Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 1/2006
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{T 7}
K 1/06

Arrêt du 26 février 2007
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Berthoud.

C. ________, recourante, représentée par Me François Roullet, avocat, rue
Ferdinand-Hodler 11, 1207 Genève,

contre

Groupe Mutuel Assurances, rue du Nord 5, 1920 Martigny,
intimé.

Assurance-maladie,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales du 17 novembre 2005.

Faits:

A.
C. ________, née en 1942, est affiliée à Futura, Caisse-maladie et accidents,
pour l'assurance obligatoire des soins et diverses assurances
complémentaires.

Le 28 mars 2003, le docteur B.________, gynécologue, a fait savoir au
médecin-conseil de Futura que sa patiente souffrait d'un carcinome mammaire
au niveau du sein droit. Il a invité Futura à informer sa patiente des
modalités de prise en charge d'une thérapie d'avant-garde, consistant en une
chirurgie associée à une irradiation per-opératoire pratiquée par l'équipe du
professeur V.________ à M.________ (Italie). Cette thérapie, qui n'était pas
encore dispensée en Suisse, permettait d'éviter de nombreuses séances de
radiothérapie post-opératoire s'étendant sur plus de six semaines. A l'issue
de ses investigations, Futura a refusé d'accorder la garantie demandée, par
lettre du 28 octobre 2003, car le traitement sollicité ne faisait pas partie
du catalogue des prestations obligatoires et qu'un traitement adéquat
existait en Suisse.

C. ________ a été hospitalisée à l'Institut européen d'oncologie de
M.________ du 6 au 8 novembre 2003. Le coût s'est élevé à 23'094,30 euros.
Par décision du 18 juin 2004, confirmée sur opposition le 26 août 2004,
Futura a refusé de prendre en charge le traitement subi en Italie aussi bien
par l'assurance obligatoire des soins que par les assurances complémentaires
de droit privé.

B.
C.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal des assurances
sociales du canton de Genève en concluant à la prise en charge du traitement
subi en Italie, soit 23'094,30 euros, avec intérêts à 5 % dès le 31 décembre
2003.

Par jugement du 17 novembre 2005, la juridiction cantonale a rejeté le
recours dans la mesure où il portait sur des prestations relevant de
l'assurance obligatoire des soins.

C.
C.________ a interjeté recours de droit administratif contre ce jugement dont
elle a demandé l'annulation, avec suite de dépens, en reprenant ses
conclusions formées en première instance.

Mutuel Assurances, fondation issue de la fusion avec Futura, conclut au rejet
du recours. L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
La LAMal régit l'assurance-maladie sociale, qui comprend l'assurance
obligatoire des soins et une assurance facultative d'indemnités journalières
(art. 1a al. 1 LAMal; avant l'entrée en vigueur de la LPGA, le 1er janvier
2003, voir l'ancien art. 1 al. 1 LAMal [RO 1995 p. 1328]). En revanche, les
assurances complémentaires pratiquées par les assureurs-maladie sont soumises
au droit privé et régies par la LCA (art. 12 al. 2 et 3 LAMal). Les litiges
qui pourraient survenir dans ce domaine entre assureurs et assurés sont donc
du ressort du juge civil et ne peuvent pas faire l'objet d'un recours de
droit administratif au Tribunal fédéral des assurances (cf. art. 47 LSA; ATF
131 V 271 consid. 2 et les références p. 274). Le fait que certains cantons -
comme le canton de Genève - ont désigné, pour trancher les litiges relatifs
aux assurances complémentaires, la même autorité que le tribunal des
assurances qui est compétent pour connaître des contestations entre assurés
et assureurs dans l'assurance sociale ne suffit pas pour ouvrir la voie du
recours de droit administratif pour ce type de litiges. Il n'y a donc pas
lieu d'examiner le cas sous l'angle des assurances complémentaires souscrites
par la recourante.

3.
Le litige porte sur la prise en charge par l'intimée d'un traitement médical
subi à l'étranger.

4.
Les premiers juges ont exposé correctement les règles applicables à la
solution du litige. En particulier, reprenant l'arrêt publié aux ATF
131 V 271 consid. 3.2 pp. 375 ss (K 78/05), ils ont rappelé à bon droit que
l'efficacité, l'adéquation et l'économicité de traitements fournis en Suisse
par des médecins est présumée (cf. art. 33 al. 1 LAMal a contrario; RAMA 2000
n° KV 132 p. 279 consid. 3 pp. 283 ss). Une exception au principe de la
territorialité selon l'art. 36 al. 1 OAMal en corrélation avec l'art. 34 al.
2 LAMal n'est admissible que dans deux éventualités du point de vue de la
LAMal. Ou bien il n'existe aucune possibilité de traitement de la maladie en
Suisse; ou bien il est établi, dans un cas particulier, qu'une mesure
thérapeutique en Suisse, par rapport à une alternative de traitement à
l'étranger, comporte pour le patient des risques importants et notablement
plus élevés (RAMA 2003 n° KV 253 p. 229 consid. 2 p. 231). Il s'agira, en
règle ordinaire, de traitements qui requièrent une technique hautement
spécialisée ou de traitements complexes de maladies rares pour lesquelles, en
raison précisément de cette rareté, on ne dispose pas en Suisse d'une
expérience diagnostique ou thérapeutique suffisante (Gebhard Eugster,
Krankenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR],
Soziale Sicherheit, 2e éd, n° 482). En revanche, quand des traitements
appropriés sont couramment pratiqués en Suisse et qu'ils correspondent à des
protocoles largement reconnus, l'assuré n'a pas droit à la prise en charge
d'un traitement à l'étranger en vertu de l'art. 34 al. 2 LAMal. C'est
pourquoi les avantages minimes, difficiles à estimer ou encore contestés
d'une prestation fournie à l'étranger, ne constituent pas des raisons
médicales au sens de cette disposition; il en va de même du fait qu'une
clinique à l'étranger dispose d'une plus grande expérience dans le domaine
considéré (RAMA 2003 précité).

5.
A l'appui de ses conclusions, la recourante relève que les premiers juges ont
constaté que le traitement dont elle a bénéficié à M.________ diffère de
celui qui est pratiqué en Suisse, dans la mesure où une radiothérapie
intra-opératoire s'est substituée à plus de trente séances de radiothérapie
post-opératoire, avec un gain considérable de confort et la suppression de
l'angoisse inévitablement liée à la nécessité de subir des séances de
radiothérapie après une opération mutilante, une diminution de la toxicité
sur le sein, avec la suppression des risques de brûlure et d'altération de la
texture du sein, ainsi qu'une meilleure protection des autres organes. De
surcroît, le coût total du traitement était inférieur à celui qui aurait été
pratiqué en Suisse.

La recourante soutient essentiellement que le traitement qu'elle a subi en
Italie était adéquat, efficace et plus économique, tout en lui apportant des
avantages importants indéniables par rapport à la technique proposée en
Suisse. A son avis, les juges cantonaux ont admis à tort qu'il n'existait pas
de raison médicale impérieuse justifiant la prise en charge du traitement
prodigué en Italie.

6.
Lors de son audition par le Tribunal cantonal, le docteur A.________,
spécialiste en oncologie, a précisé que le traitement dispensé à M.________
apporte un confort et un gain de temps, de même qu'il supprime le risque de
brûlures et provoque nettement moins de modifications de la texture cutanée.
Il a ajouté que cette technique deviendra le standard en Suisse dans cinq ou
dix ans. Le docteur A.________ a toutefois précisé que ce traitement ne
présente pas d'avantages d'un point de vue médical strict (procès-verbal du
13 septembre 2005).

L'instruction de la cause a permis d'établir que la recourante aurait pu se
faire soigner en Suisse où elle aurait bénéficié d'un traitement adéquat et
efficace. De plus, il est avéré que le critère de l'existence de risques
importants et notablement plus élevés, dans l'éventualité d'un traitement en
Suisse, n'était pas non plus réalisé. Compte tenu de ces deux éléments, les
premiers juges ont admis à juste titre (consid. 6 du jugement attaqué) que
les avantages liés au traitement médical dispensé en Italie ne justifient pas
de le mettre à la charge de l'assurance obligatoire des soins.

Le refus que l'intimée a signifié le 26 août 2004 était dès lors conforme au
droit fédéral.

7.
La recourante ne saurait se prévaloir de l'ALCP, les conditions mises à
l'octroi des prestations litigieuses par l'art. 22 du règlement no 1408/71,
applicable en vertu de l'Accord, n'étant manifestement pas remplies.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève et à l'Office fédéral de la santé
publique.

Lucerne, le 26 février 2007

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier: