Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.38/2007
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4A_38/2007

Arrêt du 7 août 2007
Ire Cour de droit civil

MM. et Mme les Juges Corboz, président, Rottenberg Liatowitsch et Kolly.
Greffier: M. Carruzzo.

X. ________,
recourant, représenté par Me Albert J. Graf,

contre

SA Y.________ en liquidation et son actionnaire-locataire Z.________, sous
gérance légale de l'Etat de Genève, soit pour lui l'Office des faillites du
canton de Genève, case postale 1856, 1227 Carouge GE,
intimés, représentés par Me Olivier Wehrli.

contrat de bail à loyer; évacuation,

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 5 février 2007 par la
Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Faits :

A.
A.a Par contrats des 26 juillet 1996 et 16 janvier 1997, la SA Y.________
(mise en faillite le 22 mars 2004), agissant par le truchement de Z.________,
son actionnaire-locataire, a remis à bail à X.________ deux appartements d'un
immeuble sis à Genève. Conclus pour un an, les baux étaient reconductibles
tacitement d'année en année. Les loyers devaient être payés par mois et
d'avance.

Les parties sont convenues ultérieurement de hausses de loyers importantes
avec effet au 1er août 2001 et au 1er février 2002. De ce fait, à la demande
du locataire, Z.________, par lettre du 6 février 1997, a autorisé celui-ci à
payer les loyers et charges "dans les trois mois après le mois échu".

A.b En juin 1997, une gérance légale a été instaurée sur l'immeuble précité
et confiée à A.________ & Cie SA. Cette agence immobilière a adressé de
nombreux rappels à X.________ pour retard dans le paiement des loyers. Le
locataire ne versait, en effet, que rarement d'avance le montant de ceux-ci;
il s'en acquittait le plus souvent dans le courant du mois suivant, mais sans
jamais se prévaloir de la facilité de paiement qui lui avait été accordée.

Au printemps 2002, A.________ & Cie SA a prétendu résilier les baux pour
cause de demeure du locataire. X.________ a formellement contesté les
résiliations en soutenant qu'il avait payé les arriérés réclamés dans les 30
jours dès la réception des avis comminatoires. La régie n'a alors pas
poursuivi ses démarches.

A.c Par lettres recommandées du 11 avril 2003, A.________ & Cie SA a mis
X.________ en demeure de s'acquitter dans les 30 jours de deux arriérés de
loyers de 11'016 fr. et 7'150 fr., faute de quoi les baux seraient résiliés
conformément à l'art. 257d al. 2 CO.

Par avis officiels du 20 mai 2003, le locataire, qui n'avait pas payé
l'intégralité des loyers en souffrance dans le délai imparti, s'est vu
signifier la résiliation des baux pour le 30 juin 2003.

B.
Le 8 juillet 2003, la bailleresse a saisi la Commission genevoise de
conciliation en matière de baux et loyers d'une requête tendant à
l'évacuation de X.________ des locaux loués. Non conciliée le 1er mars 2004,
la cause a été soumise au Tribunal des baux et loyers. Elle a donné lieu à
plusieurs décisions judiciaires en raison du défaut du défendeur.

Par jugement du 30 juin 2006, le Tribunal des baux et loyers a constaté
l'inefficacité des avis de résiliation signifiés à X.________.

L'Office des faillites du canton de Genève, en tant que représentant de
A.________ & Cie SA, a appelé de ce jugement aux fins d'obtenir l'évacuation
immédiate du défendeur. Ce dernier a contesté la légitimation active de la
susdite régie pour interjeter appel.

Statuant par arrêt du 5 février 2007, la Chambre d'appel en matière de baux
et loyers du canton de Genève, après avoir annulé le jugement de première
instance, a condamné X.________ à évacuer immédiatement les deux appartements
litigieux et débouté les parties de toutes autres conclusions.

C.
Le 12 mars 2007, X.________ a formé un recours en matière civile contre
l'arrêt cantonal. Il conclut principalement à la réforme de cet arrêt en ce
sens que les intimés devront être déboutés de leur demande visant à son
évacuation des appartements loués. A titre subsidiaire, le recourant requiert
le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour instruction et nouveau
jugement.

Les intimés concluent principalement à l'irrecevabilité du recours et,
subsidiairement, au rejet de celui-ci. La cour cantonal se réfère, quant à
elle, aux motifs énoncés dans son arrêt.

Par ordonnance présidentielle du 30 avril 2007, le recourant a été invité à
verser, jusqu'au 15 mai 2007, à la Caisse du Tribunal fédéral, le montant de
3'500 fr., suite au dépôt d'une requête de sûretés en garantie des dépens
présentée par les intimés. Il s'est exécuté en temps utile.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Comme la décision attaquée a été rendue après l'entrée en vigueur, le
1er janvier 2007 (RO 2006, 1242), de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral
(LTF; RS 173.110), le recours est régi par le nouveau droit (art. 132 al. 1
LTF).

2.
2.1 Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière civile
(art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75
al. 1 LTF) dans une affaire de bail à loyer dont la valeur litigieuse atteint
le seuil de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le présent recours en
matière civile est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le
délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.

Les intimés contestent la recevabilité du recours. A cet égard, ils font
valoir, en premier lieu, que X.________ n'occupe pas les locaux dont
l'évacuation a été ordonnée et qu'il ne soutient pas non plus les avoir
sous-loués, de sorte qu'il n'aurait aucun intérêt juridique à recourir. Cet
avis ne saurait être partagé. D'abord, la jurisprudence interprète l'art. 76
al. 1 LTF en ce sens que la qualité pour former un recours en matière civile
suppose uniquement que le recourant ait pris part à la procédure devant
l'autorité précédente et qu'il y ait succombé dans ses conclusions (arrêt
4A_28/2007 du 30 mai 2007, consid. 1.1, destiné à la publication). Tel est le
cas de X.________ qui s'est opposé sans succès, devant la Chambre d'appel, à
son expulsion des locaux pris à bail. Ensuite, l'objection soulevée par les
intimés ne découle pas de faits constatés dans l'arrêt attaqué, mais
d'allégations formulées dans la requête de sûretés en garantie des dépens.
Enfin et surtout, les intimés perdent de vue que, pour les locaux
d'habitation, il n'y a aucune obligation d'usage, sauf clause contractuelle
contraire (David Lachat, Le bail à loyer, p. 52 s., n. 1.3.10; Peter Higi,
Commentaire zurichois, n. 27 ad art. 253 CO). Aussi ne saurait-on faire
dépendre la qualité pour recourir contre une décision d'évacuation de
l'occupation effective des locaux litigieux par le locataire ou par d'autres
personnes avec le consentement de celui-ci. Les deux précédents et l'opinion
doctrinale invoqués par les intimés à l'appui de l'opinion inverse ne sont
pas topiques: l'arrêt publié aux ATF 85 II 286 consid. 2 et 3 avait trait à
la qualité du bailleur pour recourir en réforme contre une décision cantonale
refusant d'expulser un locataire, lequel avait quitté définitivement les
lieux avant le dépôt dudit recours; quant à l'arrêt publié aux ATF 131 I 242
consid. 3.3, il soulevait la question de l'intérêt du locataire à obtenir une
décision sur la validité du congé après que la décision d'expulsion avait été
exécutée; pour sa part, l'auteur cité dans la réponse au recours se borne -
dans le passage visé par les intimés - à faire la distinction entre le
recours irrecevable et le recours devenu sans objet, en se fondant notamment
sur le premier de ces deux arrêts (Jean-François Poudret, COJ, n. 5.5. ad
art. 53 OJ).

En second lieu, les intimés s'en prennent à la formulation des conclusions du
recours, qu'ils jugent imprécise. Il est vrai, comme ils le soulignent, que
le recours en matière civile n'est pas un recours en cassation mais un
recours en réforme (art. 107 al. 2 LTF; Bernard Corboz, Introduction à la
nouvelle loi sur le Tribunal fédéral, in SJ 2006 II p. 329 s.). Toutefois,
contrairement à leur avis, le recours soumis à l'examen du Tribunal fédéral
ne méconnaît pas cette nature. A tout le moins en va-t-il ainsi de la
conclusion tendant à ce qu'il soit dit que "Monsieur X.________ ne sera pas
évacué". De ce point de vue, le mémoire de recours satisfait à l'exigence de
forme fixée par l'art. 42 al. 1 LTF.

Il y a lieu, partant, d'entrer en matière. Demeure réservé l'examen des
différents moyens soulevés par le recourant.

2.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation
contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108
al. 1 let. b LTF), il n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est
pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance,
toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus
discutées devant lui. Il ne peut pas entrer en matière sur la violation d'un
droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou
intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière précise
par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).

2.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou
en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour
autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la
cause (art. 97 al. 1 LTF).

La notion de « manifestement inexacte » correspond à celle d'arbitraire au
sens de l'art. 9 Cst. (Message concernant la révision totale de
l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4000 ss,
spéc. p. 4135). D'après la jurisprudence, une décision est arbitraire
lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou
un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le
sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre
solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit
annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses
motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 III 209 consid. 2.1). Dans la
mesure où l'arbitraire est invoqué en relation avec l'établissement des
faits, il convient de rappeler que le juge dispose d'un large pouvoir
lorsqu'il apprécie les preuves. La partie recourante doit ainsi démontrer
dans quelle mesure le juge a abusé de son pouvoir d'appréciation et, plus
particulièrement, s'il a omis, sans aucune raison sérieuse, de prendre en
compte un élément de preuve propre à modifier la décision attaquée, s'il
s'est manifestement trompé sur son sens et sa portée ou encore si, en se
fondant sur les éléments recueillis, il en a tiré des constatations
insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1).

La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de
quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de
celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III 138 consid. 1.4).
Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de
résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

3.
Dans sa réponse à l'appel, le recourant avait contesté la qualité de la régie
A.________ & Cie SA pour appeler du jugement de première instance. Au
considérant 2 de son arrêt, la Chambre d'appel a écarté cette objection.
X.________ ne s'en plaint pas dans son mémoire de recours. Il n'y a donc pas
lieu d'examiner ce point de l'arrêt attaqué.

4.
Entre autres griefs, le recourant reproche aux juges précédents d'avoir
prononcé son évacuation alors que les conditions de la demeure du locataire
n'étaient pas réalisées en sa personne.

4.1 Aux termes de l'art. 257d CO, lorsque, après réception de la chose, le
locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires
échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui
signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai il résiliera le bail. Ce
délai sera de dix jours au moins et, pour les baux d'habitations ou de locaux
commerciaux, de 30 jours au moins (al. 1). Faute de paiement dans le délai
fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux
d'habitations et de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un
délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d'un mois (al. 2).

La demeure du locataire, au sens de cette disposition, suppose que la créance
du bailleur soit exigible et que le locataire soit en retard dans l'exécution
de l'obligation y relative. Si l'une de ces deux conditions cumulatives n'est
pas réalisée, le délai de paiement imparti au locataire par le bailleur, en
application de l'art. 257d al. 1 CO, reste sans effet. Il y a retard lorsque
le paiement d'une prestation exigible n'est pas encore accompli au terme
prévu. Point n'est besoin d'une interpellation du créancier, à l'inverse de
ce que l'art. 102 al. 1 CO prescrit pour la mise en demeure ordinaire du
débiteur (arrêt 4C.479/1997 du 24 juin 1998, consid. 3a et les auteurs
cités). En vertu de l'art. 257c CO, le locataire doit payer le loyer et, le
cas échéant, les frais accessoires, à la fin de chaque mois, sauf convention
ou usage local contraires.

4.2 Appliquant ces principes aux faits constatés par elle, la cour cantonale
a émis les considérations résumées ci-après.

Le terme d'exigibilité des loyers, tel qu'il était fixé dans les contrats de
bail des 26 juillet 1996 et 16 janvier 1997 - par mois et d'avance -, a été
valablement modifié par convention des parties. En effet, il résulte d'un
courrier du 6 février 1997 que la bailleresse a expressément autorisé le
locataire à s'acquitter du loyer et des charges "dans le délai de trois mois
après le mois échu". Cet accord dérogatoire, qui n'était pas limité dans le
temps, n'a pas été modifié ultérieurement. Si elle avait voulu le faire de
manière unilatérale, la bailleresse aurait d'ailleurs dû utiliser la formule
ad hoc (art. 269d al. 3 CO). Peu importe, pour déterminer l'efficacité du
terme d'exigibilité accordé par la bailleresse, que la régie A.________ & Cie
SA ait ignoré l'existence de l'accord y relatif. Il appartenait au
propriétaire de l'en informer, en lui fournissant tous les documents propres
à lui permettre une exécution régulière du mandat de gestion, y compris la
lettre du 6 février 1997. Aussi la régie ne saurait-elle opposer au locataire
la négligence de sa mandante à lui faire connaître les modalités de paiement
des loyers.
Cela étant, même si ledit accord était toujours en vigueur au moment de la
notification des avis comminatoires (11 avril 2003), il n'en faut pas moins
admettre la validité de la résiliation des baux signifiée par la régie. En
effet, le locataire ne saurait se prévaloir du terme d'exigibilité à trois
mois sans commettre un abus de droit (art. 2 al. 2 CC). S'étant abstenu,
pendant près de sept ans (de 1997 à 2004), d'invoquer la facilité de paiement
qui lui avait été accordée, alors que la régie lui avait adressé de très
nombreux rappels, il a créé et maintenu, par son silence, l'apparence
juridique du paiement des loyers par mois et d'avance, à laquelle la régie
s'est légitimement fiée. Certes, le locataire ne payait que rarement son
loyer par mois et d'avance, mais cet état de choses ne s'oppose pas à ce que
l'on admette la bonne foi de la régie (art. 3 CC). Celle-ci avait du reste
été confortée dans son erreur quant au terme d'exigibilité des loyers par le
fait que, lorsqu'il avait contesté une première résiliation des baux qui lui
avait été signifiée en mars 2002, le locataire, au lieu de se prévaloir de
l'accord dérogatoire concernant l'échéance des loyers, avait simplement
soutenu avoir payé les arriérés de loyers dans le délai comminatoire qui lui
avait été imparti à cette fin. Ce faisant, l'intéressé avait admis qu'il
était en demeure et, partant, que les loyers devaient être réglés chaque mois
à l'avance. Au demeurant, étant donné le caractère inhabituel de la clause
dérogatoire, qui consacrait une modalité de paiement très différente de la
pratique usuelle, le locataire aurait été bien inspiré d'en aviser
spécialement la régie lorsqu'il avait été informé que l'immeuble en cause
avait été placé sous gérance légale.

En conclusion, l'existence d'un délai de paiement à trois mois n'a pas
empêché les avis de résiliation de produire leur effet, contrairement à
l'opinion des premiers juges. Il convient donc d'annuler le jugement attaqué
et d'ordonner au locataire d'évacuer les appartements loués.

4.3
4.3.1 Selon l'art. 2 al. 2 CC, l'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé
par la loi. L'existence d'un abus de droit se détermine en fonction des
circonstances concrètes du cas et au regard des diverses catégories mises en
évidence par la jurisprudence et la doctrine (ATF 129 III 493 consid. 5.1 p.
497 et les arrêts cités). L'adjectif "manifeste" indique qu'il convient de se
montrer restrictif dans l'admission de l'abus de droit (ATF 128 III 284
consid. 5b non publié et l'arrêt cité). Les cas typiques sont l'absence
d'intérêt à l'exercice d'un droit, l'utilisation d'une institution juridique
contrairement à son but, la disproportion manifeste des intérêts en présence,
l'exercice d'un droit sans ménagement ou l'attitude contradictoire (cf. ATF
129 III 493 consid. 5.1 p. 497; consid. 5b, non publié, de l'ATF 128 III 284
et les arrêts cités).

4.3.2 La décision attaquée entraîne une conséquence pour le moins singulière
en ce sens que, par le détour de l'abus de droit, elle crée une fiction
juridique consistant à admettre l'existence d'un cas de demeure du locataire
dans une situation où celui-ci n'avait pas de retard dans le paiement des
loyers. Semblable conséquence n'apparaît pas compatible avec le but dévolu à
l'exception réservée par l'art. 2 al. 2 CC, dont la mise en oeuvre doit
demeurer une ultima ratio. Le comportement du locataire, tel qu'il est décrit
dans l'arrêt attaqué, à le supposer abusif, aurait pu être sanctionné par une
mesure moins drastique, par exemple en faisant supporter à cette partie les
frais et honoraires inutiles qui en étaient résultés pour ses parties
adverses.

Les faits constatés par la cour cantonale ne révèlent du reste pas
nécessairement l'intention du locataire de taire l'existence de l'accord
dérogatoire relatif au terme d'exigibilité des loyers, dans le but supposé
d'invoquer ultérieurement cette circonstance pour s'opposer à une résiliation
du bail fondée sur sa demeure. Il en appert, en particulier, que le recourant
a adopté un comportement conforme à l'accord dérogatoire, en ce sens que, la
plupart du temps, il ne s'est pas acquitté du loyer par mois et d'avance.
Qu'il l'ait fait à de rares occasions n'est d'ailleurs pas déterminant, car
l'accord dérogatoire lui avait octroyé une faculté de paiement dans les trois
mois dès l'échéance des loyers et non l'obligation d'attendre la fin de ce
délai pour s'exécuter. Sur le vu de ces mêmes faits, il est aussi possible -
autre hypothèse - que le locataire ne se soit plus souvenu de l'existence de
cet accord ou qu'il ait prêté à celui-ci une autre signification que celle
qu'il revêt, ce qui expliquerait qu'il n'en ait pas fait état à réception des
différents rappels qui lui ont été adressés ou de la résiliation du bail qui
lui a été signifiée en mars 2002, d'autant qu'il n'était alors pas assisté
d'un avocat. Dans ce cas de figure, que le locataire, pour s'opposer à son
évacuation, ait invoqué sur le tard l'accord dérogatoire, après qu'il s'était
souvenu de son existence ou qu'un homme de loi lui en eut indiqué la portée,
ne dénoterait pas un comportement abusif de l'intéressé.

Au demeurant, l'argumentation des juges précédents est quelque peu
contradictoire dans la mesure où elle dénie à la régie le droit d'opposer au
locataire le fait que la bailleresse ne l'avait pas informée des modalités de
paiement, tout en reprochant au locataire de n'avoir pas pris l'initiative de
fournir cette information à la régie.

Il apparaît ainsi, au terme de cet examen, que l'expulsion du recourant des
locaux pris à bail a été prononcée sur la base d'un congé inefficace. Il y a
lieu, partant, de réformer l'arrêt attaqué dans le sens du rejet de la
demande ad hoc présentée par les intimés.

5.
Conformément à l'art. 66 al. 1 et 5 LTF, les frais judiciaires seront mis à
la charge des intimés, avec solidarité entre eux. Ceux-ci seront encore
condamnés solidairement à verser au recourant une indemnité à titre de dépens
(art. 68 al. 2 et 4 LTF). Enfin, la Caisse du Tribunal fédéral restituera au
recourant les 3'500 fr. versés par lui pour garantir les dépens des intimés.

Quant aux frais de la procédure antérieure, ils ne consistent qu'en un
émolument d'appel de 300 fr. mis à la charge du recourant, la procédure
conduite devant le Tribunal des baux et loyers ayant été déclarée gratuite.
Faisant usage de la faculté que lui réserve l'art. 67 LTF et par souci
d'économie de la procédure, la Cour de céans statuera elle-même sur le sort
de ces frais en les mettant à la charge solidaire des intimés.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé.

2.
La demande tendant à l'évacuation immédiate de X.________ de l'appartement
qu'il occupe au 4e étage de l'immeuble sis ..., à Genève, et de l'appartement
avec studio qu'il occupe aux 1er et 2e étages du même immeuble, ainsi que de
leurs dépendances, est rejetée.

3.
Toutes les autres conclusions des parties sont rejetées.

4.
Les intimés verseront à l'Etat de Genève un émolument d'appel de 300 fr.

5.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des intimés,
solidairement entre eux.

6.
Les intimés sont condamnés solidairement à verser au recourant une indemnité
de 3'500 fr. à titre de dépens.

7.
La Caisse du Tribunal fédéral restituera au recourant le montant de 3'500 fr.
qu'il a versé pour garantir les dépens des intimés.

8.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Lausanne, le 7 août 2007

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: