Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen P 39/2006
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P 39/06

Arrêt du 6 juillet 2007
Ire Cour de droit social

MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Leuzinger et Frésard.
Greffière: Mme Berset.

S. ________, recourante,

contre

Office cantonal des personnes âgées, route de Chêne 54, 1208 Genève,
intimé.

Prestation complémentaire à l'AVS/AI,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève du 25 avril 2006.

Faits:

A.
D'origine péruvienne et américaine, S.________ est née en 1963 aux
Etats-Unis. Fille de fonctionnaire international, elle est arrivée en Suisse
avec ses parents le 10 mars 1966. Au cours de l'année 1987, alors qu'elle
accomplissait ses études de médecine à l'Université, elle a présenté des
troubles psychiques. Par la suite, elle a séjourné aux Etats-Unis et est
revenue à X.________ le 5 novembre 1993.

Le 13 juin 1996, S.________ a déposé devant l'Office cantonal de
l'assurance-invalidité du canton de Genève (OCAI) une demande de prestations
de l'assurance-invalidité. A la même date, elle a sollicité l'octroi de
prestations complémentaires de l'Office cantonal des personnes âgées du
canton de Genève (OCPA).

Dans une communication du 26 mai 1998, l'OCAI a avisé S.________ qu'au vu de
l'atteinte à sa santé, seul le versement d'une rente extraordinaire - soumise
à limites de revenu - était envisageable, et à partir du 1er janvier 1997
l'octroi de prestations complémentaires. Selon les renseignements médicaux en
sa possession, la survenance de l'invalidité remontait à 1985. Le droit
éventuel à la rente extraordinaire, voire à des prestations complémentaires,
prenant naissance au plus tôt le premier jour du mois au cours duquel la
condition relative à la durée minimale de séjour était remplie, il ressortait
des renseignements recueillis dans le cadre de l'instruction du dossier
qu'elle était domiciliée en Suisse depuis le 5 novembre 1993. Dès lors, si
les conditions étaient remplies, elle pourrait prétendre au versement de
prestations complémentaires à partir du 1er novembre 1998, la durée minimale
de résidence en Suisse prévue par la Convention de sécurité sociale entre la
Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique étant de cinq ans, de sorte
que son dossier était transmis à l'OCPA pour qu'il statue sur son droit
éventuel à une telle prestation.

Par décision du 13 juillet 1999, l'OCPA a mis S.________ au bénéfice de
prestations complémentaires fédérales dites « plafonnées » dès le 1er
novembre 1998. Il a retenu que la requérante avait droit, selon la convention
de sécurité sociale précitée, à une rente extraordinaire après un séjour de
cinq ans en Suisse. Comme les rentes extraordinaires - soumises à limites de
revenu - avaient été transférées dans le régime des prestations
complémentaires dès le 1er janvier 1997, l'intéressée avait droit à une
prestation complémentaire plafonnée jusqu'à concurrence du montant minimum de
la rente ordinaire complète (11'940 fr. pour 1998 et 12'060 fr. pour 1999).
Le 2 août 1999, la prénommée a contesté cette décision. Par décision sur
réclamation du 5 mai 2000, l'OCPA a rejeté l'opposition.

B.
Par acte du 9 juin 2000, l'intéressée a recouru contre cette décision devant
la Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI du canton de Genève.
Le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de
Genève, entré en fonction le 1er août 2003, a repris les compétences exercées
jusque-là par la Commission de recours.

En cours de procédure, par jugement sur recours du 28 septembre 2004, le
Tribunal cantonal des assurances sociales a reconnu à S.________ le droit à
une rente ordinaire d'invalidité dès le 1er juin 1995. Il a considéré que la
survenance de l'invalidité devait être fixée en septembre 1987 et que les
conditions d'assurance étaient réalisées, S.________ ayant cotisé à l'AVS
deux mois en 1982 et 9 mois en 1987 (jusqu'en septembre). Saisi d'un recours
de l'intéressée, le Tribunal fédéral des assurances a confirmé en tous points
le jugement cantonal par arrêt du 25 janvier 2006 (cause I 744/04).

Par jugement du 25 avril 2006, le Tribunal cantonal des assurances sociales a
admis partiellement le recours encore pendant devant lui et annulé la
décision sur réclamation du 13 juillet 1999 (recte: 5 mai 2000). En
particulier, il a retenu que l'assurée pouvait prétendre des prestations
complémentaires à sa rente d'invalidité à partir de mars 2000, dès lors
qu'elle avait acquis la nationalité suisse à cette époque. Par ailleurs, il a
pris note du fait que S.________ avait quitté la Suisse le 4 juillet 2001.
Aussi a-t-il renvoyé la cause à l'OCPA pour nouvelle décision.

C.
S.________ a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement
en concluant, sous suite de frais et dépens, à la réforme de celui-ci en ce
sens qu'elle a droit à des prestations complémentaires (et une rente
ordinaire d'invalidité) dès le 1er octobre 1988 - incluant les arriérés de
1988 à ce jour, « sans déduction des prestations complémentaires versées par
l'Office cantonal des personnes âgées entre 1996 et 2001 » -, assortie de
deux rentes pour enfants dès leur naissance le 19 septembre 2003, tout en
sollicitant le versement des prestations en mains propres. Elle fait valoir
notamment que la survenance de son invalidité remonte à octobre 1988.

L'OCPA déclare se rallier entièrement aux motifs exposés dans l'arrêt
attaqué. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le point de savoir si, comme l'ont décidé les premiers
juges, la recourante a droit à des prestations complémentaires dès le 1er
mars 2000. Dans la mesure où les conclusions que la recourante a prises
s'étendent à son droit à des rentes pour enfants et à son droit à une rente
ordinaire de l'assurance-invalidité à partir de 1988 et qu'elles tendent au
versement des prestations en mains propres, ces conclusions sortent de
l'objet de la contestation et sont dès lors irrecevables.

2.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L' acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

3.
Selon l'art. 39 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 42 al. 1 LAVS, dans leur
version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1996, les ressortissants suisses
avaient droit, à certaines conditions, à une rente extraordinaire, pour
autant qu'ils fussent domiciliés en Suisse (cf. consid. 3.1. non publié de
l'ATF 130 V 404, arrêt du 18 juin 2004, I 270/03). Il en allait de même pour
les ressortissants américains, aussi longtemps qu'ils conservaient leur
domicile en Suisse et si, immédiatement avant la date à partir de laquelle
ils demandaient la rente, ils avaient résidé en Suisse de manière
ininterrompue pendant cinq années au moins lorsqu'il s'agissait d'une rente
d'invalidité (cf. art. 12 de la Convention de sécurité sociale entre la
Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique (cf. SVR 2003 IV n° 34
consid. 5 p. 106, arrêt du 1er mai 2003, I 780/02).

Dans le cadre de la 10ème révision de l'AVS, les rentes extraordinaires
soumises à limites de revenu ont été remplacées par des prestations
complémentaires. C'est sur la base de cette situation juridique que l'OCPA a
accordé à la recourante - qui n'avait pas encore été mise au bénéfice d'une
rente d'invalidité - une prestation complémentaire  plafonnée.

Les premiers juges ont, pour leur part, tenu compte du fait que la recourante
avait entre-temps été mise au bénéfice d'une rente ordinaire d'invalidité
avec effet au 1er juin 1995. A juste titre, ont-ils  dès lors examiné si
l'assurée pouvait prétendre à une prestation complémentaire à cette rente
d'invalidité, selon les règles de la loi fédérale sur les prestations
complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (LPC) du
19 mars 1965 (RS 831.30). L'application de la Convention de sécurité sociale
entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique, qui ne concerne
pas ce régime, n'entre plus en considération dans ce contexte.

Selon l'art. 2 al. 1 LPC, dans sa teneur en vigueur au 1er janvier 1999,
applicable en l'espèce, les ressortissants suisses qui ont leur domicile et
leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent une des conditions
prévues aux articles 2a à 2d doivent bénéficier de prestations
complémentaires si les dépenses reconnues par la présente loi sont
supérieures aux revenus déterminants.

L'art. 2 al. 2 let. a LPC dispose que les étrangers qui ont leur domicile et
leur résidence habituelle en Suisse doivent bénéficier de prestations
complémentaires au même titre que les ressortissants suisses s'ils ont habité
en Suisse pendant les dix ans précédant immédiatement la date à partir de
laquelle ils demandent la prestation complémentaire et s'ils ont droit à une
rente, à une allocation pour impotent ou à une indemnité journalière de l'AI
ou remplissent les conditions d'octroi prévues à l'article 2b, lettre b.

L'art. 2c LPC précisait qu'ont droit aux prestations au sens de l'art. 2 les
invalides qui ont droit à une demi-rente ou à une rente entière de l'AI.

La jurisprudence a réglé le droit des ressortissants étrangers à une
prestation complémentaire, lorsqu'ils ont interrompu leur séjour en Suisse
durant le délai de carence instauré par l'art. 2 al. 2 LPC. C'est ainsi
qu'une absence à l'étranger ne dépassant pas trois mois n'inter- rompt pas
ledit délai de dix ans; en revanche, si l'absence dure plus de trois mois, un
nouveau délai de carence recommence à courir dès le retour en Suisse. Demeure
toutefois réservée l'éventualité où l'assuré n'a pas pu revenir en Suisse à
temps, en raison d'une atteinte à la santé ou d'un cas de force majeure (ATF
126 V 463 consid. 2c p. 465).

4.
Etant bénéficiaire d'une rente ordinaire de l'assurance-invalidité depuis le
1er juin 1995, S.________ peut prétendre des prestations complémentaires si
la condition de domicile et de résidence ininterrompue en Suisse est
réalisée. A cet égard, on doit admettre, à l'instar des premiers juges, que
S.________ a vraisemblablement résidé à X.________ jusqu'en mars 1990 avant
de se rendre aux Etats-Unis. En effet, il ressort des pièces qu'elle s'est
rendue chez son médecin à X.________ à plusieurs reprises entre le 7 octobre
1989 et le 17 février 1990. De surcroît, elle était immatriculée au semestre
d'hiver 1989 à l'Université et a demandé son ex-matriculation le 29 mars
1990. Eu égard au fait qu'elle est revenue en Suisse le 5 novembre 1993, le
délai de carence de dix ans prévu par l'art. 2 al. 2 let. a LPC a donc été
interrompu pendant une durée supérieure à trois mois. On ajoutera que la
situation ne serait pas différente si l'on se fondait, comme l'intimé, sur la
date de départ (officiel) du 24 août 1989 certifiée par l'Office cantonal de
la population. En toute hypothèse, la date du retour de la recourante en
Suisse (5 novembre 1993) marque le point de départ d'un nouveau délai de
carence de dix ans (cf. art. 2 al. 2 let. a LPC).

Cela étant, retenant que la recourante a acquis la nationalité suisse le 26
mars 2000, les premiers juges ont considéré que la condition de résidence
ininterrompue de dix ans en Suisse n'était plus applicable à partir de cette
date. Bien que la date de la naturalisation de la recourante ne soit pas
établie de manière exacte par les pièces du dossier, il n'y a pas de raison
de s'écarter de cette constatation des juges cantonaux, dès lors que l'office
intimé ne la conteste pas.

Dans ces circonstances, la juridiction cantonale était fondée à reconnaître à
la recourante le droit aux prestations complémentaires dès le 1er mars 2000,
ainsi qu'à annuler la décision sur réclamation du 5 mai 2000 (octroi de
prestations plafonnées) et à renvoyer la cause à l'OCPA pour nouvelles
décisions tenant compte des trois éléments suivants: l'intéressée est
bénéficiaire d'une rente ordinaire d'invalidité depuis le 1er juin 1995, elle
a acquis la nationalité suisse le 26 mars 2000 et quitté le territoire
helvétique le 4 juillet 2001 pour s'établir au Pérou.

5.
Succombant, la recourante - au demeurant non représentée par un avocat - n'a
pas droit aux dépens qu'elle sollicite.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Dans la mesure où il est recevable, le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 6 juillet 2007

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière: