Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.278/2007
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2007
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2007


1C_278/2007

Arrêt du 14 février 2008
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président, Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffier: M. Rittener.

A. ________ et B.________,
recourants, représentés par Me Pierre Heinis, avocat,

contre

C.________ et D.________,
intimés,
Commune de Neuchâtel, 2001 Neuchâtel 1,
Département de la gestion du territoire,
Château, 2001 Neuchâtel 1.

dérogation au règlement d'aménagement communal,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Neuchâtel du
9 août 2007.

Faits:

A.
C. ________ et D.________ sont propriétaires de la parcelle n° 7342 du
registre foncier de la commune de Neuchâtel. Ce bien-fonds, sis en zone à
bâtir, supporte une maison d'habitation construite dans les années 1950. Le
20 décembre 2004, C.________ et D.________ ont déposé une demande de permis
de construire pour la transformation et la surélévation de cet immeuble.
Selon le règlement d'aménagement communal du 2 février 1998, la parcelle n°
7342 est classée dans la zone d'habitation ONC (ordre non contigu) 0.8, qui
impose un indice d'utilisation minimum de 0.5 (art. 85 du règlement). La
surélévation projetée permettant d'atteindre un indice d'utilisation de 0.33
seulement, les prénommés ont sollicité une dérogation au sens de l'art. 40
al. 1 de la loi cantonale sur les constructions (LConstr.; RS/NE 720.0).
A. ________ et B.________, propriétaires de la parcelle voisine n° 7341, ont
formé opposition contre ce projet. Ils relevaient en substance que l'indice
d'utilisation minimum n'était pas respecté et ils se prévalaient d'une
servitude inscrite au registre foncier. Ils invoquaient également une
atteinte à leur vue et une perte d'intimité en raison de nouvelles fenêtres
donnant sur leur terrasse. Par décision du 3 novembre 2005, le Département de
la gestion du territoire du canton de Neuchâtel (ci-après: le département) a
levé l'opposition des époux A.________ et B.________ et a accordé la
dérogation demandée. Il a notamment considéré que, s'agissant d'une
transformation qui n'est pas d'une importance telle qu'elle doive être
assimilée à une construction nouvelle, il serait disproportionné d'exiger le
respect de l'indice d'utilisation minimum. De plus, une telle exigence aurait
pour effet d'empêcher toute densification au-dessous du minimum prescrit.
Quant à la question du respect de la servitude, elle relevait de la
compétence du juge civil.

B.
A.________ et B.________ ont recouru contre cette décision devant le Tribunal
administratif du canton de Neuchâtel, qui a rejeté le recours par arrêt du 9
août 2007. En substance, le Tribunal a considéré que les conditions d'une
dérogation au sens de l'art. 40 al. 1 LConstr. étaient réunies, que le projet
ne portait pas atteinte à l'intimité des époux A.________ et B.________ et
que la question du respect de la servitude relevait en l'espèce de la
compétence du juge civil.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et
B.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt.  Ils se
plaignent d'une application arbitraire de l'art. 40 al. 1 LConstr. ainsi que
d'une constatation arbitraire des faits (art. 9 Cst.) et ils demandent le
respect de la servitude. Ils sollicitent en outre une inspection des lieux.
La commune de Neuchâtel, C.________ et D.________ ont renoncé à formuler des
observations. Le Tribunal administratif se réfère aux considérants de son
arrêt et conclut au rejet du recours. Le département cantonal de la gestion
du territoire s'est déterminé; il conclut également au rejet du recours.

Considérant en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 133 I 206 consid. 2 p. 210; 132 I 140 consid. 1.1
p. 142; 130 I 312 consid. 1 p. 317 et les arrêts cités).

2.
Dirigé contre une décision rendue dans le domaine du droit public des
constructions, le recours est recevable comme recours en matière de droit
public conformément aux art. 82 ss de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF; RS
173.110). Aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'est réalisée.

3.
Selon l'art. 90 LTF, le recours devant le Tribunal fédéral est ouvert contre
les décisions finales, c'est-à-dire contre les décisions qui mettent fin à la
procédure. En l'occurrence, la décision litigieuse - confirmée par l'arrêt
attaqué - est la décision du 3 novembre 2005 par laquelle le département a
levé l'opposition des recourants et accordé la dérogation demandée. Or, aux
termes de l'art. 40 al. 2 LConstr., les dérogations sont accordées par le
Conseil communal, après l'approbation du département. C'est également le
Conseil communal qui est compétent pour délivrer le permis de construire
(art. 29 LConstr.), raison pour laquelle le département a pris soin de
préciser que sa décision ne constituait pas à elle seule une autorisation de
construire. Il s'ensuit que la décision litigieuse ne met pas un terme à la
procédure et qu'elle revêt un caractère incident (cf. arrêts non publiés
1P.652/1997 du 8 décembre 1997 consid. 2d; 1A.114/1996 du 18 décembre 1996
consid. 1c).

3.1 Conformément à l'art. 93 al. 1 LTF, le recours n'est ouvert contre une
décision incidente que si celle-ci peut causer un préjudice irréparable (let.
a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision
finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let.
b). Cette dernière condition n'entre pas en considération en l'espèce, de
sorte qu'il convient uniquement d'examiner si la décision litigieuse est
susceptible de causer un préjudice irréparable aux recourants.

3.2 L'art. 93 al. 1 let. a LTF reprend la règle de l'art. 87 al. 2 OJ, qui
était applicable en matière de recours de droit public (Message du Conseil
fédéral concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale
du 28 février 2001, FF 2001 p. 4131). Selon la jurisprudence relative à
l'art. 87 al. 2 OJ, un préjudice irréparable s'entendait exclusivement d'un
dommage juridique qui ne pouvait pas être réparé ultérieurement, notamment
par le jugement final (ATF 131 I 57 consid. 1 p. 59; 118 II 369 consid. 1 p.
371; 117 Ia 396 consid. 1 p. 398; 116 Ia 442 consid. 1c p. 446 et les
références). En revanche, pour attaquer une décision incidente par la voie du
recours de droit administratif, il n'était pas nécessaire que ce dommage soit
de nature juridique (art. 45 aPA en relation avec les art. 97 OJ et 5 PA; cf.
ATF 130 II 149 consid. 1.1 p. 153; 120 Ib 97 consid. 1c p. 100 et les
références); il ne suffisait cependant pas que le recourant veuille seulement
éviter la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de
celle-ci (ATF 120 Ib 97 consid. 1c p. 100; 116 Ib 344 consid. 1c p. 347 s.).
Dans des arrêts rendus en matière civile et en matière pénale, le Tribunal
fédéral a considéré que le préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1
let. a LTF devait être de nature juridique, comme sous l'empire de l'art. 87
al. 2 OJ (ATF 133 III 629 consid. 2.3.1 p. 632; 133 IV 288 consid. 3.1 p.
291; 133 V 645 consid. 2.1 et les références). Cela étant, certains auteurs
soutiennent qu'un préjudice de fait serait suffisant en matière
administrative (voir notamment en ce sens: Felix Uhlmann in Basler Kommentar
- Bundesgerichtsgesetz, Bâle 2008, n. 4 ad art. 93 al. 1  LTF; Heinz
Aemisegger, Der Beschwerdegang in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten, in
Bernhard Ehrenzeller/Rainer J. Schweizer (éd.), Die Reorganisation der
Bundesrechtspflege - Neuerungen und Auswirkungen in der Praxis, St-Gall 2006,
p. 126; cf. 133 V 477 consid. 5.2 p. 483). Il n'y a toutefois pas lieu
d'examiner ces questions plus avant, dans la mesure où, dans le cas d'espèce,
les recourants ne subissent même pas un préjudice de fait au sens de la
jurisprudence relative à l'ancien recours de droit administratif.

3.3 En effet, comme relevé ci-dessus, c'est le Conseil communal qui est
compétent pour délivrer le permis de construire (art. 29 LConstr.).  Cette
autorité statuera sur tous les aspects du projet et ne se limitera pas à la
question de la dérogation litigieuse; elle reste en outre libre de refuser le
permis pour d'autres motifs. Quoi qu'il en soit, la construction du projet
contesté ne pourra pas débuter avant la délivrance du permis de construire,
de sorte que les recourants ne subissent en l'état aucun préjudice du fait de
la décision litigieuse. Il n'y a donc pas lieu d'entrer en matière à ce stade
de la procédure d'autorisation de construire. Une telle solution satisfait au
principe de l'économie de la procédure, qui veut que le Tribunal fédéral
statue en un seul arrêt sur l'ensemble du litige qui lui est soumis. En
l'occurrence, il apparaît à première vue que les recourants pourront le cas
échéant contester le permis de construire auprès du Conseil d'Etat, puis
devant le Tribunal administratif (art. 52 LConstr.) et s'ils devaient
poursuivre leurs démarches jusque devant le Tribunal fédéral, ils auront la
faculté d'attaquer l'arrêt du 9 août 2007 confirmant la dérogation
simultanément avec la décision finale de dernière instance cantonale
concernant les autres aspects de l'autorisation de construire (art. 93 al. 3
LTF).

4.
Il s'ensuit que le recours doit être déclaré irrecevable. Les recourants, qui
succombent, doivent supporter les frais de la présente procédure (art. 66 al.
1 LTF). Il n'y a pas lieu d'accorder des dépens aux intimés, qui ne se sont
pas déterminés (art. 68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge des
recourants.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la commune de Neuchâtel ainsi
qu'au Département de la gestion du territoire et au Tribunal administratif du
canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 14 février 2008

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Féraud Rittener