Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 30/2006
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K 30/06

Arrêt du 7 mai 2007
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

PHILOS, Caisse maladie-accident, Section FRV, avenue du Casino 13, 1820
Montreux,
recourante,

contre

M.________,
intimée, représentée par Jacqueline Deck, juriste, place de la Taconnerie 3,
1204 Genève Permanence juridique sur l'assurance-maladie/accident du BCAS,
1211 Genève 3.

Assurance-maladie,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève du 7 février 2006.

Faits:

A.
M.________, domiciliée à Genève, était assurée auprès de Philos, Caisse
maladie-accident, notamment pour l'assurance obligatoire des soins en cas de
maladie. Le 10 décembre 2003, M.________ est entrée à la Clinique X.________
à 11h.30 pour s'y faire opérer; elle en est ressortie le lendemain à 11h.00.
La veille, la caisse-maladie avait indiqué à la clinique qu'à défaut de
convention conclue avec elle, elle ne donnait pas de garantie pour la prise
en charge du séjour de son assurée, mais confirmait les rapports d'assurance
(«Garantie d'hospitalisation» du 9 décembre 2003). Trois factures d'un
montant total de 9'187 fr. 95 relatives à l'intervention ont été établies le
26 janvier 2004 par la Clinique X.________ (4'629 fr. 20), le 15 décembre
2003 par le docteur M.________ (3'445 fr. 75) et le 27 janvier 2004 par la
doctoresse J.________ (1'113 fr.).

Par décision du 12 mars 2004, confirmée sur opposition le 29 juin suivant, la
caisse-maladie s'est déclarée disposée à rembourser à l'assurée l'équivalent
du forfait journalier d'hospitalisation applicable en division commune des
Hôpitaux universitaires de Genève, soit 792 fr. pour les deux jours.

B.
L'assurée a déféré cette décision au Tribunal cantonal des assurances
sociales de la République et canton de Genève. Après avoir recueilli des
renseignements auprès de la Clinique X.________, le Tribunal a, le 7 février
2006, admis le recours, annulé les décisions de la caisse et prononcé que
«M.________ a droit au remboursement des trois factures litigieuses jusqu'à
concurrence du tarif applicable».

C.
La caisse-maladie a interjeté un recours de droit administratif, en concluant
à l'annulation du jugement cantonal et au renvoi de la cause à la juridiction
cantonale pour une nouvelle décision «dans le sens des considérants».

L'assurée a renoncé à se déterminer, tandis que l'Office fédéral de la santé
publique s'est prononcé en faveur de l'admission du recours.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
Le litige porte sur l'étendue de la prise en charge par la recourante des
frais du traitement suivi par l'intimée à la Clinique X.________ les 10 et 11
décembre 2003.

3.
3.1 Selon l'art. 25 LAMal, l'assurance obligatoire des soins prend en charge
les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter une
maladie et ses séquelles (al. 1). Ces prestations comprennent notamment les
examens, traitements et soins dispensés sous forme ambulatoire, en milieu
hospitalier ou semi-hospitalier (al. 2 let. a), ainsi que le séjour en
division commune d'un hôpital (al. 2 let. e). L'assuré a le libre choix entre
les fournisseurs de prestations admis et aptes à traiter sa maladie (art. 41
al. 1 LAMal), étant précisé qu'en cas de traitement hospitalier ou
semi-hospitalier, l'assureur prend en charge les coûts jusqu'à concurrence du
tarif applicable dans le canton où réside l'assuré (art. 41 al. 1 2ème et
3ème phrase LAMal).

3.2 Sont considérés comme des hôpitaux les établissements et celles de leurs
divisions qui servent au traitement hospitalier de maladies aiguës ou à
l'exécution, en milieu hospitalier, de mesures médicales de réadaptation
(art. 39 al. 1 LAMal). Leur admission à pratiquer à la charge de l'assurance
obligatoire des soins en qualité de fournisseurs de prestations présuppose
notamment qu'ils correspondent à la planification établie par un canton ou,
conjointement, par plusieurs cantons afin de couvrir les besoins en soins
hospitaliers, et figurent sur la liste cantonale fixant les catégories
d'hôpitaux en fonction de leur mandat, les organismes privés devant être pris
en considération de manière adéquate (art. 39 al. 1 let. d et e LAMal).

4.
La recourante reproche aux premiers juges d'avoir considéré, en se fondant
sur le seul critère de la durée du séjour inférieur à 24 heures, que le
traitement en cause constituait un traitement ambulatoire, et d'avoir nié en
conséquence que l'étendue du remboursement des frais médicaux devait être
calculée sur la base d'un forfait journalier.

4.1 Comme l'a précisé le Tribunal fédéral des assurances (arrêt K 28/05 du 14
septembre 2005), il est dans l'intérêt tant des assurés que des
assureurs-maladie de distinguer clairement les notions de traitement
ambulatoire, semi-hospitalier et hospitalier. La loi, respectivement les
conventions tarifaires et les tarifs édictés par les gouvernements cantonaux
font une nette distinction entre ces trois formes de traitements médicaux et
prévoient des modalités d'indemnisation des assurés et de prise en charge des
frais fort différentes (RAMA 1991 n° K 869 p.164 consid. 1a et les
références). Cette distinction est en particulier nécessaire pour déterminer
le tarif applicable, le choix du fournisseur de prestations, l'étendue de la
prise en charge par l'assurance obligatoire des soins et la participation aux
coûts des assurés (Guy Longchamp, Conditions et étendue du droit aux
prestations de l'assurance-maladie sociale, Berne 2004, p. 376 ss).

L'obligation pour les assureurs-maladie d'allouer des prestations en cas de
traitement hospitalier suppose l'existence d'une maladie qui exige un
traitement pour soins aigus ou des mesures médicales de réadaptation en
milieu hospitalier. La condition du besoin d'hospitalisation est donnée,
d'une part si les mesures diagnostiques et thérapeutiques nécessaires ne
peuvent être pratiquées de manière appropriée que dans un hôpital et d'autre
part, également, si les possibilités d'un traitement ambulatoire ont été
épuisées et que seule une thérapie en milieu hospitalier présente des chances
de succès. L'obligation de fournir des prestations peut aussi se justifier
quand l'état maladif de la personne ne nécessite pas forcément un séjour à
l'hôpital mais que, néanmoins, le traitement ne peut être prodigué qu'en
milieu hospitalier pour des raisons particulières, notamment lorsqu'un assuré
âgé ou vivant seul est dans l'impossibilité de recevoir à domicile la
surveillance et les soins requis par son état (ATF 126 V 323 consid. 2b p.
326, 120 V 200 consid. 6a p. 206 et les références). En principe, le séjour à
l'hôpital doit durer au moins 24 heures; il peut être inférieur à cette durée
si un lit est occupé durant une nuit ou en cas de transfert dans un autre
hôpital ou de décès (art. 3 de l'Ordonnance du 3 juillet 2002 sur le calcul
des coûts et le classement des prestations par les hôpitaux et les
établissements médico-sociaux dans l'assurance-maladie [OCP; RS 832.104],
entrée en vigueur le 1er janvier 2003; voir également RAMA 1991 n° K 869
p. 164 consid. 1a et les références; Eugster, Krankenversicherung [E], in:
Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2ème
édition, p. 524, n° 382).

Le seul fait de séjourner dans un établissement hospitalier ne suffit par
conséquent pas à ouvrir le droit aux prestations dues en cas
d'hospitalisation. Encore faut-il qu'il y ait maladie nécessitant un
traitement hospitalier. Aussi, la prise en charge des frais d'hospitalisation
n'entre pas en considération si le traitement peut tout aussi bien être
appliqué sous la forme d'un traitement ambulatoire ou semi-hospitalier
(Longchamp, op. cit., p. 380).

4.2 Contrairement à ce qu'a retenu la juridiction cantonale en se référant
uniquement à l'art. 3 première phrase OCP, la qualification d'un traitement
d'«hospitalier» ou d'«ambulatoire» ne dépend pas du seul critère de la durée
- inférieure ou non à 24 heures (en l'espèce 23 heures et demie) - du séjour
dans l'établissement hospitalier. Un traitement ayant nécessité un séjour de
moins de 24 heures, mais au cours duquel un lit a été occupé durant la nuit
(ou en cas de transfert dans un autre hôpital ou de décès; cf. art. 3 seconde
phrase OCP), est également considéré comme un traitement hospitalier.

Cette règle, qui fait de l'occupation d'un lit durant une nuit le critère de
délimitation - dit «qualitatif» par le Conseil fédéral (cf. Réponse du
26 février 2003 à la question ordinaire du Conseiller national Guido Zäch,
02.1138 OCP. Extension de la notion de «traitement hospitalier») - entre le
traitement ambulatoire et hospitalier (lorsque la durée du séjour est
inférieure à 24 heures), n'est pas nouvelle. Selon la jurisprudence rendue
sous l'empire de la LAMA (RAMA 1991 n° KV 869 p. 163, 1988 n° K 759 p. 87
consid. 1), la distinction entre les notions de traitement ambulatoire et de
traitement dans un établissement hospitalier se fonde sur la durée du séjour:
le traitement est hospitalier, et donc stationnaire, lorsque l'assuré passe
au moins une nuit dans un établissement hospitalier (sous réserve du cas où
le séjour nocturne n'est pas la conséquence nécessaire de l'intervention ou
du traitement suivi; RAMA 1988 n° K 759 p. 88 consid. 2b). La LAMal a repris
les définitions du traitement ambulatoire et hospitalier de l'ancien droit,
ainsi que les critères permettant de les délimiter (ATF 127 V 409 consid.
2c/bb p. 412; RAMA 2005 n. KV 314 p. 19 [K 141/02] consid. 5.2), si bien que
l'interprétation de ces notions par la jurisprudence relative à la LAMA reste
en principe pertinente. Or, la définition du traitement hospitalier prévue à
l'art. 3 OCP est conforme à celle dégagée par la jurisprudence (Eugster, op.
cit., p. 524 n° 382). Il en découle qu'un séjour d'une durée inférieure à 24
heures dans un établissement hospitalier constitue un traitement hospitalier
si un lit est occupé durant la nuit en conséquence des examens, des
traitement ou des soins dispensés.

4.3 En l'occurrence, l'intimée est entrée à la Clinique X.________ le 10
décembre 2003 à 11 heures trente et en est sortie le lendemain à 11 heures.
Elle y a subi deux interventions - l'une le premier et l'autre le second jour
- qui ont nécessité une anesthésie générale. Au regard de ces éléments, il
apparaît que l'intimée a passé une nuit dans l'établissement hospitalier dont
on peut admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu'elle était
une conséquence du traitement suivi. Partant, le séjour de M.________ à la
Clinique X.________ doit être qualifié de traitement hospitalier et non de
traitement ambulatoire. La recourante est donc tenue de prendre en charge les
interventions subies par l'intimée et le séjour hospitalier consécutifs au
titre de traitement hospitalier, pour autant que la condition du besoin
d'hospitalisation soit remplie.

En l'état du dossier, il n'est pas possible de vérifier si cette condition
est réalisée, dès lors qu'il ne contient que l'avis non motivé du
médecin-conseil de la recourante selon lequel une hospitalisation médicale
était justifiée, sans plus amples précision sur la nature du traitement
chirurgical subi par l'intimée, alors que celle-ci affirmait que
l'intervention avait été prévue par son médecin traitant «sur le mode
ambulatoire» (courrier à la recourante du 25 mai 2004). La juridiction
cantonale n'a par ailleurs pas examiné cette question, puisqu'elle a admis le
droit à la prise en charge des prestations au titre de traitement
ambulatoire. Il convient donc de renvoyer la cause à l'autorité de recours de
première instance à qui il incombera d'instruire ce point et de rendre un
nouveau jugement. Cas échéant, il lui appartiendra également de se prononcer
sur le tarif applicable au regard des art. 43, 47 et 49 LAMal.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal cantonal des assurances
sociales de la République et canton de Genève du 7 février 2006 est annulé,
la cause étant renvoyé à ce tribunal pour instruction complémentaire au sens
des considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office
fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 7 mai 2007

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: La Greffière: