Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.469/2007
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2C_469/2007 - svc

Arrêt du 8 janvier 2008
IIe Cour de droit public

M. et Mmes les Juges Merkli, Président,
Yersin et Aubry Girardin.
Greffier: M. Vianin.

Administration fiscale cantonale genevoise,
1211 Genève 3,
recourante,

contre

X.________,
intimée,
représentée par la Fiduciaire Y.________.

Impôt fédéral direct 2001/2002,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif
du canton de Genève du 7 août 2007.

Faits:

A.
Selon un acte de vente immobilière du 28 septembre 1999, X.________
(ci-après: la contribuable ou l'intimée) a acquis, pour le prix de 1'015'000
fr., des parts de copropriété de 56 o/oo de l'immeuble sis sur la parcelle no
xxx de la commune de Z.________, comprenant un droit exclusif d'utilisation
et d'aménagement sur les parties suivantes:
- un appartemement de 168,2 m2 et une terrasse de 38,3 m2 au rez-de-chaussée
(51 o/oo);
- une salle de jeux de 62 m2 au sous-sol (3 o/oo);
- un box de 27,7 m2 et une cave de 17,2 m2 au sous-sol (2 o/oo).
Par avis de modification du 25 janvier 2001, l'Administration fiscale
cantonale genevoise (ci-après: l'Administration fiscale ou la recourante) a
fixé la valeur locative brute (annuelle) de l'immeuble de la contribuable à
32'190 fr. Le calcul de la valeur locative était basé sur une surface
habitable de 175 m2, surface obtenue comme suit: 168,2 m2 + 31 m2 (salle de
jeux comptée à raison de 50%) ./. 12% (de 168,2 + 31) pour tenir compte de
l'espace occupé par les murs = 175 (résultat arrondi).
Dans sa déclaration fiscale 2001-B datée du 27 juin 2002, la contribuable a
mentionné une valeur locative brute de 25'404 fr.
Dans son bordereau de taxation du 6 décembre 2002, l'Administration fiscale a
retenu, pour l'impôt fédéral direct de la période fiscale 2001, une valeur
locative de 35'359 fr.
La contribuable a formé une réclamation à l'encontre de cette taxation.
Dans sa déclaration fiscale 2002 datée du 9 août 2003, la contribuable a
mentionné une valeur locative brute de 28'909 fr.
Dans son bordereau de taxation du 4 décembre 2003, l'Administration fiscale a
à nouveau retenu, pour l'impôt fédéral direct de la période fiscale 2002, une
valeur locative de 35'359 fr.
La contribuable a contesté cette taxation en formant une réclamation.

B.
Par deux décisions du 7 juillet 2005, l'Administration fiscale a rejeté les
réclamations.
La contribuable a déféré ces décisions à la Commission cantonale de recours
de l'impôt fédéral direct (ci-après: la Commission cantonale), qui a admis le
recours par prononcé du 14 mars 2007. Cette autorité a considéré que, depuis
la période fiscale 1995/1996, l'Administration fiscale se servait, pour
évaluer la valeur locative des immeubles sis dans le canton, d'un formulaire
intitulé "questionnaire destiné aux propriétaires d'appartements et de
villas". D'après ce formulaire, la valeur locative est basée sur la surface
habitable définie comme "la surface exacte des pièces habitables, cuisine,
salles de bains et cabinets de toilette, hall, vestibules, vérandas fermées,
escaliers intérieurs, combles habitables et mansardes (surface où la distance
du sol au toit est supérieure à 1,5 mètre), pièces vides ou locaux annexes,
tels que réduits à concurrence de 50%, à l'exception des galetas non
habitables, balcons, terrasses et galeries, caves et autres locaux de service
(buanderie, étendage), garages et remises. [...]". En outre, en vertu de
l'art. 76 de la loi genevoise du 14 avril 1988 sur les constructions et les
installations diverses (LCI; RS/GE L 5 05), les locaux dont le plancher se
trouve au-dessous du niveau général du sol adjacent ne peuvent servir à
l'habitation. En l'occurrence, la salle de jeux en cause ne pouvait être
assimilée à des combles ou à une mansarde habitables, au sens du
questionnaire précité. Située au sous-sol, elle ne constituait pas un local
habitable au sens de la législation sur la police des constructions, de sorte
que sa surface ne devait pas être prise en compte dans le calcul de la valeur
locative.
A l'encontre de cette décision, l'Administration fiscale a interjeté un
recours au Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal
administratif ou l'autorité intimée), qui l'a rejeté par arrêt du 7 août
2007. Cette autorité a considéré que la prise en compte dans le calcul de la
valeur locative de la salle de jeux ne reposait sur aucune base légale et
était même contraire à l'art. 76 LCI. Elle se trouvait aussi en contradiction
avec une jurisprudence rendue par le Tribunal administratif en matière de
fixation des loyers en application de la loi genevoise du 25 janvier 1996 sur
les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation
(LDTR; RS/GE L 5 20), selon laquelle les salles de jeux, mezzanines et caves
ne constituent pas des espaces habitables, mais des dépendances des
appartements considérés, qui sont mises à disposition des locataires à bien
plaire et à titre gratuit.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'Administration
fiscale demande au Tribunal fédéral, principalement, d'annuler l'arrêt du 7
août 2007 et de confirmer les décisions sur réclamation du 7 juillet 2005 et,
subsidiairement, d'annuler cet arrêt et de renvoyer la cause à l'autorité de
taxation pour nouvelle décision dans le sens des considérants, le tout sous
suite de frais et dépens. Elle dénonce une violation du droit fédéral.
L'autorité intimée s'en remet à justice quant à la recevabilité du recours;
sur le fond, elle persiste dans les considérants et le dispositif de son
arrêt. L'Administration fédérale des contributions, Division principale de
l'impôt fédéral direct, de l'impôt anticipé et des droits de timbre, conclut
à l'admission du recours, sous suite de frais. L'intimée conclut au rejet du
recours, sous suite de dépens.

Considérant en droit:

1.
1.1 Rendu le 7 août 2007, l'arrêt attaqué a été expédié le 10 août 2007, si
l'on en juge par la date figurant à la dernière page. En raison des féries
(art. 46 al. 1 lettre b de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral
[LTF; RS 173.110]), le délai de recours n'a toutefois pas commencé de courir
avant le 16 août 2007. Remis à la poste le 11 septembre 2007, le recours a
donc, quoi qu'en dise l'intimée, été interjeté dans le délai de 30 jours de
l'art. 100 al. 1 LTF.

1.2 Au demeurant, le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90
LTF) rendu dans une cause de droit public (art. 82 lettre a LTF) par une
autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 lettre d LTF). Déposé
en la forme (art. 42 LTF) prévue par la loi et ne tombant sous aucun des cas
d'exceptions mentionnés à l'art. 83 LTF, il est en principe recevable.
En vertu de l'art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt
fédéral direct (LIFD; RS 642.11), l'Administration fiscale a qualité pour
recourir (art. 89 al. 2 lettre a LTF).

2.
2.1 L'art. 21 al. 1 LIFD prévoit que le rendement de la fortune immobilière
est imposable, en particulier "la valeur locative des immeubles ou de parties
d'immeubles dont le contribuable se réserve l'usage en raison de son droit de
propriété" (lettre b). Selon l'art. 21 al. 2 LIFD, la valeur locative est
déterminée compte tenu des conditions locales et de l'utilisation effective
du logement au domicile du contribuable.
En matière d'impôt fédéral direct, la valeur locative correspond au loyer
objectif du marché (ATF 131 I 377 consid. 2.2 p. 381; 123 II 9 consid. 4b p.
14 s.): est déterminant le montant que le propriétaire, en louant l'objet en
question selon les conditions usuelles du lieu, pourrait en obtenir, ou le
montant qu'il devrait payer pour louer un objet similaire (2A.298/1994, RDAF
1997 II p. 706, Pra 1997 no 121 p. 645, consid. 4a).
Dans le but d'uniformiser l'imposition de la valeur locative,
l'Administration fédérale des contributions a émis des directives (cf. art.
102 al. 2 LIFD et la circulaire du 25 mars 1969 concernant la détermination
du rendement locatif imposable des maisons d'habitation, Archives 38 p. 121
ss). Selon ces directives, la valeur locative se détermine en principe
d'après une procédure d'estimation individuelle ou sur la base d'estimations
cantonales, pour autant que celles-ci existent et aient été effectuées selon
des règles uniformes. Ces estimations ne doivent de plus pas être en moyenne
inférieures à 70% de la valeur du marché; si cette limite inférieure est
dépassée, l'Administration fédérale des contributions intervient en imposant
des suppléments (cf. 2A.254/1996, Archives 67 p. 709, RDAF 1998 II p. 441,
StE 1998 B 25.3 no 18, consid. 3a).

2.2 Dans le canton de Genève, la fixation de la valeur locative est régie par
l'art. 7 al. 2 de la loi genevoise du 22 septembre 2000 sur l'imposition des
personnes physiques, Impôt sur le revenu (revenu imposable) (LIPP-IV; RS/GE D
3 14), qui a la teneur suivante:
"La valeur locative est déterminée en tenant compte des conditions locales.
Le loyer théorique des villas et des appartements en copropriété par étage
occupés par leur propriétaire est fixé en fonction notamment de la surface
habitable, du nombre de pièces, de l'aménagement, de la vétusté, de
l'ancienneté, des nuisances éventuelles et de la situation du logement. Le
loyer théorique sera pondéré par la durée d'occupation continue de l'immeuble
conformément au barème applicable en matière d'évaluation des immeubles
situés dans le canton; il ne saurait excéder un taux d'effort de 20 pour cent
des revenus bruts totaux. Ce taux d'effort est calculé sur les revenus bruts
totaux mais au minimum sur le montant déterminant pour le calcul du rabais
d'impôt. La valeur locative limitée à ce taux d'effort n'est toutefois prise
en compte qu'à la condition que les intérêts sur le financement de l'immeuble
ne soient pas supérieurs à son montant".
Intitulé "Valeur locative du logement", l'art. 2 du règlement du 14 novembre
2001 d'application de la loi sur l'imposition des personnes physiques
(LIPP-IV), Impôt sur le revenu (revenu imposable) (RS/GE D 3 14.01) dispose
ce qui suit:
"La valeur locative du logement du contribuable dans sa propre maison doit
être déterminée en fonction des loyers usuels pratiqués dans la localité pour
des logements semblables. Lorsque certains locaux sont utilisés aussi bien à
des fins commerciales que privées, par exemple dans l'hôtellerie, il est tenu
compte d'une part appropriée à ces locaux communs (pièces d'habitation,
cuisine, bain, WC)".
Selon le "questionnaire destiné aux propriétaires d'appartements et de
villas", édité par l'Administration fiscale, la valeur locative brute est
déterminée - tant pour l'impôt fédéral direct que pour l'impôt cantonal et
communal - d'abord d'après une valeur locative de base qui est fonction de la
surface habitable (voir le tableau fixant les montants pour les années
1993/1994) et du nombre de pièces. La valeur locative de base est ensuite
multipliée par des coefficients pour tenir compte du type d'habitation, de
l'aménagement, de la vétusté, des nuisances et de la situation. Le résultat
obtenu est finalement adapté à l'indice genevois des loyers pour donner la
valeur locative brute.
Le nombre de pièces est défini comme "le nombre de pièces total y compris la
cuisine, mais sans les salles de bains ou cabinets de toilettes (une
chambrette d'une surface inférieure à 9 m2 compte pour une demi-pièce)".
La surface habitable est définie comme suit:
"C'est la surface exacte des pièces habitables, cuisine, salles de bains et
cabinets de toilette, hall, vestibules, vérandas fermées, escaliers
intérieurs, combles habitables et mansardes (surface où la distance du sol au
toit est supérieure à 1,5 mètre), pièces vides ou locaux annexes, tels que
réduits à concurrence de 50%, à l'exception des galetas non habitables,
balcons, terrasses et galeries, caves et autres locaux de service (buanderie,
étendage), garages et remises. Elle correspond au minimum au nombre de pièces
multiplié par 20 m2".
Faisant partie de la section 6 "Dispositions intérieures des constructions"
du chapitre VI "Cinquième zone", les art. 76 et suivant LCI disposent ce qui
suit:
"Art. 76 Sous-sol
1 Les locaux dont le plancher se trouve au-dessous du niveau général du
sol adjacent ne peuvent servir à l'habitation.
2 [...].
Art. 77 Vides d'étages
1 Les vides d'étages (soit hauteur entre planchers et plafonds) ne
doivent pas, en règle générale, être inférieurs à 2,40 m.
2 Pour les pièces dont le plafond suit la pente de la toiture, la
surface habitable est comptée en plein lorsque le vide d'étage est égal ou
supérieur à 2,40 m et pour moitié lorsqu'il est situé entre 1,80 m et 2,40
m".

3.
3.1 L'art. 21 al. 1 lettre b LIFD prévoit l'imposition de la valeur locative
"des immeubles ou de parties d'immeubles dont le contribuable se réserve
l'usage", sans la limiter aux parties habitables. De même, selon l'art. 7 al.
2 LIPP-IV, la surface habitable représente seulement l'un des critères -
énumérés de manière non limitative - de fixation de la valeur locative. Il
est vrai que, selon le questionnaire précité, la valeur locative de base est
fonction de la surface habitable; toutefois, celle-ci ne comprend pas
seulement la surface des "pièces habitables" à proprement parler, mais
également - notamment - celle des "locaux annexes", tels que les réduits (à
raison de 50%), à l'exclusion certes des "galetas non habitables, balcons,
terrasses et galeries, caves et autres locaux de service (buanderie,
étendage), garages et remises". Il ressort au demeurant de la définition de
la valeur locative donnée par la jurisprudence fédérale (cf. consid. 2.1
ci-dessus) que les locaux doivent être pris en considération dans la mesure
où ils ont une valeur locative pour eux-mêmes ou qu'ils augmentent celle de
l'ensemble de l'immeuble. Le fait que leur usage est limité par leur
configuration (il s'agit p. ex. de locaux en sous-sol, d'accès difficile,
etc.) influe sur leur valeur locative, mais ne justifie pas de la supprimer
s'ils ont une valeur sur le marché immobilier.

3.2 En l'occurrence, il est indéniable que la salle de jeux en cause a une
valeur sur le marché immobilier. Dès lors, en vertu de l'art. 21 al. 1 lettre
b LIFD, elle doit être prise en compte dans le calcul de la valeur locative
litigieuse. Le fait qu'elle ne peut servir à l'habitation en vertu de l'art.
76 LCI n'est pas déterminant: la notion de surface habitable du droit fiscal
genevois n'est pas identique à celle du droit de la police des constructions.
C'est ainsi que, selon le questionnaire, la surface des mansardes est comptée
en plein comme surface habitable dès lors que la distance du sol au toit
dépasse 1,5 mètre, alors que l'art. 77 LCI - qui vise plus largement les
pièces dont le plafond suit la pente de la toiture - exige pour cela une
distance entre plancher et plafond de 2,4 mètres. Dans le cas particulier, la
salle de jeux peut constituer un "local annexe", au sens du questionnaire,
dont la surface entre (pour moitié) dans le calcul de la surface habitable
déterminante pour la valeur locative, quand bien même elle ne saurait servir
à l'habitation en vertu de la loi sur les constructions et les installations
diverses. La législation sur la police des constructions poursuit en effet
des buts - tels que la salubrité des constructions et l'hygiène des
habitations - différents des règles du droit fiscal sur la valeur locative,
qui tendent à déterminer celle-ci en prenant en considération l'ensemble des
locaux ayant une valeur sur le marché immobilier.
Il découle de ce qui précède qu'il est contraire au droit fédéral de ne pas
prendre en considération la salle de jeux dans la fixation de la valeur
locative de l'immeuble de l'intimée, l'argumentation de l'autorité intimée
tirée du défaut de base légale ne pouvant être suivie. Les montants eux-mêmes
n'étant pas en cause, il convient d'annuler l'arrêt entrepris et de confirmer
les décisions sur réclamation de la recourante du 7 juillet 2005.

4.
Vu ce qui précède, le recours en matière de droit public doit être admis.
Succombant, l'intimée doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF) et n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours en matière de droit public est admis. L'arrêt du Tribunal
administratif du canton de Genève du 7 août 2007 est annulé et les décisions
sur réclamation de l'Administration fiscale cantonale genevoise du 7 juillet
2005 sont confirmées.

2.
Des frais judiciaires de 2'000 fr. sont mis à la charge de l'intimée.

3.
Le présent arrêt est communiqué à l'Administration fiscale cantonale
genevoise, au mandataire de l'intimée, au Tribunal administratif du canton de
Genève et à l'Administration fédérale des contributions, Division juridique
impôt fédéral direct.

Lausanne, le 8 janvier 2008

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Merkli Vianin