Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.406/2007
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4A_406/2007

Arrêt du 17 décembre 2007
Ire Cour de droit civil

MM. et Mme les Juges Corboz, Président,
Rottenberg Liatowitsch et Kolly.
Greffière: Mme Crittin.

X. ________,
recourant,
représenté par Me Grégoire Rey,

contre

Association de l'Hôpital Y.________,
intimée,
représentée par Me Jean-Pierre Schmid.

Contrat de travail,

recours contre le jugement de la IIe Cour civile
du Tribunal cantonal du canton du Valais
du 4 septembre 2007.

Faits:

A.
A.a En 1984, X.________ a été engagé par l'Hôpital Y.________ en qualité de
médecin-chef en anesthésie et en réanimation.

En sus de son activité de médecin-chef, X.________ pouvait consacrer 10% de
son temps à des activités académiques. Il était en outre membre du conseil de
direction du département d'anesthésiologie et assumait la présidence de la
commission d'urgence et, à partir de décembre 1995, la présidence du collège
des médecins-chefs. X.________ était également responsable du matériel lourd
et à usage unique, des statistiques, de la facturation et du rapport annuel,
et coresponsable de l'enseignement des médecins et infirmières.

Le 2 décembre 1998, les parties ont signé un nouveau contrat de travail, qui
se distinguait du précédent notamment en ce qui concerne la réglementation de
la couverture perte de gain en cas de maladie.

A.b Dans le contexte de la démission du Dr A.________, médecin-chef
anesthésiste, le comité de direction de l'Hôpital a pris la décision, en
séance du 12 septembre 1995, de mettre en garde X.________ en raison des
critiques recueillies quant à ses sautes d'humeur et ses écarts de langage.
Le comité a informé oralement X.________ des griefs qui lui étaient faits.

X. ________ n'a cependant guère modifié ses habitudes et son naturel s'est
encore affirmé au fil du temps. En décembre 2000, la direction a été informée
de l'ampleur et de la gravité de la situation, à la lecture du rapport remis
le 14 de ce mois par B.________, chef du service du personnel. Ce rapport
retranscrivait les plaintes des employés à l'endroit de X.________.

A.c Le 23 décembre 2000, l'employeur a signifié à X.________ son congé pour
le 30 juin 2001, avec dispense immédiate de travailler.

X. ________ a été en incapacité de travail totale puis partielle du 26
décembre 2000 au 7 octobre 2001. Le 8 janvier 2001, l'employé a contesté la
validité du congé.
L'Hôpital a versé le salaire de X.________ jusqu'au 31 décembre 2001.

B.
Le 16 novembre 2001, X.________ a ouvert action devant le juge du district de
... à l'encontre de l'Association de l'Hôpital Y.________. Il concluait à la
condamnation de la défenderesse à lui verser la somme de 345'345 fr.30, avec
intérêts dès le 3 janvier 2001, à titre de rétribution du travail
supplémentaire (210'989 fr.40) et d'indemnité pour licenciement abusif
(134'355 fr.90), et demandait à ce que le cas soit dénoncé aux autorités
pénales compétentes. La défenderesse a proposé le rejet de la demande, dans
la mesure de sa recevabilité.

L'instruction close, le dossier a été transmis à l'autorité de jugement.
Statuant le 4 septembre 2007, la Cour civile II du Tribunal cantonal valaisan
a rejeté la demande.

L'autorité cantonale a rejeté les prétentions du demandeur fondées sur 321c
CO et considéré que la loi fédérale sur le travail dans l'industrie,
l'artisanat et le commerce (LTr; 822.11) ne trouvait pas application. La
juridiction cantonale a enfin nié le caractère abusif du licenciement.

C.
Le demandeur interjette contre ce prononcé un recours en matière civile au
Tribunal fédéral. Il conclut à l'admission du recours, à l'annulation du
jugement entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour
nouvelle décision dans le sens des considérants.

La défenderesse sollicite le rejet du recours dans la mesure de sa
recevabilité. Quant à l'autorité cantonale, elle se réfère aux considérants
de son jugement.

Considérant en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al.
1 LTF) et dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu en matière
civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance
(art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire concernant le droit du travail dont
la valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 francs (art. 74 al. 1 let. a
LTF), le recours en matière civile est en principe recevable, puisqu'il a été
déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus
par la loi.

1.2 Dans un recours en réforme comme le recours en matière civile, le
recourant ne doit pas se borner à demander l'annulation de la décision
attaquée, mais il doit également prendre des conclusions sur le fond du
litige. Il n'est fait exception à cette règle que lorsque le Tribunal
fédéral, en cas d'admission du recours, ne serait de toute manière pas en
mesure de statuer lui-même sur le fond et devrait renvoyer la cause à
l'autorité cantonale (ATF 133 III 489 consid. 3 et les arrêts cités; Bernard
Corboz, Introduction à la nouvelle loi sur le Tribunal fédéral, in: SJ 2006
II 319 ss, p. 329 s.). En l'espèce, l'autorité cantonale n'a pas arrêté le
nombre d'heures de travail supplémentaire effectuées par le recourant,
puisqu'elle a retenu qu'aucun horaire de travail n'avait été convenu entre
les parties. Cela étant, en cas d'admission du recours, la cause devra être
renvoyée à l'instance cantonale pour qu'elle statue sur cette question. Dès
lors, les conclusions cassatoires du recourant sont recevables.

1.3 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments
soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid.
1.4). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2
LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal
fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de
traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les
questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées
devant lui. Il ne peut pas entrer en matière sur la violation d'un droit
constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou
intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière précise
par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF). Cette exigence de motivation
est calquée sur ce qui était exigé par la jurisprudence en matière de recours
de droit public sur la base de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 133 IV 286
consid. 1.4; 133 III 393 consid. 6 et l'arrêt cité).

1.4 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou
en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de
quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de
celui contenu dans la décision attaquée (ATF 133 IV 286 consid. 6.2; cf. ATF
130 III 136 consid. 1.4). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être
présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99
al. 1 LTF).

2.
A titre liminaire, il est précisé que le litige ne porte que sur la question
du travail supplémentaire ou des heures supplémentaires, le caractère non
abusif du licenciement n'étant plus remis en cause.

3.
3.1 Le recourant s'en prend tout d'abord à deux constatations de fait de
l'autorité cantonale, en considérant qu'il est arbitraire d'avoir retenu que
le recourant « élaborait son propre emploi du temps en collaboration avec ses
collègues » et qu'il « fixait les horaires de travail des infirmiers et des
médecins-assistants et répartissait le travail » ou « faisait le planning du
personnel en fonction de ses affinités, attribuant les personnes qu'il
appréciait le moins à un autre médecin ».

Selon le recourant, la première constatation est insoutenable, puisque
contraire aux conditions-cadre du Groupement des établissements hospitaliers
valaisans (Gehval), qui indiquent que si le cahier des charges des
médecins-chefs est élaboré par les intéressés, ceux-ci proposent aux
responsables de l'établissement leur cahier des charges et, le cas échéant,
l'organisation de leur service. Il ajoute que l'instruction de la cause n'a
pas porté sur l'emploi du temps ou les horaires des médecins-chefs et que le
volume des opérations chirurgicales à effectuer excluait toute latitude dans
l'établissement d'un « horaire de travail ».

Quant aux deux autres constatations, le recourant les conteste formellement,
en affirmant qu'elles n'ont jamais fait l'objet d'une instruction,
d'allégations ou d'offres de preuve des parties et qu'elles ne sont
confirmées par aucun document contractuel ou d'organisation. Pour appuyer ses
dires, il soutient, référence faite au ch. 5.1.2 de la pièce 4, qu'au sein du
conseil de direction du département, la charge de l'organisation du personnel
était du ressort du Dr C.________.

3.2 Dans la mesure où, s'agissant de la première constatation litigieuse, le
recourant fonde son argumentation sur un passage des conditions-cadre du
Gehval qui a trait au cahier des charges des médecins-chefs, mais pas à leur
emploi du temps, sa critique est sans consistance. Par ailleurs, quoi qu'en
dise le recourant, le témoin D.________, directeur de l'Hôpital au moment des
faits, s'est exprimé sur la question de l'emploi du temps des médecins-chefs.
Enfin, le recourant semble perdre de vue qu'il a été retenu par l'autorité
cantonale que si le recourant n'avait pas d'horaire de travail imposé, sa
liberté était en pratique limitée par la nécessité d'organiser son emploi du
temps en collaboration avec ses collègues de manière à faire face aux besoins
de l'Hôpital.

Quant aux deux autres constatations, on ne saurait dénier toute valeur
probante aux divers documents constituants le dossier pénal, dès l'instant où
ce dossier a été dûment versé en cause et où les dépositions figurant dans ce
dossier, notamment en ce qui concerne la fixation par le recourant des
horaires de travail du personnel, n'ont pas été contredites en cours de
procédure par les personnes entendues à ce sujet. De plus, la pièce 4 ne
corrobore en rien l'affirmation selon laquelle le Dr C.________ avait la
charge de l'organisation du personnel, puisqu'il est indiqué sous chiffre
6.1.2 (et non pas 5.1.2, qui n'existe pas) que « le Dr C.________ est
présent. La commission constate que l'organisation actuelle qui permet au Dr
A.________ d'?uvrer principalement aux Soins intensifs a apaisé la
situation ».

En tout état de cause, force est d'admettre que les constatations litigieuses
ne constituent que des éléments d'appréciation parmi bien d'autres sur
lesquels les juges se sont basés pour reconnaître que le recourant exerçait
une fonction dirigeante élevée. Dès lors que les autres éléments
d'appréciation ne sont pas présentement remis en cause, les constatations sur
lesquelles porte le litige ne sauraient être arbitraires dans le résultat, ce
que le recourant ne démontre du reste pas.

Dans ces circonstances, le premier grief tombe à faux.

4.
Sous l'intitulé « Quant à l'application de la LTr aux médecins-chefs », le
recourant revient sur la non-application par l'autorité cantonale de la LTr
pour trancher la prétention du travail supplémentaire.
Dans son grief, le recourant ne démontre pas en quoi l'autorité cantonale
aurait violé le droit fédéral, plus particulièrement l'art. 3 let. d LTr en
lien avec l'art. 9 OLT 1. Il ne prétend pas et encore moins n'établit, que
les éléments sur lesquels s'est fondée l'autorité cantonale pour admettre que
le recourant occupait une fonction dirigeante élevée ne constituent pas des
critères décisifs au sens de la jurisprudence. Par ailleurs, lorsque le
recourant affirme que « le travailleur doit être en réalité un organe de fait
pour qu'il puisse être considéré comme un cadre à fonction dirigeante
élevée », il fait une lecture erronée de la jurisprudence du Tribunal fédéral
dont il se fait l'écho.

Pour arriver à la conclusion qu'il n'a jamais occupé une fonction dirigeante
élevée, le recourant se contente en définitive de prendre appui sur un
certain nombre de faits, qui divergent manifestement de ceux retenus par
l'autorité cantonale. En cela, le grief est clairement irrecevable.

5.
Le recourant fait enfin état d'une violation de l'art. 321c CO.

5.1 La cour cantonale a considéré que le recourant ne pouvait pas fonder ses
prétentions sur l'art. 321c CO, au motif qu'il n'a pas été établi que les
parties avaient convenu d'un horaire de travail de 45 heures par semaine,
comme allégué par le recourant à l'appui de ses prétentions. Les juges ont
retenu que la terminologie « 9 heures/année » figurant à l'art. 7 du contrat,
consacré à la rémunération au forfait, n'a pas pour vocation d'arrêter la
durée du travail hebdomadaire. Ils ont en outre déduit des conditions-cadre,
édictées le 21 avril 1998, par le Gehval, au sujet des honoraires médicaux,
que les médecins-chefs ne sont pas soumis à un horaire de travail, mais que
la durée de leur activité varie d'un jour à l'autre en fonction des besoins.
Ils ont à ce sujet arrêté que tous les médecins-chefs entendus en procédure
effectuaient un horaire hebdomadaire de plus de 45 heures - en moyenne plus
de 50 heures - sans avoir jamais fait valoir de prétention.

5.2 Après avoir recopié le passage critiqué du jugement entrepris, le
recourant se contente d'affirmer que les considérations de l'autorité
cantonale justifient que les médecins-chefs soient soumis à n'importe quelles
conditions de travail, y compris les plus extrêmes, le seul critère digne de
considération étant les besoins de l'institution hospitalière, avant
d'ajouter qu'il a été établi que personne ne pouvait sortir indemne du rythme
de travail qui lui avait été imposé. Force est de constater qu'en tenant de
tels propos, le recourant ne démontre pas, d'une manière conforme à l'art. 42
al. 2 LTF, en quoi l'autorité cantonale aurait violé l'art. 321c CO. Le
recourant ne tente même pas de prétendre qu'il aurait effectué des horaires
allant au-delà de l'usage dans la profession, ce qu'il n'y a du reste pas
lieu d'inférer, dès lors qu'il a été souverainement retenu que tous les
médecins-chefs, y compris le recourant, effectuaient en moyenne plus de 50
heures par semaine.

Le recourant revient essentiellement sur le terme « 9 heures/année ». Il
soutient que l'autorité cantonale a sombré dans l'arbitraire en ayant
considéré que ce terme ne visait pas l'horaire de travail, mais une simple
échelle de rémunération. Dans la mesure où cette considération relève de
l'appréciation des preuves et du fait en découlant, le moyen est infondé,
puisqu'aucune exception au sens de l'art. 105 LTF n'a été soulevée en lien
avec le fait en question. Quoi qu'il en soit, le recourant ne démontre pas à
satisfaction que l'autorité cantonale aurait fait montre d'arbitraire,
puisqu'il se limite, d'une part, à retranscrire partiellement la déposition
de D.________ pour tenter de lui donner un sens différent de celui retenu par
la cour et, d'autre part, à opposer sa propre appréciation à celle de la cour
s'agissant du libellé de l'art. 7.

Le recourant prétend enfin que si la notion « 9 heures/année » ne devait pas
signifier 45 heures de travail par semaine, le contrat de travail devrait
être lu comme s'il comprenait une semaine de 45 h, soit le maximum légal
selon l'art. 9 LTr. Dès lors qu'il a été jugé que la LTr ne trouvait pas
application dans le cas d'espèce, le grief est infondé.

6.
Au terme de cet examen, le recours ne peut qu'être rejeté dans la mesure de
sa recevabilité.

7.
Comme la valeur litigieuse, calculée selon les prétentions à l'ouverture de
l'action (ATF 115 II 30 consid. 5b), dépasse le seuil de 30'000 fr., le
montant de l'émolument judiciaire est fixé d'après le tarif ordinaire (art.
65 al. 3 let. b LTF) et non réduit (art. 65 al. 4 let. c LTF).
Compte tenu de l'issue du litige, le recourant, qui succombe, doit acquitter
l'émolument judiciaire et les dépens à allouer à l'intimée (art. 66 al. 1 et
68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'500 fr., sont mis à la charge du
recourant.

3.
Une indemnité de 7'500 fr., à payer à l'intimée à titre de dépens, est mise à
la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 17 décembre 2007 / CMF

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière:

Corboz Crittin