Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Sozialrechtliche Abteilungen B 30/2006
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Cause {T 7}
B 30/06

Arrêt du 13 juillet 2006
IVe Chambre

MM. les Juges Ursprung, Président, Schön et Frésard. Greffier : M. Wagner

M.________, recourante,

contre

Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des
fonctionnaires de l'administration de Genève, boulevard Saint-Georges 38,
1205 Genève, intimée

Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève

(Jugement du 19 janvier 2006)

Faits:

A.
M.________, mère de deux enfants, nés en 1984 et 1989, travaillait depuis le
1er avril 1981 au service de la République et canton de Genève. A partir de
1989, son taux d'activité a été de 75 pour cent. En 1993, elle a demandé à
travailler à 100 pour cent, demande qui est restée sans suite. Dès la fin de
l'année 1996, elle a réduit son temps de travail à 50 pour cent en raison de
problèmes de santé.
En sa qualité d'employée de l'Etat de Genève, M.________ a été affiliée à la
Caisse de prévoyance du personnel et des fonctionnaires de l'administration
du canton de Genève (CIA). Le 9 octobre 1996, la CIA lui a reconnu un degré
d'invalidité de 50 pour cent. Elle a été mise au bénéfice d'une pension
partielle d'invalidité depuis le 1er décembre 1996. En 2003, cette pension
s'élevait à 1'466 fr. 60, à laquelle s'ajoutaient deux rentes pour enfants de
408 fr. 40 chacune.
Par arrêté du 9 décembre 1996, le Conseil d'Etat de la République et canton
de Genève a fixé à 50 pour cent le taux d'activité de l'intéressée à partir
du 1er décembre 1996. Il était précisé que le salaire et les cotisations à la
CIA subiraient des réductions proportionnelles.

B.
L'état de santé de l'affiliée s'étant par la suite aggravé, celle-ci a été
mise au bénéfice d'une rente entière de l'assurance-invalidité fédérale,
fondée sur un degré d'invalidité de 70 pour cent. Cette rente s'élevait à
2'062 fr. et était assortie de deux rentes pour enfants de 825 fr. chacune,
soit 3'712 fr. au total (décision de l'Office de l'assurance-invalidité du 10
mars 2004).
Le 25 mai 2004, la CIA a informé son affiliée qu'à partir du mois de mai
2004, elle lui verserait un montant mensuel de 2'087 fr. 35 (indexations non
comprises), plus deux rentes pour enfants de 556 fr. 50 chacune (indexations
non comprises). Ces prestations étaient versées en plus des pensions dont
l'assurée bénéficiait déjà depuis le 1er décembre 1996. L'employeur ayant
poursuivi le versement du salaire jusqu'au mois d'avril 2004, le montant
rétroactif calculé du 1er juin 2003 au 26 avril 2004 lui a été rétrocédé.

Les pensions supplémentaires étaient réduites pour cause de surindemnisation.
La caisse invoquait ses dispositions réglementaires selon lesquelles elle
était en droit de réduire les prestations d'invalidité d'ayants droit dans la
mesure où, ajoutées à d'autres revenus à prendre en compte, elles dépassaient
90 pour cent du salaire de référence de l'invalide. En l'espèce, le salaire
de référence annuel pour un taux d'activité de 50 pour cent avant
l'invalidité était de 67'421 fr. (valeur au 30 juin 2004), dont le 90 pour
cent était de 60'678 fr. 90. Les rentes de l'assurance-invalidité (prises en
compte à raison de 50 pour cent) s'élevaient à 22'272 fr (3'712 X 12 : 2). Le
montant à la charge de la CIA dans les limites de la surindemnisation était
donc de 38'404 fr. 20 (recte: 38'406 fr. 90), ce qui donnait des rentes
mensuelles, après réduction au prorata, de 2'087 fr. 35 pour l'assurée et de
556 fr. 50 pour chaque enfant.

C.
Par écriture du 22 juin 2004, M.________ a assigné la CIA en concluant au
versement de rentes non réduites (soit 2'792 fr. 20 + 744 fr. 70 pour chaque
enfant). La défenderesse a conclu au rejet de la demande.
Statuant le 19 janvier 2006, le Tribunal cantonal des assurances sociales de
la République et canton de Genève a rejeté la demande.

D.
M.________ interjette un recours de droit administratif dans lequel elle
conclut, en substance, au versement de pensions non réduites. La CIA conclut
au rejet du recours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il
propose également de le rejeter.

Considérant en droit:

1.
Est litigieuse la réduction, pour cause de surindemnisation, des pensions
d'invalidité nouvellement ouvertes en faveur de la recourante. Ne sont pas en
cause les pensions déjà allouées depuis 1996.

2.
2.1 Selon l'art. 24 OPP 2 (dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre
2004), l'institution de prévoyance peut réduire les prestations d'invalidité
et de survivants dans la mesure où, ajoutées à d'autres revenus à prendre en
compte, elles dépassent 90 pour cent du gain annuel dont on peut présumer que
l'intéressé est privé (al. 1). Sont considérées comme des revenus à prendre
en compte les prestations d'un type et d'un but analogues qui sont accordées
à l'ayant droit en raison de l'événement dommageable, telles que les rentes
ou les prestations en capital prises à leur valeur de rentes provenant
d'assurances sociales ou d'institutions de prévoyance suisses et étrangères,
à l'exception des allocations pour impotents, des indemnités pour atteinte à
l'intégrité et de toutes autres prestations semblables. Le revenu provenant
d'une activité lucrative exercée par un assuré invalide est aussi pris en
compte (al. 2). L'entrée en vigueur de la LPGA et les adaptations de la LPP y
relatives n'ont pas modifié la situation juridique en ce qui concerne ces
règles sur la surindemnisation. En particulier, l'art. 69 al. 2 LPGA n'est
pas applicable à la prévoyance professionnelle (ATF 130 V 78).

2.2 La réglementation ainsi décrite ne vaut toutefois que pour les
prestations de la prévoyance professionnelle obligatoire, auxquelles
s'applique la LPP: pour ce qui est de la prévoyance plus étendue, les
institutions de prévoyance restent libres, en effet, de régler différemment
la coordination avec d'autres assurances sociales (art. 49 al. 2 LPP; ATF 122
V 155 consid. 3d et les références citées), pour autant qu'elles respectent
certains principes, notamment celui de la concordance des droits, qui a une
portée générale (ATF 129 V 154 consid. 2.2). En l'espèce, ce principe ne
prête toutefois pas à discussion, dès lors que sont en concours des
prestations de même nature (rentes de l'assurance-invalidité fédérale et
pensions d'invalidité d'une institution de prévoyance).

3.
En l'espèce, l'intimée est une institution de prévoyance de droit public
pratiquant la prévoyance obligatoire et plus étendue (institution dite
«enveloppante»: ATF 128 V 247 consid. 3a, 117 V 45 consid. 3b). Les
prestations réglementaires vont donc au-delà des prestations minimales selon
la LPP.
Il s'agit d'examiner, dans un premier temps, si la réduction des prestations
en cause est justifiée au regard des dispositions statutaires et
réglementaires de l'institution de prévoyance. En cas de réponse affirmative,
il conviendra alors d'examiner si la réduction est justifiée au regard des
exigences minimales de la LPP (prévoyance professionnelle obligatoire; art. 6
LPP), autrement dit si la recourante bénéficie au moins des prestations
légales selon la LPP.

3.1 L'art. 46 des statuts de la CIA (édition 2002) traite des avantages
injustifiés. Selon cette disposition, la somme des pensions versées par la
caisse à un membre et/ou à ses ayants droit ne peut donner lieu à aucun
avantage injustifié; le règlement général fixe les prescriptions nécessaires,
notamment les modalités de la réduction des prestations de la caisse en cas
de surindemnisation. L'art. 19 du règlement auquel renvoie la disposition
statutaire citée prévoit que la caisse réduit les prestations d'invalidité et
d'ayants droit dans la mesure où, ajoutées à d'autres revenus à prendre en
compte, elles dépassent 90 pour cent du salaire de référence de l'invalide ou
du défunt. L'art. 20 du même règlement définit le salaire de référence. Est
réputé salaire de référence la somme des salaires mensuels qui ont servi de
base au calcul des cotisations de l'AVS pendant les douze mois consécutifs
rémunérés au montant le plus favorable parmi les 24 mois précédant la
survenance de l'événement assuré, plus les allocations familiales versées
pour la même période (al. 1). Le salaire de référence est indexé conformément
aux traitements de l'Etat (al. 3). En cas d'invalidité partielle, le salaire
de référence est réduit proportionnellement au taux d'invalidité (al. 4).
En l'espèce, le salaire de référence (indexé) pour l'activité à mi-temps
qu'exerçait la recourante est de 67'421 fr. Ce montant n'est pas contesté. La
limite de surindemnisation est ainsi de 60'678 fr. 90 (90 pour cent de 67'421
fr.). La caisse intimée a pris en considération les rentes de
l'assurance-invalidité jusqu'à concurrence de 50 pour cent (22'272 fr.), pour
établir ainsi une corrélation avec le taux d'activité. La différence, soit
38'406 fr. 90 (et non 38'404 fr. 20 comme l'a retenu la caisse; supra let.
B), correspond au montant annuel des pensions allouées à la recourante. Ce
calcul n'apparaît pas critiquable. Il contient certes une erreur, mais qui
est insignifiante (différence de 2 fr. 70).
Certes, on peut se demander par ailleurs s'il ne conviendrait pas de prendre
comme salaire de référence le revenu correspondant à une activité de 75 pour
cent exercée antérieurement par l'assurée, alors qu'elle était pleinement
valide. Mais, dans cette éventualité, il faudrait prendre en considération
dans le calcul de la surindemnisation les rentes de l'assurance-invalidité en
totalité, ou du moins jusqu'à concurrence de 75 pour cent, ainsi que les
pensions d'invalidité ouvertes en 1996. Cela conduirait toutefois à une
surindemnisation plus importante encore et donc à un résultat moins favorable
à la recourante. En effet, le salaire de référence pour une activité à 75
pour cent, calculé en fonction du montant précité de 67'421 fr. serait de
101'131 fr. 50, dont le 90 pour cent (limite de surindemnisation) représente
91'018 fr. Les rentes de l'assurance-invalidité, comptées aux trois quarts,
représentent 33'408 fr. Les pensions déjà ouvertes en 1996 (1'466 fr. 60 par
mois pour la rente principale et 408 fr. 40 par mois pour chaque enfant)
représentent 27'400 fr. 80. Le total des rentes à prendre en considération
dans le calcul de la surindemnisation serait donc de 60'808 fr. 80. La
différence par rapport à la limite de surindemnisation est ainsi de 30'209
fr. 20 (91'018 fr. - 60'808 fr. 80), soit un montant inférieur à celui de
38'406 fr. 90.
Il résulte de ce qui précède que la réduction opérée par l'institution
intimée n'est pas contraire à ses dispositions réglementaires.

3.2 Reste à examiner si la réduction opérée en vertu du règlement porte
atteinte aux garanties minimales de la prévoyance obligatoire.
En ce domaine, on l'a vu, la limite de surindemnisation correspond à 90 pour
cent du gain présumé perdu, conformément à l'art. 24 al. 1 OPP 2 (sur la
notion de gain présumé perdu, voir par exemple l'arrêt T. du 17 octobre 2003
[B 80/01], résumé dans REAS 2004 p. 239). Même en admettant que l'assurée
aurait repris une activité à plein temps si elle n'était pas devenue invalide
et en considérant que celle-ci réaliserait comme inspectrice du travail à
plein temps un gain de l'ordre de 138'000 fr., comme elle l'allègue, la
limite de surindemnisation serait de 124'200 fr. Les revenus à prendre en
compte dans le calcul de la surindemnisation sont les rentes de
l'assurance-invalidité, dans leur totalité, et les pensions de la CIA dues en
vertu de la LPP (c'est-à-dire calculées selon l'art. 24 al. 2 LPP [dans sa
version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004]) pour une invalidité de 100
pour cent. Selon les indications non contestées de la caisse, les rentes
minimales selon la LPP s'élèvent annuellement à 15'838 fr. 80 (rente
principale) et à 6'334 fr. 80 (rentes pour enfants). Le cumul des rentes de
l'assurance-invalidité et des pensions selon la LPP n'atteint de loin pas la
limite de surindemnisation. Autrement dit, les pensions réglementaires, soit
25'048 fr. 20 pour la rente principale (2'087 fr. 35 x 12) et 13'356 fr. pour
les rentes d'enfants (556 fr. 50 x 12 x 2) sont nettement supérieures aux
prestations légales. La réduction opérée par la CIA n'entame donc pas le
montant des rentes auxquelles peuvent prétendre les ayants droit en vertu des
exigences minimales selon la LPP.

4.
Il résulte de ce qui précède que le recours est mal fondé. Vu la nature du
litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 13 juillet 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IVe Chambre: Le Greffier: