Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.15/2007
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4A_15/2007 /ech

Arrêt du 27 juin 2007
Ire Cour de droit civil

MM. et Mme les juges Corboz, président, Klett et Kolly.
Greffier: M. Thélin.

X. ________ SA,
défenderesse et recourante, représentée par Me Daniel Richard,

contre

Z.________,
demandeur et intimé, représenté par Me Maurice Harari,
Caisse cantonale genevoise de chômage,
intervenante et intimée.

contrat de travail; licenciement immédiat

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 3 janvier 2007 par la Cour
d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève.

Faits :

A.
X. ________ SA a pour but social le négoce et le courtage dans le domaine de
l'aéronautique. A.________ est son administrateur unique; B.________ est
employé à titre de directeur général. Dès mai 1998, Y.________ a également
été employé en qualité de directeur.
Dès le 1er août 1999, la société a engagé Z.________, ingénieur en
aéronautique, à la fonction de directeur commercial. En octobre 2003, son
salaire mensuel brut s'élevait à 21'000 fr., treize fois par année; il avait
de plus l'usage d'un appartement.
Le 31 octobre 2003, Y.________ et Z.________ ont déposé une plainte pénale
contre B.________ qu'ils accusaient d'escroquerie, abus de confiance et
gestion déloyale. Le 5 novembre 2003, X.________ SA a signifié à Z.________
son licenciement immédiat par suite de la plainte pénale. Le lendemain, elle
a agi de même avec Y.________.
A l'appui de leurs accusations, les plaignants expliquaient qu'ils s'étaient
associés à trois avec B.________, en société simple, pour accomplir des
opérations de négoce et de courtage dans le domaine aéronautique. Ils
devaient agir « au travers » de X.________ SA dont ils auraient tous trois le
statut de salarié. B.________ devait « garder les aspects financiers et
comptables » de cette société dont il détenait toutes les actions, hormis une
qui était remise à l'administrateur. Les bénéfices de leur société simple
devaient parvenir à raison de 30% à Z.________ et de 10% à Y.________. Or, au
moyen d'un accord passé secrètement avec un de leurs partenaires en affaires,
B.________ était parvenu à détourner 2'500'000 dollars étasuniens qui
auraient dus être répartis entre eux; par des manoeuvres semblables, il
s'apprêtait à détourner, pour les soustraire au partage, encore d'autres
sommes d'importance comparable.

B.
Le 5 décembre 2003, Z.________ a ouvert action contre X.________ SA devant la
juridiction des prud'hommes du canton de Genève. Sa demande tendait au
paiement de 276'750 fr. à titre de salaire et de 126'000 fr. à titre
d'indemnité pour licenciement injustifié. La défenderesse a introduit une
demande reconventionnelle.
Le 27 juillet 2005, le Tribunal de prud'hommes a ordonné la suspension de la
cause jusqu'à droit connu sur la plainte pénale. Le demandeur a appelé de ce
jugement. Par un arrêt présidentiel du 15 novembre 2005, la Cour d'appel l'a
annulé; elle a renvoyé la cause au tribunal pour instruction et jugement.
Après que les parties eurent plusieurs fois modifié leurs conclusions, le
demandeur réclamait 306'666 fr. à titre de salaire, 126'000 fr. à titre
d'indemnité et 72'301 dollars pour remboursement d'un prêt. La défenderesse
reconnaissait une dette de salaire au montant de 63'000 fr. Elle réclamait
25'200 fr. au titre du loyer de l'appartement pour les mois de janvier à juin
2004 et 80'014 fr.70 pour remboursement de dépenses personnelles du
demandeur, dépenses que celui-ci avait payées sans justification avec des
cartes de crédit qui lui étaient confiées. Sur ce dernier poste, le demandeur
reconnaissait devoir 23'451 fr.15. La Caisse cantonale genevoise de chômage
est intervenue pour se subroger aux prétentions du demandeur, par suite des
indemnités versées par elle de novembre 2003 à janvier 2004, à concurrence de
12'579 fr.10.
Le Tribunal de prud'hommes a rendu un jugement final le 3 mai 2006. Il a jugé
que le licenciement immédiat était injustifié. Il a reconnu au demandeur une
créance d'indemnité au montant de 15'000 fr. avec intérêts au taux de 5% par
an dès le 5 novembre 2003. Il lui a reconnu une créance de salaire brut au
montant de 215'156 fr.05, avec intérêts dès la même date, soumise aux
déductions sociales, moins la somme nette de 12'579 fr.10 correspondant à la
prétention de la caisse de chômage. Il a reconnu cette prétention à cette
caisse, avec intérêts dès le 9 février 2004. Il a reconnu au demandeur et à
la défenderesse, respectivement, des créances nettes et sans intérêts de
122'639 fr. pour remboursement d'un prêt et de 23'451 fr.25 pour
remboursement de dépenses personnelles.
La défenderesse ayant appelé du jugement, le demandeur a usé de l'appel
incident. La Cour d'appel a statué le 3 janvier 2007. Elle a confirmé que le
licenciement immédiat était injustifié. Elle a augmenté l'indemnité
correspondante à 42'000 fr., soit à deux mois de salaire. Elle a augmenté la
créance de salaire à 231'662 fr.50 car la défenderesse reconnaissait devoir,
au jour du licenciement immédiat, un arriéré de 143'912 fr.50, treizième mois
prorata temporis inclus, et 87'750 fr. étaient dus pour la durée du délai de
congé. La Cour a confirmé la subrogation partielle de la caisse de chômage.
Elle a refusé d'augmenter la créance consécutive à des dépenses personnelles,
cette créance restant fixée à 23'451 fr.25, et elle a confirmé que le
demandeur ne devait rien au titre du loyer de son appartement. Elle a
confirmé l'obligation de la défenderesse de rembourser un prêt par 122'639
fr.; elle y a ajouté des intérêts au taux de 5% par an dès le 5 novembre
2003. Le calcul final et le dispositif de l'arrêt ajoutent ces intérêts aussi
au montant des dépenses personnelles.

C.
Agissant par la voie du recours en matière civile, la défenderesse requiert
le Tribunal fédéral, à titre principal, de réduire la créance de salaire à
147'291 fr.70, de refuser toute indemnité pour licenciement injustifié, de
refuser toute prestation à la caisse de chômage et de condamner le demandeur
à payer 25'200 fr. à titre de loyer de son appartement, avec intérêts dès le
1er juillet 2004. Elle ne conteste pas les autres postes de la décision
attaquée. Subsidiairement, elle requiert que la cause soit renvoyée à la Cour
d'appel pour nouvelle décision.
Le demandeur conclut au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt de la Cour d'appel étant postérieur à l'entrée en vigueur, au
1er janvier 2007, de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF; RO 2006 p. 1242), la cause est soumise à cette loi (art. 132 al. 1
LTF).

2.
Le recours est formé par une partie qui a pris part à l'instance précédente
et succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF). Il est dirigé contre un
jugement final (art. 90 LTF), rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) et
en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). La valeur litigieuse
excède le minimum légal de 15'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let.
a LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes
requises (art. 42 al. 1 à 3 LTF), le recours est en principe recevable.
Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral
(art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office (art.
106 al. 1 LTF); il n'est pas lié par l'argumentation des parties et il
apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant,
d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante soulève
conformément aux exigences légales relatives à la motivation du recours (art.
42 al. 2 LTF). Le Tribunal fédéral ne contrôle pas d'office le respect des
droits fondamentaux (art. 106 al. 2 LTF). Le recours n'est pas recevable pour
violation du droit cantonal, hormis les droits constitutionnels cantonaux
(art. 95 let. c LTF) et certaines dispositions sans pertinence en matière
civile (art. 95 let. d LTF).
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Il peut
compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se
révèlent manifestement inexactes ou établies en violation du droit (art. 105
al. 2 LTF). La partie recourante est autorisée à attaquer des constatations
de fait ainsi irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer
sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Cette partie ne peut toutefois
pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres
allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; elle doit
plutôt indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont contraires au
droit ou entachées d'une erreur indiscutable; une critique qui ne satisfait
pas à cette exigence est irrecevable (cf. ATF 130 I 258 consid. 1.3 p.
261/262; 125 I 492 consid. 1b p. 495).
En l'occurrence, l'état de fait est complété en ce qui concerne la teneur de
la plainte pénale déposée contre B.________. La Cour d'appel a pris
connaissance de cette écriture mais elle ne l'a pas incorporée au dossier; la
défenderesse l'a produite sur réquisition du Tribunal fédéral. Il convient de
souligner ici que l'obligation de transmettre le dossier au Tribunal fédéral,
imposée aux autorités précédentes par l'art. 102 al. 2 LTF, implique aussi le
devoir de constituer et de conserver le dossier à cette fin (cf. art. 51 al.
1 let. c aOJ).

3.
La défenderesse critique la désignation des parties dans l'en-tête de l'arrêt
attaqué. Contrairement à son opinion, on n'y discerne aucun vice grave qui
puisse nécessiter de renvoyer cette décision selon l'art. 112 al. 3 LTF.

4.
Selon la Cour d'appel, les parties se sont liées par un contrat de travail et
celui-ci était conclu pour une durée indéterminée. Il était donc susceptible
d'une résiliation ordinaire avec observation d'un délai de congé, selon
l'art. 335c CO, ou d'une résiliation immédiate pour de justes motifs, selon
l'art. 337 CO.

4.1 D'après l'art. 337 al. 2 CO, on considère notamment comme de justes
motifs toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne
permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des
rapports de travail. Mesure exceptionnelle, la résiliation immédiate pour
justes motifs doit être admise de manière restrictive. D'après la
jurisprudence, les faits invoqués à l'appui d'un renvoi immédiat doivent
avoir entraîné la perte du rapport de confiance qui constitue le fondement du
contrat de travail. Seul un manquement particulièrement grave justifie le
licenciement immédiat du travailleur. En cas de manquement moins grave,
celui-ci ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété
malgré un avertissement. Par manquement du travailleur, on entend en règle
générale la violation d'une obligation imposée par le contrat mais d'autres
faits peuvent aussi justifier une résiliation immédiate (cf. ATF 129 III 380
consid. 2.2 p. 382).
Le juge apprécie librement, selon les règles du droit et de l'équité (art. 4
CC), si le congé abrupt répond à de justes motifs (art. 337 al. 3 CO). A
cette fin, il prend en considération tous les éléments du cas particulier,
notamment la position et la responsabilité du travailleur, la nature et la
durée des rapports contractuels, ainsi que la nature et l'importance des
manquements (ATF 130 III 28 consid. 4.1 p. 32; 127 III 351 consid. 4a p.
354). Le Tribunal fédéral ne contrôle qu'avec réserve une décision d'équité
prise en dernière instance cantonale. Il intervient lorsque la décision
s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence
en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle s'appuie sur des faits qui,
dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle, ou encore lorsqu'elle
ignore des éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; en
outre, le Tribunal fédéral redresse les décisions rendues en vertu d'un
pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement
injuste ou à une iniquité choquante (ATF 130 III 28 consid. 4.1 p. 32; 130
III 213 consid. 3.1 p. 220; 129 III 380 consid. 2 p. 382).

4.2 La Cour d'appel tient pour manifeste que la relation entre B.________ et
le demandeur a été « sérieusement ébranlée » par le dépôt de la plainte
pénale. Elle retient cependant que celui-là n'était pas visé en qualité de
directeur de la défenderesse mais de « partenaire commercial » du demandeur.
A son avis, compte tenu qu'une instruction a été ouverte, la plainte
« n'apparaît, a priori, pas totalement farfelue [ni] purement chicanière »;
dans ces conditions, retenir que la plainte constitue un juste motif de
licenciement immédiat aboutirait à priver le demandeur de son droit de porter
plainte contre un autre travailleur de l'entreprise. Il n'est d'ailleurs pas
établi que les décisions importantes de la défenderesse soient prises par
B.________, ni que celui-ci soit donc un organe de fait. En définitive, la
plainte n'était « pas de nature à rompre le lien de confiance nécessaire à la
continuation des rapports de travail [...], ce d'autant moins que la personne
visée n'était pas [la défenderesse] ».
La plainte porte une accusation grave contre la probité de B.________. A
supposer qu'elle soit calomnieuse ou, simplement, téméraire, elle
constituerait sans aucun doute un juste motif de licenciement immédiat. Il en
irait ainsi également dans l'hypothèse où B.________ n'aurait pas assumé de
rôle dirigeant au service de la défenderesse et aurait seulement été un
collègue du demandeur (Ullin Streiff et Adrian von Kaenel, Leitfaden zum
Arbeitsvertragsrecht, 6e éd., 2006, p. 739/740). Cette hypothèse est
d'ailleurs contestée par la défenderesse. Il est donc indispensable de
vérifier si l'accusation était au moins partiellement fondée, ou, dans la
négative, si son auteur avait pu croire de bonne foi qu'une infraction avait
été commise contre lui. Or, la Cour d'appel n'a fait aucune constatation à ce
sujet. Une enquête judiciaire pénale a été ouverte mais cela n'autorise pas à
présumer la légitimité ou, à défaut, le caractère éventuellement excusable de
l'accusation. Si la juridiction civile se refuse à suspendre le procès
jusqu'à droit connu sur la plainte pénale, ainsi que la Cour d'appel en a
décidé le 15 novembre 2005, elle doit élucider elle-même les faits, dans la
mesure nécessaire à un jugement sur ce point essentiel. De plus, s'il se
vérifiait que l'activité du demandeur constituât en réalité son apport à une
société simple formée avec B.________ et Y.________, il faudrait examiner si
un contrat de travail avec la défenderesse était effectivement conclu ou
seulement simulé. En l'état, cette partie-ci se plaint à bon droit d'un
prononcé contraire à l'art. 337 al. 2 CO, en tant que la juridiction
cantonale dénie l'existence d'un juste motif de licenciement immédiat et la
condamne, en conséquence, à une prestation de salaire et à une indemnité.

5.
En cas de résiliation immédiate et injustifiée du contrat, le travailleur
peut réclamer ce qu'il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris
fin à l'expiration du délai de congé (art. 337c al. 1 CO); la caisse de
chômage se subroge à cette prétention à concurrence des indemnités qu'elle
verse au travailleur (art. 29 al. 1 et 2 LACI). Le juge peut en outre allouer
à celui-ci une indemnité dont il fixe librement le montant, en tenant compte
de toutes les circonstances mais sans excéder six mois de salaire (art. 337c
al. 3 CO).

5.1 La Cour d'appel admet une créance de salaire au montant total de 231'662
fr.50, du 1er mai 2003 au 31 janvier 2004, y compris le treizième mois en
entier pour 2003 et prorata temporis pour 2004. Elle additionne les montants
de 143'912 fr.50, du 1er mai au 5 novembre 2003, date du licenciement, et
87'750 fr. du 6 novembre 2003 au 31 janvier 2004. La défenderesse conteste
son calcul.
Du 1er mai au 5 novembre 2003, elle reconnaît 147'291 fr.70, y compris le
treizième mois de 2003 prorata temporis depuis le 1er janvier. Elle reconnaît
ce montant dans ses conclusions, lesquelles lient le Tribunal fédéral (art.
107 al. 1 LTF); son calcul est d'ailleurs exact.
Du 6 novembre 2003 au 31 janvier 2004, à supposer qu'elle soit débitrice, la
défenderesse reconnaît la différence entre 147'291 fr.70 et 211'750 fr., soit
64'458 fr.30. Ce montant de 211'750 fr. correspond au salaire des mois de mai
2003 à janvier 2004, plus le treizième mois de 2003 et 1/12 de celui de 2004.
Ce calcul est exact et, dans sa réponse au recours, le demandeur ne le
conteste pas.
La Cour d'appel, suivant le jugement de première instance, a retenu 87'750
fr. pour cette même période. Le calcul comporte déjà une erreur d'addition de
2'000 fr. au préjudice de la défenderesse. De plus, le treizième mois de 2003
est porté en entier alors qu'il a déjà été compté prorata temporis dans les
143'912 fr.50 de la période précédente; il est ainsi compté deux fois sur une
période d'environ dix mois. Ce résultat est indûment favorable au demandeur.
A supposer que la prestation prévue à l'art. 337c al. 1 CO soit due par la
défenderesse, cette partie acquittera donc 64'458 fr.30 à ce titre. La
prétention de la caisse intervenante, par 12'579 fr.10 avec intérêts au taux
de 5% par an dès le 9 février 2004, sera déduite de cette somme et allouée à
cette caisse.

5.2 La défenderesse conteste qu'une indemnité soit due au demandeur, même
dans l'hypothèse où, en définitive et contrairement à son opinion, le
licenciement immédiat se révélerait injustifié. Au besoin, selon l'issue de
ses investigations complémentaires, la juridiction cantonale procédera à une
nouvelle appréciation sur le droit à l'indemnité et, le cas échéant, sur le
montant à allouer.

6.
La défenderesse persiste à réclamer au demandeur un montant de 25'200 fr.
correspondant prétendument au loyer de l'appartement encore occupé de janvier
à juin 2004. La Cour d'appel a rejeté cette prétention reconventionnelle au
motif que la défenderesse n'avait pas prouvé le paiement, par elle et pour
cet appartement, d'un loyer égal au montant précité.
L'usage de l'appartement était cédé au demandeur en contrepartie de son
travail, en sus d'un salaire en argent. Cette prestation constituait donc un
salaire en nature (Streiff/von Kaenel, op. cit, p. 188). Sur la base de
l'art. 62 CO, à supposer que le demandeur n'eût plus droit à aucun salaire
dans la période considérée, la défenderesse est autorisée à lui réclamer,
s'il y a lieu, la restitution de son enrichissement. La prétention
reconventionnelle est précisément fondée sur cette disposition; nul ne
prétend qu'il existe un contrat de bail à loyer entre les parties.
L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve dans les contestations soumises
au droit civil fédéral. Selon cette disposition, celui qui exerce l'action
pour cause d'enrichissement illégitime doit établir, entre autres faits,
qu'il est appauvri (Gilles Petitpierre, Commentaire romand, ch. 8 et 54 ad
art. 62 CO). Si aucune preuve concluante n'est apportée, le juge n'est pas
autorisé à constater un appauvrissement en considération de sa simple
vraisemblance (cf. ATF 131 III 222 consid. 4.3 p. 226; 118 II 235 consid. 3c
p. 339). En tant que le juge doit déterminer équitablement l'appauvrissement
en se référant, par analogie, à l'art. 42 al. 2 CO relatif à l'évaluation
d'un dommage (Petitpierre, loc. cit., ch. 8), la partie qui demande
restitution doit prouver les faits propres à permettre cette évaluation (ATF
131 III 360 consid. 5.1 p. 363). En l'occurrence, la défenderesse se dit
appauvrie du loyer qu'elle aurait payé à un tiers pour l'appartement
concerné. Ce paiement d'un loyer n'est toutefois pas prouvé, alors que
d'ordinaire, une dépense de ce genre est facile à attester de façon directe
et précise. La défenderesse n'allègue aucune circonstance extraordinaire qui
aurait pour effet de lui rendre cette preuve impossible ou particulièrement
difficile. En conséquence, la Cour d'appel refuse à bon droit de reconnaître
la prétention en restitution.
Devant le Tribunal de prud'hommes, le demandeur s'est dit prêt à rembourser
le loyer de l'appartement, à condition que la défenderesse en prouvât le
paiement. Conformément à l'opinion soutenue devant le Tribunal fédéral, cette
déclaration était apte à obliger le demandeur selon l'art. 17 CO. Celui-ci a
toutefois subordonné son obligation à une condition selon l'art. 151 CO, qui
avait pour objet la preuve, dans le procès, du paiement d'un loyer par la
défenderesse. Cette condition ne s'est pas accomplie, d'où il résulte que la
déclaration ne produit aucun effet.

7.
Sur divers points, la défenderesse se plaint d'une constatation manifestement
inexacte des faits. Invoquant l'art. 9 Cst., elle se plaint aussi d'une
application arbitraire du droit. Compte tenu de ce qui précède, ces critiques
se révèlent dénuées de fondement ou dépourvues d'incidence sur l'issue du
recours.

8.
Il convient que le présent arrêt mette fin à la cause sur les points
définitivement résolus; ainsi, le procès ne se continuera que sur les
prétentions consécutives au licenciement immédiat du demandeur.
En l'état, la défenderesse doit payer au demandeur 147'291 fr.70 à titre de
salaire jusqu'au licenciement, soumis aux déductions sociales, et, après
compensation, 99'187 fr.75 non soumis (122'639 fr. moins 23'451 fr.25, soit
le remboursement du prêt moins celui des dépenses personnelles), le tout avec
intérêts dès le 5 novembre 2003.

9.
La valeur litigieuse déterminante selon l'art. 3 al. 2 du tarif (RS
173.110.210.3) s'élève à 150'000 fr. environ. La défenderesse succombe pour
2/12 de cette valeur et 10/12 demeurent en litige. L'émolument judiciaire
sera fixé à 6'000 fr. Il doit être acquitté à raison de 3'500 fr. (7/12) par
la défenderesse et de 2'500 fr. (5/12) par le demandeur. La charge des
dépens, évaluée à 7'200 fr. tant pour celui-ci que pour la défenderesse, doit
être répartie dans la même proportion. Après compensation à due concurrence,
la défenderesse doit donc verser 1'200 fr. au demandeur.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis et l'arrêt de la Cour d'appel est annulé.

2.
La défenderesse doit payer au demandeur:
147'291 fr.70 à titre de salaire brut, soumis aux déductions sociales, avec
intérêts aux taux de 5% par an dès le 5 novembre 2003;
99'187 fr.75 à titre de prestation nette, avec intérêts selon les mêmes
modalités;
1'200 fr. à titre de dépens.

3.
La cause est renvoyée à la Cour d'appel pour nouvelle décision conformément
aux considérants 4 et 5 ci-dessus.

4.
Les parties acquitteront un émolument judiciaire de 6'000 fr., à raison de
3'500 fr. à la charge de la défenderesse et de 2'500 fr. à la charge du
demandeur.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie à l'intervenante, aux mandataires
des autres parties et à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du
canton de Genève.

Lausanne, le 27 juin 2007

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: