Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 81/2006
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Cause {T 7}
U 81/06

Arrêt du 2 juin 2006
IIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffier : M.
Piguet

G.________, recourant, représenté par Me Christophe Auteri, avocat, avenue
Léopold-Robert 23-25,
2300 La Chaux-de-Fonds,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,
6004 Lucerne, intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 15 décembre 2005)

Faits:

A.
G. ________, né en 1956, travaillait comme opérateur régleur CNC au service
de l'entreprise X.________ SA. A ce titre, il était assuré contre les
accidents professionnels et non professionnels auprès de la Caisse nationale
suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).

Le 6 juin 2002, le prénommé a fait une chute sur son lieu de travail qui a
occasionné des contusions à la colonne vertébrale. Cet accident, dont les
suites ont été prises en charge par la CNA, n'a pas provoqué d'incapacité de
travail.
Le 20 novembre 2002, l'assuré a été victime d'un accident de la circulation:
alors qu'il était arrêté devant un passage pour piétons, un automobiliste a
percuté l'arrière de son véhicule qui, sous l'effet du choc, a embouti la
voiture qui le précédait. A la suite de cet accident, l'assuré a présenté des
douleurs à la colonne vertébrale qui n'ont cependant pas entraîné
d'incapacité de travail. Le traitement conservateur a été assuré par les
docteurs S.________, médecin traitant, et B.________, spécialiste en
chiropractie, et pris en charge par la CNA. Alors que ledit traitement
n'était pas encore achevé, l'assuré a été licencié par son employeur au mois
de juillet 2003 pour le 30 septembre suivant et a présenté à compter du 18
août 2003 une incapacité totale de travail.

Après avoir procédé à des mesures d'instruction complémentaires et soumis le
cas à l'appréciation de son médecin conseil, le docteur P.________, la CNA a,
par décision du 25 février 2004, confirmée sur opposition le 18 juin suivant,
mis un terme avec effet au 29 février 2004 au versement de ses prestations
d'assurance, au motif que l'assuré ne souffrait plus de troubles organiques
objectivables, mais en revanche de troubles de la sphère psychique qui
n'engageaient pas sa responsabilité, faute de causalité adéquate.

B.
G.________ a recouru contre la décision sur opposition devant le Tribunal
administratif du canton de Neuchâtel. Ne contestant pas l'absence de
causalité adéquate entre les accidents litigieux et les troubles psychiques
qu'il présentait, il estimait en revanche que celle-ci devait être admise
s'agissant des dorso-lombalgies consécutives auxdits accidents et pour
lesquelles il a été suivi médicalement jusqu'à la fin du mois de juillet
2004.

Par jugement du 15 décembre 2005, le Tribunal administratif a rejeté le
recours.

C.
G.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il demande l'annulation. Sous suite de dépens, il conclut, principalement, au
maintien des prestations d'assurance au-delà du 29 février 2004 et,
subsidiairement, au renvoi de la cause à l'intimée pour complément
d'instruction et nouvelle décision.

La CNA conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral de la santé
publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le droit du recourant à des prestations de
l'assurance-accidents au-delà du 29 février 2004, singulièrement sur
l'existence d'un lien de causalité naturelle entre les accidents survenus les
6 juin et 20 novembre 2002 et les troubles physiques qu'il a présentés
au-delà du 29 février 2004 et pour lesquels il a été suivi médicalement
jusqu'à la fin du mois de juillet 2004.

2.
2.1 Selon la jurisprudence, le droit à des prestations découlant d'un accident
assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel
et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est
remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le
dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de
la même manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la
cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit que
l'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs, ait
provoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré,
c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci.
Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un
rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration
ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des
renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à
la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à
l'appréciation  des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque
l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage
paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le
cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré
doit être nié (ATF 129 V 181 consid. 3.1, 406 consid. 4.3.1, 119 V 337
consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références).

2.2 Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations, la règle
selon laquelle le fardeau de la preuve appartient à la partie qui invoque la
suppression du droit (RAMA 2000 n° U 363 p. 46 consid. 2 et la référence),
entre seulement en considération s'il n'est pas possible, dans le cadre du
principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves
un état de fait qui au degré de vraisemblance prépondérante corresponde à la
réalité (ATF 117 V 264 consid. 3b et les références). La preuve de la
disparition du lien de causalité naturelle ne doit pas être apportée par la
preuve de facteurs étrangers à l'accident. Il est encore moins question
d'exiger de l'assureur-accidents la preuve négative, qu'aucune atteinte à la
santé ne subsiste plus ou que la personne assurée est dorénavant en parfaite
santé. Est seul décisif le point de savoir si les causes accidentelles d'une
atteinte à la santé ne jouent plus de rôle et doivent ainsi être considérées
comme ayant disparu (arrêts G. du 20 décembre 2005, U 359/04, consid. 2, B.
du 27 octobre 2005, U 389/04, consid. 4.1, B. du 30 novembre 2004, U 222/04,
consid. 1.3 et les références).

3.
3.1 Les accidents des 6 juin et 20 novembre 2002 ont occasionné à G.________
des douleurs à la colonne vertébrale, qui, dans un premier temps, ne l'ont
pas contraint à interrompre son activité lucrative. Il convient à cet égard
de noter que dans un rapport daté du 8 juillet 2003 adressé à l'intimée, le
docteur S.________ faisait encore mention d'une capacité de travail normale.
Les douleurs présentées par le recourant s'inscrivaient par ailleurs dans un
contexte d'altérations dégénératives préexistantes du rachis lombaire
(radiographies du 26 juin 2000). La CT lombaire réalisée le 5 novembre 2002
mettait en évidence une atteinte dégénérative lombaire pluri-étagée, avec
discopathies lombaires étagées de L2 à S1, protrusion discale L3-L4 avec
composante de hernie foraminale gauche, forte protrusion discale L4-L5 avec
composante de sténose foraminale droite et hernie discale médiane et
paramédiane droite L5-S1 avec sténose foraminale bilatérale à prédominance
droite.
Peu après qu'il eut interrompu son travail, G.________ a été examiné par le
docteur E.________, médecin-conseil de l'intimée, qui n'a pas constaté de
myogélose manifeste au niveau du rachis et de déficits périphériques
manifestes (rapport du 25 août 2003), ainsi que par le docteur O.________,
spécialiste en neurologie, qui récusait avec certitude une souffrance
médulo-radiculaire liée à un traumatisme lombaire (rapports des 1er et 29
octobre 2003). L'assuré présentait en revanche, selon ces deux médecins, les
manifestations subjectives d'un traumatisme cervical qui s'inséraient dans un
contexte socioprofessionnel difficile. Le docteur S.________ notait pour sa
part l'existence de troubles somatoformes dans le cadre d'un syndrome
post-traumatique et d'un état dépressif, tout en précisant que le
licenciement de l'assuré avait joué un rôle dans l'évolution du cas (rapport
du 20 octobre 2003). Soulignant également le rôle joué par la perte d'emploi,
la doctoresse R.________, chef de clinique au Centre psychosocial Y.________,
a, quant à elle, posé les diagnostics de trouble de l'adaptation et de
réaction mixte anxieuse et dépressive (rapport du 7 janvier 2004).

3.2 Dans son rapport du 12 février 2004, le docteur P.________ a indiqué que
les troubles diffus du rachis lombaire dont se plaignait l'assuré n'avaient
aucun lien de causalité vraisemblable avec l'accident du 6 juin 2002, dans la
mesure où des radiographies réalisées le 26 juin 2000 montraient déjà
l'existence d'altérations dégénératives du rachis lombaire. Il n'existait par
ailleurs aucune suite physique objectivable de l'accident du 22 novembre
2002, aussi bien sur le plan orthopédique que neurologique. Il n'y avait pas
d'éléments indiquant une véritable aggravation des altérations dégénératives
préexistantes du rachis lombaire ou parlant en faveur de l'existence d'un
syndrome cervical. Le recourant disposait sur le plan physique d'une pleine
capacité de travail et ne présentait aucune atteinte à l'intégrité durable et
importante. La situation était en fait dominée par une problématique
psychiatrique prenant la forme d'un trouble de l'adaptation avec troubles
somatoformes.

4.
4.1 En l'occurrence, il n'y a pas lieu de s'écarter de l'appréciation faite
par le docteur P.________, laquelle constitue, comme l'ont souligné à juste
titre les premiers juges aux considérants desquels il peut être renvoyé, une
synthèse objective de la situation médicale, fondée sur les documents
d'imagerie et les rapports médicaux versés au dossier. Les considérations
émises par le recourant à l'appui de son recours de droit administratif ne
portent d'ailleurs pas sur le bien-fondé de cette appréciation, mais sont
bien plutôt de nature formelle. Or, G.________ ne met en évidence aucun
élément concret susceptible de mettre en doute l'impartialité du docteur
P.________. Le simple fait que ce médecin appartienne à l'équipe médicale de
la CNA ne permet en effet pas encore de douter de l'objectivité de son
appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré (voir ATF
125 V 353 consid. 3b/ee). Le fait que le docteur P.________ n'ait pas examiné
personnellement le recourant importe à cet égard peu. Son appréciation repose
sur un dossier médical qui contient suffisamment d'indications médicales
fiables et concordantes qui, elles, se fondent sur un examen personnel de
l'assuré (voir RAMA 2001 n° U 348 p. 346 consid. 3d) et, partant, rendent
superflues la mise en oeuvre d'une mesure d'instruction complémentaire.

4.2 Eu égard aux pièces médicales versées au dossier et au contexte
socioprofessionnel dans lequel s'est inscrite la symptomatologie du
recourant, on ne saurait reprocher aux premiers juges et à la CNA d'avoir
considéré que les troubles dorso-lombaires pour lesquels le recourant suivait
un traitement pris en charge par la CNA n'étaient plus en relation de
causalité naturelle avec les accidents litigieux au moment où le droit aux
prestations d'assurance a été supprimé. En tant que lesdits troubles n'ont
pas empêché le recourant d'exercer une activité lucrative à plein temps
durant près de neuf mois, il apparaît en effet peu vraisemblable que
l'aggravation survenue à compter du mois d'août 2003 et qui a conduit à une
incapacité de travail totale, soit en relation de causalité naturelle avec
les événements accidentels litigieux. Comme l'ont relevé l'ensemble des
médecins consultés, cette aggravation semble bien plutôt avoir été
conditionnée par le licenciement, si bien qu'il convient d'admettre que des
facteurs psychiques - tels que ceux relevés par les docteurs S.________ et
R.________ - et socioprofessionnels, étrangers aux accidents en cause, ont
pris une importance prépondérante et entretenu, indirectement, les problèmes
physiques et le traitement médical y relatif.

4.3 Il résulte de ce qui précède que l'intimée était fondée, par sa décision
sur opposition du 18 juin 2004, à nier tout lien de causalité naturelle entre
les douleurs présentées par le recourant au-delà du 29 février 2004 et les
accidents des 6 juin et 20 novembre 2002 et, partant, à mettre un terme à
l'octroi de ses prestations dès le 29 février 2004.
Partant, le recours se révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif du
canton de Neuchâtel et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 2 juin 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIe Chambre: Le Greffier: