Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 603/2006
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{T 7}
U 603/06

Arrêt du 7 mars 2007
Ire Cour de droit social

MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Leuzinger et Frésard.
Greffière: Mme von Zwehl.

O. ________,
recourant, représenté par Me Karin Baertschi, avocate, rue du XXXI Décembre
41, 1207 Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,
6004 Lucerne,
intimée.

Assurance-accidents,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève du 25 octobre 2006.

Faits:

A.
A.a Le 13 février 1995, O.________, né en 1955 et domicilié en France, a été
victime d'un accident professionnel alors qu'il travaillait comme maçon au
service de l'entreprise X.________ SA. Il se trouvait au fond d'une fouille
et portait un casque quand il a reçu une lourde chaîne dont le maillon
s'était rompu au-dessus de lui sur la région cervico-thoracique, ce qui lui a
occasionné des lésions multiples de la colonne verticale et dorsale (fracture
de l'arc postérieur des vertèbres C5-C6, fracture de l'apophyse postérieur
C7, fracture-tassement des murs antérieurs D8 et D7), ainsi qu'une contusion
à l'épaule droite. Depuis lors, il a présenté par alternance des périodes
d'incapacité de travail totale ou partielle; à partir du 17 décembre 1996, il
a complètement cessé de travailler en raison de la persistance d'un tableau
algique important. La Caisse nationale suisse en cas d'accidents (CNA),
auprès de laquelle il était assuré, a pris en charge son cas et lui a versé
les indemnités journalières correspondantes.

A.b Le 18 mars 1996, O.________ s'est annoncé à l'assurance-invalidité. A
l'issue d'un stage d'observation professionnelle, l'Office de
l'assurance-invalidité pour les assurés résidant à l'étranger (ci-après :
l'office AI) lui a alloué une rente entière d'invalidité limitée dans le
temps du 1er février 1996 au 31 mai 1997, assortie des rentes complémentaires
pour son épouse et ses enfants (décision du 20 avril 1999). L'assuré a
contesté cette décision jusqu'au Tribunal fédéral des assurances qui a admis
son recours, annulé le jugement cantonal et renvoyé la cause à l'office AI
pour instruction complémentaire (arrêt du 19 juin 2001; cause I 481/00).
Mandaté par ledit office pour la réalisation d'une expertise médicale, les
médecins du Centre d'observation de l'assurance-invalidité (COMAI) ont estimé
que "l'ensemble des éléments objectifs ne [permettaient] plus d'expliquer
l'entier de la symptomatologie" de l'assuré; ils ont conclu à une capacité de
travail résiduelle entre 30 et 40 % en raison essentiellement d'atteintes à
la santé psychique (rapport du 6 mai 2003). Sur cette base, l'office AI a
rendu une nouvelle décision, par laquelle il a reconnu un degré d'invalidité
de 70 % dès le 1er juin 1997 et versé les rentes en conséquence (décisions
des 17 septembre et 21 janvier 2004).

A.c Après avoir pris connaissance du rapport d'expertise du COMAI et soumis
l'ensemble du dossier à son service médical pour appréciation du cas, la CNA
a alloué à l'assuré une rente d'invalidité LAA complémentaire, fondée sur une
incapacité de gain de 32 %, avec effet au 1er mars 2004, ainsi qu'une
indemnité pour atteinte à l'intégrité d'un taux de 20 %. Elle a considéré que
O.________ était en mesure, sur le plan somatique, d'exercer une activité
adaptée et qu'elle n'avait pas à répondre de ses troubles psychogènes,
ceux-ci ne se trouvant pas en relation de causalité adéquate avec l'accident
assuré (décision du 12 avril 2005). Saisie d'une opposition, elle l'a rejetée
dans une nouvelle décision du 29 juillet 2005.

B.
Par jugement du 25 octobre 2006, le Tribunal cantonal genevois des assurances
sociales a rejeté le recours formé par l'assuré contre la décision sur
opposition de l'assureur-accidents.

C.
O.________ a interjeté recours de droit administratif contre ce jugement,
dont il requiert l'annulation. Sous suite de dépens, il conclut, à titre
préalable, au renvoi de la cause au tribunal cantonal "pour déterminer si les
troubles psychiques [qu'il présente] sont en lien de causalité adéquate avec
l'accident du 13 février 1995" et, à titre principal, à la reconnaissance de
son droit à une rente d'invalidité entière.

L'intimée n'a pas été invitée à se déterminer sur le recours.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 395 consid. 1.2).

2.
Est seule litigieuse la responsabilité de l'intimée pour les affections
psychiques diagnostiquées par les experts du COMAI, à savoir un syndrome
douloureux somatoforme persistant, un trouble dépressif récurrent épisode
actuel moyen, une personnalité paranoïaque (rapport d'expertise du 6 mai 2003
p. 23). Les premiers juges ont admis avec raison que ces troubles étaient, en
partie tout au moins, en relation de causalité naturelle avec l'accident. La
question est donc de savoir si ces troubles sont en relation de causalité
adéquate avec ce même événement. Il s'agit d'une question de droit qui ne
peut être tranchée par un expert médical. La conclusion préalable du
recourant doit dès lors être rejetée.

3.
Les premiers juges ont retenu que l'on était en présence d'un accident de
gravité moyenne, à la limite des accidents graves. Il n'y a pas de motif de
remettre en cause ce point du jugement attaqué.

Lorsque l'on se trouve à la limite de la catégorie des accidents graves, il
n'est pas nécessaire que soient réunis dans chaque cas tous les critères
objectifs posés par la jurisprudence, un seul d'entre eux peut être suffisant
pour faire admettre l'existence d'une relation de causalité adéquate (ATF 117
V 367 consid. 6a).

4.
En l'espèce, les premiers juges retiennent qu'aucun de ces critères n'est
rempli. En particulier, ils considèrent que si l'accident subi n'est certes
pas banal, on ne saurait pour autant le qualifier de particulièrement
impressionnant : si le recourant a eu peur de mourir, c'est
rétrospectivement, attendu qu'il a été surpris par la chute de la chaîne. Le
recourant soutient que cet argument n'est pas pertinent pour nier le
caractère particulièrement impressionnant de l'accident, car « tout accident
qui surprend, puisqu'inattendu, entraîne par définition une peur
rétrospective d'avoir frôlé la mort ».

5.
Avec la juridiction cantonale, on doit nier le caractère particulièrement
impressionnant de l'accident. Selon le rapport médical initial LAA du 17 mars
1995, le recourant a reçu le bout de la chaîne (évalué à une tonne environ)
sur la région cervico-thoracique. Le rapport de police parle sans autre
précision d'une « lourde chaîne ». L'assuré a été partiellement protégé par
son casque, bien que celui-ci se fût cassé (ou du moins fendu) en trois
morceaux. Il n'a pas perdu connaissance. Il est resté un moment allongé dans
la fouille, avant d'en sortir au moyen d'une échelle amenée par ses
collègues. Il a pu marcher, soutenu, jusqu'à la cabane de chantier. Il a été
transporté à l'hôpital par l'ambulance de la police. Il y est resté en
observation pendant 24 heures avant de retourner à son domicile muni d'une
collerette.

Dans ces conditions, on ne saurait qualifier l'accident de particulièrement
impressionnant ou dramatique. A cet égard et par comparaison, le Tribunal
fédéral des assurances a par exemple nié que cette condition fût remplie dans
le cas d'un travailleur victime d'un accident dans les circonstances
suivantes : une lourde pierre s'était détachée d'un mur haut de 2 m 70 d'un
immeuble en démolition et lui a percuté le dos, puis la cheville gauche,
alors qu'il s'apprêtait à franchir une fenêtre; le choc l'a projeté en avant
et il s'est trouvé face contre terre, à cheval sur la base de l'encadrement
de la fenêtre (arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 24 février 2004, U
338/05). Ou encore dans le cas d'un travailleur qui était tombé d'un
échafaudage d'une hauteur d'environ trois à quatre mètres (arrêt du 9
septembre 2004, U 393/04) ou d'un travailleur qui avait chuté d'une échelle
d'une hauteur d'environ 4,5 mètres dans une fouille (arrêt du 27 décembre
2005, U 144/05; voir aussi l'arrêt du 30 novembre 2005, U 21/06 consid. 4.5).
Il l'a en revanche admis dans le cas d'un assuré qui, lors de travaux de
démolition de boxes de garages, s'est trouvé pressé contre une benne de
déchets par un pan de mur en plâtre s'écroulant sur lui tandis que le toit
menaçait également de s'effondrer, et qui a subi plusieurs fractures à la
suite de cet événement nécessitant une hospitalisation de plusieurs jours
(arrêt du 10 juillet 2000, U 89/99). Or, certains éléments qui rendent le
déroulement de l'accident précité particulièrement impressionnant ne se
retrouvent pas dans celui dont a été victime O.________.

6.
En ce qui concerne les autres critères, le recourant, à juste titre, ne
prétend pas qu'ils soient réunis ou que l'un d'entre eux seulement soit
rempli. On peut renvoyer ici aux considérants du jugement attaqué.

Le recours est ainsi mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal genevois
des assurances sociales et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 7 mars 2007

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: p. la greffière: