Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.81/2007
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1C_81/2007 /col

Arrêt du 31 octobre 2007
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président, Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffier: M. Rittener.

A. ________,
recourant, représenté par Me Patrick Blaser, avocat,

contre

Service des automobiles et de la navigation du canton de Genève, case postale
1556, 1227 Carouge,
Tribunal administratif du canton de Genève,
case postale 1256, 1211 Genève 1.

retrait du permis de conduire,

recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif
du canton de Genève du 6 mars 2007.

Faits:

A.
Le 17 août 2006, A.________ circulait au volant de sa voiture sur l'autoroute
A53 dans le canton de Zurich, lorsqu'il a été contrôlé à la vitesse de 113
km/h, sur un tronçon où la vitesse était limitée à 80 km/h. Après déduction
de la marge de sécurité, l'excès de vitesse était de 27 km/h. Par décision du
17 novembre 2006, le Service des automobiles et de la navigation du canton de
Genève (ci-après: le SAN) a ordonné le retrait du permis de conduire de
A.________ pour une durée de trois mois. Il qualifiait l'infraction
susmentionnée de légère au sens de l'art. 16a al. 1 de la loi fédérale sur la
circulation routière (LCR; RS 741.01), mais il prenait en compte les nombreux
antécédents de l'intéressé, qui avait fait l'objet de cinq mesures de retrait
de permis et d'un avertissement entre 1995 et 2003.

B.
A.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif
du canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif), qui a rejeté ce
recours par arrêt du 6 mars 2007. Le tribunal a considéré que l'infraction
n'avait pas été commise "dans le délai de récidive de deux ans prévu par
l'article 16b alinéa 2 aLCR" mais que le SAN pouvait majorer le "minimum
légal d'un mois prescrit par cette dernière disposition" pour tenir compte
des mauvais antécédents de A.________ et de l'inattention dont il a fait
preuve en ne prenant pas garde aux panneaux de limitation de vitesse. Le
Tribunal administratif relevait encore que l'inattention en question aurait
pu être sanctionnée en concours avec l'excès de vitesse, mais qu'il ne
pouvait pas procéder à une reformatio in pejus.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________
demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et de prononcer un
avertissement, subsidiairement un retrait de permis pour une durée d'un mois.
Il se plaint d'une violation de l'art. 16a LCR et il invoque l'interdiction
de l'arbitraire (art. 9 Cst.) ainsi que le principe de la proportionnalité
(art. 36 al. 3 Cst.). Il requiert en outre l'octroi de l'effet suspensif. Le
Tribunal administratif se réfère à l'arrêt attaqué et conclut au rejet du
recours. Le SAN n'a pas présenté d'observations. L'Office fédéral des routes
s'est déterminé; il conclut à l'admission du recours.

D.
Par ordonnance du 25 mai 2007, le Président de la Ire Cour de droit public a
accordé l'effet suspensif au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision attaquée ayant été rendue après le 1er janvier 2007, la loi
fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110) est
applicable à la présente procédure de recours (art. 132 al. 1 LTF).

1.1 La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss
LTF, est en principe ouverte contre les décisions prises en dernière instance
cantonale au sujet de mesures administratives de retrait du permis de
conduire. Le recourant est particulièrement atteint par la décision attaquée
- qui confirme le retrait de son permis de conduire pour une durée de trois
mois - et il a un intérêt digne de protection à sa modification dans le sens
d'une diminution de la durée du retrait ou du prononcé d'un avertissement; il
a donc la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 let. a et b LTF.
Pour le surplus, interjeté en temps utile et dans les formes requises contre
une décision finale prise en dernière instance cantonale non susceptible de
recours devant le Tribunal administratif fédéral, le recours est recevable au
regard des art. 42, 86 al. 1 let. d, 90 et 100 al. 1 LTF.

1.2 Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); il
n'est pas lié par l'argumentation des parties et il apprécie librement la
portée juridique des faits. Il peut admettre un recours pour des motifs
autres que ceux invoqués par la partie recourante; il peut aussi rejeter un
recours en opérant une substitution de motifs, c'est-à-dire en adoptant un
raisonnement juridique autre que celui de la juridiction cantonale (ATF 133
II 249 consid. 1.4.1 p. 254; cf. ATF 132 II 257 consid. 2.5 p. 262; 130 III
136 consid. 1.4 in fine).

2.
Il convient en premier lieu de déterminer le droit applicable à la présente
cause. A la lecture de l'arrêt attaqué, on ne parvient pas à déterminer quel
droit le Tribunal administratif a voulu appliquer lorsqu'il a considéré que
l'infraction n'avait pas été commise "dans le délai de récidive de deux ans
prévu par l'article 16b alinéa 2 aLCR" mais que le SAN pouvait majorer le
"minimum légal d'un mois prescrit par cette dernière disposition". En effet,
il n'existe pas d'art. 16b aLCR et l'art. 16 aLCR ne contient pas de
référence à un délai de deux ans ni à une durée minimale de retrait d'un
mois.

2.1 Comme l'infraction a été commise après l'entrée en vigueur de la
modification de la LCR du 14 décembre 2001, il convient d'appliquer les
nouveaux art. 16ss LCR (disposition finale de la modification de la LCR du 14
décembre 2001). Contrairement à ce que semble considérer le Tribunal
administratif, le principe de la lex mitior ne devrait pas s'appliquer en
l'espèce puisque l'infraction a précisément été commise après l'entrée en
vigueur de la nouvelle loi (cf. art. 2 al. 2 CP). L'autorité intimée se
réfère cependant à un avis de doctrine selon lequel, lorsqu'un antécédent
commis sous l'ancien droit est pris en considération pour fixer la sanction,
il conviendrait d'appliquer l'ancien droit s'il est plus favorable (Cédric
Mizel, Les nouvelles dispositions légales sur le retrait du permis de
conduire in RDAF 2004 I p. 423 ss). Il n'y a toutefois pas lieu d'examiner
plus avant cette question, dès lors que l'ancienne loi n'est de toute façon
pas plus favorable au recourant (cf. infra consid. 2.2) .

2.2 La question de savoir quelle est la loi est la plus favorable ne doit pas
être résolue de manière abstraite; il faut plutôt déterminer lequel des deux
droits conduit au résultat le plus avantageux pour l'intéressé dans le cas
d'espèce (cf. arrêt non publié 2A.719/2004 du 11 mai 2005 consid. 2). En
l'occurrence, la sanction encourue par le recourant pour une infraction
légère est un avertissement, alors que l'art. 16 al. 2 aLCR laissait ouverte
la possibilité d'un retrait de permis; le nouveau droit lui est donc plus
favorable à cet égard. De même, si l'on devait considérer que l'infraction
est moyennement grave, l'ancien droit ne lui serait pas plus favorable
puisque tant l'art. 16b LCR que l'art. 16 aLCR prévoient la possibilité du
retrait de permis dans un tel cas. Par conséquent, même si l'on devait
examiner la présente cause sous l'angle du principe de la lex mitior, c'est
bien le nouveau droit qui s'applique.

3.
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 16a LCR. Ses antécédents
étant antérieurs de plus de deux ans à la commission de l'infraction, il
soutient que seul un avertissement pouvait être prononcé à son encontre.
Selon le texte clair de l'art. 16a al. 3 LCR, si l'auteur d'une infraction
légère n'a pas fait l'objet d'un retrait de permis ou d'une autre mesure
administrative dans les deux années précédant la commission de l'infraction
en cause, il ne peut se voir infliger qu'un avertissement et non un retrait
de permis. Cette disposition ne laisse pas de marge de manoeuvre à l'autorité
d'application, qui ne peut pas prononcer un retrait de permis dans un tel
cas. Ainsi, nonobstant les antécédents particulièrement mauvais du recourant,
l'autorité intimée ne pouvait pas ordonner le retrait de son permis de
conduire pour une infraction  légère. L'art. 16a LCR a donc été violé, de
sorte qu'il y a lieu d'admettre le recours et d'annuler l'arrêt attaqué.

4.
Cela étant, selon ses propres allégations, le recourant n'a pas seulement
circulé largement au-dessus de la vitesse autorisée, mais il a également fait
preuve d'inattention. L'intéressé admet en effet un "comportement négligent"
et il allègue avoir relâché son attention de la route "accaparé qu'il était
par le nouveau système de stabilisateur de vitesse et le GPS dont le véhicule
de son épouse était équipé, qu'il n'arrivait pas à faire fonctionner" (cf.
recours p. 16). L'autorité intimée devra donc vérifier s'il n'a pas enfreint
les devoirs de prudence découlant de l'art. 31 al. 1 LCR et violé l'art. 3
al. 1 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR; RS
741.11). Compte tenu de cette inattention, elle devra également examiner si
le comportement du recourant peut toujours être qualifié de légère mise en
danger de la sécurité d'autrui et de faute bénigne au sens de l'art. 16a al.
1 LCR, ou s'il ne doit pas plutôt être qualifié d'infraction moyennement
grave au sens de l'art. 16b LCR.
A cet égard, il sera rappelé que la définition du cas moyennement grave dans
le nouveau droit correspond à celle de l'ancien droit (ATF 132 II 234 consid.
3.2 p. 238). En matière d'excès de vitesse, la jurisprudence a fixé des
règles précises dans un souci d'égalité de traitement. Elle a ainsi considéré
que, sur les autoroutes, un dépassement de vitesse atteignant 15 km/h
constituait un cas de peu de gravité passible d'un avertissement (ATF 123 II
106 consid. 2c p. 111), alors qu'un dépassement de vitesse compris entre 30
et 35 km/h était une infraction moyennement grave justifiant un retrait
facultatif (ATF 124 II 475 consid. 2a p. 477, 97 consid. 2b p. 99 et les
arrêts cités). Ces chiffres s'appliquent lorsque les conditions de
circulation sont favorables et que le conducteur jouit d'une bonne réputation
en tant qu'automobiliste; il n'est dès lors nullement exclu de faire preuve
d'une sévérité plus grande en fonction des circonstances concrètes (ATF 124
II 475 consid. 2a p. 477, 97 consid. 2b p. 99; 123 II 37 consid. 1e p. 41 et
les références).

5.
Il s'ensuit que le recours en matière de droit public doit être admis et
l'arrêt attaqué annulé, l'affaire étant renvoyée au Tribunal administratif
pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il n'y a pas lieu de
percevoir des frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Le recourant, assisté
d'un avocat, a droit à des dépens, à la charge de l'Etat de Genève (art. 68
al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis; l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée au
Tribunal administratif du canton de Genève, pour nouvelle décision dans le
sens des considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Une indemnité de 2000 fr. est allouée au recourant à titre de dépens, à la
charge de l'Etat de Genève.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Service des automobiles et de la navigation et au Tribunal administratif du
canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral des routes, Division circulation
routière.

Lausanne, le 31 octobre 2007

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: