Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen K 120/2006
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2006
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2006


K 120/06

Arrêt du 26 juillet 2007
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Piguet.

Mutuel Assurances, Administration, rue du Nord 5, 1920 Martigny,
recourante,

contre

L.________,
intimé, représenté par Me Marco Ziegler, avocat, boulevard de Saint-Georges
72, 1205 Genève.

Assurance-maladie,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève du 2 août 2006.

Faits:

A.
L. ________ est assuré auprès de Mutuel Assurances (à l'époque Mutuelle
Valaisanne Caisse Maladie) pour l'assurance obligatoire des soins en cas de
maladie.
Le 27 octobre 2003, l'assuré a transmis à son assureur une facture de
13'000 USD relatif à un séjour hospitalier effectué du 14 juillet au 7 août
2003 auprès de l'Hôpital A.________ de X.________. Selon un rapport établi
par le docteur K.________, l'assuré s'est présenté en urgence le 14 juillet
2003 dans l'établissement précité en raison d'une perte de connaissance sans
notion de traumatisme. A l'examen, il présentait une altération de la
conscience avec un Glasgow à 10 (E4 V1-M5), une paralysie faciale droite
(lèvres déviées à gauche), une hémiplégie gauche, un pouls à 96 et une
tension artérielle à 190/110. Un scanner cérébral effectué à la Clinique de
X.________ a objectivé un oedème diffus de l'hémisphère cérébral droit, ce
qui a permis de retenir le diagnostic d'accident vasculaire cérébral sur
hypertension artérielle. A la sortie de l'établissement, il subsistait une
hémiplégie gauche, malgré les séances de kinésithérapie réalisées.
Considérant la facture présentée comme totalement fantaisiste, Mutuel
Assurances a, par décision du 22 janvier 2004, confirmée sur opposition le 3
septembre suivant, refusé la demande de prise en charge faite par l'assuré.

B.
L.________ a déféré la décision sur opposition au Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève. Au cours de la procédure, celui-ci a
entendu l'assuré, son épouse, ainsi que les docteurs B.________ et
P.________, médecins à l'Hôpital Y.________.
Par jugement du 2 août 2006, le Tribunal cantonal des assurances a
partiellement admis le recours, condamné la caisse au paiement des frais
subis par l'assuré en raison de son hospitalisation en urgence à X.________
du 14 juillet au 7 août 2003 (plus intérêt à 5 % dès le 8 août 2005) et
renvoyé la cause à la caisse afin qu'elle en fixe le montant.

C.
Mutuel Assurances a interjeté un recours de droit administratif contre ce
jugement, dont elle a demandé l'annulation.

L. ________ a conclu au rejet du recours et sollicité l'octroi de
l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale. L'Office fédéral de la
santé publique a pour sa part renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué
ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
En vertu de l'art. 24 LAMal, l'assurance obligatoire des soins prend en
charge les coûts des prestations définies aux art. 25 à 31 en tenant compte
des conditions des art. 32 à 34 LAMal. Selon l'art. 34 al. 2 LAMal, le
Conseil fédéral peut décider de la prise en charge, par l'assurance
obligatoire des soins, des coûts des prestations prévues aux art. 25 al. 2 ou
29 LAMal fournies à l'étranger pour des raisons médicales. Se fondant sur
cette délégation de compétence, l'autorité exécutive a édicté l'art. 36
OAMal, intitulé "Prestations à l'étranger". Selon cette disposition,
l'assurance obligatoire des soins prend en charge le coût des traitements
effectués en cas d'urgence à l'étranger. Il y a urgence lorsque l'assuré, qui
séjourne temporairement à l'étranger, a besoin d'un traitement médical et
qu'un retour en Suisse n'est pas approprié. Il n'y a pas d'urgence lorsque
l'assuré se rend à l'étranger dans le but de suivre un traitement (al. 2).
Les traitements effectués à l'étranger sont pris en charge jusqu'à
concurrence du double du montant qui aurait été payé si le traitement avait
eu lieu en Suisse (al. 4).

3.
3.1 A l'issue d'une appréciation exhaustive et minutieuse des documents
médicaux et des témoignages recueillis au cours de la procédure, les premiers
juges ont conclu que l'hospitalisation du recourant du 14 juillet au 7 août
2003 auprès de l'Hôpital A________ était établie avec un degré de
vraisemblance suffisant. L'assuré était en effet connu pour présenter des
facteurs de risque cardio-vasculaires, celui-ci ayant été victime en mars et
en avril 2002 d'un accident vasculaire cérébral d'installation progressive en
trois étapes. Ils ont également constaté qu'une fois de retour à Genève,
l'assuré a pris immédiatement et spontanément un rendez-vous auprès de
l'Hôpital Y. Sur le plan médical, les médecins qui l'ont alors examiné ont
constaté une aggravation de son état de santé, quand bien même il était
difficile de connaître l'atteinte exacte que l'assuré avait subie en Afrique
(accident vasculaire cérébral ou accident ischémique transitoire). Confrontés
au rapport établi par le docteur K.________, les docteurs J.________ et
B.________ ont estimé qu'il ne comportait pas de contradictions en ce qui
concerne les examens pratiqués, le diagnostic posé ou le traitement mis en
oeuvre par ce médecin. Il en allait de même des explications fournies par
l'épouse de l'assuré au cours de son audition. Les premiers juges ont
également considéré que la condition de l'urgence était remplie. Sur la base
des données cliniques fournies par le docteur K.________, les docteurs
J.________ et B.________ ont en effet estimé que l'état de santé de l'assuré
exigeait un traitement médical immédiat en milieu hospitalier. Vu
l'altération de la conscience et le déficit moteur dont souffrait l'assuré,
il ne faisait aucun doute qu'un retour en Suisse était totalement
inapproprié. Quant à la durée de l'hospitalisation, elle apparaissait
adéquate, comme l'admettait d'ailleurs le docteur O.________, médecin-conseil
de la recourante.

3.2 Comme l'ont déjà relevé les premiers juges, les éléments invoqués par la
recourante n'apportent aucun élément concret et sérieux permettant d'écarter
les constatations opérées par les différents médecins intervenus au cours de
la procédure.
L'argumentation de la recourante se borne pour l'essentiel à prétendre qu'il
était impossible de traiter un accident vasculaire cérébral à l'Hôpital
A.________ au regard de l'état de vétusté de cet établissement et du manque
évident de matériel approprié. De plus, la prise en charge lors du retour en
Suisse n'a pas été suffisante et adéquate au regard du problème déclaré. De
ces faits, elle en déduit que l'accident vasculaire cérébral n'a pas eu lieu,
à tout le moins qu'il n'a pas revêtu l'importance déclarée. Ce raisonnement
n'est pas convaincant. La recourante ne démontre nullement en quoi l'Hôpital
A.________ ne disposait pas concrètement des ressources - matérielles ou
humaines - nécessaires à la prise en charge de l'assuré. Sur la base des
renseignements médicaux transmis par le docteur K.________, les docteurs
J.________ et B.________ se sont au contraire accordés pour considérer que,
d'une part, l'état de santé de l'assuré exigeait un traitement médical
immédiat en milieu hospitalier et que, d'autre part, les mesures administrées
par le docteur K.________ avaient été parfaitement adéquates au regard du
tableau clinique présenté. A cet égard, peu importe de savoir si l'assuré a
été victime d'un accident vasculaire cérébral ou d'un accident ischémique
transitoire. Pour le surplus, on ajoutera que les docteurs V.________ et
R.________, médecins à l'Hôpital Y.________, ont également confirmé
l'existence d'une péjoration de l'état de santé de l'assuré à compter du mois
d'août 2003 (rapports des 14 mars et 12 mai 2005).
La recourante reproche également aux premiers juges de n'avoir pas pris en
compte et apprécié à leur juste valeur les rapports et documents établis à
X.________ par M.________, société spécialisée dans l'assistance et
l'assurance-voyage. A titre liminaire, il convient de souligner que les
observations effectuées par cette entreprise en qualité de mandataire de la
recourante doivent être appréciées comme de simples allégations de partie,
auxquelles il n'y a pas lieu d'allouer une valeur probante particulière. Or
s'agissant précisément du contenu de celles-ci, il n'est guère décisif. Les
prises de vue de l'extérieur du bâtiment du Hôpital A________ sont peu
parlantes et ne sont à tout le moins pas de nature à exclure le fait que
l'assuré a séjourné durant trois semaines dans cet établissement. Quant aux
informations rapportées par M.________, elles sont pour le moins sommaires;
en outre, plusieurs indices laissent à penser qu'elles reflètent une vision
partiale et tronquée de la réalité. M.________ n'a ainsi nullement fait
allusion, dans la description qu'elle a faite de l' Hôpital A________, qu'il
était fait mention d'une salle d'opération sur l'une des photos produites,
affirmant au contraire qu'il s'agissait simplement d' « un petit dispensaire
avec une chambre et trois lits sans climatisation ». Elle a également passé
sous silence la teneur de la fiche de soins de l'assuré mise à la disposition
de son correspondant par le docteur K.________ (voir la lettre de ce médecin
du 9 janvier 2004).
C'est enfin en vain que la recourante croit pouvoir mettre en doute la
crédibilité de l'assuré, en tant qu'il n'existerait aucune trace du séjour
qu'il aurait effectué à la Clinique de X.________. Cette allégation procède
d'une mauvaise lecture du témoignage de l'assuré, celui-ci n'ayant jamais
prétendu avoir été hospitalisé ailleurs qu'à l'Hôpital A.________. Il ressort
de manière suffisamment claire du dossier que l'assuré s'est rendu à la
Clinique de X.________ dans le seul but d'y effectuer un scanner cérébral.
S'il convient d'admettre qu'il n'existe aucune trace administrative du
passage de l'assuré dans cet établissement, on ne saurait prétendre qu'il
s'agit d'un fait inhabituel dans un pays en voie de développement.

3.3 Dès lors qu'il convient d'admettre le principe de la prise en charge des
frais relatifs au traitement suivi par l'assuré à l'Hôpital A.________ du 14
juillet au 7 août 2003, le renvoi par les premiers juges de l'affaire à la
caisse pour qu'elle en fixe le montant, dans les limites posées par l'art. 36
al. 4 OAMal, n'est pas critiquable.

4.
Mal fondé, le recours doit par conséquent être rejeté. L'intimé, qui est
représenté par un avocat, obtient gain de cause, de sorte qu'il a droit à une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale à la charge de la recourante
(art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). Sa requête d'assistance
judiciaire est dès lors sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit administratif est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
La recourante versera à l'intimé la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe sur
la valeur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office
fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 26 juillet 2007

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier: