Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.516/2006
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5P.516/2006 /frs

Arrêt du 25 juin 2007
IIe Cour de droit civil

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Hohl et Zappelli, suppléant.
Greffière: Mme Jordan.

Époux X.________,
recourants, représentés par Me Marco Crisante, avocat,

contre

Y.________,
intimé,
Président du Tribunal de première instance du canton de Genève, autorité de
séquestre, place du Bourg-de-Four 1, case postale 3736, 1211 Genève 3.

art. 9 et 29 Cst. (ordonnance de refus de séquestre),

recours de droit public contre l'ordonnance du Président du Tribunal de
première instance du canton de Genève, autorité de séquestre, du
14 novembre 2006.

Faits :

A.
Le 13 novembre 2006, les époux X.________ ont  requis le Président du
Tribunal de première instance du canton de Genève d'ordonner le séquestre,
sur la base de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, de la quotité saisissable du
salaire de Y.________, en mains de son employeur Z.________ SA, à Genève. Ils
invoquaient une créance de 2'142 fr. avec intérêts à 5% dès le 31 janvier
2006, fondée sur l'art. 41 al. 1 CO.

Par ordonnance du 14 novembre 2006, le président du tribunal a rejeté la
demande de séquestre.

B.
Contre cette décision, agissant conjointement et solidairement, les époux
X.________ interjettent un recours de droit public au Tribunal fédéral,
concluant à son annulation. Ils se plaignent de la violation de leur droit
d'être entendus, sous son aspect de droit à une décision motivée (art. 29 al.
2 Cst.), d'arbitraire (art. 9 Cst.) en tant que la décision nie le caractère
vraisemblable de l'existence de la créance qu'ils allèguent et ne tient pas
compte d'une des conditions de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, ainsi que d'une
appréciation arbitraire (art. 9 Cst.) des moyens de preuve.

Selon le rapport de la police française du 29 mai 2007, l'ordonnance de la
cour de céans du 29 décembre 2006 invitant l'intimé à déposer sa réponse et à
indiquer une adresse de notification en Suisse n'a pu  être notifiée,
l'intéressé ayant quitté son domicile sans laisser d'adresse.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué ayant été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier
2007 (RO 2006 1205, 1242), de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ) est
applicable à la présente cause (art. 132 al. 1 LTF).

2.
La décision refusant une demande de séquestre en dernière instance cantonale
ne peut être attaquée que par la voie du recours de droit public (ATF 119 III
92 consid. 1 partiellement publié). Le droit de procédure genevois ne
prévoyant aucune voie de recours contre la décision du Président du tribunal
de première instance, le présent recours est recevable au regard de l'art. 86
OJ (art. 22 al. 1 et 23 LaLP/GE; arrêt 5P.156/2003 du 7 juillet 2003).

3.
Invoquant l'art. 29 al. 2 Cst., les recourants soulèvent une violation de
leur droit d'être entendus, plus précisément de leur droit à une décision
motivée.

3.1 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu garanti par l'art. 29
al. 2 Cst. l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le
destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et
que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces
exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs
qui l'ont guidé et sur lesquels il s'est fondé; il n'a toutefois pas
l'obligation d'exposer et de discuter tous les arguments invoqués par les
parties. Il n'y a violation du droit d'être entendu que si l'autorité ne
satisfait pas à son devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes
pertinents (ATF 130 II 530 consid. 4.3 p. 540 et les arrêts cités).

Le droit d'être entendu étant une garantie constitutionnelle de nature
formelle, dont la violation entraîne l'annulation de la décision attaquée
sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 127 V 431
consid. 3d/aa p. 437), ce moyen doit être examiné en premier lieu (ATF 124 I
49 consid. 1 p. 50 in fine) et avec un plein pouvoir d'examen (ATF 127 III
193 consid. 3 et la jurisprudence citée).

3.2 Le président du tribunal a considéré que le créancier doit rendre
vraisemblable l'existence de sa créance en vertu de l'art. 272 al. 1 ch. 1
LP. Il a relevé qu'en l'espèce, le prétendu créancier exposait qu'il était
titulaire d'une créance résultant d'actes illicites du prétendu débiteur.
Toutefois, d'une part, la créance alléguée n'était pas rendue vraisemblable
par les pièces produites. D'autre part, le motif de séquestre invoqué ne
pouvait l'être que si la créance alléguée était reconnue ou faisait l'objet
d'un jugement exécutoire, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Dans ces
conditions, la requête devait être rejetée.

3.3 Une motivation aussi indigente ne répond pas aux exigences de l'art. 29
al. 2 Cst. A la lecture de la décision attaquée, la cour de céans n'est pas
en mesure de savoir de quelle créance il s'agit, ni à combien elle se monte,
quels allégués et quels moyens de preuve les requérants faisaient valoir et
pour quelles raisons le juge ne l'a pas considérée comme vraisemblable. Quant
aux recourants, ils en sont réduits à imaginer les motifs de doute et à
réaffirmer les termes de leur requête. Il s'ensuit que le recours doit être
admis et l'ordonnance attaquée annulée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner
les autres griefs soulevés.

4.
L'intimé ne saurait être assimilé à une partie qui «succombe» au sens des
art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ. Cela étant, les dépens doivent être supportés
par le canton de Genève (cf. ATF 125 I 389 consid. 5 p. 393), à l'exception
des frais de justice (art. 156 al. 2 OJ).

5.
Une notification du présent arrêt à l'intimé apparaissant d'emblée vouée à
l'échec, il y a lieu de faire application de l'art. 29 al. 4 OJ et de
s'abstenir d'une telle notification, la copie de l'arrêt qui lui est destinée
étant conservée au dossier, à sa disposition.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et l'ordonnance attaquée est annulée.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le canton de Genève versera aux recourants une indemnité de 1'000 fr. à titre
de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants et au
Président du Tribunal de première instance du canton de Genève, autorité de
séquestre.

La copie de l'arrêt destinée à l'intimé demeure au dossier, à sa disposition.

Lausanne, le 25 juin 2007

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président:  La Greffière: