Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.170/2007
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1B_170/2007 /col

Arrêt du 24 septembre 2007
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger et Fonjallaz.
Greffière: Mme Truttmann.

A. ________,
recourant, représenté par Me Grégoire Rey, avocat,

contre

Cour de justice de la République et canton de Genève, Assistance juridique,
case postale 3108,
1211 Genève 3.

assistance juridique,

recours en matière pénale contre la décision de la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Assistance juridique, du 9 juillet 2007.

Faits:

A.
A. ________, né le 28 juin 1965 et B.________, née le 1er avril 1969, sont
mariés depuis le 6 avril 1990. Trois enfants sont issus de cette union.
Par arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève
(ci-après: la Cour de justice), A.________ a été condamné à verser une somme
de 2'300 fr. par mois du 1er avril 2004 au 31 janvier 2005, puis de 4'800 fr.
par mois, à titre de contribution d'entretien pour sa famille.

B.
Suite au dépôt d'une plainte pénale par son épouse, A.________ a été convoqué
à une audience devant le Tribunal de police de la République et canton de
Genève (ci-après: le Tribunal de police) pour avoir omis de verser cette
contribution.

C.
Le 21 mars 2007, A.________ a sollicité l'assistance juridique pour sa
défense dans le cadre de cette procédure pénale.
Par décision du 21 mars 2007, le Vice-président du Tribunal de première
instance de la République et canton de Genève (ci-après: le Vice-président du
Tribunal de première instance) a rejeté la requête, au motif que
l'intervention d'un avocat n'était pas nécessaire et qu'on pouvait attendre
du requérant qu'il se présente seul devant le Tribunal de police pour faire
valoir ses arguments.

A. ________ a recouru contre cette décision auprès de la Cour de justice.

D.
Par décision du 4 avril 2007, le Tribunal de police a condamné A.________ à
une peine pécuniaire de 30 jours-amende et l'a mis au bénéfice du sursis,
avec un délai d'épreuve de trois ans.

E.
Par décision du 9 juillet 2007, le Vice-président de la Cour de justice a
rejeté le recours et confirmé la décision du Vice-président du Tribunal de
première instance.
Il a considéré que l'assistance d'un avocat n'était effectivement pas
nécessaire, puisque l'affaire relevait uniquement de l'appréciation des
faits, sans poser de questions complexes nécessitant des connaissances
juridiques particulières. En particulier, la condition de l'inexistence de
mauvaise volonté ne représentait qu'un fait, que le juge devait apprécier sur
la base d'éléments ne présentant aucune difficulté juridique spéciale. Enfin,
le Tribunal de police était "peu formel s'agissant d'un justiciable en
personne".

F.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler la décision du Vice-président de la Cour de
justice du 9 juillet 2007 et d'ordonner à cette autorité de lui octroyer
l'assistance juridique avec effet au jour de sa demande, soit au 5 mars 2007.
Il sollicite en outre l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
Le Vice-président de la Cour de justice se réfère aux considérants de sa
décision.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision attaquée ayant été rendue après le 1er janvier 2007, la loi sur
le Tribunal fédéral du 17 juin 2006 (LTF) est applicable à la présente
procédure de recours (art. 132 al. 1 LTF).

2.
Selon l'art. 78 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours contre les
décisions rendues en matière pénale. La notion de décision rendue en matière
pénale comprend toute décision fondée sur le droit pénal matériel ou sur le
droit de procédure pénale. En d'autres termes, toute décision relative à la
poursuite ou au jugement d'une infraction fondée sur le droit fédéral ou sur
le droit cantonal est en principe susceptible d'un recours en matière pénale
(Message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale
du 28 février 2001, FF 2001 p. 4111).
En l'espèce, la décision attaquée a été rendue dans le cadre d'une procédure
pénale. Nonobstant les indications figurant au bas du prononcé litigieux, la
voie du recours en matière pénale est dès lors bien ouverte en l'espèce.
Formé en temps utile contre une décision incidente prise en dernière instance
cantonale, qui est de nature à causer un préjudice irréparable et qui touche
le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés, le recours est
recevable au regard des art. 80, 81 al. 1 let. a et b ch.1, 93 et 100 LTF.

3.
3.1 Le principe, l'étendue et les limites du droit à l'assistance judiciaire
gratuite sont déterminés en premier lieu par les prescriptions du droit
cantonal de procédure, dont le Tribunal fédéral ne revoit l'application et
l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire. Dans tous les cas
cependant, l'autorité cantonale doit respecter les garanties minimales
déduites de l'art. 29 al. 3 Cst. et le Tribunal fédéral vérifie librement que
cela soit bien le cas (ATF 126 I 165 consid. 3, p. 165 s.; 124 I 1 consid. 2
p. 2, 304 consid. 2c p. 306).
Le droit genevois n'offre pas de protection plus étendue (Bernard Corboz, Le
droit constitutionnel à l'assistance judiciaire, SJ 2003 II 67, p. 70), de
sorte que c'est à la lumière de l'art. 29 al. 3 Cst. qu'il y a lieu
d'examiner le présent recours.

3.2 A teneur de cette disposition, toute personne qui ne dispose pas des
ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins
que sa cause ne paraisse dépourvue de toute chance de succès; elle a en outre
le droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la
sauvegarde de ses droits le requiert (ATF 129 I 129 consid. 2.1 p. 133; 128 I
225 consid. 2.3 p. 227; 127 I 202 consid. 3b p. 205). Selon cette
jurisprudence, il se justifie en principe de désigner un avocat d'office à
l'indigent lorsque la situation juridique de celui-ci est susceptible d'être
affectée de manière particulièrement grave. Lorsque, sans être d'une portée
aussi capitale, la procédure en question met sérieusement en cause les
intérêts de l'indigent, il faut en sus que l'affaire présente des difficultés
en fait et en droit que le requérant ou son représentant légal ne peuvent
surmonter seuls (ATF 128 I 225 consid. 2.5.2 p. 232 et les arrêts cités). En
général, on ne tranchera par l'affirmative que si les problèmes posés ne sont
pas faciles à résoudre et si le requérant ou son représentant ne bénéficient
pas eux-mêmes d'une formation juridique (ATF 119 Ia 264 consid. 3b p. 266).
Le point décisif est toujours de savoir si la désignation d'un avocat
d'office est objectivement nécessaire dans le cas d'espèce. A cet égard, il
faut tenir compte des circonstances concrètes de l'affaire, de la complexité
des questions de fait et de droit, des particularités que présentent les
règles de procédure applicables, des connaissances juridiques du requérant ou
de son représentant, du fait que la partie adverse est assistée d'un avocat,
et de la portée qu'a pour le requérant la décision à prendre, avec une
certaine réserve lorsque sont en cause principalement ses intérêts financiers
(ATF 123 I 145 consid. 2b/cc p. 147; 122 I 49 consid. 2c/bb p. 51/52, 275
consid. 3a p. 276; 119 Ia 264 consid. 3b p. 265/266; 117 Ia 277 consid. 5b/bb
p. 281). La nature de la procédure, qu'elle soit ordinaire ou sommaire,
unilatérale ou contradictoire, régie par la maxime d'office ou la maxime des
débats, et la phase de la procédure dans laquelle intervient la requête, ne
sont pas à elles seules décisives (ATF 125 V 32 consid. 4b p. 36 et les
arrêts cités).
La désignation d'un défenseur d'office dans la procédure pénale est en tout
cas nécessaire lorsque le prévenu est exposé à une longue peine privative de
liberté ou qu'il est menacé d'une peine qui ne peut être assortie du sursis.
Elle peut aussi l'être, selon les circonstances, même lorsque le prévenu
n'encourt une peine privative de liberté que de quelques semaines à quelques
mois si, à la gravité relative du cas, s'ajoutent des difficultés
particulières du point de vue de l'établissement des faits ou des questions
juridiques soulevées qu'il ne serait pas en mesure de résoudre seul. En
revanche, l'assistance d'un défenseur peut être refusée pour les cas de peu
d'importance, passibles d'une amende ou d'une légère peine de prison (ATF 120
Ia 43 consid. 2a p. 44 et les références citées).

4.
En premier lieu, le recourant soutient que la règle jurisprudentielle selon
laquelle l'assistance juridique n'est octroyée que s'il existe un risque de
condamnation à une peine incompatible avec l'octroi du sursis ou à une grave
mesure privative de liberté ne résulte d'aucune base légale et viole dès lors
les garanties conventionnelles et constitutionnelles. Cette règle aurait des
conséquences d'autant plus choquantes depuis l'entrée en vigueur du nouveau
Code pénal.

4.1 L'argumentation du recourant découle d'une mauvaise compréhension de la
jurisprudence du Tribunal fédéral. En effet, selon cette dernière, si
l'accusé risque concrètement une peine privative de liberté incompatible avec
l'octroi du sursis ou une mesure équivalente, l'assistance d'un avocat doit
lui être accordée, indépendamment de la complexité de la cause. Cela ne
signifie cependant pas, comme semble le croire le recourant, que si la peine
est moins lourde, il n'y a  pas droit. Au contraire, dans ces cas, un
défenseur n'est considéré indispensable que si la complexité de l'affaire et
l'état du requérant le justifient. Ce n'est que si l'accusé n'encourt qu'une
amende ou une brève privation de liberté - de telle sorte que l'on puisse
parler d'un cas-bagatelle - que le Tribunal fédéral a jugé que l'assistance
d'un avocat n'était pas due en vertu de la Constitution fédérale.

4.2 En l'occurrence, le Vice-président de la Cour de justice a manifestement
estimé qu'il s'agissait d'un cas d'une gravité relative, puisqu'il a examiné
la complexité de la cause. Le recourant ne saurait dès lors soutenir que le
bénéfice de l'assistance juridique lui a été refusé au seul motif qu'il
n'existait pas de risque de condamnation à une peine incompatible avec
l'octroi du sursis ou à une grave mesure privative de liberté.

4.3 La critique liée à l'entrée en vigueur du nouveau droit ne saurait être
examinée ici, puisqu'elle sort clairement du cadre du litige. Au demeurant,
elle tombe à faux conformément à ce qui a été exposé plus haut. De plus, le
recourant perd de vue que demeure déterminante l'appréciation de la gravité
de l'atteinte à la situation juridique du requérant. Or, cette dernière ne
saurait être dissociée des circonstances concrètes du cas d'espèce, de sorte
qu'une application schématique n'entre de toute façon pas en considération.

5.
En second lieu, s'agissant de la complexité de la cause, le recourant fait
valoir que la condition de la mauvaise volonté serait une notion indéterminée
malaisée à exposer et qu'elle le serait encore davantage, en termes de
crédibilité, lorsqu'un accusé doit plaider sa propre cause en personne.
Le recourant ne saurait être suivi sur ce point. Il apparaît au contraire que
la problématique de la volonté ne soulève pas de difficultés particulières.
Les arguments à avancer sont en effet à la portée de tous et ne font appel à
aucune connaissance en droit. En outre, l'assistance juridique n'a pas pour
fonction de pallier au manque de crédibilité de l'accusé.
Enfin, le recourant ne fait valoir aucune circonstance particulière propre à
sa personne, et on n'en décèle d'ailleurs aucune à la lecture du dossier, qui
justifierait l'assistance d'un avocat.

6.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Les conditions d'octroi de
l'assistance judiciaire dans la présente procédure étant réunies, il y a lieu
de statuer sans frais (art. 64 al. 1 LTF). Me Grégoire Rey est désigné comme
défenseur d'office du recourant et une indemnité lui sera versée à titre
d'honoraires par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il est statué sans frais.

4.
Me Grégoire Rey est désigné comme défenseur d'office du recourant et une
indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la
caisse du Tribunal fédéral.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et à la
Cour de justice de la République et canton de Genève.

Lausanne, le 24 septembre 2007

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: