Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.307/2007
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4A_307/2007

Arrêt du 6 décembre 2007
Ire Cour de droit civil

MM. et Mme les juges Corboz, président, Klett et Kolly.
Greffier: M. Thélin.

X. ________,
Y.________,
demandeurs et recourants,
représentés par Me Marcel Heider,

contre

A.Z.________,
B.Z.________,
C.Z.________,
D.Z.________,
E.Z.________,
défendeurs et intimés,
représentés par Me Robert Fox.

interprétation d'un contrat de vente

recours contre le jugement rendu le 17 janvier 2007 par la Cour civile du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Faits:

A.
En 1998, M.________ SA était propriétaire d'un bien-fonds avec bâtiment
d'habitation sis à Montreux; cet immeuble constituait son principal actif. Le
bilan au 31 décembre 1997 mentionnait des dettes hypothécaires en premier et
deuxième rang au total de 1'375'000 francs.

X. ________ et Y.________ détenaient toutes les actions de M.________ SA. Par
contrat conclu le 5 décembre 1998, ils ont vendu ces titres à A.Z.________
qui achetait conjointement avec quatre autres personnes de sa famille.
Le bilan au 31 décembre 1997 était annexé au contrat et il en faisait partie
intégrante. Le prix de vente des actions était « calculé sur la base du
bilan » et arrêté au montant de 1'930'000 fr. Les vendeurs s'obligeaient à
prendre en charge le paiement de « toutes dettes, obligations ou engagements
non mentionnés dans le bilan ».
Un descriptif de l'immeuble social était reproduit dans le contrat; il
indiquait que ce bien était grevé de quatre cédules hypothécaires dont trois
étaient détenues par la Banque cantonale vaudoise. Les parties convenaient
que « ces quatre cédules hypothécaires seront tenues gratuitement à
disposition des acheteurs - libres de tout prêt et engagement - pour le jour
du transfert définitif, soit au règlement du solde du prix de vente ».
Conformément au contrat et par l'intermédiaire du notaire qui avait préparé
ce document, les acheteurs versèrent d'abord un acompte de 200'000 fr., puis
le solde du prix par 1'730'000 fr. Sur ce dernier montant, la banque fut
remboursée des crédits hypothécaires par 1'431'371 fr.50 au total. Il n'est
pas douteux que les actions de M.________ SA furent transférées aux acheteurs
car cette société entra en liquidation dès le 17 mars 1999; elle avait nommé
A.Z.________ à la fonction de liquidateur unique.

B.
Le 6 décembre 1999, X.________ et Y.________ ont ouvert action contre les
cinq acheteurs devant le Tribunal cantonal du canton de Vaud. Ceux-ci
devaient être condamnés solidairement au paiement de 1'004'602 fr.10 avec
intérêts au taux de 5% par an dès le 12 mai 1999. Les demandeurs exposaient
que pour la taxation de l'impôt sur les gains immobiliers, sur la base du
contrat et du bilan, l'administration fiscale cantonale avait estimé la
valeur de l'immeuble à 3'307'829 fr.10. Le contrat obligeait censément les
défendeurs à payer la différence entre ce montant et ce qu'ils avaient déjà
versé, moins divers impôts liés au transfert des titres et à la liquidation
de la société.
Les défendeurs ont conclu au rejet de cette demande; ils ont élevé des
prétentions reconventionnelles au montant total de 39'031 fr.80 avec suite
d'intérêts dès le 3 avril 2000. Ces prétentions correspondaient à des charges
que M.________ SA devait supporter et qui ne figuraient pas au bilan
déterminant.
La Cour civile du Tribunal cantonal s'est prononcée le 17 janvier 2007. Elle
a rejeté la demande principale. Elle a jugé que les demandeurs s'étaient
obligés à rembourser les dettes hypothécaires de M.________ SA et à
transférer les actions de cette société aux défendeurs, le toute pour le prix
de 1'930'000 fr. que ces derniers avaient dûment acquitté; ce prix
correspondait à la valeur de l'immeuble convenue entre les parties et les
demandeurs ne pouvaient rien exiger en sus. La Cour a partiellement admis la
demande reconventionnelle, en tant que les charges concernées se rapportaient
à des faits antérieurs au transfert des actions; elle a condamné les
demandeurs à payer 19'939 fr.05 avec intérêts au taux de 5% par an dès le 30
avril 2000.

C.
Agissant par la voie du recours en matière civile, les demandeurs requièrent
le Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la Cour civile en ce sens que les
défendeurs devront payer solidairement 1'004'602 fr.10, avec intérêts au taux
de 5% par an dès le 12 mai 1999, et, en outre, 28'795 fr. à titre de dépens
de première instance; subsidiairement, les demandeurs requièrent l'annulation
de l'arrêt et le renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle
décision.
Les défendeurs concluent au rejet du recours.

Considérant en droit:

1.
Le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF), rendu en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF) et en dernière instance cantonale (art. 75
al. 1 LTF). La valeur litigieuse excède le minimum légal de 30'000 fr. (art.
51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. b LTF). Il est formé par deux parties qui
ont pris part à l'instance précédente et succombé dans leurs conclusions
(art. 76 al. 1 LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), le recours
est recevable dans la mesure où il est suffisamment motivé (consid. 2
ci-dessous).
Le recours peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a
LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office, hormis les droits
fondamentaux (art. 106 LTF). Il n'est pas lié par l'argumentation des parties
et il apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient
cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante
soulève conformément aux exigences légales relatives à la motivation du
recours (art. 42 al. 2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254); il ne se
prononce sur la violation de droits fondamentaux que si le grief est invoqué
et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; même arrêt, consid. 1.4.2).
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Il peut
compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se
révèlent manifestement inexactes ou établies en violation du droit (art. 105
al. 2 LTF). La partie recourante est autorisée à attaquer des constatations
de fait ainsi irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer
sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Cette partie ne peut toutefois
pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres
allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; elle doit
plutôt indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont contraires au
droit ou entachées d'une erreur indiscutable (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p.
254; voir aussi ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 125 I 492 consid. 1b p.
495).

2.
Les demandeurs soutiennent que le contrat conclu le 5 décembre 1998 obligeait
les défendeurs à payer le prix convenu et, de plus, à prendre en charge le
remboursement des dettes hypothécaires de M.________ SA. Ils reprochent à la
Cour civile d'avoir violé l'art. 18 CO, relatif à l'interprétation des
contrats, en retenant que les défendeurs devaient seulement le prix convenu.
Leur argumentation n'indique pas comment ils parviennent au montant de
1'004'602 fr.10 censément dû pour le remboursement des dettes hypothécaires;
sur ce point, le recours n'est pas motivé conformément aux exigences de
l'art. 42 al. 2 LTF. En tant que la contestation porte sur les prétentions
reconventionnelles des défendeurs, le recours est irrecevable parce que
dépourvu de toute motivation.
Les conclusions concernant les dépens de l'instance cantonale sont recevables
en tant que le Tribunal fédéral peut, selon l'issue de la cause, fixer
lui-même ces dépens d'après le tarif cantonal (art. 68 al. 5 LTF).

3.
Confronté à un litige sur l'interprétation d'une convention, le juge doit
tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des
parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles
ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de
la convention (art. 18 al. 1 CO). S'il y parvient, le juge procède à une
constatation de fait qui ne peut être contestée, en instance fédérale, que
dans la mesure restreinte permise par l'art. 97 al. 1 LTF (cf. ATF 131 III
606 consid. 4.1 p. 611; 129 III 618 consid. 3 p. 620, 129 III 664 consid. 3.1
p. 667). Déterminer ce que les parties savent ou veulent au moment de
conclure relève en effet de la constatation des faits (ATF 131 III 606,
ibidem; 128 III 419 consid. 2.2 p. 422).
Si le juge ne parvient pas à établir la commune et réelle intention des
parties, il lui incombe d'interpréter leurs déclarations et comportements
selon la théorie de la confiance. Il doit rechercher comment une déclaration
ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble
des circonstances (ATF 132 III 24 consid. 4 p. 27/28). Le principe de la
confiance permet d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou
de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime
(ATF 131 III 606 consid. 4.1 p. 611; 130 III 417 consid. 3.2 p. 424; 129 III
118 consid. 2.5 p. 123, 664 consid. 3.1 p. 667). L'application du principe de
la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral examine
librement. Pour résoudre cette question de droit, il doit cependant apprécier
le contenu de la manifestation de volonté concernée et les circonstances dans
lesquelles elle est intervenue, points qui relèvent du fait (ATF 132 III 24
consid. 4 p. 28; 131 III 606 consid. 4.1 p. 611; 130 III 417 consid. 3.2 p.
425).
La Cour civile s'est dûment référée à ces principes. Elle fonde sa décision
sur deux motivations convergentes: l'une constate en fait la réelle et
commune intention des parties; l'autre, subsidiaire, repose sur une
interprétation objective de leurs manifestations de volonté.

4.
Invoquant l'art. 9 Cst., les demandeurs reprochent à la Cour d'avoir constaté
arbitrairement qu'il existât, lors de la conclusion du contrat, une intention
commune des parties.
Dans l'appréciation des preuves et la constatation des faits, l'autorité
viole l'art. 9 Cst. lorsqu'elle ne prend pas en considération, sans aucune
raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision,
lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore
lorsque, sur la base des éléments recueillis, elle parvient à des
constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1). Selon la jurisprudence
relative aux recours formés pour violation de droits constitutionnels (art.
106 al. 2 ou 116 LTF), celui qui se plaint d'arbitraire doit indiquer de
façon précise en quoi la décision qu'il attaque est entachée d'un vice grave
et indiscutable; à défaut, le grief est irrecevable (ATF 133 II 249 consid.
1.4.3 p. 254; arrêt 2C_224/2007 du 10 septembre 2007, consid. 3.3 destiné à
la publication).
De l'arrêt dont est recours, on extrait le passage ci-après:
Au moment de conclure l'acte de vente, il était clair dans l'esprit des
parties et du notaire qu'il s'agissait d'une vente mobilière, portant sur les
actions de la société immobilière, qui correspondait, du point de vue
économique, à la vente de l'immeuble. Pour les parties au contrat, le prix de
vente de 1'930'000 fr. s'entendait au total, y compris le montant des dettes
hypothécaires, qu'il appartenait aux vendeurs de régler, conformément à la
pratique habituelle. La courtière N.________ en avait expressément parlé avec
le demandeur X.________, le fiscaliste O.________ et la famille Z.________
lors d'un entretien dans le bureau O.________ à Pully. Le demandeur avait
demandé quel montant lui resterait après le paiement des dettes hypothécaires
et il lui avait été répondu que c'était un montant compris entre 300'000 et
500'000 francs. Cela n'a pas été rediscuté lors de la signature de l'acte
chez le notaire. C'était un montant de cet ordre que le demandeur X.________
souhaitait garder pour lui après le paiement de toutes les dettes.
La Cour discute ensuite les éléments de preuve sur lesquels elle fonde cet
exposé, en expliquant de façon concise mais précise pourquoi elle retient
certains témoignages, tels que celui de la courtière, et écarte d'autres
dépositions; en particulier, elle souligne que le témoignage du fiscaliste,
celui-ci s'étant exprimé en faveur d'une estimation de l'immeuble à plus de
3'000'000 de francs, ne se rapporte pas à l'intention des parties lors de la
conclusion du contrat.
Pour contester le jugement de la Cour, les demandeurs invoquent d'autres
faits survenus bien après la conclusion du contrat: le 22 mars 1999, en vue
d'inciter l'autorité fiscale à modifier son évaluation de l'immeuble, le
notaire a proposé que les parties signent un « avenant » destiné à confirmer
qu'elles évaluaient ce bien à 1'930'000 fr.; répondant à cet homme de loi,
les demandeurs ont refusé leur signature et interdit que les dettes
hypothécaires soient remboursées sur le prix de vente des actions. La Cour a
discuté la portée de cette manifestation de volonté; à son avis, intervenue
après l'évaluation de l'immeuble par l'autorité fiscale et après que cette
évaluation eut été approuvée par le fiscaliste O.________, elle « ne remet
pas en cause » l'intention qui était celle des demandeurs lors de la
conclusion du contrat. Or, le Tribunal fédéral ne discerne pas en quoi cette
appréciation pourrait être jugée arbitraire et les demandeurs n'avancent
eux-mêmes rien à ce sujet; ils se bornent à répéter que l'avenant proposé ne
correspondait ni au contrat ni à leur propre intention. Il est douteux que
cette argumentation satisfasse aux exigences précitées concernant le recours
pour violation de droits constitutionnels; de toute manière, elle ne parvient
aucunement à mettre en évidence un vice certain dans les constatations
litigieuses.
Le grief d'arbitraire se révèle privé de fondement, dans la mesure où il est
recevable, ce qui conduit au rejet du grief tiré de l'art. 18 CO et au rejet
du recours; il n'est pas nécessaire d'examiner les critiques que les
demandeurs développent contre la motivation subsidiaire de l'arrêt attaqué.
Il n'y a pas lieu de modifier les dépens de l'instance cantonale.

5.
A titre de parties qui succombent, les demandeurs doivent acquitter
l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens de l'instance
fédérale.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Les demandeurs acquitteront un émolument judiciaire de 15'000 fr.

3.
Les demandeurs acquitteront, solidairement entre eux, une indemnité de 17'000
fr. due aux défendeurs, créanciers solidaires, à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au Tribunal
cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 6 décembre 2007

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:

Corboz Thélin