Ce contrat prévoyait également
une clause d'arbitrage.

B.
Par courrier du 11 octobre 2000, A.A.________ a dénoncé le contrat de
distribution exclusive du 1er janvier 1999 pour le 18 octobre suivant. Elle
invoquait des retards dans le paiement de six factures pour un montant total de
60'568 fr.89 et se plaignait d'une mauvaise qualité de la représentation que
Y.________ lui assurait dans les pays concédés.

Par courrier du même jour, A.________ a résilié le contrat de licence du 1er
juin 1999 pour le 18 octobre suivant, au motif de la résiliation du contrat
principal de distribution.

Y.________ a contesté ces résiliations et a élevé des prétentions en
dommages-intérêts, qui furent à leur tour niées.

Afin de trancher leurs différends, les parties ont désigné un arbitre unique à
Genève.

Par requête d'arbitrage du 11 octobre 2001, Y.________ a assigné, conjointement
et solidairement, V.________ et A.________ en paiement d'une somme de USD
2'504'800.- plus intérêts, à titre de dommages et intérêts pour résiliation
injustifiée des contrats de distribution et de licence susmentionnés, sous
déduction de sommes qu'elle reconnaissait devoir à V.________ (60'568 fr.89) et
à A.________ personnellement (22'810 fr.), le tout avec suite de dépens. La
requérante a également conclu à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle
tenait à la disposition de V.________ le stock de marchandises en sa
possession, d'une valeur de USD 264'200.- selon elle.

Y.________, V.________, A.________ et l'arbitre ont conclu et signé une
convention de procédure arbitrale le 7 novembre 2001, laquelle prévoyait
notamment que le droit suisse s'appliquait à la solution des litiges et que la
procédure d'arbitrage était soumise au Concordat suisse sur l'arbitrage,
subsidiairement à la loi de procédure civile genevoise. Les parties ont choisi
"comme voie de recours en nullité le Tribunal fédéral."

Y.________ a introduit le 12 décembre 2001 deux requêtes d'arbitrage, l'une
dirigée contre V.________, et l'autre dirigée contre A.________
personnellement. Ces requêtes se substituaient à celle du 11 octobre 2001. Ces
deux requêtes ont débouché sur l'ouverture de deux procédures. Celles-ci ont
été instruites en même temps, mais il a été convenu que chaque procédure
donnerait lieu à une sentence propre.

Seule la cause opposant Y.________ à V.________ au sujet de la résiliation du
contrat de distribution fait l'objet du présent recours. Dans le cadre de cette
cause, Y.________ a pris les conclusions suivantes, dans leur teneur finale:

- Dire que la résiliation du contrat de distribution du 1er janvier 1999 par
X.________ (anciennement A.A.________ et V.________) était injustifiée.

- Condamner, en conséquence, X.________, conjointement et solidairement avec
A.________, à lui verser la somme de 2'240'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 18
octobre 2000, sous déduction de 60'568 fr.89 et 22'810 fr.

- Lui donner acte de ce qu'elle tient à disposition de X.________ le stock de
marchandises qui sera encore en sa possession à la date d'exécution du jugement
à intervenir.

- Condamner X.________, conjointement et solidairement avec A.________, à lui
verser en contrepartie du stock de marchandises, la contre-valeur de celui-ci,
comprenant le prix auquel il lui a été vendu, augmenté des frais de transport,
de dédouanement et d'assurances, ainsi que des droits de douane, étant précisé
que le transport de cette marchandise depuis l'Arabie Saoudite, respectivement
depuis les Emirats Arabes Unis, serait à la charge de X.________.

- Condamner X.________, conjointement et solidairement avec A.________, en tous
les frais et dépens de la procédure arbitrale.

- Débouter X.________ de toutes autres mesures ou contraires conclusions.

Pour sa part, X.________ a conclu au déboutement de Y.________ de toutes ses
conclusions et à ce qu'il lui soit donné acte de son accord de reprendre le
stock de marchandises encore en mains de cette dernière et d'en payer le prix à
la valeur facturée à celle-ci, pour autant que celui-ci soit en parfait état et
sous déduction du solde de ses factures impayées s'élevant à 60'568 fr.89 plus
intérêts. Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à la condamnation de
Y.________ à lui payer le montant de 60'568 fr.89 plus intérêts, avec suite de
dépens, y compris une équitable indemnité de procédure en sa faveur.

Y.________ a conclu au déboutement de X.________ de toutes ses conclusions.

Le 26 octobre 2006, le Tribunal arbitral a rendu sa sentence. Il a considéré,
en substance, que la résiliation immédiate pour justes motifs n'avait pas
respecté les règles légales et contractuelles concernant les formes de la
notification, ce qui excluait la faculté pour X.________ de résilier le contrat
pour justes motifs. Subsidiairement, il a estimé que cette résiliation ne
reposait, de toute façon, sur aucun juste motif, mais sur des prétextes
destinés à permettre à X.________ de négocier librement avec de nouveaux
partenaires commerciaux; l'absence de justes motifs résultait aussi du fait que
les carences de Y.________ n'avaient pas été démontrées et que, même si cette
dernière ne s'était pas montrée très percutante, elle n'avait cependant pas
commis de violation crasse de ses obligations contractuelles. L'arbitre a, dès
lors, considéré que X.________ devait, à teneur de l'art. 97 CO, réparer le
manque à gagner de Y.________ qui résultait de cette résiliation injustifiée;
il a, en outre, admis le lien de causalité entre celle-ci et le dommage allégué
et a procédé à la détermination du montant du dommage, en application de l'art.
42 al. 2 CO. Enfin, il a écarté l'hypothèse d'une responsabilité solidaire
personnelle de A.________ dans l'échec des relations commerciales de X.________
et Y.________ et dans la survenance du dommage en résultant.

C.
Par acte déposé le 27 novembre 2006 auprès de la Cour de justice du canton de
Genève, X.________ a interjeté un recours en nullité contre la sentence
arbitrale du 26 octobre 2006. Y.________ a formé un recours incident.

Par arrêt du 14 septembre 2007, la Cour de justice du canton de Genève a
déclaré le recours incident de Y.________ irrecevable en la forme et a rejeté
le recours de X.________.

D.
Le 22 octobre 2007, X.________ a formé un recours en matière civile avec
requête d'effet suspensif contre l'arrêt de la Cour de justice du 14 septembre
2007. Elle conclut à l'annulation de cet arrêt et à la constatation qu'elle
était autorisée à résilier avec effet immédiat, pour justes motifs, le contrat
de distribution qui la liait à Y.________, sous suite de dépens. Y.________
conclut au rejet du recours. La Cour de justice suggère le rejet du recours
sans observations particulières.

Par ordonnance présidentielle du 24 octobre 2007, l'effet suspensif a été
accordé au recours à titre superprovisoire; cette ordonnance a été confirmée le
16 novembre 2007.

Considérant en droit:

1.
1.1 La recourante s'en prend à une décision finale (art. 90 LTF) rendue en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière
instance (art. 75 al. 2 let. a LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur
litigieuse atteint le seuil de 30'000 Fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF).
Conformément à l'art. 3 let. f du Concordat intercantonal sur l'arbitrage du 27
août 1969 (ci-après: CIA), c'est l'autorité compétente pour statuer sur les
recours en nullité dirigés contre les sentences émanant des tribunaux arbitraux
dont le siège se trouve dans son canton qui a pris cette décision. La
compétence de cette autorité cantonale n'est plus contestée devant le Tribunal
fédéral. Ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente, la
recourante, qui y a succombé, possède la qualité pour recourir (art. 76 al. 1
LTF). Elle a par ailleurs déposé son mémoire en temps utile (art. 44 al. 1, 45
al. 1 et 100 al. 1 LTF) et dans la forme prévue par la loi (art. 42 LTF), de
sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière.

1.2 Le recours en matière civile peut être interjeté, entre autres motifs, pour
violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF) et du droit intercantonal (art.
95 let. e LTF), tel le CIA. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office
(art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art.
42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il
n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter,
comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions
juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui.
Il ne peut pas entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou
sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal si le grief n'a
pas été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106
al. 2 LTF).

Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral conduit son
raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente
(art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis
de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95
LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du vice soit
susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La notion de
« manifestement inexacte » visée à l'art. 105 al. 2 LTF correspond également à
celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (Message concernant la révision
totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p.
4000 ss, spéc. p. 4135). La partie recourante qui entend s'écarter des
constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée
en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient
réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de
fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III
138 consid. 1.4; cf. également ATF 133 III 350 consid. 1.3).

Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107
al. 1 LTF).

2.
La recourante reproche essentiellement à l'autorité cantonale d'avoir violé
l'art. 36 let. f CIA.

2.1 Selon cette disposition, la sentence arbitrale peut être attaquée en
nullité devant l'autorité judiciaire compétente lorsqu'elle est arbitraire
"parce qu'elle repose sur des constatations manifestement contraires aux faits
résultant du dossier ou parce qu'elle constitue une violation évidente du droit
et de l'équité". La notion concordataire de l'arbitraire correspond à celle
développée par la jurisprudence relative aux art. 4 aCst. et 9 Cst. (arrêt
4A_280/2007 du 15 octobre 2007, consid. 3.1; ATF 131 I 45 consid. 3.4; voir
aussi Pierre Lalive/Jean-François Poudret/Claude Reymond, Le droit de
l'arbitrage interne et international en Suisse, Lausanne 1989, n. 4 ad art. 36
CIA p. 212 s. et les nombreuses références).

En matière d'arbitrage concordataire, le grief d'arbitraire se rapportant à
l'établissement des faits est même plus restrictif, puisque le juge ne peut
revoir la façon dont les arbitres ont apprécié les preuves; il doit se limiter
à vérifier que les faits constatés ne sont pas manifestement contraires au
dossier (cf. ATF 131 I 45 consid. 3.6).

2.2 Pour déterminer si le dispositif de la sentence arbitrale est arbitraire
dans son résultat, l'autorité judiciaire saisie d'un recours en nullité au sens
des art. 36 ss CIA n'a pas à examiner quelle interprétation correcte le
tribunal arbitral aurait dû donner des dispositions applicables; elle doit
uniquement dire si l'interprétation qui a été faite par lui aboutit à un
résultat défendable, quels qu'en soient les motifs, lors même qu'une autre
solution serait également concevable, voire préférable (arrêt 4A_280/2007 du 15
octobre 2007, consid. 3.1; ATF 132 I 13 consid. 5.1 et les arrêts cités).

Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral vérifie librement
l'interprétation et l'application des dispositions du concordat faites par
l'autorité judiciaire cantonale (ATF 131 I 45 consid. 3.3 in fine). Depuis
qu'il a abandonné sa pratique connue sous l'appellation d'"arbitraire au carré"
("Willkur im Quadrat" ou "doppelte Willkur"; cf. ATF 112 la 350 consid. 1), il
examine avec une libre cognition si l'autorité cantonale a admis ou rejeté à
juste titre le grief d'arbitraire, au sens de l'art. 36 let. f CIA, visant la
sentence attaquée devant elle. Cependant, comme la décision entreprise est
celle qui a été rendue sur le recours en nullité et non pas la sentence
arbitrale, ce libre examen ne saurait être opéré de manière plus approfondie
que celui auquel l'autorité cantonale de recours s'est elle-même livrée (ATF
112 la 166 consid. 3b). En d'autres termes, s'agissant de l'application de
l'art. 36 let. f CIA, il ne peut en aucun cas consister en une analyse complète
des considérants de fait et de droit de la sentence arbitrale. Seule importe en
définitive la question de savoir si, sur les points indiqués par le recourant
et dans le cadre des griefs valablement soumis, cette sentence était entachée
d'arbitraire, auquel cas la cour cantonale aurait violé l'art. 36 let. f CIA en
refusant de sanctionner un tel vice.

3.
3.1 La recourante fait valoir tout d'abord que la Cour de justice aurait dû
considérer comme arbitraire l'affirmation du Tribunal arbitral selon laquelle
la résiliation immédiate pour justes motifs avait été notifiée à tort, tant à
la forme qu'au fond. Elle soutient en effet qu'elle avait de justes motifs lui
permettant de résilier le contrat de distribution et qu'elle était en droit de
le faire immédiatement sans fixer un délai de trente jours à l'intimée pour que
cette dernière puisse remédier à ses manquements. La cour cantonale serait
tombée dans l'arbitraire en constatant que le Tribunal arbitral n'avait pas
fait un usage arbitraire de son pouvoir d'appréciation en décidant qu'en
l'occurrence, il n'existait pas de justes motifs de résiliation.

Il convient d'examiner ci-dessous si, sur la base des faits retenus par
l'autorité inférieure, cette dernière a nié injustement les griefs d'arbitraire
invoqués par la recourante visant la sentence arbitrale.

La résiliation d'un contrat de représentation exclusive de durée déterminée est
régie par l'art. 418r CO concernant les contrats d'agence (ATF 89 II 30 consid.
2), qui prévoit que le mandant et l'agent peuvent, sans avertissement
préalable, résilier immédiatement le contrat pour de justes motifs. L'art. 418r
al. 2 CO renvoie aux règles du contrat de travail, soit à l'art. 337 CO, selon
lequel sont considérées comme de justes motifs toutes les circonstances qui,
selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a
donné le congé la continuation des rapports contractuels. Le juge apprécie
librement s'il existe de justes motifs (art. 337 al. 3 CO).
Dans la sentence du 26 octobre 2006, le Tribunal arbitral a considéré, en
substance, que l'intimée avait accusé du retard dans ses paiements mais que la
recourante ne lui avait adressé aucune injonction ou mise en demeure. En outre,
toujours selon le Tribunal arbitral, même si le distributeur ne s'était pas
montré très percutant, il n'avait cependant pas commis de violation crasse de
ses obligations contractuelles. La résiliation notifiée en octobre 2000 ne
reposait pas sur de justes motifs, mais sur des prétextes destinés à permettre
à la recourante de négocier librement avec de nouveaux partenaires commerciaux.
La cour cantonale a considéré pour sa part que l'arbitre avait bien examiné
s'il existait des justes motifs de résiliation immédiate et qu'il n'avait pas
fait un usage arbitraire de son pouvoir d'appréciation en décidant que tel
n'était pas le cas.

3.2 En ce qui concerne l'existence de justes motifs, les critiques soulevées
par la recourante présentent essentiellement un caractère appellatoire. Loin de
se fonder sur les faits établis par l'arrêt attaqué, la recourante expose sa
propre version des événements, tout en multipliant les pétitions de principe.
Elle fonde son argumentation sur des constatations de fait qui ne reposent pas
sur l'arrêt attaqué, sans se prévaloir de l'une des exceptions de l'art. 97
LTF, de sorte que le Tribunal fédéral ne saurait en tenir compte.

Au demeurant, sur la base des faits constatés souverainement par la cour
cantonale (art. 105 al. 1 LTF), il n'était pas arbitraire de considérer que les
retards dans les paiements et le fait que le distributeur ne se soit pas montré
très percutant dans la promotion des produits ne revêtent pas le caractère de
gravité nécessaire pour justifier une résiliation immédiate du contrat de
distribution. Contrairement à ce que soutient la recourante, ce résultat n'est
pas manifestement injuste et ne conduit pas à une iniquité profonde, au vu des
circonstances du cas et des dispositions contractuelles conclues entre les
parties. En effet, le contrat conclu par les parties prévoit à son article 6.01
un mécanisme de résiliation anticipée du contrat en cas de non-paiement des
factures et de violation, par le distributeur, de toute autre obligation
résultant du contrat, si le distributeur ne remédie pas au défaut ou à la
situation contraire au contrat dans un délai de trente jours. Les parties ont
donc instauré un mécanisme contractuel pour sauvegarder leurs relations
contractuelles en cas de violation de certaines obligations définies dans le
contrat; ceci indique qu'aux yeux des parties, les violations considérées ne
constituent pas un manquement particulièrement grave propre à détruire
immédiatement le rapport de confiance et à empêcher la continuation des
rapports contractuels. Les retards de paiement et les insuffisances liées à la
promotion des produits invoqués par la recourante tombent à l'évidence dans le
champ d'application de cette clause, de sorte que l'on peut en déduire qu'ils
ne constituent pas de justes motifs de résiliation immédiate.
Enfin, la portée des critiques formées par la recourante au sujet des
manquements allégués doit être fortement relativisée à la lumière de la
constatation faite par le Tribunal arbitral que la résiliation était en réalité
destinée à permettre à la recourante de négocier librement avec de nouveaux
partenaires commerciaux.

Dans ces conditions, la sentence n'est pas arbitraire sur ce point et la cour
cantonale n'a pas violé l'art. 36 let. f CIA.

3.3 La recourante fait valoir encore à ce sujet que le Tribunal arbitral a fait
preuve d'arbitraire en considérant à tort que la clause 6.01 primait le droit
impératif permettant à chaque cocontractant de résilier immédiatement le
contrat en cas de justes motifs. Cet argument ne saurait être suivi. En
l'espèce, la question n'est pas de savoir si la résiliation pour justes motifs
est de droit impératif, mais si la partie qui résilie le contrat avec effet
immédiat dispose de justes motifs suffisants. Or, comme mentionné ci-dessus, le
Tribunal arbitral et la cour cantonale pouvaient sans tomber dans l'arbitraire
soutenir que les retards de paiement et les désaccords sur la stratégie de
vente ne revêtent pas cette qualité, notamment au vu de cette clause
contractuelle.

Dès lors, puisqu'il n'était pas arbitraire de nier l'existence de justes motifs
de résiliation, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, se dispenser
d'examiner les griefs touchant à la forme de la résiliation.

3.4 Toujours en relation avec l'existence de justes motifs, la recourante fait
valoir que l'intimée aurait tenté de mettre en péril son existence même, en
passant commande de grandes quantités de produits et que ce comportement
déloyal et hostile constitue un juste motif suffisant de résiliation. Il était
arbitraire pour l'arbitre de ne pas avoir tiré cette conclusion et la cour
cantonale aurait violé l'art. 36 let. f CIA en ne sanctionnant pas ce vice.

On relèvera sur ce point que cette argumentation se fonde sur des constatations
de fait qui ne ressortent nullement de l'arrêt attaqué et que la recourante ne
se prévaut à cet égard d'aucune des exceptions de l'art. 97 LTF, de sorte que
ce moyen ne peut qu'être rejeté.

4.
Dans un second moyen, la recourante s'en prend à la fixation du dommage qu'elle
a été condamnée à réparer. Elle fait valoir que le Tribunal arbitral a admis
d'office l'existence d'un dommage, en ignorant les faits du dossier, ce qui
serait arbitraire. La cour cantonale aurait pour sa part violé le droit
intercantonal en ne sanctionnant pas le raisonnement du Tribunal arbitral et en
niant que le calcul du dommage effectué par le Tribunal arbitral fût
arbitraire.

4.1 On relèvera en premier lieu que déterminer l'existence et l'ampleur du
dommage relève du fait (ATF 127 III 543 consid. 2b). Dire si la notion
juridique du dommage a été méconnue est, en revanche, une question de droit
(ATF 127 III 543 précité). La recourante se plaint que la cour cantonale soit
tombée dans l'arbitraire en considérant que "l'existence d'un dommage est
incontestable s'agissant de la résiliation anticipée d'un contrat de
distribution". On peut laisser ouverte la question de savoir si ce grief relève
du fait ou du droit. En effet, cette affirmation quelque peu malheureuse de la
cour cantonale est cependant aussitôt relativisée dans le paragraphe qui suit,
dans lequel la cour cantonale énumère les éléments de fait qui établissent sans
aucun doute le manque à gagner de l'intimée, donc l'existence d'un dommage. On
ne discerne dans ces considérants aucune trace d'arbitraire.

4.2 La recourante prétend encore que l'intimée n'aurait subi aucun dommage dans
la mesure où cette dernière n'aurait pas écoulé jusqu'au terme prévu du
contrat, en date du 31 décembre 2003, l'important stock de produits dont elle
disposait au moment de la résiliation immédiate du contrat, si celui-ci n'avait
pas été dénoncé de manière anticipée.

Comme rappelé ci-dessus, en matière d'arbitrage concordataire, le grief
d'arbitraire se rapportant à l'établissement des faits ne peut être admis que
très restrictivement, puisque le juge ne peut revoir la façon dont les arbitres
ont apprécié les preuves; il doit se limiter à vérifier que les faits constatés
ne sont pas manifestement contraires au dossier (cf. ATF 131 I 45 consid. 3.6).
Force est de souligner que la recourante se limite, pour l'essentiel, à
substituer sa propre approche des faits à celle du Tribunal arbitral. Elle
exerce une critique purement appellatoire des constatations de fait relatives à
la détermination du dommage, sans prétendre ni démontrer qu'elles soient
manifestement contraires au dossier. Pour ces raisons, son recours ne satisfait
pas aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF et il est irrecevable
en tant qu'il porte sur l'existence du dommage.

4.3 La recourante critique encore le calcul du dommage sous deux angles
distincts.
4.3.1 En premier lieu, la cour cantonale aurait violé le droit de manière
évidente au sens de l'art. 36 let. f CIA en ne qualifiant pas d'arbitraire le
fait que le Tribunal arbitral ait pris en compte les commandes de marchandises
effectuées par l'intimée dès la mi-octobre 1998 et non dès le 1er janvier 1999
- date de la conclusion du contrat de distribution litigieux - pour calculer le
montant des gains réalisés par cette dernière durant la période contractuelle.

A l'appui de son argumentation - une fois encore purement appellatoire - la
recourante invoque le texte du contrat litigieux, le contrat de licence
parallèle au contrat de distribution, et le fait qu'avant le 1er janvier 1999,
les ventes passaient par l'intermédiaire de la société Z.________, titulaire
d'un contrat de distribution avec la recourante. Elle cite ces éléments
pêle-mêle en se bornant à constater que le raisonnement du Tribunal arbitral
est en complète contradiction avec les termes clairs du contrat et les éléments
du dossier. Dans la même veine, elle se contente d'affirmer que la cour
cantonale a violé le droit intercantonal en affirmant que c'est à raison que
l'arbitre a fait application du principe de la confiance et qu'il n'a pas fait
preuve d'arbitraire dans cette application.

La recourante ne motive aucunement ce grief. Elle n'explique en rien en quoi
réside la contradiction alléguée et quels sont les éléments du dossier qui
n'auraient pas été pris en considération; elle se contente de renvoyer à son
recours en nullité et à critiquer la sentence arbitrale sans examiner
concrètement et de manière motivée l'arrêt attaqué, qui seul fait l'objet du
recours au Tribunal fédéral; elle n'explique pas où réside l'arbitraire. Là
encore, son recours ne remplit pas les exigences de motivation et est
irrecevable sur ce point (art. 106 al. 2 et 108 LTF).

On peut noter à titre superfétatoire que même s'il était recevable, le recours
devrait être rejeté. Au vu des faits qui lient le Tribunal fédéral, il faut
admettre que le contrat litigieux n'était pas clair sur la question de savoir
si les livraisons effectuées dès la mi-octobre 1998 devaient être incluses dans
les quotas définis à l'annexe B, de sorte que la cour cantonale n'est pas
tombée dans l'arbitraire en considérant que l'arbitre avait appliqué à bon
droit la théorie de la confiance pour trancher la question précitée. De même,
la conclusion du Tribunal arbitral tendant à inclure les livraisons opérées dès
la mi-octobre 1998 pour calculer le manque à gagner subi par l'intimée ne prête
pas le flanc à la critique sous l'angle de l'arbitraire dès lors qu'elle
apparaît à tout le moins soutenable, étant rappelé qu'il n'y a pas arbitraire
du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même
être préférable. L'arrêt cantonal sera donc confirmé sur ce point, le grief
soulevé par la recourante étant, pour autant qu'il soit recevable, infondé.
4.3.2 Par ailleurs, la recourante émet encore d'autres critiques mettant en
cause le calcul du dommage effectué par le Tribunal arbitral. Pour autant que
le grief soit compréhensible, la recourante semble reprocher à la cour
cantonale de ne pas avoir sanctionné le raisonnement de l'arbitre selon lequel
le chiffre d'affaires de l'intimée aurait continué à augmenter au fil des
années entre 2001 et 2003 malgré les faibles efforts de promotion constatés de
sa part par le Tribunal arbitral. Selon la recourante, en raison de
l'importance du stock encore en mains de l'intimée et des faibles efforts de
marketing susmentionnés, le calcul du dommage opéré par l'arbitre serait
entaché d'arbitraire.

Ici également, la recourante se borne à répéter les griefs qu'elle a formulés
dans le cadre de son recours en nullité et qui ont été examinés de manière
détaillée dans l'arrêt attaqué, sans se référer à ce dernier et en oubliant
manifestement que l'objet du recours devant le Tribunal fédéral est bien
l'arrêt cantonal et non la sentence arbitrale. Il ressort clairement de cet
arrêt que, contrairement à ce que soutient la recourante, la cour cantonale a
vérifié que l'arbitre a bien pris en compte l'état du stock ainsi que le peu
d'effort démontré par l'intimée en matière de promotion pour établir le chiffre
d'affaires escompté. Elle a considéré que les griefs formés par la recourante
étaient infondés. La recourante ne démontre en rien en quoi la cour cantonale
aurait violé l'art. 36 let. f CIA à cet égard. Ce grief est irrecevable.
4.3.3 La cour cantonale a également considéré qu'il n'était pas insoutenable
qu'un distributeur puisse augmenter ses ventes d'année en année, malgré une
promotion peu énergique. La recourante y voit une violation du droit
intercantonal. Elle ne démontre cependant pas en quoi cette constatation serait
arbitraire ou en contradiction manifeste avec les éléments du dossier. En
particulier, la cour cantonale a expliqué que la recourante n'avait ni soutenu
ni établi que le bénéfice annuel n'avait pas augmenté entre 1999 et 2000, voire
qu'il aurait diminué, de sorte que rien ne vient confirmer que tel serait le
cas en 2001, 2002 et 2003. Ce raisonnement est soutenable. La recourante ne
remet pas en cause ces faits et cette explication, elle se contente de s'en
prendre à la sentence arbitrale. Son recours ne remplit pas les exigences de
motivation des art. 42 al. 1 et 2 LTF et 106 al. 2 LTF. Il est irrecevable sur
ce point.

5.
La recourante reproche encore à la cour cantonale de n'avoir pas considéré
comme arbitraire la répartition des frais et dépens d'arbitrage opérée par le
Tribunal arbitral mettant les trois quarts de ceux-ci à la charge de la
recourante, alors que l'intimée n'aurait obtenu que le 20% de ses conclusions.

Encore une fois, la recourante n'explique pas en quoi cette décision reposerait
sur des constatations manifestement contraires aux faits résultant du dossier
ou constituerait une violation évidente du droit ou de l'équité. Comme le
relève à juste titre l'arrêt attaqué, dans la mesure où l'intimée a obtenu gain
de cause sur l'élément essentiel de la procédure, à savoir l'allocation de
dommages et intérêts, cette répartition des dépens ne saurait être taxée
d'arbitraire.

Pour autant qu'il soit recevable, le grief est donc infondé.

6.
Dans un dernier grief, la recourante invoque une violation de l'art. 36 let. c
CIA. Elle reproche à la cour cantonale d'avoir admis à tort que la sentence
arbitrale avait statué sur le chef de la demande de l'intimée relatif au sort
du stock de marchandises non vendues encore en possession de cette dernière. Le
Tribunal arbitral n'a pas abordé expressément la question du sort du stock de
marchandises invendues, mais il a débouté les parties de toutes autres
conclusions. La cour cantonale, se fondant sur la littérature (Lalive/Poudret/
Reymond, op. cit., n. 4 ad art. 36 CIA p. 210; Pierre Jolidon, Commentaire du
Concordat suisse sur l'arbitrage, Berne 1984, n. 63 ad art. 36 CIA p. 512), a
jugé que le rejet de toutes les autres conclusions comprenait celui de la
demande de restitution du stock en contrepartie de sa valeur, de sorte qu'il ne
résultait aucune omission au sens de l'art. 36 let. c CIA.

On peut se dispenser d'examiner ce grief plus avant, dès lors qu'il est
irrecevable. En effet, la recourante n'a pris aucune conclusion au fond sur ce
point, se contentant de demander l'annulation de l'arrêt attaqué, sans se
prévaloir de l'une des exceptions admises par la jurisprudence qui autoriserait
le Tribunal fédéral à renvoyer la cause à l'instance inférieure (ATF 133 III
489 consid. 3.1). On ne saurait donc entrer en matière sur ce grief.

7.
En définitive, le recours en matière civile doit être rejeté dans la faible
mesure où il est recevable. La recourante, qui succombe, supportera les frais
judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). En outre, elle devra verser à l'intimée une
indemnité pour ses dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 8'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Une indemnité de 9'000 fr., à payer à l'intimée à titre de dépens, est mise à
la charge de la recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre
civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 26 mars 2008
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Corboz Crittin