Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.381/2007
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1C_381/2007

Arrêt du 11 janvier 2008
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Eusebio.
Greffier: M. Parmelin.

A. ________ et consorts
recourants, représentés par Me Jean-Samuel Leuba, avocat,

contre

B.________,
C.________,
la société D.________,
intimées, toutes les trois représentées par
Me Philippe Reymond, avocat,
Commune d'Ecublens, chemin de la Colline 5, 
1024 Ecublens,
représentée par Me Benoît Bovay, avocat,

permis de construire,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du
28 septembre 2007.

Faits:

A.
B. ________ et C.________ sont propriétaires de la parcelle n° 513 de la
commune d'Ecublens, dans le hameau de Bassenges. Ce terrain de 2'134 mètres
carrés s'étend en légère pente entre la rue de Bassenges et le talus
surplombant l'avenue du Tir-Fédéral, dont il est séparé par une étroite bande
de terrain, propriété de l'Etat de Vaud. Il comprend trois constructions dans
sa partie supérieure, soit une maison villageoise à l'angle nord, une petite
dépendance adossée au mur d'enceinte longeant la rue de Bassenges et un
ancien laboratoire de boucherie avec un fumoir. Ce dernier est contigu aux
constructions érigées sur la parcelle n° 1217, propriété de E.________, qui
se composent d'une habitation avec rural et d'un bâtiment industriel. La
parcelle n° 513, promise-vendue à la société D.________, est située en zone
de village régie par les art. 8 et suivants du règlement communal sur le plan
général d'affectation et la police des constructions approuvé par le
Département des infrastructures du canton de Vaud le 28 mai 1999 (RPGA).
Le 20 décembre 2001, B.________, C.________ et la société D.________ ont
requis l'autorisation de construire un bâtiment de neuf logements sur cette
parcelle avec un parking souterrain de quatorze places et onze places
extérieures. Le projet a fait l'objet de plans modifiés sanctionnés par un
permis de construire délivré par la Municipalité d'Ecublens le 10 janvier
2005, afin de tenir compte des remarques de la Commission cantonale
consultative d'urbanisme et d'architecture. Par arrêt rendu le 17 février
2006, le Tribunal administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal
administratif ou la cour cantonale) a admis le recours des opposants et
annulé le permis de construire. Il a notamment retenu que la démolition de
l'ancien fumoir au profit d'une rampe d'accès au parking souterrain n'était
pas conforme au règlement communal qui prévoit le maintien de l'ordre contigu
là où il existe et que les conditions d'une dérogation n'étaient pas
remplies.
Le 13 septembre 2006, les constructrices ont présenté de nouveaux plans
portant sur la construction d'un immeuble résidentiel comprenant neuf
logements et un parking souterrain de vingt places, ainsi que sur la
transformation des bâtiments annexes. Le bâtiment principal, prévu au centre
de la parcelle, aurait une longueur de trente mètres et une largeur de seize
mètres pour une hauteur à la corniche de 6,53 mètres et une hauteur au faîte
de 11,80 mètres. La dépendance servirait de local pour les containers à
ordures alors que l'ancien laboratoire de boucherie et fumoir abriterait deux
places de parc pour visiteurs ainsi que la rampe d'accès au parking
souterrain implanté dans la partie inférieure du terrain.
Ce projet, soumis à l'enquête publique du 22 septembre 2006 au 12  octobre
2006, a suscité six oppositions que la Municipalité d'Ecublens a levées le 22
janvier 2007. Elle a délivré le permis de construire au terme d'une décision
prise le même jour.
Statuant par arrêt du 28 septembre 2007, le Tribunal administratif a rejeté
le recours formé contre ces décisions par A.________ et consorts. Il a admis
que l'implantation d'un immeuble au centre de la parcelle n'était pas
conforme aux objectifs du plan directeur communal visant à maintenir le
dégagement visuel sur le hameau de Bassenges depuis l'avenue du Tir-Fédéral.
Il a néanmoins jugé qu'il s'agissait d'un plan d'intention, dont la
municipalité pouvait s'écarter afin de tenir compte d'un intérêt public
prépondérant, tel celui lié à la densification du sol.

B.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et
consorts demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Ils se plaignent
d'une violation du principe de la bonne foi ancré à l'art. 9 Cst. et
d'arbitraire.
Le Tribunal administratif conclut au rejet du recours. La Commune d'Ecublens
et les constructrices proposent également de le rejeter dans la mesure où il
est recevable.

C.
Par ordonnance du 28 novembre 2007, le Président de la Ire Cour de droit
public a rejeté la requête d'effet suspensif présentée par les recourants.

Considérant en droit:

1.
Le recours est dirigé contre une décision confirmant en dernière instance
cantonale l'octroi d'une autorisation de construire fondé sur les normes
cantonales et communales de police des constructions; il est recevable comme
recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF (ATF 133 II 400
consid. 2 p. 403). Aucun des motifs d'exclusion définis à l'art. 83 LTF n'est
réalisé.
Les recourants sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué qui autorise
la construction, sur une parcelle voisine, d'un bâtiment résidentiel d'une
volumétrie jugée excessive. Ils peuvent se prévaloir d'un intérêt personnel,
qui se distingue nettement de l'intérêt général des autres habitants de la
commune, et digne de protection à l'annulation de cette décision au sens de
l'art. 89 al. 1 let. c LTF. Les autres conditions de recevabilité du recours
en matière de droit public sont au surplus réunies de sorte qu'il y a lieu
d'entrer en matière.

2.
Les recourants reprochent à la cour cantonale de s'être écartée des
considérants émis dans l'arrêt rendu entre les mêmes parties le 17 février
2006. Ils dénoncent à ce propos une attitude contradictoire et contraire à la
bonne foi de l'autorité de recours.
Dans l'arrêt précité, le Tribunal administratif a jugé que le projet avait
pour effet de rompre la contiguïté, en tant qu'il prévoit la démolition de
l'ancien fumoir au profit d'une rampe d'accès au parking souterrain, et qu'il
n'était pas conforme au règlement communal qui commandait de maintenir la
contiguïté là où elle existe. De même, il a retenu que la surface des
vitrages dans les combles dépassait le minimum autorisé par l'art. 28 du
règlement cantonal d'application de la loi sur l'aménagement du territoire et
les constructions (RATC), auquel l'art. 11 RPGA renvoie implicitement, et
qu'elle devrait être réduite. Il laissait le choix aux constructrices quant à
la manière de se conformer à cette règle, soit en diminuant les surfaces de
chaque percement, soit en limitant leur nombre. Il a estimé que les
corrections nécessaires du projet, spécialement celles nécessitées par le
considérant 4, relatif à la contiguïté, ne pouvaient être imposées comme
modification de minime importance par la réforme de la décision attaquée et
que les constructrices devaient reconsidérer l'économie de leur projet. Les
intimées ont revu leur projet en maintenant la dépendance et l'ancien
laboratoire de boucherie et fumoir pour les affecter à l'usage de local à
containers et de places de parc pour visiteurs. Les recourants ne contestent
pas que le projet ainsi modifié respecterait désormais la réglementation
communale relative à l'ordre contigu. Ils prétendent que les points
définitivement tranchés dans l'arrêt ne se limitaient pas à cet aspect du
projet, mais portaient également sur l'implantation de l'immeuble au centre
de la parcelle, sa volumétrie et son esthétique, qui auraient dû être revues.
La cour cantonale a certes qualifié de peu heureuse l'intégration du bâtiment
dans le quartier, relevant qu'il était le reflet de la législation communale
qui n'interdit pas de pareilles constructions. Elle a aussi constaté que
l'implantation du projet au centre de la parcelle n'était pas adaptée aux
objectifs de protection du plan directeur communal. Tenue à une certaine
réserve, elle a finalement laissé ouverte la question de savoir si la
Municipalité d'Ecublens avait abusé de son pouvoir d'appréciation en
considérant le projet, dans son implantation, sa volumétrie et ses options
architecturales, comme admissibles sur le plan esthétique. Dans ces
conditions, on ne saurait dire que ces questions auraient définitivement été
tranchées dans l'arrêt précité et, partant, que le projet aurait été condamné
par la cour cantonale.
En tant qu'il dénonce un éventuel comportement contradictoire de la part du
Tribunal administratif, le recours est manifestement mal fondé.

3.
Les recourants soutiennent que la cour cantonale aurait fait preuve
d'arbitraire en considérant que les objectifs de sauvegarde du hameau de
Bassenges fixés dans le plan directeur communal approuvé par le Conseil
d'Etat du canton de Vaud le 6 août 1993 devaient céder le pas à l'intérêt
public à une densification des zones constructibles.

3.1 L'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait
qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait
préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue en
dernière instance cantonale que si elle est manifestement insoutenable,
méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou
si elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou de
l'équité. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit
insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF
133 I 149 consid. 3.1 p. 153 et les arrêts cités), ce qu'il appartient au
recourant d'établir en vertu de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 133 II 396 consid.
3.2 p. 400).

3.2 Le Tribunal administratif a reconnu que le projet litigieux avait pour
effet de couper le dégagement sur le hameau de Bassenges depuis l'avenue du
Tir-Fédéral et qu'il n'était de ce fait pas conforme aux objectifs de
protection du plan directeur communal. Il a cependant admis que ce plan
n'avait pas de force contraignante pour les autorités en vertu des art. 4
RPGA et 31 al. 2 de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire et les
constructions et que les exigences de préservation de la silhouette du hameau
de Bassenges devaient céder le pas à l'intérêt public à une densification des
zones constructibles. Les recourants ne contestent pas la portée juridique
attachée au plan directeur communal (cf. arrêt 1A.13/2005 du 24 juin 2005
consid. 4.8 in fine; arrêt 1P.513/1997 du 15 avril 1998 consid. 1c/bb
reproduit à la RDAF 1998 I p. 318). Ils prétendent néanmoins que les
objectifs définis dans ce plan devraient être strictement observés lorsque,
comme en l'espèce, la réglementation communale ne contient aucune norme
relative aux coefficients d'occupation et d'utilisation du sol. Ils se
réfèrent à ce propos à un arrêt rendu le 10 septembre 2001 dans la cause
1P.354/2001.
Dans cette cause, le Tribunal fédéral avait confirmé sur recours du
propriétaire un arrêt du Tribunal administratif qui annulait un permis de
construire un immeuble locatif avec un parking souterrain délivré par la
Municipalité d'Ecublens au motif que le projet ne respectait pas les
objectifs d'aménagement et de protection du hameau de Renges et ne
s'intégrait pas dans le site construit. Il a alors rappelé que l'application
de la clause d'esthétique ne devait pas vider la propriété privée de sa
substance mais qu'elle devait s'inscrire dans le cadre réglementaire. Il a
cependant précisé que, lorsque le règlement communal ne délimite pas la
densité autorisée en zone du village, l'autorité compétente pour délivrer le
permis de construire pouvait accorder un poids plus important à la clause
d'esthétique et aux objectifs de sauvegarde d'un site définis dans un plan
directeur communal. La cour cantonale s'était alors ralliée sur ce point à
l'avis exprimé par la Commission cantonale consultative d'urbanisme et
d'architecture suivant lequel le projet litigieux était en totale rupture
avec l'identité des lieux, par le style architectural du bâtiment, par ses
aménagements extérieurs et par sa densité excessive.
Dans l'arrêt rendu le 14 février 2006, la cour cantonale avait déjà constaté
qu'en l'absence de règle imposant un front d'implantation obligatoire, il
était en principe possible de construire sur le coteau, en retrait de la rue
de Bassenges, même si une telle implantation était de nature à faire obstacle
à une mise en valeur judicieuse du hameau de Bassenges et aux objectifs de
protection du plan directeur communal. Elle n'avait toutefois pas tranché
définitivement la question de savoir si la municipalité avait abusé de son
pouvoir d'appréciation en le considérant comme admissible sur le plan
esthétique, dans son implantation, sa volumétrie et ses options
architecturales. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif a constaté
que la volumétrie du bâtiment principal restait importante par rapport aux
constructions voisines. Elle correspondait toutefois à un coefficient
d'utilisation du sol de 0,82, dont 0,74 destinés aux logements, ce qui ne
pouvait être tenu pour excessif à l'intérieur d'une localité de l'ouest
lausannois, et répondait à une utilisation rationnelle du territoire dans le
sens d'une densification du bâti. Les recourants ne contestent pas l'arrêt
attaqué sur ce point, pas plus qu'ils ne critiquent celui-ci en tant qu'il
retient que l'impact visuel du projet serait limité aussi bien depuis la rue
de Bassenges que depuis l'avenue du Tir-Fédéral en raison de la présence d'un
talus. La cour cantonale a reconnu que l'implantation du projet au milieu de
la parcelle n° 513 avait pour effet de couper le dégagement que le plan
directeur communal estimait approprié de préserver sur la colline et le
hameau de Bassenges et qu'elle était contraire aux objectifs de ce plan. Les
autorités communales n'ont toutefois pris aucune mesure particulière visant à
concrétiser ces objectifs, par exemple en ménageant un secteur de dégagement
inconstructible comme le suggérait le plan directeur. La cour cantonale
pouvait ainsi s'estimer liée par la réglementation en vigueur et faire
prévaloir l'avis de la Commission cantonale consultative d'urbanisme et
d'architecture lequel considérait que le projet litigieux n'était pas de
nature à porter un préjudice majeur aux qualités de l'ensemble villageois
formé par le hameau de Bassenges, tel qu'il se présente dans la vision
lointaine. On ne saurait dire que l'argumentation retenue pour conclure à
l'admissibilité du projet est insoutenable et, partant, arbitraire même si
une autre solution plus restrictive aurait peut-être également pu être suivie
sans se heurter à l'art. 9 Cst.

4.
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est
recevable, aux frais des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 LTF). Ces
derniers verseront une indemnité de dépens aux intimées qui obtiennent gain
de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 et 2 LTF). La Commune
d'Ecublens, qui a agi dans le cadre de ses attributions de droit public, ne
saurait en revanche prétendre à des dépens (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des
recourants.

3.
Une indemnité de 2'000 fr., à payer aux intimées, créancières solidaires, à
titre de dépens, est mise à la charge des recourants, solidairement entre
eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au Tribunal
administratif du canton de Vaud.

Lausanne, le 11 janvier 2008

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Féraud Parmelin