Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.14/2007
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2C_14/2007 - svc

Arrêt du 24 juillet 2007
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Hungerbühler, Juge présidant,
Wurzburger et Yersin.
Greffière: Mme Dupraz.

AX.________,
recourant,
représenté par Me Georges Reymond, avocat,

contre

Service de la population du canton de Vaud,
avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.

Révocation d'une autorisation de séjour CE/AELE,

recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif
du canton de Vaud du 9 janvier 2007.

Faits :

A.
Après avoir séjourné illégalement en Suisse, AX.________, ressortissant
tunisien né le 25 juillet 1974, a épousé, le 17 décembre 1999, BC.________,
ressortissante française née le 29 juillet 1964 au bénéfice d'une
autorisation d'établissement en Suisse. Le 19 juin 2000, il s'est vu octroyer
une autorisation de séjour au titre du regroupement familial pour une période
de six mois, compte tenu de la situation financière précaire du couple. Cette
autorisation de séjour a été régulièrement prolongée. Le 16 décembre 2002, le
Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal) a
délivré à AX.________ une autorisation de séjour CE/AELE valable pour toute
la Suisse jusqu'au 16 décembre 2007, en enjoignant à l'intéressé
d'entreprendre toutes les démarches nécessaires pour exercer durablement une
activité lucrative et garantir l'autonomie financière de son couple.
Les époux X.C.________ se sont séparés en juillet 2003. Statuant le 24
octobre 2003 sur la requête de mesures protectrices de l'union conjugale
déposée par BX.C.________, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement
de Lausanne a notamment, d'une part, autorisé celle-ci à vivre séparée de son
mari pour une durée indéterminée, la jouissance du logement conjugal lui
étant attribuée, et, d'autre part, octroyé à AX.________ un délai échéant le
31 octobre 2003 pour quitter le domicile conjugal et interdit à celui-ci
d'importuner sa femme de quelque manière que ce fût, tout en l'astreignant à
contribuer à l'entretien de cette dernière par le versement d'une pension
mensuelle de 640 fr. Le 8 juin 2004, BX.C.________ a déposé une demande de
divorce.
Le 4 mai 2005, le Service cantonal a révoqué l'autorisation de séjour CE/AELE
de AX.________ et imparti à l'intéressé un délai de départ d'un mois dès la
notification de cette décision, en se fondant notamment sur l'art. 9 al. 2
lettre b de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement
des étrangers (LSEE; RS 142.20). Il a considéré en particulier que
AX.________ commettait un abus de droit dans la mesure où il se prévalait
d'un mariage vidé de sa substance et n'existant plus que formellement dans le
but de conserver le bénéfice de son autorisation de séjour.
Le 9 mai 2005, BX.C.________ a retiré sa demande de divorce.

B.
Par arrêt du 9 janvier 2007, le Tribunal administratif du canton de Vaud
(ci-après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours de AX.________
contre la décision du Service cantonal du 4 mai 2005, confirmé ladite
décision et ordonné au Service cantonal de fixer un nouveau délai de départ à
l'intéressé. Il a repris, en la développant, l'argumentation du Service
cantonal.
Le 22 janvier 2007, le Service cantonal a imparti à l'intéressé un délai de
départ échéant le 9 mars 2007.

C.
AX.________ a déposé un "recours de droit administratif" au Tribunal fédéral
contre l'arrêt du Tribunal administratif du 9 janvier 2007. Il demande, sous
suite de frais et dépens, principalement, que l'arrêt attaqué soit réformé en
ce sens qu'une autorisation de séjour CE/AELE lui soit octroyée et,
subsidiairement, que le dossier soit renvoyé à "l'Autorité inférieure" pour
nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.
Selon le recourant, il ne serait pas établi avec certitude que son mariage
serait vidé de sa substance, de sorte qu'il commettrait un abus de droit en
l'invoquant. L'intéressé reproche notamment à l'autorité intimée d'avoir
accordé trop d'importance aux déclarations de sa femme. Il requiert
l'assistance judiciaire.
Le Tribunal fédéral a demandé au Tribunal administratif et au Service
cantonal de produire leurs dossiers respectifs, sans pour autant ordonner
d'échange d'écritures.

D.
Par ordonnance du 13 février 2007, le Président de la IIe Cour de droit
public a admis provisoirement la demande d'effet suspensif présentée par le
recourant.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont
soumis.

1.1 L'arrêt attaqué date du 9 janvier 2007, de sorte qu'il y a lieu
d'appliquer la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110)
au présent recours (art. 132 al. 1 LTF) et de le traiter comme un recours en
matière de droit public.

1.2 D'après l'art. 83 lettre c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit
public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers
qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit. Il est, en revanche, recevable contre la
révocation d'une autorisation de séjour qui ne tombe pas sous le coup de
l'exception précitée et déploierait encore ses effets s'il n'y avait pas eu
de révocation. Dans un tel cas, la recevabilité du recours en matière de
droit public se fonde sur la confiance légitime que l'autorisation qui a été
accordée durera jusqu'à l'échéance de sa validité et qu'en principe, aucune
atteinte ne sera portée à la situation juridique correspondante (cf. arrêt
2C_67/2007 du 11 juin 2007, consid. 1.2).
Le recourant est marié à une ressortissante française titulaire d'une
autorisation d'établissement. En principe, il dispose donc, en vertu des art.
7 lettre d de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une
part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la
libre circulation des personnes (ci-après: l'Accord ou ALCP; RS
0.142.112.681) et 3 par. 1 et 2 annexe I ALCP, d'un droit (dérivé) à une
autorisation de séjour en Suisse pendant toute la durée formelle de son
mariage, à l'image de ce que prévoit l'art. 7 al. 1 LSEE pour le conjoint
étranger d'un ressortissant suisse (ATF 130 II 113 consid. 8.3 p. 129). Le 16
décembre 2002, il s'est ainsi vu délivrer une autorisation de séjour CE/AELE
valable pour toute la Suisse jusqu'au 16 décembre 2007, au titre du
regroupement familial. Son recours est dès lors recevable en tant qu'il s'en
prend à la révocation de l'autorisation de séjour obtenue à la suite de son
mariage et en demande le maintien.
En revanche, dans la mesure où l'intéressé demande une autorisation de séjour
dans le cadre de la libre appréciation de l'autorité cantonale (art. 4 LSEE),
son recours est irrecevable comme recours en matière de droit public, au
regard de l'art. 83 lettre c ch. 2 LTF. Il est également irrecevable, à cet
égard, comme recours constitutionnel subsidiaire, car le recourant, qui se
plaint apparemment d'arbitraire, n'a pas qualité pour recourir au sens de
l'art. 115 lettre b LTF, faute de droit à l'octroi d'une autorisation de
séjour. En effet, dans un arrêt du 30 avril 2007 destiné à la publication
(2D_2/2007), le Tribunal fédéral a décidé que la jurisprudence rendue sous
l'empire de la loi fédérale du 16 décembre 1943 d'organisation judiciaire
(OJ) à propos de la qualité pour recourir dans le recours de droit public
selon l'art 88 OJ (ATF 126 I 81 et 121 I 267) restait valable pour définir la
qualité pour recourir selon l'art. 115 lettre b LTF. Dès lors, l'interdiction
générale de l'arbitraire découlant de l'art. 9 Cst. ne confère pas, à elle
seule, une position juridique protégée au sens de l'art. 115 lettre b LTF,
lorsque l'intéressé allègue une mauvaise application du droit. Enfin, le
recourant ne peut déduire aucun droit à une autorisation de séjour du fait
qu'une procédure civile à laquelle il est partie est pendante, d'autant qu'il
peut se faire représenter dans cette cause par un avocat.

1.3 Au surplus, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes
prescrites par la loi (art. 42 LTF), le présent recours est en principe
recevable en vertu des art. 82 ss LTF.

2.
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il peut cependant rectifier ou compléter
d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été
établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF; cf. aussi art. 97 al. 1 LTF).
Le recourant produit pour la première fois devant l'autorité de céans deux
pièces dont l'une, non signée, date du 26 mai 2006 alors que l'autre n'est
pas datée. Il ne prétend pas avoir été dans l'impossibilité de les présenter
devant l'autorité intimée. Ces pièces, nouvelles, ne peuvent pas être prises
en considération par l'autorité de céans (cf. art. 105 al. 1 LTF).

3.
3.1 D'après la jurisprudence (ATF 130 II 113 consid. 4, 8, 9 et 10 p. 116/117
et 127 ss) relative à l'art. 3 par. 1 et 2 lettre a annexe I ALCP, le
conjoint étranger d'un travailleur communautaire disposant d'une autorisation
de séjour ou d'établissement en Suisse peut se prévaloir de droits d'une
portée analogue à ceux dont bénéficie le conjoint étranger d'un citoyen
suisse en vertu de l'art. 7 al. 1 LSEE.
Par conséquent, à l'instar des étrangers mariés à un citoyen suisse, les
étrangers mariés à un travailleur communautaire jouissent, en principe, d'un
droit de séjour en Suisse pendant toute la durée formelle du mariage, attendu
qu'ils n'ont pas à vivre "en permanence" sous le même toit que leur époux
pour être titulaire d'un tel droit. Ce droit n'est cependant pas absolu.
D'une part, l'art. 3 annexe I ALCP ne protège pas les mariages fictifs.
D'autre part, en cas de séparation des époux, il y a abus de droit à invoquer
cette disposition lorsque le lien conjugal est vidé de toute substance et que
la demande de regroupement familial vise seulement à obtenir une autorisation
de séjour pour l'époux du travailleur communautaire. A cet égard, les
critères élaborés par la jurisprudence rendue à propos de l'art. 7 al. 1 LSEE
s'appliquent mutatis mutandis afin de garantir le respect du principe de
non-discrimination inscrit à l'art. 2 ALCP et d'assurer une certaine cohésion
d'ensemble au système.
Selon la jurisprudence relative à l'art. 7 al. 1 LSEE, le mariage n'existe
plus que formellement lorsque l'union conjugale est rompue définitivement,
c'est-à-dire lorsqu'il n'y a plus d'espoir de réconciliation; les causes et
les motifs de la rupture ne jouent pas de rôle (ATF 130 II 113 consid. 4.2 p.
117 et la jurisprudence citée). Des indices clairs doivent démontrer que la
poursuite de la vie conjugale n'est plus envisagée et qu'il n'existe plus de
perspective à cet égard (cf. ATF 130 II 113 consid. 10.2 p. 135; 128 II 145
consid. 2.2 p. 151).

3.2 La révocation litigieuse se fonde sur l'art. 9 al. 2 lettre b LSEE qui
dispose notamment que l'autorisation de séjour peut être révoquée lorsque
l'une des conditions qui y sont attachées n'est pas remplie.

4.
Le Tribunal administratif a retenu qu'au moment où il statuait, les époux
X.C.________ avaient cessé la vie commune depuis plus de trois ans et
qu'aucune reprise de celle-ci n'était envisagée par la femme du recourant qui
l'avait déclaré à maintes reprises. BX.C.________ avait certes retiré sa
demande de divorce, mais cela parce qu'une demande unilatérale de divorce ne
pouvait être déposée qu'après une séparation de deux ans, comme l'a
d'ailleurs reconnu le recourant. Le Tribunal administratif a en outre relevé
que ce dernier avait prétendu de manière apparemment contradictoire qu'il
aimait sa femme qui pourtant le trompait et faisait tout pour lui nuire. Les
faits déterminants constatés ainsi par l'autorité intimée n'ont pas été
établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF, de sorte qu'ils lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1
et 2 LTF). Le recourant se plaint que l'autorité intimée ait attaché trop
d'importance aux déclarations de sa femme qui excluait de se mettre à nouveau
en ménage avec lui; il prétend certes qu'il fera tout son possible pour
restaurer la communauté conjugale, mais il n'invoque aucun élément concret et
vraisemblable permettant d'admettre une volonté réelle d'une reprise
prochaine de la vie commune. Il n'allègue du reste pas avoir entrepris de
démarches en ce sens. On ne saurait reprocher au Tribunal administratif
d'avoir pris en compte les affirmations de BX.C.________ quant à l'absence
d'espoir de réconciliation alors que le recourant lui-même n'avançait aucun
élément sérieux permettant de croire à une véritable réconciliation. En
réalité, la séparation des époux X.C.________ est durable et il n'y a pas
d'espoir tangible de restauration d'une vraie vie conjugale. En se prévalant
d'un mariage purement formel pour conserver son autorisation de séjour, le
recourant a commis un abus de droit. En outre, il apparaît que l'union
conjugale des époux X.C.________ était déjà vidée de sa substance avant
l'écoulement du délai de cinq ans de l'art. 7 al. 1 2ème phrase LSEE. C'est
donc à juste titre que l'autorité intimée a confirmé la révocation de
l'autorisation de séjour de l'intéressé. Ce faisant, le Tribunal
administratif a respecté le droit, notamment la loi fédérale sur le séjour et
l'établissement des étrangers ainsi que l'Accord.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable.
Les conclusions du recourant étaient dénuées de toute chance de succès, de
sorte qu'il convient de lui refuser l'assistance judiciaire (art. 64 LTF).
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires, qui seront
fixés compte tenu de sa situation financière (art. 65 et 66 al. 1 LTF), et
n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 500 fr. est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Service de la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi
qu'à l'Office fédéral des migrations.

Lausanne, le 24 juillet 2007

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant:  La greffière: