Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.450/2007
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2C_450/2007 ajp

Arrêt du 12 novembre 2007
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Wurzburger et Yersin.
Greffière: Mme Mabillard.

X. ________,
recourant,
représenté par Me Jean-Charles Sommer, avocat,

contre

Département de l'économie et de la santé du canton de Genève, rue de
l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3984 1211 Genève 3,
intimé,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case
postale 1956, 1211 Genève 1.

Autorisation d'exploiter un taxi de service public en qualité d'indépendant,

recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif
du canton de Genève du 31 juillet 2007.

Faits :

A.
X. ________ a obtenu sa première carte professionnelle pour chauffeur de taxi
dans le canton de Genève le 28 février 1996. Le 24 janvier 2002, il a reçu
l'autorisation d'exploiter un service de taxi avec permis de stationnement.

A la suite d'un changement de la législation cantonale en matière de taxi,
l'intéressé a été invité à déposer une requête en vue de l'obtention d'une
nouvelle carte professionnelle de chauffeur indépendant. Il s'est exécuté le
10 février 2003.

Le 10 avril 2003, le Département cantonal genevois de justice, police et
sécurité, alors compétent, a refusé de délivrer à l'intéressé une carte
professionnelle et a révoqué l'autorisation d'exploiter un service de taxi
délivrée le 24 janvier 2002. Il a relevé que, conformément à un extrait du
casier judiciaire, X.________ avait été condamné le 21 octobre 1997 à sept
jours d'emprisonnement et 500 fr. d'amende pour conduite en état d'ivresse et
le 6 juillet 1998 à cinq jours d'emprisonnement et 300 fr. d'amende pour
conduite en état d'ébriété et violation des règles de la circulation. Par
ailleurs, il avait fait l'objet de deux retraits du permis de conduire pour
avoir circulé en état d'ivresse, le 21 novembre 1997 pour une durée de quatre
mois (taux d'alcool moyen de 1,53 g o/oo) et le 3 août 1998 pour une durée de
huit mois (taux d'alcool moyen de 1,17 g o/oo). Le 19 mars 2003, son permis
lui avait été retiré à titre préventif pour avoir dépassé, au volant de son
taxi, de 16 km/h la vitesse maximale autorisée le 8 octobre 2002 et avoir
circulé au volant de son taxi, le 8 février 2003, en état d'ivresse (taux
d'alcool moyen de 2,19 g o/oo), provoquant un accident et quittant les lieux
sans remplir ses devoirs.

Par arrêt du 8 mars 2005, le Tribunal administratif du canton de Genève
(ci-après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours de l'intéressé
contre la décision précitée.

B.
Le 13 novembre 2006, X.________ a sollicité la restitution de son
autorisation de "chauffeur de taxi de service public". Il indiquait qu'il
était à nouveau titulaire de son permis de conduire.

Par décision du 19 avril 2007, le Département cantonal genevois de l'économie
et de la santé (ci-après: le Département cantonal) a refusé de restituer à
l'intéressé l'autorisation d'exploiter un taxi de service public en qualité
d'indépendant. La nouvelle loi genevoise sur les taxis et limousines
(transport professionnel de personnes au moyen de voitures automobiles) du 21
janvier 2005 (ci-après: LTaxis ou la loi sur les taxis et limousines) et son
règlement d'exécution du 4 mai 2005 étaient entrés en vigueur le 15 mai 2005,
de sorte que la requête de l'intéressé devait être examinée selon ces
dispositions. Comme l'intéressé n'exerçait pas son activité au moment du
changement de loi, il ne pouvait bénéficier des dispositions transitoires et
devait passer avec succès la prochaine session d'examen pour obtenir la carte
professionnelle de chauffeur de taxi.

Le 31 juillet 2007, le Tribunal administratif a rejeté le recours de
X.________ contre la décision précitée. Il a considéré que la décision du 10
avril 2003 (refus de la délivrance d'une carte professionnelle de chauffeur
de taxi indépendant et révocation d'une autorisation d'exploiter un service
de taxi) n'était pas une sanction administrative de nature disciplinaire,
devant être limitée dans le temps, comme le soutenait l'intéressé. Par
ailleurs, lors de l'entrée en vigueur de la loi sur les taxis et les
limousines, l'intéressé n'exerçait pas de manière effective sa profession; il
n'était pas non plus titulaire d'une carte professionnelle de chauffeur de
taxi et ne disposait plus d'une autorisation d'exploiter un service de taxi.
Il ne pouvait donc pas bénéficier des dispositions transitoires de la
nouvelle loi.

C.
L'intéressé a porté sa cause devant le Tribunal fédéral, concluant, avec
suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt du Tribunal administratif
du 31 juillet 2007 et de la décision du Département cantonal du 19 avril
2007. Subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à l'Etat de Genève
afin qu'il rende une nouvelle décision dans le sens des considérants et lui
restitue son autorisation d'exploiter un taxi de service public. Il est
d'avis que les autorités cantonales ont violé l'art. 27 Cst. (liberté
économique) ainsi que les art. 9 Cst. (protection contre l'arbitraire) et 30
Cst. (garanties de procédure judiciaire). Il requiert en outre l'assistance
judiciaire.

Le Tribunal administratif renonce à formuler des observations sur le recours
et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le
Département cantonal conclut au rejet du recours, sous suite des frais et
dépens.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours qui lui sont soumis (ATF 132 I 140 consid. 1.1 p. 292; 131 II 58
consid. 1 p. 60). Le recourant n'a pas indiqué par quelle voie de recours il
procède auprès du Tribunal fédéral. Toutefois, cette imprécision ne saurait
lui nuire si son recours remplit les exigences légales de la voie de droit
qui est ouverte (sur le choix erroné d'une voie de recours, cf. ATF 126 II
506 consid. 1b p. 508/509 et les arrêts cités), à savoir, en l'espèce, la
voie du recours en matière de droit public.

Déposé en temps utile et dans les formes requises (art. 100 al. 1 et 106 al.
2 LTF) contre une décision finale prise en dernière instance cantonale, qui
ne peut pas être attaquée devant le Tribunal administratif fédéral (art. 86
al. 1 lettre d LTF; art. 33 lettre i LTAF), le présent recours est en
principe recevable pour violation du droit fédéral (art. 95 lettre a LTF),
lequel comprend également le droit constitutionnel.

1.2 Toutefois, la conclusion du recourant tendant à l'annulation de la
décision du Département cantonal du 19 avril 2007 est irrecevable, étant
donné l'effet dévolutif du recours déposé auprès du Tribunal administratif
(ATF 126 II 300 consid. 2a p. 302/303; 125 II 29 consid 1c p. 33).

1.3 En vertu de l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine les
moyens fondés sur la violation d'un droit constitutionnel que si les griefs
ont été invoqués et motivés de manière précise par le recourant, lequel doit
notamment indiquer les motifs et les moyens de preuve (art. 42 al. 1 LTF) et
exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viol le droit (art. 42 al. 2
LTF). Le recourant ne peut ainsi se contenter de critiquer la décision
attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où la juridiction supérieure
jouit d'une libre cognition; en particulier, il ne saurait se limiter à
opposer son opinion à celle de l'autorité cantonale, (cf. ATF 129 I 113
consid. 2.1 p. 120) ou soulever des critiques de nature appellatoire (cf. ATF
130 I 258 consid. 1.3 p. 261 s.).

2.
Invoquant l'art. 27 Cst., le recourant fait valoir que le refus de lui
restituer son autorisation d'exploiter un taxi de service public viol sa
liberté économique ainsi que le principe de proportionnalité.

2.1 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle
comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une
activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2
Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à
titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF
118 Ia 175 consid. 1 p. 176). Aux termes de l'art. 36 al. 1 Cst., toute
restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale; les
restrictions graves doivent être prévues par une loi. Toute restriction d'un
droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la
protection d'un droit fondamental d'autrui (art. 36 al. 2 Cst.) et
proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.). L'essence des droits
fondamentaux est inviolable (art. 36 al. 4 Cst.).
2.2 Entrée en vigueur le 15 mai 2005, la loi sur les taxis et limousines a
remplacé la loi genevoise du 26 mars 1999 sur les services de taxis
(ci-après : la loi du 26 mars 1999).

La loi sur les taxis et limousines sépare les autorisations d'exercer la
profession (délivrée sous la forme d'une carte professionnelle de chauffeur
de taxi; art. 5 ss LTaxis) de celle d'exploiter un service de transport de
personnes (art. 9 ss LTaxis). Selon l'art. 6 LTaxis, la carte professionnelle
est délivrée par le département notamment lorsque le requérant a réussi les
examens prévus à l'art. 26 qui portent en particulier sur la connaissance
théorique et pratique de la topographie de la ville et du canton, les
obligations résultant de la loi, le maniement du compteur, la maîtrise du
français et les rudiments de l'anglais. L'art. 9 al. 1 LTaxis prévoit
plusieurs types d'autorisations d'exploiter un service de transport de
personnes. Pour les indépendants, il distingue l'autorisation d'exploiter un
taxi de service privé, celle d'exploiter un taxi de service public et celle
d'exploiter une limousine. Ces dernières ne sont délivrées que si le
requérant est au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur de taxi
(art. 10 al. 1 lettre a, 11 al. 1 lettre a, 14 al. 1 lettre a LTaxis). La
délivrance des permis de service public est soumise à un numerus clausus régi
par les art. 20 et 21 LTaxis.

Selon l'art. 53 LTaxis, les chauffeurs de taxis titulaires notamment de la
carte professionnelle de chauffeur indépendant sans employé au sens de l'art.
4 ou de l'art. 5 de la loi du 26 mars 1999 qui, lors de l'entrée en vigueur
de la loi, exercent de manière effective leur profession en qualité
d'indépendants, se voient délivrer la carte professionnelle de chauffeur de
taxi et sont autorisés à poursuivre leur activité durant une année. A
l'échéance de ce délai, l'exploitant doit avoir satisfait aux conditions de
l'art. 10 al. 1, ou de l'art. 11 al. 1, et sollicité du département la
délivrance d'une nouvelle autorisation d'exploiter au sens de l'art. 10 ou de
l'art. 11 (art. 53 al. 3 et 4 LTaxis). D'après l'art. 58 LTaxis, les permis
de stationnement délivrés au sens des art. 8 et suivants de la loi du 26 mars
1999 sont d'office considérés comme des permis de service public au sens de
la loi. Ils sont renouvelés, pour autant que les titulaires remplissent les
conditions de leur maintien, en même temps que les autorisations d'exploiter
en vertu des art. 53 ou 54 LTaxis.

2.3 Dans son arrêt, le Tribunal administratif a constaté que, par décision du
10 avril 2003, le recourant s'était vu retirer sa carte professionnelle et
son autorisation d'exploiter un taxi avec permis de stationnement. Comme
celui-ci ne disposait plus de carte professionnelle de chauffeur de taxi ni
d'autorisation d'exploiter un taxi au moment de l'entrée en vigueur de la loi
sur les taxis et limousines, il ne pouvait pas bénéficier du régime
transitoire instauré par les art. 53 et 58 LTaxis et ne remplissait pas non
plus les conditions posées par l'art. 11 al. 1 LTaxis pour obtenir une
autorisation d'exploiter un taxi de service public, sans passer d'examen.

Le recourant fait valoir que, compte tenu de son âge, l'obligation de passer
une nouvelle fois les examens de chauffeur de taxi - pour obtenir une carte
professionnelle de chauffeur de taxi - et l'inscription sur la liste
d'attente l'empêcheront à jamais d'obtenir l'autorisation d'exploiter un taxi
de service public, ce qui serait contraire au principe de proportionnalité.

Il n'est pas contesté qu'au moment de l'entrée en vigueur de la loi sur les
taxis et les limousines, le 15 mai 2005, le recourant n'exerçait plus sa
profession de chauffeur de taxi de manière effective. Les motifs qui ont
empêché l'exercice effectif de la profession au sens de l'art. 58 LTaxis ne
revêtent par ailleurs aucune importance (arrêt 2C.291/2007 du 24 septembre
2007, consid. 2.3). Il suffit par conséquent de constater, à l'instar du
Tribunal administratif, que le recourant s'est trouvé dans la même situation
qu'une personne qui cherche à débuter dans la profession de chauffeur de taxi
de service public. Il n'a ainsi pas de droit à la restitution de son
autorisation ou à une nouvelle autorisation du moment qu'il ne remplissait
pas les conditions prévues par la loi pour leur délivrance. En outre, compte
tenu des infractions répétées aux règles de la circulation commises par
l'intéressé et de l'interruption de l'exercice de la profession pendant
quatre ans, l'exigence du Département cantonal que le recourant passe un
nouvel examen professionnel n'a au demeurant rien de disproportionné.
Si, évoquant la liste d'attente, le recourant entend se plaindre du régime
transitoire mis en place par la loi sur les taxis et les limousines, il perd
de vue que le législateur cantonal était en droit de modifier la législation
sur les taxis pour rendre l'accès à la profession de chauffeur de taxi de
service public plus difficile, dès lors que ce dernier était guidé par des
motifs d'intérêt public et a respecté le principe de proportionnalité, comme
l'a déjà jugé le Tribunal fédéral (cf. arrêt 2P 258/2006 du 17 mars 2007,
consid. 2.2).

Partant, le grief tiré de la violation de la liberté économique est infondé.

2.4 Le recourant se plaint ensuite que, dans d'autres professions, juridiques
et médicales notamment, à la fin de la sanction, la personne concernée
retrouve sans nouvel examen professionnel ni liste d'attente tous les droits
liés à son brevet de capacité professionnelle. Ce faisant, il se plaint
implicitement d'inégalité de traitement.
Pour autant qu'il réponde aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2
LTF, ce qui est pour le moins douteux, ce grief doit être rejeté. En effet,
l'art. 27 Cst. n'assure l'égalité de traitement qu'entre concurrents directs
(ATF 132 I 97 consid. 2.1 p. 100; 125 I 431 consid. 4b/aa p. 435 s.; 121 I
129 consid. 3b p. 132 et les références citées) et l'art. 8 Cst ne trouve
d'application que lorsqu'il s'agit de comparer des situations semblables, ce
qui n'est pas le cas de la profession de chauffeur de taxi et des autres
professions invoquées par le recourant. Au demeurant, pour les avocats et les
professionnels de la santé en général, l'interdiction de pratiquer la
profession est une mesure disciplinaire infligée en cas de violation des
devoirs professionnels mais ne résulte que rarement du fait que l'intéressé
ne remplit plus les conditions d'exercice de la profession. Si tel était le
cas, l'autorisation de pratiquer ne leur serait pas nécessairement restituée
sans condition. En outre, pour ces professions, le nombre d'autorisations
n'est en principe pas limité, bien qu'il faille relever que de jeunes
médecins ont été empêchés de s'installer pour des motifs économiques relatifs
aux coûts de la santé (ATF 130 I 26; arrêt 2P.134/2003, RDAF 2005 I p 182).

2.1 Enfin, invoquant les art. 9 et 30 Cst., le recourant se plaint également
d'arbitraire et de violation des garanties de procédure sans exposer en quoi
le Tribunal administratif aurait interprété ou appliqué le droit cantonal de
manière arbitraire ni préciser de quelles garanties de procédure il dénonce
la violation. Par conséquent, ne répondant pas aux exigences de motivation de
l'art. 106 LTF (cf. consid. 1.4 ci-dessus), ces deux derniers griefs sont
irrecevables dans la mesure où ils ne se confondent pas avec celui de
violation du principe de proportionnalité, qui a déjà été écarté.

3.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure
où il est recevable. Les conclusions du recourant étaient dénuées de toute
chance de succès de sorte qu'il convient de lui refuser l'assistance
judiciaire (art. 64 LTF). Succombant, le recourant doit supporter les frais
judiciaires (art. 65 et 66 LTF) et n'a pas droit à des dépens (art. 68 LTF).

Le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 2'500 fr. est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie mandataire du recourant, au
Département de l'économie et de la santé et au Tribunal administratif du
canton de Genève.

Lausanne, le 12 novembre 2007

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière: