Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.235/2007
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1C_235/2007 /col

Arrêt du 29 novembre 2007
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président, Fonjallaz et Eusebio.
Greffier: M. Rittener.

A. ________,
recourant, représenté par Me Marc Oederlin, avocat,

contre

Service des automobiles et de la navigation,
route de Veyrier 86, case postale 1556, 1227 Carouge,
intimé,
Tribunal administratif du canton de Genève,
case postale 1956, 1211 Genève 1.

retrait du permis de conduire,

recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif
du canton de Genève du 12 juin 2007.

Faits:

A.
Le 11 mars 2005, A.________ circulait au guidon d'une moto d'une cylindrée de
125 cm³ dans le canton de Genève, sur la route de Chancy en direction de
Bernex. Ayant emprunté un giratoire, il a perdu la maîtrise de son véhicule,
qui s'est couché sur le flanc gauche. Dans le rapport de police établi à la
suite de cet accident, les agents ont relevé des traces de freinage et en ont
déduit que non seulement A.________ avait perdu la maîtrise de son véhicule
mais qu'il avait en outre circulé à une vitesse qui n'était pas adaptée aux
conditions de la route. Par décision du 9 juin 2005, le Service des
automobiles et de la navigation du canton de Genève (ci-après: le SAN) a
ordonné le retrait de son permis de conduire pour une durée de trois mois en
application de l'art. 16c al. 1 let. a de la loi fédérale sur la circulation
routière (LCR; RS 741.01) au motif que l'intéressé avait circulé à une
vitesse inadaptée et perdu la maîtrise de son véhicule. Par arrêt du
17 janvier 2006, le Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le
Tribunal administratif) a rejeté le recours formé par A.________ contre cette
décision. Rappelant que la durée du retrait de permis est de trois mois au
minimum en cas d'infraction grave à la LCR, il a relevé que le SAN aurait pu,
en retenant le cumul d'infractions, prendre une mesure plus incisive.

B.
A.________ a formé un recours de droit administratif contre cet arrêt. La
Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral a admis ce recours par arrêt du
15 juin 2006, au motif que l'état de fait lacunaire de l'arrêt attaqué ne
permettait pas de déterminer si la vitesse avait été qualifiée à juste titre
d'inadaptée au sens de l'art. 32 LCR (arrêt 6A.21/2006). Le Tribunal
administratif a donc rendu un nouvel arrêt le 12 juin 2007. Il relevait que
l'instruction complémentaire n'avait pas permis de réunir des preuves
concernant la vitesse à laquelle circulait A.________. Il considérait
cependant que la perte de maîtrise constituait une faute grave au sens de
l'art. 16a al. 1 let. a LCR et qu'il n'existait aucune circonstance pouvant
conduire à une diminution de la faute, de sorte que le recours devait être
rejeté.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________
demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il se plaint d'une violation
des art. 16 ss et 31 LCR. Il requiert en outre l'octroi de l'effet suspensif.
Le Tribunal administratif se réfère à l'arrêt attaqué. L'Office fédéral des
routes renvoie également à l'arrêt attaqué et conclut au rejet du recours. Le
SAN n'a pas présenté d'observations.

D.
Par ordonnance du 14 septembre 2007, le Président de la Ire Cour de droit
public a accordé l'effet suspensif au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision attaquée ayant été rendue après le 1er janvier 2007, la loi
fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110) est
applicable à la présente procédure de recours (art. 132 al. 1 LTF).

1.1 La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss
LTF, est en principe ouverte contre les décisions prises en dernière instance
cantonale au sujet de mesures administratives de retrait du permis de
conduire. Le recourant est particulièrement atteint par la décision attaquée
- qui confirme le retrait de son permis pour une durée de trois mois - et il
a un intérêt digne de protection à son annulation; il a donc la qualité pour
recourir au sens de l'art. 89 al. 1 let. a et b LTF. Pour le surplus,
interjeté en temps utile et dans les formes requises contre une décision
finale prise en dernière instance cantonale non susceptible de recours devant
le Tribunal administratif fédéral, le recours est recevable au regard des
art. 42, 86 al. 1 let. d, 90 et 100 al. 1 LTF.

1.2 Le recourant n'a formulé qu'une conclusion cassatoire, alors que le
recours en matière de droit public, contrairement au recours de droit public
(art. 84 ss OJ), n'est pas un recours en cassation mais un recours en réforme
(art. 107 al. 2 LTF; ATF 133 III 489 consid. 3.1). Il ressort cependant
clairement du mémoire que le recourant entend demander l'annulation de la
décision du SAN ordonnant le retrait de son permis de conduire. Comprise dans
ce sens, sa conclusion cassatoire ne s'oppose pas à l'entrée en matière sur
le recours (cf. arrêt non publié 1C_142/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4;
arrêt 1C_86/ 2007 du 31 octobre 2007 consid. 1.4 destiné à la publication).

2.
Le Tribunal administratif a considéré que le permis du recourant pouvait être
retiré pour une durée de trois mois en application de l'art. 16c al. 2 let. a
LCR. Il estimait que même si l'instruction n'avait pas établi que l'intéressé
circulait à une vitesse excessive, la perte de maîtrise suffisait à fonder un
retrait de permis de trois mois, dès lors qu'une telle infraction était "une
faute grave au sens de l'art. 16 a al. 1 let. a LCR".

2.1 Les faits déterminants se sont déroulés après l'entrée en vigueur, le 1er
janvier 2005, des dispositions modifiées de la LCR régissant le retrait
d'admonestation du permis de conduire, si bien que la gravité de l'infraction
doit être qualifiée selon le nouveau droit (dispositions transitoires de la
modification du 14 décembre 2001, al. 1; RO 2002 2781). Aux termes de l'art.
16a al. 1 let. a LCR, commet une infraction légère la personne qui, en
violant les règles de la circulation, met légèrement en danger la sécurité
d'autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée. Selon,
l'art. 16b al. 1 let. a LCR, commet une infraction moyennement grave la
personne qui, en violant les règles de la circulation, crée un danger pour la
sécurité d'autrui ou en prend le risque. Enfin, conformément à l'art. 16c al.
1 let. a LCR, commet une infraction grave la personne qui, en violant
gravement les règles de la circulation, met sérieusement en danger la
sécurité d'autrui ou en prend le risque. Selon ces dispositions, la
qualification de l'infraction dépend donc du degré de la mise en danger de la
sécurité d'autrui ainsi que de la gravité de la faute imputable au conducteur
concerné.

2.2 Il découle de ce qui précède que la perte de maîtrise du véhicule ne
constitue pas toujours une infraction grave au sens de l'art. 16a al. 1 let.
a LCR, contrairement à ce que semble considérer le Tribunal administratif.
Une telle conclusion ne saurait en tout cas être déduite de l'arrêt cité par
cette autorité à l'appui de son raisonnement (ATF 127 II 302), puisque dans
cet arrêt il est justement admis qu'une perte de maîtrise peut constituer un
cas de peu de gravité suivant les circonstances du cas d'espèce. C'est donc
bien selon ces circonstances - en particulier selon le degré de mise en
danger de la sécurité d'autrui et selon la faute de l'intéressé - qu'il y a
lieu de qualifier la gravité de l'infraction. Il n'est dès lors aucunement
exclu qu'une perte de maîtrise ne cause  qu'une mise en danger moyennement
grave au sens de l'art. 16b al. 1 let. a LCR, voire légère au sens de l'art.
16a al. 1 let. a LCR (cf. Cédric Mizel, Les nouvelles dispositions légales
sur le retrait du permis de conduire, in RDAF 2004 I 361, p. 367). En
omettant d'examiner ces questions, le Tribunal administratif a violé les art.
16a ss LCR, de sorte qu'il convient d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer
la cause à cette autorité pour nouvelle décision. Il lui appartiendra de
déterminer, selon les circonstances du cas d'espèce, le degré de la mise en
danger provoquée par la perte de maîtrise ainsi que la gravité de la faute
imputable au recourant.

3.
Il s'ensuit que le recours en matière de droit public doit être admis et
l'arrêt attaqué annulé, l'affaire étant renvoyée au Tribunal administratif
pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il n'y a pas lieu de
percevoir des frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Le recourant, assisté
d'un avocat, a droit à des dépens, à la charge de l'Etat de Genève (art. 68
al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis; l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée au
Tribunal administratif du canton de Genève, pour nouvelle décision dans le
sens des considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Une indemnité de 2000 fr. est allouée au recourant à titre de dépens, à la
charge de l'Etat de Genève.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Service des automobiles et de la navigation et au Tribunal administratif du
canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral des routes, Division circulation
routière.

Lausanne, le 29 novembre 2007

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: