Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen B 97/2006
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B 97/06

Arrêt du 25 juin 2007
IIe Cour de droit social

MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Cretton.

G. ________,
recourant, représenté par Me Michel Voirol, avocat,
rue des Moulins 9, 2800 Delémont,

contre

Fondation institution supplétive LPP, avenue du Théâtre 1, 1005 Lausanne,
intimée, représentée par Me Hans-Ulrich Stauffer, avocat, Rümelinsplatz 14,
4001 Bâle.

Prévoyance professionnelle,

recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal de la
République et canton du Jura, Chambre des assurances, du 22 juin 2006.

Faits:

A.
Par convention du 28 octobre 1999 prévoyant une adhésion rétroactive au 1er
juin 1988, G.________, entrepreneur, s'est affilié à la «Fondation
institution supplétive LPP» (ci-après: la fondation) pour assurer la
prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité de ses
employés.

Se fondant sur les documents récoltés (demandes d'affiliation, résiliations
des rapports de travail et déclarations de salaires), la fondation a assuré
le personnel de G.________ depuis la date convenue et a adressé à ce dernier
des bordereaux de contributions. L'employeur ne s'étant pas acquitté du
montant réclamé, la fondation a requis contre celui-ci une poursuite portant
sur une somme de 9'613 fr. 20, composée des cotisations et intérêts
rétroactifs, des frais extraordinaires et d'administration, ainsi que des
intérêts prélevés à la fin des années 2000 à 2003, avec intérêt à 5 % dès le
1er janvier 2004, et sur 150 fr. de frais de contentieux. G.________ s'est
opposé au commandement de payer.

B.
La fondation a ouvert action de droit administratif devant la Chambre des
assurances du Tribunal cantonal jurassien concluant à la condamnation de
l'employeur au paiement des montants poursuivis et à la mainlevée de
l'opposition.

G. ________ a conclu au rejet des conclusions de la fondation et à
l'annulation de la poursuite aux motifs notamment que les créances invoquées
étaient prescrites, ses employés n'avaient jamais été engagés pour une
période supérieure à trois mois, leur salaire n'avait jamais atteint le
montant de coordination, le calcul des intérêts violait l'interdiction de
l'anatocisme et les frais n'étaient pas justifiés.

Par jugement du 22 juin 2006, la juridiction cantonale a prononcé la
mainlevée définitive de l'opposition et condamné l'employeur à payer à la
fondation 1'933 fr., avec intérêt à 5 % dès le 1er décembre 2000, 6'309 fr.,
avec intérêt à 5 % dès le 28 décembre 2000, sous déduction des acomptes de
312 et 733 fr. versés les 31 août et 4 octobre 2003, ainsi que 1'250 fr. de
frais divers.

C.
G.________ a interjeté recours de droit administratif contre ce jugement dont
il a requis l'annulation. Il a repris, sous suite de frais et dépens, les
mêmes conclusions et développé fondamentalement la même argumentation qu'en
première instance.

Egalement sous suite de frais et dépens, la fondation a conclu au rejet du
recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
L'acte attaqué a été rendu avant l'entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO
2005 1205, 1242) de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral
(LTF; RS 173.110), de sorte que la procédure reste régie par l'OJ (art. 132
al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

2.
Le litige porte sur le paiement des cotisations périodiques et des frais
afférents à leur établissement dus par le recourant pour l'ensemble de son
personnel durant la période allant de 1988 à 1998, singulièrement sur la
prescription du droit d'en demander le versement et sur le calcul du montant
réclamé. Il n'a pas pour objet l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance. Le Tribunal fédéral doit donc se borner à examiner si les
premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par l'excès ou l'abus de
leur pouvoir d'appréciation, ou si les faits pertinents ont été constatés
d'une manière manifestement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en relation avec les
art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

3.
La novelle du 3 octobre 2003 modifiant la LPP (première révision) est entrée
en vigueur le 1er janvier 2005 (sous réserve de certaines dispositions dont
l'entrée en vigueur a été fixée au 1er avril 2004 et au 1er janvier 2006 [RO
2004 1700]), entraînant la modification de nombreuses dispositions légales
dans le domaine de la prévoyance professionnelle (RO 2004 1677). Eu égard au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits, le cas d'espèce
reste régi par les dispositions de la LPP en vigueur jusqu'au 31 décembre
2004 (cf. ATF 129 V 455 consid. 1 p. 456 et 127 V 466 consid. 1 p. 467).

4.
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les
principes jurisprudentiels concernant la prescription des actions en
recouvrement de créances quand elles portent sur des cotisations en matière
de prévoyance professionnelle (art. 41 LPP, dans sa teneur en vigueur
jusqu'au 31 décembre 2004, et 130 al. 1 CO), l'affiliation obligatoire des
salariés (art. 2, 7,10 et 11 LPP, dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31
décembre 2004) et la répartition des cotisations, ainsi que la perception
d'intérêts moratoires (art. 66 al. 2 LPP, dont la teneur n'a pas été modifiée
par la première révision de la LPP, 102, 104 al. 1 et 2 et 105 al. 3 CO). Il
suffit donc d'y renvoyer.

5.
L'employeur invoque tout d'abord une violation des règles applicables en
matière de prescription des actions en recouvrement de cotisations (art. 41
LPP, 130 al. 1 CO et 24 al. 1 LPGA).

5.1 Il soutient pêle-mêle que les prétentions de l'intimée sont prescrites
puisqu'aucun acte interruptif n'est intervenu avant le 1er avril 2004
(réquisition de poursuite), que la juridiction cantonale ne pouvait se fonder
sur une vieille jurisprudence, selon laquelle la prescription des cotisations
relatives aux années qui précèdent l'affiliation à l'institution supplétive
court seulement depuis la date de cette affiliation, que cette jurisprudence
est par ailleurs contraire à la volonté récente du législateur exprimée à
l'art. 24 LPGA et au texte clair de l'art. 130 al. 1 CO et qu'elle ne saurait
de surcroît trouver application que dans les cas d'affiliation d'office. Il
soutient encore que la réglementation du délai de prescription des créances
dues par l'employeur doit être la même que celle qui est applicable pour le
recouvrement par celui-ci de la part de ses employés et que le début du délai
de prescription devrait en tous cas être fixé au 29 décembre 1998, date de la
première démarche du recourant montrant sa volonté de régulariser sa
situation.

5.2 Les premiers juges ont déjà correctement répondu à la plupart des
arguments invoqués.

On mentionnera néanmoins que les dispositions de la LPGA sont applicables aux
assurances sociales régies par la législation fédérale si et dans la mesure
où les lois spéciales afférentes à ces assurances le prévoient (art. 2 LPGA).
En l'occurrence, la LPGA ne trouve pas application dans le domaine de la
prévoyance professionnelle, la LPP ne le mentionnant pas expressément.
La volonté du législateur est effectivement exprimée de manière claire dans
la loi. L'art. 41 al. 1 LPP, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre
2004, est en tous points identiques à l'art. 41 al. 2 LPP, actuellement en
vigueur. Cette disposition renvoie - et a toujours renvoyé - notamment à
l'art. 130 al. 1 CO, associant le début du délai de prescription à
l'exigibilité de la créance. La jurisprudence critiquée fixe certes un autre
point de départ au délai de prescription: le moment de l'affiliation lorsque
l'employeur ne s'est pas conformé à son obligation de le faire. Il s'agit
d'un cas particulier, différent de celui envisagé par la loi, pour lequel la
jurisprudence ne fait pas de différence entre affiliation d'office ou
affiliation volontaire rétroactive. Le Tribunal fédéral n'a jamais manifesté
l'intention de changer sa pratique. Au contraire, il l'a confirmée à
plusieurs reprises (ATF 127 V 315 consid. 6 p. 326: voir également les arrêts
non publiés du Tribunal fédéral des assurances B 66/99, B 54/99, B 56/99 et B
26/99 des 29 février, 1er mai, 5 octobre 2000 et 9 août 2001).

Le fait que l'employeur se soit spontanément annoncé en décembre 1998 ne
change rien à la date à partir de laquelle court la prescription, car même si
la fondation intimée avait réagi immédiatement, elle aurait  dû procéder à
des vérifications ou recherches dans la mesure où les informations
communiquées étaient lacunaires.

5.3 Au regard de ce qui précède, il apparaît dès lors que la prescription
n'était pas acquise au moment de la réquisition de poursuite, le 1er avril
2004, le délai de cinq ans ayant commencé à courir au moment de la signature
de la convention d'adhésion, le 28 octobre 1999. L'argumentation du recourant
ne lui permet donc pas d'établir une violation du droit fédéral, de sorte que
son recours est mal fondé sur ce point.

6.
L'employeur conteste également le calcul des montants réclamés par la
fondation intimée, en particulier la détermination des intérêts et des frais.

6.1 Il soutient notamment que ceux-ci comprennent des intérêts rétroactifs
dont il n'y a pas lieu de tenir compte avant l'échéance des bordereaux de
contributions et qui ne peuvent à leur tour porter intérêts. Il soutient
également que les frais facturés doivent être ramenés de 1'250 à 950 francs.

6.2 Dans la mesure où les parties ont convenu d'une affiliation rétroactive,
il est tout à fait normal que la fondation perçoive des intérêts sur les
cotisations qui auraient dû être facturées trimestriellement et échues
automatiquement trente jours après chaque terme prévu par la convention (1er
mars, 1er juin, 1er septembre et 1er décembre). Elle ne fait ainsi que
percevoir ce qui lui était dû si l'employeur avait rempli son obligation
d'adhésion en temps voulu. Il est par ailleurs abusif de prétendre que
conformément à la réglementation, des intérêts sur les cotisations non payées
ne sauraient être réclamés avant l'échéance des bordereaux de contributions,
qui constituent la première mise en demeure relative auxdites cotisations,
alors même qu'on est responsable de la situation par le fait de ne pas s'être
annoncé à temps auprès d'une institution de prévoyance.

On notera encore que les intérêts rétroactifs se rapportent aux cotisations
dues pour la période allant de l'engagement du premier employé du recourant
jusqu'à l'établissement des bordereaux de contributions. Le montant réclamé à
cette époque représente ainsi le capital, y compris les intérêts, qui serait
à disposition de la fondation si l'affiliation avait eu lieu à temps et que
les contributions avaient été versées régulièrement. Les intérêts perçus par
la suite, à la fin des années 2000, 2001, 2002 et 2003 découlant des mises en
demeure des 1er et 28 novembre 2000 (cf. art. 104 al. 1 CO), portent sur la
période postérieure à l'exigibilité de la créance. Il n'y a donc pas
perception d'intérêts moratoires sur des intérêts moratoires contrairement
aux allégations de l'employeur. Il en va de même de la somme mise en
poursuite qui se compose du montant de base et des intérêts courus à la fin
de chaque année entre 2000 et 2003 et qui porte intérêt dès le 1er janvier
2004.

6.3 Le recourant se réfère enfin aux seuls bordereaux de contributions
rectificatifs des 30 juillet et 4 septembre 2003 pour soutenir que la somme
des frais facturés est erronée puisque le travail de la fondation a porté sur
l'affiliation de quatre employés au lieu de cinq (frais de mutation
rétroactive d'entrée, de sortie, etc.), alors que le contraire ressort
expressément des bordereaux établis en octobre et novembre 2000. Son
argumentation, plus que sommaire, n'est donc pas de nature à établir une
constatation des faits par la juridiction cantonale manifestement inexacte ou
incomplète ou établie en violation des règles essentielles de procédure.

6.4 Il apparaît dès lors que les arguments du recourant à l'égard des
intérêts et des frais sont également en tous points mal fondés, de sorte que
son recours doit être rejeté.

7.
La procédure n'est pas gratuite (art. 134 OJ a contrario). Les parties sont
représentées par un avocat. L'employeur, qui succombe, ne saurait prétendre
de dépens (art. 159 al. 1 en relation avec l'art. 135 OJ). La fondation
intimée ne saurait non plus en prétendre dans la mesure où les autorités et
organisations chargées de tâches de droit public (art. 159 al. 2 OJ; voir
également consid. 6 non publié de l'ATF 120 V 352) n'y ont droit que dans des
circonstances exceptionnelles qui ne sont pas réunies en l'espèce (cf. ATF
119 V 446 consid. 6b p. 456; RAMA 1995 n° K 955 p. 6 et les références).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 1'100 fr., sont mis à la charge du
recourant et compensés avec l'avance de frais, d'un même montant, qu'il a
effectuée.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Chambre des assurances du
Tribunal cantonal jurassien et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 25 juin 2007

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: p. le Greffier: