Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.229/2007
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4A_229/2007 /ech

Arrêt du 7 novembre 2007
Ire Cour de droit civil

Mmes et M. les Juges Klett, Juge présidant, Kolly et Kiss.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.

X. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Daniel Guggenheim,

contre

Banque Y.________,
défenderesse et intimée, représentée par Me Serge Fasel.

prêt hypothécaire à terme fixe; remboursement anticipé,

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton
de Genève du 11 mai 2007.

Faits :

A.
X. ________ est un homme d'affaires actif depuis de nombreuses années sur le
marché genevois de l'immobilier, notamment au travers de W.________ SA,
société dont il était l'actionnaire unique avant sa liquidation pour des
motifs d'ordre fiscal.

Le 27 août 1998, la Banque Y.________ (ci-après: Y.________ ou la banque) a
dénoncé au remboursement, pour leur échéance, plusieurs prêts hypothécaires
accordés en 1993 à W.________ SA et à X.________, en qualité de codébiteur
solidaire, et portant sur plusieurs dizaines de millions de francs; les
immeubles concernés étaient situés notamment à la rue R.________, à la rue
S.________ et au boulevard T.________. La banque était toutefois prête à
trouver un arrangement.

Finalement, par contrats du 1er février 2000, X.________ et Y.________ ont
reconduit les prêts hypothécaires jusqu'au 31 décembre 2001 au taux d'intérêt
fixe de 3,75 %, moyennant quoi l'emprunteur s'engageait à payer à la banque,
par échéances trimestrielles, la somme de 1'500'000 fr. en remboursement
partiel des intérêts antérieurs impayés. Dès le 1er janvier 2002, Y.________
a appliqué aux emprunts de X.________ un nouveau taux d'intérêt, fixé à 4,75
% et variable en tout temps selon les conditions du marché. Par la suite,
X.________ a tenté, sans succès, d'obtenir de Y.________ un taux d'intérêt
plus bas ou de trouver auprès d'autres banques un refinancement à un taux
plus favorable.

Le 10 avril 2003, la banque a soumis à X.________ une offre de reconduction
de ses emprunts hypothécaires pour une durée indéterminée, au taux d'intérêt
de 4,75 %. Le 5 mai 2003, X.________ a rejeté l'offre et demandé à la banque
une nouvelle proposition. Il sollicitait une baisse du taux d'intérêt à 3,75
% et déclarait consentir à confier à Y.________ un mandat de vente sur ses
immeubles, qui entrerait en vigueur deux ans plus tard au cas où lesdits
immeubles n'avaient pas été vendus ou les emprunts n'avaient pas été
remboursés entre-temps. La banque a conditionné la baisse du taux d'intérêt à
des amortissements supplémentaires.

Le 24 juillet 2003, Y.________ a adressé à X.________ une nouvelle offre
relative à trois contrats de prêt hypothécaire, portant sur des montants de
7'323'160 fr. (rue R.________), 12'154'000 fr. (rue S.________) et 9'081'250
fr. (boulevard T.________). Les contrats proposés prévoyaient notamment
l'engagement de X.________ de payer, en sus des intérêts hypothécaires, un
montant de 800'000 fr. par versements trimestriels de 100'000 fr. en
remboursement partiel de ses encours. Ils contenaient également les rubriques
suivantes:

«Taux d'intérêt  3.75 % taux fixe pour une durée de 2 ans à
partir du 1er juillet 2003.
Les intérêts sont payables trimestriellement,
les 30 mars, 30 juin, 30 septembre et 30 dé-
cembre de chaque année, la prochaine fois le
30 septembre 2003.

Indemnité en cas de  En cas de dénonciation anticipée, le client
est
résiliation anticipée  tenu de verser à la banque une indemnité éga-
le à la différence entre le taux d'intérêt de l'hy-
    pothèque, tel qu'il a été convenu, et le taux
d'intérêt, au moment de la résiliation du con-
trat, d'un placement sur le marché monétaire
ou des capitaux calculé en fonction de la durée
résiduelle dudit placement.
L'indemnité minimale est toutefois fixée à 1 %
du montant remboursé, ceci même si le taux
d'intérêt du crédit est inférieur à celui du place-
ment.

Durée    Le prêt est accordé pour une période ferme de
2 ans, sans possibilité de dénonciation au rem-
boursement de part et d'autre, à l'exception du
cas de demeure et du non-respect des verse-
ments de CHF 100'000.00 par trimestre, la
1ère fois le 30 septembre 2003 et la dernière
fois le 30 juin 2005.
A l'échéance, notre prêt devra soit:
a) être intégralement remboursé. Dans ce cas,
nous vous informons que le retard dans le rem-
boursement du prêt à l'échéance contractuelle
entraînera une majoration de taux de 2 %. Cet-
te clause ne peut en aucun cas être considé-
rée comme une prolongation tacite à l'échéan-
ce du financement.
b) être reconduit, d'entente avec notre établis-
sement, à des conditions à déterminer, ou être
transformé en placement ordinaire, dont le taux
sera celui des nouvelles affaires en vigueur à
ce moment-là.
Vous devrez nous informer par écrit, au mini-
mum un mois avant l'échéance du prêt, de vos
    intentions par rapport à ce qui précède.»

L'offre était soumise à la condition que X.________ signe un «mandat en
matière immobilière» conférant à la banque le pouvoir de gérer ou de vendre
les immeubles garantissant les emprunts «afin d'assurer [leur] pérennité». Si
un bénéfice était dégagé après la réalisation de l'ensemble des immeubles, la
mandataire devait recevoir, en plus de ses honoraires, une commission de
courtage de 50 % sur le profit net réalisé (art. 7 du mandat). Le mandat
devait prendre effet en cas de difficultés financières de X.________ ou à la
suite d'un retard de plus de trente jours dans l'un des versements
trimestriels de 100'000 fr. ou encore le 1er juillet 2005 si la totalité des
immeubles n'avait pas été vendue ou si les crédits n'avaient pas été
remboursés.

Le 29 juillet 2003, X.________ a paraphé chacune des pages des offres du 24
juillet 2003 et a renvoyé les documents à la banque. Il en a fait de même
avec le mandat de gestion immobilière.

Le 4 novembre 2003, l'emprunteur a signé un avenant aux contrats de prêt,
lequel se limitait à proroger jusqu'au 1er octobre 2005 la durée ferme des
prêts hypothécaires au taux d'intérêt inchangé de 3,75 %.

En juin 2004, X.________ a vendu l'immeuble sis à la rue R.________ et a
remboursé le prêt hypothécaire correspondant de manière anticipée. Y.________
a consenti à la remise de la cédule hypothécaire grevant l'immeuble contre le
versement d'un montant minimum de 7'100'000 fr. Le décompte adressé alors par
la banque à X.________ laissait apparaître une dette totale afférente à ce
prêt de 7'338'431 fr.50, incluant 236'413 fr. à titre d'indemnité de
résiliation du prêt; ce dernier montant s'obtenait par le calcul suivant:
7'034'733 fr. [montant nominal du prêt] x 2,69 % [différence entre le taux
d'intérêt hypothécaire fixe de 3,75 % et le taux de placement sur le marché
de 1,06 %] x 1,249 année [durée résiduelle du prêt entre le remboursement
anticipé le 1er juillet 2004 et l'échéance prévue au 30 septembre 2005]
(sic).

Les 30 juin et 20 août 2004, X.________ a contesté, en vain, le prélèvement
de 236'413 fr. opéré par la banque. Il faisait valoir que la clause
d'indemnité pour résiliation anticipée avait été insérée dans le contrat à la
suite d'une «erreur matérielle». Selon lui, elle n'avait pas sa place dans la
relation entre les parties, qui cherchaient précisément à liquider les
crédits accordés par la banque; en outre, une telle clause était
contradictoire avec le mandat confié à Y.________, permettant à celle-ci de
réaliser les biens immobiliers en cause s'ils n'avaient pas été vendus le 1er
juillet 2005 ou si les crédits n'avaient pas été remboursés à cette date.

En novembre 2004, X.________ a vendu les immeubles sis à la rue S.________ et
au boulevard T.________; il a remboursé les prêts hypothécaires
correspondants de manière anticipée. Y.________ lui a alors réclamé des
«frais de dédite». Pour le premier immeuble, l'indemnité de résiliation
anticipée s'élevait à 315'892 fr. (11'982'026 fr. [montant nominal du prêt] x
2,97 % [différence entre les taux déterminants] x 0,89 année [durée
résiduelle du prêt] [sic]). Pour le second immeuble, elle se montait à
213'970 fr. (8'951'375 fr. x 2,87 % x 0,83 année [sic]). X.________ a
contesté ces indemnités par courrier du 12 novembre 2004. Il les a toutefois
payées afin de pouvoir disposer librement des cédules hypothécaires grevant
les immeubles qu'il avait vendus.

B.
Le 2 mars 2005, X.________ a assigné Y.________ en paiement de 766'275 fr.,
plus intérêts. Fondée sur les règles sur l'enrichissement illégitime,
l'action tendait au remboursement des trois indemnités pour résiliation
anticipée perçues par la banque. Le demandeur soutenait avoir signé les
contrats de prêt du 24 juillet 2003 sans avoir lu la clause d'indemnité en
cas de remboursement anticipé; subsidiairement, il prétendait avoir été dans
l'erreur ou encore contraint par la banque de conclure sous la menace de
poursuites.

Par jugement du 14 septembre 2006, le Tribunal de première instance du canton
de Genève a débouté X.________ de toutes ses conclusions.

Statuant le 11 mai 2007 sur appel du demandeur, la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance.
En substance, elle a jugé que la clause prévoyant une indemnité en cas de
résiliation anticipée avait été valablement conclue et qu'elle liait les
parties. Au surplus, elle a considéré que le demandeur n'avait accepté la
clause litigieuse sous l'empire ni d'une erreur, ni d'une crainte fondée.
Elle a nié également tout abus de droit de la part de la défenderesse. Enfin,
elle a refusé de voir dans la clause litigieuse une fixation contractuelle du
dommage ou une clause pénale.

C.
X.________ interjette un recours en matière civile. A titre principal, il
demande l'annulation de l'arrêt cantonal et la condamnation de Y.________ à
lui payer les sommes de 236'413 fr. avec intérêts à 5 % dès le 24 août 2004,
213'970 fr. avec intérêts à 5 % dès le 10 novembre 2004 et 315'892 fr. avec
intérêts à 5 % dès le 24 novembre 2004. A titre subsidiaire, il conclut à
l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à l'autorité
cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants de l'arrêt du
Tribunal fédéral.

Y. ________ propose le rejet du recours.

Pour sa part, la cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement
(art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière
instance (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse
atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours est en
principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF)
et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.

1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Compte tenu de l'exigence de motivation
contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108
al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs
invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de
première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque
celles-ci ne sont plus discutées devant lui. Il ne peut pas entrer en matière
sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du
droit cantonal ou intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de
manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).

1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). L'auteur du
recours ne peut critiquer les faits que si ceux-ci ont été établis de façon
manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF
(art. 97 al. 1 LTF; cf. également art. 105 al. 2 LTF); de plus, la correction
du vice doit être propre à influer le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
La notion de «manifestement inexacte» correspond à celle d'arbitraire au sens
de l'art. 9 Cst. (Message concernant la révision totale de l'organisation
judiciaire fédérale du 28 février 2001, in FF 2001, p. 4000 ss, spécialement
p. 4135).

La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception à l'art. 105 al. 1 LTF seraient réalisées, faute de quoi il
n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui
contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III 138 consid. 1.4 p. 140;
cf. également ATF 133 III 350 consid. 1.3). Aucun fait nouveau ni preuve
nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de
l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties
(art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99
al. 2 LTF).

2.
2.1 En premier lieu, le recourant se plaint d'une violation de l'art. 44 al. 1
CO, lequel interdirait de réclamer l'indemnisation d'un «dommage volontaire».
En effet, la clause d'indemnisation en cas de résiliation anticipée serait
inapplicable dans le cas où, comme en l'espèce, la volonté de la banque est
d'obtenir le remboursement des prêts aussi rapidement que possible,
c'est-à-dire avant l'échéance du prêt. Sur ce dernier point, ce serait de
manière arbitraire et à la suite d'une inadvertance manifeste que la cour
cantonale aurait omis de constater l'intention réelle de l'intimée, ce qui
aurait faussé l'issue du litige. Dans la partie «en fait» de son recours, le
demandeur invoque à cet égard les procès-verbaux de comparution personnelle
de A.________ et B.________, cadres auprès de Y.________, une lettre de la
banque à la suite de la mise en vente de l'immeuble sis rue U.________, une
lettre de Me D.________ du 17 décembre 2002 ainsi que le témoignage de
C.________, qui était notamment réviseur de W.________ SA.

Dans le même ordre d'idées, le recourant reproche plus loin à la cour
cantonale d'avoir méconnu les principes applicables en matière
d'interprétation objective des déclarations de volonté, en particulier les
art. 1er et 2 CO. A son avis, il ne pouvait comprendre, selon la théorie de
la confiance, qu'il aurait à payer en sus une indemnité au cas où il
respecterait la volonté de la banque d'obtenir un remboursement de manière
anticipée.

Le recourant reprend le même argument sous l'angle de l'art. 24 ch. 4 (recte:
art. 24 al. 1 ch. 4) CO; il fait valoir qu'il se trouvait dans une erreur
essentielle lors de la conclusion des contrats de prêt en croyant qu'il
n'aurait pas à payer d'indemnité s'il remboursait les prêts de manière
anticipée, conformément à la volonté de l'intimée.

Toujours en invoquant la volonté de la banque d'obtenir avant terme le
remboursement des prêts, le recourant est d'avis que l'intimée a, en tout
état de cause, commis un abus de droit au sens de l'art. 2 al. 2 CC en
exigeant le versement d'une indemnité pour résiliation anticipée.

2.2 Les griefs soulevés en relation avec les art. 44, 1er, 2 et 24 CO ainsi
que 2 al. 2 CC se fondent tous sur la prémisse selon laquelle la volonté de
la banque, lors de la conclusion des contrats de prêt des 24/29 juillet 2003,
était en réalité d'obtenir le remboursement anticipé des emprunts par la
vente des immeubles.

La cour cantonale n'a pas constaté une telle intention réelle de l'intimée.
Au contraire, elle a relevé que la banque n'avait «aucunement incité [le
recourant] à rembourser ses prêts» (consid. 5.2 de l'arrêt attaqué). Ce
faisant, elle n'a commis aucune inadvertance, ni versé dans l'arbitraire. Les
éléments que le recourant avance à ce sujet ne sont en aucun cas
déterminants. Ainsi, le seul fait constant qui ressort des déclarations des
cadres de la banque et du courrier de celle-ci invoqués par le recourant est
la volonté de l'intimée de réduire l'endettement du débiteur hypothécaire
envers elle. Au demeurant, les dires de A.________ concernent 2001 et la
lettre de la banque est datée du 17 janvier 2002; ils se rapportent donc à
des périodes bien antérieures à celle de la conclusion des contrats en
juillet 2003. De même, le courrier de Me D.________, selon lequel la banque
souhaite que le débiteur «trouve une solution de vente», est daté du 17
décembre 2002. Il est intervenu plusieurs mois avant la première offre de
reconduction des emprunts du 10 avril 2003 et ne saurait ainsi être un indice
de la volonté réelle de la banque au moment de la conclusion des contrats de
prêt. Enfin, le témoin C.________ a déclaré avoir eu «l'impression» que la
banque encourageait la vente des immeubles servant de gages aux trois prêts
de juillet 2003. Le simple avis d'un témoin, qui plus est réviseur en tout
cas d'une société dont le recourant est actionnaire unique, ne saurait
manifestement conduire à admettre que la cour cantonale a omis arbitrairement
une constatation déterminante pour l'issue du litige, comme le demandeur le
prétend.

Cela étant, les contrats des 24/29 juillet 2003 expriment sans ambiguïté que
les prêts sont accordés à taux fixe pour une durée de deux ans, sans
possibilité de dénonciation de part et d'autre; seule la banque peut faire
valoir une exception à cet égard, en cas de demeure ou de non-respect des
versements trimestriels. Une indemnité est prévue en cas de résiliation
anticipée du prêt. Comme on l'a vu, la cour cantonale n'a pas omis de
constater de manière arbitraire que la volonté réelle de la banque, comprise
comme telle par le recourant, était de ne pas percevoir cette indemnité dans
l'hypothèse où le débiteur vendrait ses immeubles et rembourserait sa dette
en capital avant le terme des prêts. Au surplus, aucun élément de l'arrêt
attaqué ne laisse supposer que la banque aurait exigé de la part de
l'emprunteur un remboursement anticipé après la conclusion des contrats et
renoncé par là-même à la clause d'indemnisation.

Il convient encore d'interpréter la clause contractuelle litigieuse selon la
théorie de la confiance, en recherchant comment elle pouvait être comprise de
bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances (interprétation dite
objective; ATF 133 III 61 consid. 2.2.2 p. 67; 132 III 268 consid. 2.3.2, 626
consid. 3.1). En effet, le sens d'un texte, apparemment clair, n'est pas
forcément déterminant, de sorte que l'interprétation purement littérale est
prohibée. Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît limpide à
première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but
poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que le texte de ladite
clause ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu (ATF 133 III 61
consid. 2.2.1 p. 67; 131 III 606 consid.4.2; 130 III 417 consid. 3.2). Il n'y
a cependant pas lieu de s'écarter du sens littéral du texte adopté par les
cocontractants lorsqu'il n'existe aucune raison sérieuse de penser qu'il ne
correspond pas à leur volonté (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 p. 67; 130 III
417 consid. 3.2; 129 III 118 consid. 2.5; 128 III 265 consid. 3a).

En l'espèce, la clause contractuelle litigieuse prévoit une indemnisation de
la banque en cas de dénonciation prématurée des prêts de durée déterminée;
aucune exception à ce versement obligatoire ne ressort des contrats. Le texte
est parfaitement clair à ce sujet. Les parties aux contrats sont une banque
et un homme rompu aux affaires immobilières, qui ont négocié pendant plus de
trois mois les conditions de reconduction des emprunts hypothécaires. Aucun
motif sérieux ne permet de penser que la clause litigieuse ne reflète pas la
volonté commune des parties. Il convient dès lors de s'en tenir au texte
littéral et d'admettre, contrairement à ce que le recourant soutient, qu'une
indemnité était due à la banque également en cas de dénonciation anticipée
liée au remboursement des prêts à la suite de la vente des immeubles.

En conclusion, aucune violation des art. 44, 1er, 2 et 24 CO ainsi que de
l'art. 2 al. 2 CC ne saurait être imputée à la cour cantonale.

3.
3.1 Le recourant prétend ensuite avoir conclu les contrats de prêt des 24/29
juillet 2003 sous l'empire d'une crainte fondée. Invoquant l'art. 30 al. 2
CO, il soutient qu'il craignait des poursuites de la part de la banque, ce
qui l'a amené à accepter la clause relative à la résiliation anticipée.
L'intimée aurait ainsi bénéficié d'un avantage excessif sous forme d'une
indemnité pour dénonciation prématurée, alors qu'elle avait déjà obtenu des
versements supplémentaires ainsi que la possibilité, moyennant des
commissions, de vendre les immeubles en cause en cas de difficultés
financières du mandant ou à la suite d'un retard de plus de trente jours dans
l'un des versements trimestriels. En ne tenant pas compte de la crainte des
poursuites, procédé déjà utilisé antérieurement par la banque, et de la
conclusion forcée d'un mandat de vente en faveur de l'intimée, la cour
cantonale aurait établi les faits relatifs à la crainte fondée de manière
arbitraire et manifestement incomplète.

3.2 Vice du consentement, la crainte fondée est celle qu'une personne -
partie ou tiers - inspire à une autre, intentionnellement et sans droit, pour
la déterminer à faire une déclaration de volonté. La cause de la crainte est
la menace d'un mal futur dans l'hypothèse d'un refus d'obtempérer; elle vicie
la volonté au stade de sa formation (Engel, Traité des obligations en droit
suisse, 2e éd., p. 363; ci-après: op. cit. 1).
Pour qu'un contrat soit invalidé au titre de la crainte fondée, les quatre
conditions suivantes doivent être réunies: une menace dirigée sans droit
contre une partie ou l'un de ses proches, la crainte fondée qui en résulte,
l'intention de l'auteur de la menace de déterminer le destinataire à faire
une déclaration de volonté et le lien de causalité entre la crainte et le
consentement (ATF 111 II 349 consid. 2).

Aux termes de l'art. 30 al. 2 CO, la crainte de voir invoquer un droit ne
peut être prise en considération que si la gêne de la partie menacée a été
exploitée pour extorquer à celle-ci des avantages excessifs. En principe,
n'est pas une menace sans droit le fait d'user d'un moyen licite qui cause un
mal licite. Il doit toutefois y avoir adéquation entre le moyen et la fin que
l'auteur se propose d'atteindre (Engel, op. cit. 1, p. 366). Ainsi, la menace
du dépôt d'une plainte pénale est illicite lorsqu'il n'existe aucun rapport
avec le but recherché (par exemple, la menace de dénoncer une soustraction
fiscale pour obtenir la conclusion d'un contrat de vente). Si elle a trait à
une infraction dont l'auteur de la menace ou ses proches ont été victimes, la
menace d'une plainte n'est licite que dans la mesure où elle ne tend pas à
obtenir plus que les dommages-intérêts dus (ATF 125 III 353 consid. 2 p. 355
et les références).

3.3 En l'espèce, il ne ressort nulle part de l'arrêt attaqué que l'intimée
aurait menacé le recourant d'introduire des poursuites contre lui au cas où
il n'accepterait pas son offre du 24 juillet 2003. La Cour de justice relève
du reste expressément «l'absence de menace proférée par la banque» (consid.
4.2 de l'arrêt attaqué). Aucun élément de la décision entreprise n'autorise
non plus à retenir que le recourant a été contraint à attribuer un mandat de
vente à l'intimée. Sur ces points, le recourant se borne à invoquer
l'arbitraire et le caractère incomplet des constatations cantonales, mais ne
se livre à aucune démonstration conforme aux exigences de motivation du
recours rappelées au considérant 1.3. ci-dessus. En tant qu'il se fonde sur
l'art. 97 al. 1 LTF, le moyen se révèle d'emblée irrecevable.

Cela étant, dès lors qu'aucune menace n'a été établie à la charge de la
banque, l'une des conditions d'invalidation des contrats pour crainte fondée
fait déjà défaut. La Chambre civile n'a dès lors pas méconnu l'art. 30 al. 2
CO en refusant de retenir la crainte fondée en l'espèce.

4.
Le recourant reproche enfin à la cour cantonale de n'avoir pas qualifié
l'indemnisation prévue en cas de dénonciation anticipée de fixation
contractuelle du dommage. Invoquant l'arrêt publié aux ATF 83 II 525, il
soutient que la banque devait faire la preuve de son dommage, ce qu'elle n'a
pas fait. En se contentant de valider le calcul abstrait de la banque, les
juges genevois auraient violé les art. 43 al. 1 et 337 al. 2 (sic) CO,
applicable par analogie.

Au demeurant, l'intimée n'aurait pas établi que les indemnités réclamées
avaient été calculées conformément au mode prévu dans la clause contractuelle
litigieuse. En reprenant tels quels les taux appliqués par la banque, la cour
cantonale aurait violé l'art. 8 CC.

4.1 Les parties étaient liées par des contrats de prêt hypothécaire de durée
déterminée. En cas de prêt commercial à terme fixe, les obligations de
l'emprunteur consistent à payer des intérêts aux échéances prévues et à
rembourser le montant prêté au terme du contrat. S'il rembourse le prêt de
manière anticipée, l'emprunteur reste en principe redevable des intérêts
jusqu'à la fin du contrat (Higi, Zürcher Kommentar, n. 107 ad art. 312 CO;
Schärer/Maurenbrecher, Basler Kommentar, 3e éd., n. 13 ad art. 312 CO et n. 6
ad art. 313 CO; Engel, Contrats de droit suisse, 2e éd., p. 274; Bénédikt
Maurenbrecher, Das verzinsliche Darlehen im schweizerischen Recht, thèse
Berne 1995, p. 160-163; Bernhard Christ, Der Darlehensvertrag, in SPR VII/2,
p. 242/243 et p. 255). Une exception à ce principe est prévue à l'art. 17 de
la loi fédérale sur le crédit à la consommation (RS 221.214.1), qui consacre
le droit du consommateur au remboursement anticipé (al. 1), entraînant une
remise des intérêts (al. 2). Hormis ce cas, l'emprunteur qui rembourse le
capital avant terme doit l'intégralité des intérêts, sans réduction. En
effet, l'intérêt dû par l'emprunteur ne consiste pas en des
dommages-intérêts, mais constitue la prestation promise contractuellement.
Dans ce cadre-là, une imputation des avantages ou un devoir du créancier de
réduire le dommage sont exclus (Maurenbrecher, op. cit., p. 167; Christ, op.
cit., p. 242/243). Une application analogique des art. 264 al. 3, 324 al. 2
ou 337c al. 2 CO ne se justifie pas non plus. Ces dispositions, relatives au
bail à loyer et au contrat de travail, découlent de motifs de politique
sociale qui ne sont pas transposables en matière de prêt. Un droit à une
diminution des intérêts en cas de remboursement anticipé peut en revanche se
déduire de l'art. 81 al. 2 CO, s'il est autorisé par la convention ou l'usage
(Higi, op. cit., n. 106 ad art. 312 CO; Schärer/Maurenbrecher, op. cit., n. 6
ad art. 313 CO; Maurenbrecher, op. cit., p. 167-169). Pour les prêts
hypothécaires à terme fixe, la pratique bancaire prévoit également souvent la
possibilité pour l'emprunteur de résilier le contrat de manière anticipée
contre le versement d'une prime (Maurenbrecher, op. cit., p. 163). Une telle
disposition contractuelle s'analyse comme une clause pénale exclusive ou
dédit consensuel (Wandelpön) au sens de l'art. 160 al. 3 CO, dès lors qu'elle
permet de résoudre le contrat moyennant le versement de la peine
(Gauch/Schluep/Schmid/Rey, Schweizerisches Obligationenrecht - Allgemeiner
Teil, 8e éd., tome II, n. 4027, p. 338; Engel, op. cit. 1, p. 861 et p. 865).

4.2 Les contrats des 24/29 juillet 2003 prévoyaient que les prêts étaient
accordés pour une période ferme de deux ans, sans possibilité de dénonciation
au remboursement, sauf exceptions non réalisées en l'espèce. Si une
dénonciation anticipée intervenait tout de même, une indemnité était alors
due. Le mode de calcul de cette indemnité figurait dans les contrats et
prenait en compte la différence entre le taux hypothécaire convenu et le taux
d'intérêt d'un placement sur le marché monétaire ou des capitaux au moment de
la résiliation; le montant minimal de l'indemnité était fixé toutefois à 1 %
de la somme remboursée.

Comme on l'a vu plus haut (consid. 4.1), le recourant, qui s'était engagé
pour des prêts à durée déterminée, devait en principe les intérêts jusqu'à la
fin du contrat. Par conséquent, de même qu'il n'y a pas lieu de se référer
aux dispositions applicables en matière de bail à loyer ou de contrat de
travail, un parallélisme ne se justifie pas non plus entre le prêt et le
contrat de gérance faisant l'objet de la jurisprudence citée par le recourant
(ATF 83 II 525).

La clause litigieuse institue une peine exclusive, puisqu'elle permet en
définitive à l'emprunteur d'échapper à son obligation de verser les intérêts
prévus jusqu'à la fin du contrat, moyennant le versement d'une indemnité. Le
caractère de clause pénale de la disposition contractuelle en cause ressort
du reste bien de la fixation d'une indemnité minimale. Dans ces conditions,
l'intimée n'avait nullement à prouver un dommage, mais pouvait simplement
faire valoir l'indemnité calculée selon la clause applicable en cas de
résiliation anticipée. Au surplus, les montants réclamés, nécessairement
inférieurs à la somme des intérêts en cours jusqu'à la fin des contrats, ne
sauraient être qualifiés d'excessifs.
La Cour de justice n'a rien trouvé à redire au calcul des indemnités effectué
par l'intimée. Elle a relevé qu'en l'absence de contestation des taux
appliqués par la banque, les enquêtes n'avaient pas porté sur ce point; par
conséquent, le demandeur ne pouvait y revenir après la clôture de
l'instruction préalable. La cour cantonale s'est référée à l'art. 126 al. 3
LPC/GE, qui permet de tenir le silence ou toute réponse évasive pour un aveu
des faits allégués par la partie adverse. A ce propos, le recourant se
contente d'invoquer l'art. 8 CC; il ne remet d'aucune manière en cause le
raisonnement des juges genevois et ne se plaint pas en particulier d'une
application arbitraire du droit cantonal de procédure. Là aussi, le recours
est irrecevable dans cette mesure.

5.
Sur le vu de ce qui précède, le recours ne peut être que rejeté dans la
mesure où il est recevable.

Les frais judiciaires seront mis à la charge du recourant (art. 66 al. 1
LTF), qui versera en outre des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 9'500 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 11'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 7 novembre 2007

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Juge présidant: La Greffière:

Klett Godat Zimmermann